7273e séance – matin
CS/11584

Syrie: trois ans après le début du conflit, l’accès à des millions de personnes dans le besoin demeure un défi majeur, déplore Valerie Amos devant le Conseil de sécurité

La Secrétaire générale adjointe aux affaires humanitaires et Coordonnatrice des secours d’urgence, Mme Valerie Amos, a fait, ce matin devant les membres du Conseil de sécurité, le point sur la situation humanitaire en Syrie. Elle a en particulier mis l’accent sur les conséquences des agissements du groupe « État islamique d’Iraq et du Levant (EIIL) » sur l’évolution du conflit, le sort des personnes assiégées par les forces gouvernementales et celui des millions de réfugiés syriens au Liban, en Jordanie et en Turquie. 

Plus de trois ans après le début de la guerre, « l’accès à près de 5 millions de personnes, qu’il a été très difficile d’atteindre pendant des mois, voire des années, continue de représenter un défi majeur », a-t-elle profondément regretté.

Les membres du Conseil étaient en outre saisis d’un rapport du Secrétaire général appelant à la mise en œuvre des deux résolutions à caractère humanitaire sur la Syrie.  

Lors de la réunion mensuelle que le Conseil de sécurité consacre à la crise syrienne, Mme Amos n’a pas caché sa frustration, en constatant d’abord que, deux mois après l’adoption de la résolution 2165 (2014) du Conseil, l’accès aux populations dans le besoin n’était toujours pas assuré.  « La violence continue de s’abattre à travers tout le pays, y compris dans des régions qui n’étaient pas trop affectées jusque-là et, chaque jour, les populations subissent des privations et sont forcées de se déplacer », a-t-elle ajouté avec gravité.

Abordant les exactions commises par l’EIIL, qui ont attiré l’attention internationale au cours de ces dernières semaines, Mme Amos s’est dite profondément préoccupée par les informations faisant état de recrutements d’enfants au sein des forces de ce groupe de militants qui sévit en Syrie et en Iraq. 

« Au cours des deux dernières semaines, les forces d’EIILont progressé dans le nord d’Alep et plus de 160 000 personnes –pour l’essentiel des femmes et des enfants– ont dû fuir en Turquie en l’espace de quelques jours.  Leur peur était si grande que nombre d’entre eux ont traversé des champs minés pour trouver refuge de l’autre côté de la frontière », a fait remarquer Mme Amos.  Elle n’a pas omis de pointer du doigt les autres parties au conflit qui, elles aussi, continuent d’agir en violation du droit international humanitaire, en précisant que le Gouvernement syrien, notamment, multipliait les attaques aériennes en bombardant à l’aide de barils d’explosifs les zones densément peuplées. 

« Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a reçu des informations selon lesquelles des dizaines de civils, dont des femmes et des enfants, ont trouvé la mort au cours des attaques récentes menées à Alep mais aussi à Joubar », a poursuivi la Coordonnatrice des secours d’urgence, en rappelant que, dans son dernier rapport, la Commission d’enquête sur la Syrie notait que les civils et les infrastructures publiques étaient « systématiquement » pris pour cibles par les forces gouvernementales. 

Revenant sur les déplacements provoqués par le conflit syrien, Mme Amos a estimé à 3 millions le nombre de Syriens enregistrés comme réfugiés dans les pays voisins.  « En réalité, le nombre réel de celles et ceux qui ont fui le pays est nettement plus élevé », a-t-elle confié, en précisant que le Liban, la Jordanie et la Turquie accueillaient des millions de réfugiés et de personnes déplacées, épuisant ainsi les ressources de leurs communautés et leur économie.  Concernant le sort de ceux qui sont dans l’incapacité de fuir la Syrie, elle a déploré le fait que « des millions de personnes manquent de nourriture et de médicaments et que près de 3 millions d’enfants sont déscolarisés de fait ». 

« Onze millions de personnes, dont 6,4 millions sont déplacées à l’intérieur du pays, ont besoin d’une aide humanitaire.  L’accès à près de 5 millions de personnes, qu’il a été très difficile d’atteindre pendant des mois, voire des années, continue de représenter un défi majeur et plus de 240 000 individus sont délibérément assiégés, la plupart par les forces gouvernementales, sont privés d’assistance », a encore énuméré Mme Amos.

Sur les activités des institutions du système des Nations Unies, la Secrétaire générale adjointe aux affaires humanitaires a fait savoir qu’en raison des violences et de la présence de groupes armés, le Programme alimentaire mondial (PAM) ne pouvait plus, depuis trois mois, acheminer une aide dans les gouvernorats de Deir ez-Zor et de Raqqa.  Après avoir regretté les entraves administratives à la fourniture de l’assistance imposées par le Gouvernement syrien, elle a rendu hommage à David Haines, « le soixante-troisième travailleur humanitaire tué depuis le début de la guerre ».  Elle a également salué le rôle des partenaires des Nations Unies qui, malgré les dangers encourus, ont pu, le mois dernier, distribuer de la nourriture à plus de 4 millions de personnes.  « Grâce à l’UNICEF et ses partenaires, l’eau potable a été fournie et des articles de secours ont également été distribués à plus de 400 000 personnes », a aussi noté avec satisfaction Mme Amos.

Après avoir salué le soutien des Gouvernements de la Turquie et de la Jordanie aux organisations humanitaires ainsi que le travail des ONG sur le terrain, la Secrétaire générale adjointe aux affaires humanitaires et Coordonnatrice des secours d’urgence a demandé au Conseil de sécurité de continuer à faire pression sur toutes les parties au conflit pour qu’elles appliquent les résolutions 2139 et 2165.  « Nous avons également besoin de l’appui financier de tous et je salue, à cet égard, le milliard de dollars que les États Membres ont promis, la semaine dernière, pour contribuer au financement de la réponse à la crise syrienne », a-t-elle déclaré.  Avant de délibérer à huis clos avec les 15 membres du Conseil, Mme Amos a insisté pour que la violence qui a déjà tué plus de 190 000 personnes en Syrie « prenne fin ».

 

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