ECOSOC/6561

Une table ronde, organisée conjointement par l’ECOSOC et la Deuxième Commission, souligne le rôle de la recherche et l’innovation pour assurer la sécurité alimentaire dans le monde

14/2/2013
Conseil économique et socialECOSOC/6561
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Conseil économique et social

Séance commune spéciale

avec la Deuxième Commission

3e séance - matin


UNE TABLE RONDE, ORGANISÉE CONJOINTEMENT PAR L’ECOSOC ET LA DEUXIÈME COMMISSION, SOULIGNE LE RÔLE

DE LA RECHERCHE ET L’INNOVATION POUR ASSURER LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE DANS LE MONDE


« Une personne sur huit va se coucher le soir avec la faim au ventre et, parmi elles, de nombreux enfants », a souligné le Président de la Deuxième Commission, M. George Wilfred Talbot (Guyana).  Il intervenait ce matin au cours de la séance commune spéciale du Conseil économique et social et de la Deuxième Commission placée sous le thème « Sécurité alimentaire et nutrition: Intensifier les efforts au niveau mondial ».  M. Talbot a plaidé pour un renforcement des efforts en matière de sécurité alimentaire et nutritionnelle à l’échelle mondiale, régionale et nationale. 


« Aujourd’hui, 870 millions de personnes souffrent de la faim dans le monde et il s’agit là de l’un des défis les plus urgents auxquels nous devons faire face », a fait remarquer, pour sa part, le Directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), qui intervenait par visioconférence depuis Rome, en Italie.  L’Objectif du Millénaire pour le développement (OMD) visant à réduire de moitié la population mondiale souffrant de malnutrition d’ici à 2015 peut être atteint, a-t-il assuré.  Une cinquantaine de pays sont sur cette voie, dont le Niger, mais nous devons, a-t-il souligné, appuyer leur effort grâce à l’action internationale.  Il a encouragé les pays à établir un calendrier précis pour « mettre un terme à la faim en l’espace d’une génération ».


« Dans un monde d’abondance, personne ne devrait connaître la faim », a ensuite renchéri le Président du Conseil économique et social, M. Néstor Osorio (Colombie), en citant le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon.  Il a rappelé que les dirigeants mondiaux s’étaient engagés, en juin 2012, lors de la Conférence sur le développement durable Rio+20, au Brésil, à soutenir une agriculture durable et à accroître la productivité mondiale.  M. Osorio, qui était le modérateur de la table ronde, a aussi salué l’engagement du Secrétaire général sur ces questions, en particulier son Équipe spéciale de haut niveau sur la crise mondiale de la sécurité alimentaire et son initiative « Faim Zéro », lancée à Rio+20.  


Cette séance commune spéciale a été ouverte avec la projection d’une courte vidéo réalisée par le Département de l’information des Nations Unies, au cours de laquelle, le Secrétaire général a parlé de sécurité alimentaire et a invité la communauté internationale à plus d’action contre la faim.  Quelques messages d’internautes, tirés d’une campagne organisée par l’ECOSOC dans les médias sociaux, ont été également lus en début de séance par le Président de l’ECOSOC. 


Table ronde sur la « Sécurité alimentaire et la nutrition: Intensifier les efforts au niveau mondial »


Exposés


M. LESLIE RAMSAMMY, Ministre de l’agriculture du Guyana, a estimé que rien ne peut expliquer que des gens aillent se coucher le ventre vide.  Il a indiqué qu’à Guyana, et plus généralement dans la région des Caraïbes, le problème alimentaire se pose surtout en termes de qualité et non en termes de quantité.  Il a déclaré que l’agriculture de Guyana était de plus en plus victime des conséquences dévastatrices des intempéries climatiques, notamment les cycles de sécheresse et d’inondations qui se succèdent au cours de la même année. 


Le Ministre a indiqué que 14% du budget de Guyana sont consacrés aux infrastructures agricoles et que le pays garantissait la sécurité et l’autosuffisance alimentaires, s’est félicité le Ministre.  Il a précisé que tous ces éléments positifs dans le domaine agricole sont le résultat des programmes de recherche mis en place par le Gouvernement de Guyana dans le secteur agricole.  Au sujet des échanges mondiaux de produits alimentaires, le pays a besoin d’une assistance internationale pour mieux répondre aux exigences des normes sanitaires mises en place par les pays développés, a souligné le Ministre.


M. AMADOU ALLAHOURY DIALLO, Haut-Commissaire de l’Initiative 3N “Les Nigériens nourrissent les Nigériens”, au sein du Cabinet présidentiel du Niger,intervenant par visioconférence, a fait observer que le Niger, qui est un pays de la région du Sahel, connaît les difficultés qui sont propres à tout environnement désertique.  Il a précisé que l’Initiative 3N était un programme visant à assurer la sécurité alimentaire par des mesures telles que l’amélioration des infrastructures rurales et les facilités d’accès aux marchés pour les agriculteurs.  Ce programme a, par exemple, permis d’améliorer l’accès à l’eau pour les agriculteurs et pour le bétail qui est le plus important des pays de la région du Sahel, a-t-il ajouté.  M. Diallo s’est félicité des premiers résultats du programme 3N comme la baisse de l’exode rural et la baisse de la mortalité du bétail.


M. JONATHAM SHRIER, Représentant spécial des États-Unis pour la sécurité alimentaire, a souligné que la sécheresse que les États-Unis avaient connue en 2012 aura été la plus dévastatrice depuis celle de 1928.  Il a fait observer que cette sécheresse avait donné lieu à des pénuries en maïs et en blé dans le monde, avec une baisse des récoltes de 30% et 5% respectivement.  Après cette sécheresse, le Gouvernement a établi des aides d’urgence en faveur des agriculteurs, en débloquant 200 millions de dollars pour les fourrages et consenti des prêts à faible intérêt aux agriculteurs.  Il a également précisé que l’inflation des denrées alimentaires avait été maîtrisée, avec tout de même une exception pour les œufs et le prix des produits laitiers a augmenté plus que celui des autres produits alimentaires. 


M. Shrier a ensuite invité les pays en développement à investir davantage dans la recherche et à explorer des moyens novateurs pour réduire la volatilité des prix des denrées alimentaires, tout en évitant aussi d’adopter des politiques protectionnistes.  En matière de coopération agricole, les États-Unis ont établi un programme de financement agricole en direction de certains pays d’Afrique, avec l’objectif ambitieux de sortir 50 millions de personnes de la pauvreté à l’horizon 2050, a-t-il indiqué.


Mme LORETTA DORMAL MARINO, Directrice générale adjointe de la Direction générale de l’agriculture et du développement durable, Commission européenne, a rappelé, quant à elle, qu’en 2012, l’Union européenne célébrait le cinquantième anniversaire de sa Politique agricole commune (PAC), qui avait été instituée en réaction pour faire face à la famine en Europe, au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale.  Citant les mesures prises pour permettre au secteur de l’agriculture en Europe de produire en quantité suffisante, elle a précisé que la recherche était la pierre angulaire de cette politique agricole européenne, car elle permet d’augmenter la productivité agricole.  Dans le cadre de la coopération agricole avec les pays en développement, Mme Marino a indiqué que l’Union européenne avait pris des mesures en faveur des pays du Sahel et de la corne de l’Afrique qui ont permis aux communautés locales de mieux faire face à une crise alimentaire.  Elle a souhaité que les pays en développement puissent s’engager davantage pour assister le monde rural et les petits producteurs agricoles, ainsi qu’une plus grande coordination des initiatives public-privé afin de lutter contre la faim dans le monde. 


Mme ISOBEL POLLOCK, Présidente Directrice générale de l’Institution des ingénieurs en mécanique, a estimé que le gaspillage de la nourriture produite dans le monde était de 30 à 40%.  Elle a précisé que dans les pays en développement, les produits périssaient souvent entre la récolte et leur vente sur les marchés, en raison des mauvaises techniques de récolte, de transport et d’entreposage.  Un entrepôt sec et bien ventilé peut assurer une bonne préservation des produits récoltés, a expliqué Mme Pollock.  Dans les pays développés, c’est le comportement des consommateurs qui est pointé du doigt avec le phénomène de gaspillage, a-t-elle déploré.  Les consommateurs achètent par exemple des produits alimentaires en grande quantité et jettent ensuite le surplus, a-t-elle expliqué.


Elle a invité la communauté internationale à mettre sur pied des mécanismes pour assurer le transfert de technologies vers les pays en développement afin de réduire les pertes alimentaires.  Elle a également souhaité que des systèmes de suivi des données sur ces phénomènes de perte alimentaire soient mis en place à l’échelle internationale, et les résultats largement diffusés.  Au lieu de cultiver plus de nourriture, nous devrions utiliser des méthodes et technologies appropriées pour limiter le gaspillage des produits alimentaires, a-t-elle dit en conclusion.   


M. JOS VERBEEK, Économiste hors classe et responsable, Global Monitoring Report, à la Banque mondiale, a fait remarquer qu’il n’existait pas de solution « ad hoc » qui pourrait être appliquée de manière uniforme à tous les pays.  Il a expliqué que, dans certains pays, l’augmentation du revenu des ménages ne conduit pas forcément à une augmentation de la part du budget consacrée à l’alimentation mais plutôt, par exemple, à l’achat de technologies.  Les panélistes n’ont pas suffisamment insisté sur les programmes nutritionnels de base, a-t-il regretté.  « La nutrition, a-t-il rappelé, est fondamentale au cours des deux premières années de la vie d’un enfant.  L’accent a souvent été mis sur l’offre, a-t-il noté, en faisant cependant observer que ce n’est pas le manque de nourriture qui conduit à la faim.


Pour Mme ELLEN GUSTAFSON, membre du Comité consultatif du Centre Barilla pour l’alimentation et la nutrition, l’expérience et les progrès enregistrés par Guyana démontraient que les idées novatrices peuvent venir des pays en voie de développement.  Elle a appelé la communauté internationale à promouvoir des régimes alimentaires plus sains, ainsi qu’une vision stratégique à long terme.  Elle a, par exemple, souligné que les systèmes de production agricole ne devraient pas contribuer pas à la détérioration de l’environnement.  « Les dirigeants doivent éduquer les populations pour qu’elles soient en mesure d’assurer elles-mêmes une sécurité alimentaire plutôt que de recourir à des politiques qui ne sont pas efficaces », a-t-elle insisté.


Mme DEBRA A. JONES, Directrice et Représentante de Save the Children auprès de l’Organisation des Nations Unies à New York, a également mis l’accent sur l’importance de la nutrition au cours des 1 000 premiers jours de la vie d’un enfant.  Elle a plaidé pour l’adoption de mesures fondées sur des données factuelles afin de combattre la mortalité infantile.  Dans cette optique, elle a rappelé la nécessité d’adopter une approche multisectorielle et intégrée à l’échelle nationale, qui associerait les programmes de nutrition et les programmes de santé dans les pays enregistrant des retards de croissance chez les enfants. 


Dialogue interactif


Au cours d’un échange avec les délégations, les représentantes de l’Argentine et du Brésil ont tenu à rappeler que la cause de la faim ne résidait pas dans la volatilité des prix des denrées alimentaires mais dans la pauvreté et la répartition injuste des richesses. 


De son côté, le délégué de l’Afrique du Sud a exhorté les pays développés à faciliter l’accès à leur marché en réexaminant leurs subventions à l’agriculture car, a-t-il dit, elles ont « un impact délétère sur les pays en voie de développement ».  Trop de pays africains ont des populations qui souffrent encore de la faim et de la malnutrition, a-t-il rappelé.  Le représentant sud-africain a aussi invité à soutenir les femmes travaillant dans le secteur de l’agriculture en leur assurant l’accès aux ressources et aux technologies.


La représentante du Gabon a interrogé la transparence des pratiques commerciales au sein de l’Union européenne.  Après avoir fait mention de l’actualité récente au sujet de la viande de cheval, elle a insisté sur le fait que l’Union européenne était l’un des principaux partenaires commerciaux de son pays.


« Le droit à l’alimentation est un droit fondamental », a tenu à rappeler le représentant de l’Allemagne.  Il a notamment plaidé pour une plus grande coordination des mesures ayant un impact sur l’alimentation, tel que l’accès à l’eau ou l’utilisation des ressources naturelles. 


Le représentant de la Tunisie a déploré qu’il existe un manque de suivi des décisions prises par l’Organisation mondiale du commerce (OMC), en particulier en matière d’assistance aux pays en développement.


Répondant à ces commentaires, le Ministre de l’agriculture du Guyana, a mis l’accent sur la notion d’équité.  Il a précisé que son pays ne disposait pas des ressources lui permettant de produire du carburant, par exemple.


Pour sa part, la représentante de la Commission européenne a expliqué que les allégations faites dans la presse concernant l’utilisation de viande de cheval dans des produits congelés concernaient une affaire de tromperie du consommateur.  Elle a assuré que l’Union européenne avait renforcé les mesures de traçabilité de la viande qui ont déjà permis de détecter des irrégularités.  S’agissant des premiers mois de la vie d’un enfant, elle a expliqué que l’Union européenne participait aux efforts de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) en faveur de la nutrition des enfants, et ce, sous l’angle de la coopération au développement.   


De son côté, le Représentant spécial des États-Unis pour la sécurité alimentaire a mis en exergue les efforts consentis par son pays en matière d’investissement dans les infrastructures agricoles en Afrique, notamment par l’intermédiaire de l’US Food Initiative.  Il a aussi reconnu la nécessité de centrer davantage les efforts sur les femmes en tant qu’actrices du développement.


Concernant la question du gaspillage et de la destruction de denrées alimentaires, la responsable de l’Institution des ingénieurs en mécanique a rappelé que l’expertise des ingénieurs pouvait contribuer à enrayer ce problème.


Se sont également exprimés, au cours de cet échange, les représentants de la Jordanie et du Japon, ainsi qu’un représentant du Groupe de la société civile pour l’alimentation et la sécurité alimentaire, ayant participé aux travaux de la Conférence Rio+20.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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