ECOSOC/6529

Le débat de haut niveau de l’ECOSOC souligne le caractère crucial de la lutte contre la corruption dans les efforts de développement

09/07/2012
Conseil économique et socialECOSOC/6529
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Conseil économique et social                               

Session de fond de 2012                                    

21e & 22e séances – matin & après-midi                      


LE DÉBAT DE HAUT NIVEAU DE L’ECOSOC SOULIGNE LE CARACTÈRE CRUCIAL DE LA LUTTE

CONTRE LA CORRUPTION DANS LES EFFORTS DE DÉVELOPPEMENT


Le Conseil économique et social (ECOSOC), qui devait achever aujourd’hui le débat de haut niveau de sa session de fond qui se tient depuis le 2 juillet à New York, a décidé de reporter à demain la clôture de ce débat et l’examen du projet de texte ministériel, sur la demande de plusieurs délégations qui souhaitaient plus de temps pour en étudier le contenu.  L’ECOSOC a aujourd’hui tenu des débats sur les thèmes de la corruption et de la création d’emplois.


Au cours des deux premiers dialogues organisés ce matin dans le cadre du débat de haut niveau, les ministres et hauts représentants se sont penchés sur le thème de « la responsabilité, la transparence et le développement durable », un examen qui leur a offert l’occasion d’exprimer haut et fort leur engagement en faveur du renforcement de la lutte anticorruption.


Affirmant que « le développement durable n’est possible que par la promotion de la responsabilité », le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, a relevé que l’an dernier, la corruption avait empêché 30% du montant total de l’aide au développement (APD) d’arriver à ses véritables destinataires, ce qui représente autant d’écoles, de ponts et d’hôpitaux qui ne seront pas construits.


La corruption est un obstacle majeur dans la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), a souligné le Vice-Secrétaire général de l’ONU, M. Jan Eliasson.  Les pays en développement sont privés chaque année de 40 milliards de dollars en raison de faits de corruption, a quant à lui précisé le Directeur exécutif de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC).  Mille milliards de dollars sont payés chaque année en pots-de-vin à travers le monde, a ajouté le représentant de l’Académie internationale de lutte contre la corruption.  L’Administratrice du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a donné l’exemple du prix de l’eau, qui est parfois 30% plus cher qu’il ne devrait être à cause de pratiques de corruption.


Parmi les mesures à prendre pour renforcer la lutte contre la corruption, plusieurs intervenants ont insisté pour que les pays en développement bénéficient d’une assistance technique pour appliquer la Convention des Nations Unies contre la corruption.  Entrée en vigueur en 2005, la Convention a été ratifiée par 160 pays.  Cadre général de lutte contre la corruption, ce texte a établi un mécanisme d’évaluation par les pairs.  M. Ban Ki-moon a aussi rappelé que le document adopté lors de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable (Rio+20) exhortait tous les États Membres qui ne l’avaient pas encore fait à ratifier la Convention.


Les États Membres participant au débat, comme le Panama, la Fédération de Russie, l’Afrique du Sud, la République-Unie de Tanzanie, le Brésil, l’Autriche, ont témoigné des efforts déployés par leur gouvernement dans ce domaine, souvent avec le soutien de la société civile.  Le Maroc, où a été adoptée la Déclaration de Marrakech en faveur de la prévention de la corruption, a notamment créé une unité de lutte contre le blanchiment d’argent, tandis que le Cameroun a créé un organe indépendant de lutte contre la corruption, ont indiqué les délégations de ces deux pays.  S’exprimant pour la Sierra Leone, l’ancien Commissaire de la Commission anticorruption de ce pays a fait part de l’expérience acquise par cette Commission qui a pu accélérer ses travaux depuis 2008.


En outre, le rôle croissant que doit jouer la société civile pour aider les gouvernements dans la lutte contre la corruption a été souligné à plusieurs reprises, à l’aide d’exemples donnés par des représentants d’organisations non gouvernementales, dont « Alliance pour la justice pénale » et « Transparency International ».  Au niveau des entreprises, un Partenariat contre la corruption (PACI) a été lancé en 2004, auquel 180 entreprises ont adhéré en mettant en place une politique de tolérance zéro pour les pratiques de corruption, a dit un intervenant.  Du côté des institutions internationales, l’UNODC a mis au point un manuel de bonnes pratiques à destination du monde des affaires, a indiqué le Directeur exécutif de cet Office, M. Yury Fedotov.  Avec la Banque mondiale, l’Office a lancé l’Initiative STAR relative à la restitution des avoirs acquis de manière illicite.  En conclusion de ce débat, le Directeur exécutif de l’UNODC a suggéré la mise en place d’un large partenariat entre les secteurs privé et public, avec l’implication de la société civile, des médias, des jeunes et des femmes, afin d’optimiser les chances de réussite de la lutte contre la corruption pour mettre fin à ce fléau.


Au cours de la table ronde thématique de l’après-midi, le Ministre d’État et Président de la Commission des privatisations du Bangladesh, ainsi que des représentants du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, de la Banque mondiale, et de l’Organisation internationale du Travail (OIT) ont débattu sur le thème de la « mise en œuvre des politiques macroéconomiques efficaces pour créer des emplois ».


L’économiste en chef du Groupe de recherche sur le développement de la Banque mondiale a notamment indiqué qu’une bonne stratégie d’emploi doit identifier les lacunes propres à chaque pays, afin de pouvoir le conduire au développement.  M. Martin Rama a par ailleurs noté que près de la moitié des travailleurs dans les pays en développement ne sont pas financièrement salariés, car faisant partie du secteur agricole et du secteur informel, et ne bénéficient pas de protection sociale.


L’ECOSOC poursuivra demain, mardi 10 juillet, à partir de 10 heures, les travaux de sa session de fond, en continuant l’examen de son projet de déclaration ministérielle issue de son débat de haut niveau.


RESPONSABILITÉ, TRANSPARENCE ET DÉVELOPPEMENT DURABLE: TRANSFORMER LES PROBLÈMES EN ATOUTS


Débat de haut niveau


Observations liminaires


M. MILOŠ KOTEREC (Slovaquie), Président du Conseil économique et social, a indiqué que la corruption ainsi que le manque de transparence et de responsabilité entamaient la légitimité des gouvernements dans tous les pays, et ce, indépendamment de leurs niveaux de développement.  Il a souligné le rôle particulier joué par la Convention des Nations Unies contre la corruption pour promouvoir une culture de transparence et de responsabilité.  Les réseaux sociaux sont aussi un outil précieux à cette fin, a-t-il poursuivi, avant de souligner qu’il est important que les entreprises reconnaissent le rôle de la responsabilité et de la transparence dans la création d’une économie mondiale plus efficace.  M. Koterec a ensuite affirmé que le succès dans la promotion de la responsabilité et de la transparence s’évaluera à l’aune de la volonté de la communauté internationale de mettre en œuvre la Convention précitée.  « J’appelle en conséquence tous les pays à le faire », a conclu le Président du Conseil économique et social dans cette déclaration liminaire.


M. JAN ELIASSON, Vice-Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, qui dans le passé a été Vice-Président de l’ECOSOC, a rappelé que le Document final de la Conférence Rio+20 a renouvelé l’engagement pris au niveau mondial d’assurer la croissance économique pour tous, et sur une planète saine.  Ces déclarations doivent être suivies d’actions, a-t-il demandé, dans un contexte qui a vu le partenariat mondial pour le développement subir de graves pressions du fait de la crise.  Les pressions fiscales que subissent les États ont entraîné une diminution récente de l’aide publique au développement (APD), a regretté M. Eliasson.  Il nous reste trois ans et demi pour réaliser les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), a-t-il rappelé, avant de mentionner le cadre de mise en œuvre intégrée, qui a été mis en place l’an dernier afin de permettre le suivi du respect et de la mise en œuvre des engagements pris par les États Membres.


La corruption est un obstacle majeur dans la réalisation des OMD, a souligné le Vice-Secrétaire général, en plaidant en faveur de la transparence et de la responsabilisation.  La corruption, qui est un crime en elle-même, favorise aussi la criminalité en général, a dit M. Eliasson.  Il a encouragé tous les pays qui ne l’ont pas encore fait à ratifier la Convention des Nations Unies contre la corruption et a demandé aux autres d’appliquer les dispositions de ce texte.  En ce qui concerne le secteur privé, il l’a invité à participer à cette lutte en prenant des initiatives, notamment dans le cadre du Pacte mondial.  En outre, l’engagement du public est essentiel, notamment par le biais de l’autonomisation des femmes, a ajouté M. Eliasson.


M. YURY FEDOTOV, Secrétaire général adjoint et Directeur exécutif de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC), a indiqué que les pays en développement sont privés chaque année de 40 milliards de dollars en raison de faits de corruption.  De tels fonds viennent à manquer au développement éducatif et social des sociétés concernées, a-t-il déploré.  Il s’est ensuite réjoui qu’il y ait 160 États parties à la Convention des Nations Unies contre la corruption, « seul instrument international de lutte contre la corruption ».  La ratification de ce traité n’est cependant qu’un premier pas, a néanmoins relevé M. Fedotov, qui a exhorté les États Membres à le mettre en œuvre.


M. Fedotov a précisé que la Convention établissait un mécanisme d’évaluation et de revue, basé sur le principe d’examen par les pairs, permettant d’en évaluer la mise en œuvre.  Les pays en développement ont besoin d’une assistance technique pour appliquer la Convention et lutter contre la corruption, a-t-il indiqué, ajoutant qu’il était du rôle de l’UNODC de leur fournir cette assistance.  Il a ensuite souligné le rôle de chef de file joué par l’UNODC dans les partenariats anticorruption noués avec le secteur privé, avec notamment l’adoption d’un manuel de bonnes pratiques à destination du monde des affaires.  M. Fedotov s’est ensuite réjoui que 5 milliards de dollars, sur les 40 milliards précités, aient été récupérés ces 15 dernières années, soulignant l’urgence que revêt la lutte contre le blanchiment d’argent.  En conclusion, M. Fedotov a une nouvelle fois exhorté les États Membres à appliquer pleinement la Convention des Nations Unies contre la corruption, ajoutant que « la lutte contre la corruption et les efforts pour la récupération des fonds détournés étaient des questions de vie et de mort pour les pays en développement ».


Dialogue interactif I: « Créer des sociétés ouvertes et harmonieuses: Une conception multidisciplinaire de la lutte contre la corruption et pour le développement »


Le Secrétaire de la Conférence des États parties à la Convention des Nations Unies contre la corruption, M. DIMITRI VLASSIS, qui est aussi le Chef du Service de la lutte contre la corruption et la criminalité économique de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC), a animé ce dialogue en proposant aux délégations de se concentrer sur les stratégies de lutte contre la corruption à court et à long termes.


M. ABDELADIM EL GUERROUJ, Ministre chargé de la fonction publique et de la modernisation de l’Administration du Maroc et Président de la Conférence des États parties à la Convention des Nations Unies contre la corruption, a tout d’abord expliqué que la corruption n’est plus un problème interne aux États, mais qu’elle a pris une dimension globale avec la mondialisation et la révolution technologique.  Cela explique que c’est maintenant une préoccupation majeure pour les organisations internationales.  La Convention des Nations Unies contre la corruption, qui est entrée en vigueur en 2005, constitue un cadre général de lutte contre la corruption et en faveur de la promotion de la bonne gestion des affaires publiques.  M. Guerrouj a aussi souligné l’appui technique important qu’apporte l’UNODC aux États dans ce domaine.


La dernière session de la Conférence des États parties à la Convention des Nations Unies contre la corruption s’est déroulée au Maroc, en octobre 2011, a rappelé le Ministre.  Les travaux ont abouti à l’adoption de la Déclaration de Marrakech en faveur de la prévention de la corruption, a-t-il indiqué.  Le Maroc participe aux efforts de prévention en organisant des ateliers de formation et a mis en œuvre des réformes visant à améliorer son cadre institutionnel de lutte contre la corruption, avec en particulier la création d’une unité de lutte contre le blanchiment d’argent.  Nous espérons que les mesures prises augmenteront la confiance que peuvent avoir les citoyens dans le Gouvernement et l’Administration marocaine modernisée, a conclu le Ministre.


Nous constatons des progrès dans la lutte contre la corruption, a quant à elle assuré Mme HELEN CLARK, Administratrice du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), qui a cité les mesures prises et les institutions créées par de nombreux pays dans ce domaine.  Soulignant que la corruption est un grand obstacle au développement, comme l’a rappelé la Conférence Rio+20, elle a donné l’exemple du prix de l’eau qui est parfois 30% plus cher qu’il ne devrait l’être à cause de la corruption.  Les femmes sont le plus gravement affectées, a-t-elle ajouté, expliquant l’importance que peuvent avoir les organisations de femmes dans la lutte anticorruption.


Une des actions du PNUD est de lutter contre l’abattage des arbres, qui devrait être partout interdit, car cette pratique dégrade les écosystèmes et appauvrit la population, a dit Mme Clark.  Elle a expliqué que le PNUD se concentre sur la prévention de la corruption, en favorisant l’augmentation de la transparence dans les activités du secteur public.  Au Pérou, nous avons soutenu les associations d’utilisateurs d’eau afin de décourager la corruption dans ce secteur.  Nous aidons aussi les pays les moins avancés (PMA) à mieux gérer les ressources publiques, a-t-elle ajouté, citant le document intitulé « Les flux financiers illicites venant des PMA: 1990-2008 », qui a été présenté par le PNUD lors de la quatrième Conférence des Nations Unies sur les PMA, qui a eu lieu à Istanbul, l’an dernier.


Mille milliards de dollars sont payés chaque année en pots-de-vin à travers le monde, et les pays développés perdent ainsi de 8 à 25% de leur PIB chaque année, a pour sa part signalé M. MARTIN KREUTNER, Président de l’Équipe internationale de transition de l’Académie internationale de lutte contre la corruption et Secrétaire exécutif de la Commission provisoire de l’Autriche.  L’Académie, dont le siège est en Autriche, compte 60 pays membres, dont 31 ont ratifié le traité qui a fondé cette institution.  Elle offre une formation professionnelle qui permet de renforcer les compétences et les moyens techniques de lutte contre la corruption.  M. Kreutner a invité les États à joindre leurs forces et leurs efforts de lutte contre la corruption dans le cadre de la Convention et de l’Académie de lutte contre la corruption.


De son côté, M. ABDUL TEJAN-COLE, Directeur régional pour l’Afrique à la Fondation pour une société ouverte et ancien Commissaire de la Commission anti-corruption de la Sierra Leone, a fait part de l’expérience de cette Commission, qui a été créée en 2000.  Expliquant que le mandat qui lui avait été donné était trop faible au départ, il a indiqué qu’une nouvelle loi, adoptée en 2008, a permis de poursuivre les efforts dans le domaine concerné.  La Commission, qui n’avait poursuivi que 30 personnes entre les années 2000 et 2008, a pu doubler le nombre de poursuites entre 2008 et 2010, tout en améliorant la qualité de ses enquêtes et procédures de poursuite.  La nouvelle loi anticorruption a aussi imposé des peines plus sévères.  Nous avons réussi à faire passer cette loi plus forte en invoquant la Convention des Nations Unies contre la corruption, a-t-il dit.  Selon M. Tejan-Cole, des commissions de ce genre ne peuvent réussir leur mission que si leur mandat est suffisamment large et leurs ressources adaptées à leurs besoins.  Il a aussi souligné la nécessité de les doter d’un personnel compétent et indépendant.  En outre, il a conseillé de mener des activités de sensibilisation qui touchent les enfants.  Une commission anticorruption ne peut pas lutter seule contre le phénomène social, politique et économique qu’est devenue la corruption, a-t-il aussi prévenu, invitant tous les groupes de la société civile à participer à cette lutte.


Confirmant l’importance de la participation du secteur privé et de la société civile pour aider les gouvernements dans la lutte contre la corruption, le représentant de l’Autriche a assuré que le Parlement autrichien et le Bureau fédéral de lutte anticorruption, notamment, sont très actifs dans ce domaine.  L’Autriche organisera, avec le Japon et la Tunisie, un évènement sur ce thème, parallèlement au débat de haut niveau sur l’état de droit, qui aura lieu le 24 septembre prochain à l’ONU, a-t-il annoncé.


Soulignant pour sa part les limites auxquelles sont confrontés les gouvernement des pays en développement dans la lutte contre la corruption et dans leurs efforts de récupération des avoirs et biens détournés, le représentant du Brésil a appelé tous les autres États à leur offrir, à cet égard, des ressources prévisibles dans le cadre de l’aide au développement pour contribuer au développement de leurs capacités nationales.


Le représentant du Bangladesh a soulevé la question du choix éventuel en ce qui concerne les cibles à atteindre, avertissant que les ressources disponibles pour les poursuites risquent de s’épuiser rapidement si on ne s’attaque qu’aux « gros poissons ».  Il ne faut pas se demander qui poursuivre, mais il faut poursuivre tout le monde, a estimé le représentant de l’Académie international de lutte contre la corruption.  Pour le Ministre chargé de la fonction publique et de la modernisation de l’Administration du Maroc, seule une démarche structurelle permet de s’attaquer à la fois aux petits comme aux gros poissons.


La représentante du Cameroun, pays qui a créé en 2006 un organe indépendant de lutte contre la corruption, a demandé si l’Académie pourrait trouver les moyens de disséminer et vulgariser son enseignement afin de l’intégrer dans les programmes scolaires.  Le représentant de l’Académie internationale de lutte contre la corruption a reconnu l’importance de la sensibilisation des enfants sur ce problème et a indiqué que l’Académie essaie d’élaborer des programmes durables. 


Enfin, après que la représentante de l’organisation non gouvernementale « NGO Sustainability » ait expliqué qu’on lui avait demandé le versement d’un pot-de-vin dans le cadre de la mise en place d’un projet de promotion de l’énergie solaire en Afrique, le représentant de la Fondation pour une société ouverte a demandé que l’ONG lui fasse rapport sur ce problème.  L’Administratrice du PNUD a conseillé aux individus et aux entreprises de ne jamais accepter de verser de pot-de-vin.


Dialogue interactif II: « Partage des rôles et des responsabilités : Créer des partenariats novateurs pour lutter globalement contre la corruption »


Ce dialogue interactif a été animé par M. RICO HIZON, Présentateur des émissions « BBC Newsday » et « Asia Business Report » sur la chaîne de télévision internationale de la BBC.


Déclarations liminaires


M. SERGEY DUBIK, Conseiller de la Direction des services du personnel et de l’État du Président de la Fédération de Russie, a indiqué que la Fédération de Russie avait pris des mesures importantes de lutte contre la corruption, en renforçant son arsenal législatif, et ce, en conformité avec la Convention des Nations Unies contre la corruption.  Il y est prévu notamment la reconnaissance de la responsabilité des personnes étrangères reconnues coupables de faits de corruption et une aggravation des pénalités financières infligées à toute personne responsable d’actes de corruption, a-t-il poursuivi.  Il a précisé qu’un projet de loi encore en discussion avec la Douma, le Parlement russe, prévoyait un mécanisme de vérification de l’acquisition des biens des fonctionnaires ainsi qu’un mécanisme de restitution éventuelle des biens acquis de manière illicite à l’État.  M. Dubik a enfin rappelé que la Fédération de Russie était l’hôte de la prochaine Conférence des États parties à la Convention des Nations Unies contre la corruption.


Mme ABIGAIL BENZADON COHEN, Secrétaire exécutive du Conseil national pour la transparence et la lutte contre la corruption du Panama, a détaillé le mécanisme d’évaluation par les pairs contenu dans la Convention des Nations Unies contre la corruption, une Convention qu’elle a qualifiée d’« évolutive ».  Pour la période 2012-2015, le Panama remettra son rapport à l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC), un document qui sera ensuite transmis aux experts des Bahamas et de l’Estonie, a-t-elle expliqué.  Elle a ensuite plaidé pour une implication maximale de la société civile dans les efforts de lutte contre la corruption.  La société civile a un rôle crucial d’observateur et de contrôleur des actions de l’administration publique, a dit Mme Benzadon Cohen, en ajoutant que le Panama avait mis en œuvre à cet effet un mécanisme de consultation national.


M. JANAMITRA DEVAN, Vice-Présidentdu Département Finances et développement du secteur privé de la Banque mondiale, a indiqué que la confiance publique dans les institutions était un élément clef du bon fonctionnement d’une économie.  La Banque mondiale veille à renforcer le lien entre entreprises, gouvernements et objectifs de développement en prenant toute sa part dans la lutte contre la corruption, a-t-il poursuivi.  Il a cité à cet effet l’appui de la Banque à « l’Alliance des chasseurs de corruption », un groupe anticorruption créé au sein du G-20, et à l’UNODC.  M. Devan a également cité l’Initiative STAR, lancée par la Banque mondiale et l’UNODC, relative à la restitution des avoirs acquis de manière illicite et souvent transférés à l’étranger.  Cette Initiative soutient les efforts internationaux pour l’élimination des paradis fiscaux, ainsi que pour le rapatriement des avoirs acquis de manière illicite dans leur pays d’origine, a-t-il expliqué.


Mme ELAINE DEZENSKI, Directrice du Centre pour l’engagement des milieux d’affaires du Forum économique mondial, a détaillé l’Initiative pour un Partenariat contre la corruption (PACI), lancée par le Forum économique mondial en 2004, qui vise à élaborer un langage commun en matière de lutte contre la corruption pour toutes les industries, tout en fournissant une plateforme par laquelle les entreprises signalent leur engagement résolu en la matière.


Cent quatre vingts entreprises ont adhéré à cette initiative en mettant en place une politique de tolérance zéro contre toutes les pratiques de corruption, s’est-elle réjouie.  Elle a ensuite plaidé pour une vision systémique de la corruption, avec notamment une identification de tous les facteurs de corruption.  La mise en place d’un classement des pays en fonction de leur compétitivité, mais aussi d’un indice de corruption pourrait être envisagée, a-t-elle dit.  Enfin, elle a cité les objectifs poursuivis par l’Initiative pour un Partenariat contre la corruption, notamment l’appui aux entreprises dans la mise en œuvre des mesures de lutte contre la corruption, et la promotion de partenariats public-privé, comme cela a été fait en Mongolie et au Viet Nam.  Depuis mars 2011, 160 entreprises mongoles ont d’ores et déjà adhéré à notre Initiative, s’est réjouie Mme Dezenski.


Échange interactif


Ouvrant le débat interactif, le représentant de l’Afrique du Sud a pour sa part détaillé les efforts menés par son pays en matière de lutte contre la corruption, avec notamment le renforcement des moyens alloués aux unités enquêtant sur des faits de corruption, l’adoption d’un code de conduite pour les parlementaires et les fonctionnaires, ainsi que la mise en place d’un numéro de téléphone rattaché au Bureau du Président de l’Afrique du Sud, par lequel les citoyens peuvent signaler des cas de corruption.


La représentante de l’Égypte a centré son commentaire sur l’importance cruciale que représente la restitution des avoirs acquis de manière illicite et déposés dans des banques étrangères, en particulier pour les pays ayant connu une dictature dans un passé récent.  Pointant la responsabilité des États dans la confiscation et la restitution de tels avoirs, elle s’est interrogée sur les moyens dont peuvent disposer les pays spoliés pour surmonter les barrières juridiques qui s’opposent à ces restitutions. 


Le Vice-Présidentdu Département Finances et développement du secteur privé, de la Banque mondiale a repris la parole pour lui indiquer que la Banque mondiale avait identifié 29 obstacles à la récupération de ces avoirs, tant de nature politique que juridique.  Il s’est dit prêt à transmettre à la représentante de l’Égypte le document faisant mention de ces obstacles.


La représentante de l’organisation non gouvernementale « Alliance pour la justice pénale » s’est réjouie d’une intégration renforcée de la société civile, qui est un « élément clef » dans la lutte contre la corruption, alors que son homologue de « Transparency international » a jugé cruciale la pleine mise en œuvre de la Convention.  La corruption est une industrie mondiale qui ne cesse de s’exporter, a-t-il dit, avant de plaider pour la participation des ONG aux travaux qui auront lieu sur l’évaluation de la performance des pays en ce qui concerne l’application des termes de la dite Convention.


« Si la société civile veut jouer le rôle crucial qui est le sien dans la lutte contre la corruption, encore faut-il qu’elle s’organise en conséquence », leur a répondu Mme Benzadon Cohen, qui a évoqué les demandes parfois contradictoires qui s’expriment en son sein venant de ses différentes composantes.  L’examen de la participation de la société civile à l’évaluation de la politique de lutte contre la corruption du Panama est en cours, a-t-elle ajouté. 


Répondant à une observation du représentant du Bangladesh qui a notamment loué l’instauration au Panama d’un mécanisme de consultation nationale, Mme Benzadon Cohen a indiqué que son pays œuvrait également à la mise en place d’académies régionales de lutte contre la corruption.


Enfin, le représentant de la République-Unie de Tanzanie a tenu à signaler aux États Membres l’engagement résolu de son pays dans la lutte contre la corruption, alors que le représentant du Brésil a rappelé l’initiative lancée par son pays et les États-Unis lors de l’Assemblée générale de 2011, visant à intensifier l’utilisation des nouvelles technologies dans la lutte contre la corruption.


Conclusion des dialogues interactifs: « Responsabilité, transparence et développement durable: Faire des difficultés des chances »


M. BAN KI-MOON, Secrétaire général des Nations Unies, a indiqué que l’Afghanistan -objet de la Conférence de Tokyo à laquelle le Secrétaire général participait ce 8 juillet 2012– faisait face à de nombreux défis, dont celui de la corruption.  Ce défi, qui est également celui qui se pose à de nombreux pays, touche d’abord les citoyens les plus pauvres qui doivent payer des pots-de-vin pour des services qui leur sont dus, a-t-il déploré.  La corruption rend impossible l’instauration de la paix, du développement et du respect des droits de l’homme, a poursuivi le Secrétaire général, qui a souligné l’impact très profond de la corruption sur les sociétés où les institutions sont faibles et l’état de droit défaillant.


M. Ban a relevé que l’année dernière la corruption avait empêché 30% du montant total de l’aide au développement d’arriver à ses véritables destinataires, ce qui représente autant d’écoles, de ponts et d’hôpitaux qui ne seront pas construits.  C’est un échec en termes de transparence et de responsabilité, a-t-il affirmé.  


Le Secrétaire général a ensuite indiqué que la Convention des Nations Unies contre la corruption et son mécanisme d’examen par les pairs avaient bénéficié d’un consensus international fort en vue de l’éradication de ce fléau.  En s’évaluant les uns les autres, les pays s’engagent dans la voie de la responsabilité mutuelle, a dit M. Ban, qui a néanmoins invité à aller de l’avant.  « Il est temps de forger des liens forts avec le secteur privé, la société civile, le monde éducatif, les médias, les femmes et les jeunes, afin de promouvoir une culture de l’intégrité », a préconisé le Secrétaire général.


Il a ensuite rappelé que le document adopté lors de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable -Conférence Rio+20- exhortait tous les États Membres qui ne l’avaient pas encore fait à ratifier la Convention contre la corruption et à entamer sa mise en œuvre.  « Le développement durable n’est possible que par la promotion de la responsabilité », a affirmé M. Ban, ajoutant que la Conférence Rio+20, si elle a été un pas accompli dans la voie d’un avenir durable, en appelait maintenant d’autres.


M. MILOŠ KOTEREC, Président du Conseil économique et social, a brièvement pris la parole après l’intervention du Secrétaire général pour exhorter à son tour les pays qui ne l’ont pas encore fait à adhérer à la Convention des Nations Unies contre la corruption, dont le rôle est « essentiel dans la promotion d’une culture de la responsabilité et de la transparence ».


M. YURY FEDOTOV, Secrétaire général adjoint et Directeur exécutif de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC), a relevé qu’il y a une tendance anticorruption de plus en plus visible et croissante à travers le monde.  « Les citoyens n’acceptent plus la corruption dans différents pays », a-t-il ajouté.  Il a ensuite encouragé toutes les nations à participer à l’initiative d’évaluation par les pairs que promeut l’ONU.  Il a également souhaité que des mesures de réparation soient mises en œuvre afin de récupérer les fonds publics perdus du fait de la corruption, et de barrer la voie au blanchiment d’argent.  Dans cette optique, M. Fedotov a suggéré la mise en place d’un large partenariat entre les secteurs privé et public, avec l’implication de la société civile, des médias, des jeunes et des femmes, afin d’optimiser les chances de réussite de la lutte contre la corruption pour mettre fin à ce fléau.  Il a en outre indiqué que ce défi interpelle toute personne avide de justice et soucieuse de voir se réaliser l’avènement d’un monde sans corruption.


Table ronde thématique III: « Mettre en œuvre des politiques macroéconomiques efficaces pour créer des emplois »


Observations liminaires


M. RICO HIZON, Journaliste et présentateur des émissions « BBC Newsday » et « Asia Business Report », qui a animé et modéré cette table ronde a introduit les différents panelistes par des questions en rapport avec le thème retenu. 


M. SYED SAMAD, Ministre d’État et Président de la Commission des privatisations du Bangladesh, a présenté la situation de l’emploi dans son pays.  Il a relevé qu’au Bangladesh, le secteur dominant de l’économie reste l’agriculture, qui emploie plus de trois millions et demi de personnes.  Il a ajouté que le sous-emploi est un problème crucial au Bangladesh, contrairement à d’autres pays souffrant du chômage.  Il a expliqué cette situation par le fait que les pratiques sociales y privilégient le partage des tâches entre membres de la même communauté, afin de ne laisser personne sans emploi, ce qui fait aussi que les rémunérations soient subséquemment très faibles.  M. Samad a ensuite relevé que la Constitution du Bangladesh reconnaît le droit au travail comme l’un des droits fondamentaux des citoyens.  


M. MARTIN RAMA, Économiste en chef du Groupe de recherche sur le développement de la Banque mondiale, a présenté les tendances mondiales de l’emploi, en précisant qu’un rapport détaillé sur la question sera publié en octobre prochain par la Banque mondiale.  Il a indiqué que toute politique d’emploi est basée sur trois piliers ou principes: la productivité, l’épanouissement des travailleurs et la cohésion sociale.  Il a précisé que faire cohabiter ces trois exigences relève souvent du défi impossible à relever. 


Il a par la suite parlé des pays où l’épanouissement des travailleurs est privilégié à travers le versement de salaires décents, et cela au détriment de la productivité.  Il a également souligné que certains pays, dans leur politique d’emploi, mettent l’accent sur la cohésion sociale afin de se prémunir des révoltes sociales, notamment de celles initiées par les jeunes.  Il a en outre indiqué qu’une bonne stratégie d’emploi doit identifier les lacunes propres à chaque pays afin de pouvoir conduire au développement.  Il a également insisté sur le fait que l’emploi devrait permettre aux gens de sortir de la pauvreté et de se prendre en charge. 


M. Rama a par ailleurs noté que près de la moitié des travailleurs vivant dans les pays en développement ne sont pas salariés sur le plan monétaire, car exerçant dans le secteur agricole et dans le secteur informel, et ne bénéficiant pas de protection sociale.  Enfin, il a reconnu que les stratégies d’emploi semblent souvent s’opposer aux stratégies de croissance.  Il a, à titre d’exemple, cité le cas de Singapour, où la stratégie gouvernementale privilégiant l’emploi a abouti à une grande récession après avoir semblé connaître un succès qui a malheureusement été de courte durée.


M. STEPHEN PURSEY, Directeur du Département des politiques d’intégration de l’Organisation internationale du Travail (OIT), a focalisé son propos sur la qualité des emplois.  Il a indiqué que des lacunes doivent être comblées en termes de protection sociale.  Il a dans ce contexte évoqué les personnes handicapées et les personnes du troisième âge qui ne bénéficient pas toujours de protection adéquate.  Il a ensuite prôné l’instauration d’un système de santé minimal pour assurer des soins à tous les citoyens.  Pour financer ce programme, il a suggéré l’élargissement de l’assiette fiscale dans un contexte de bonne gouvernance. 


M. IVAN SIMONOVIĆ, Secrétaire général adjoint des Nations Unies aux droits de l’homme, a pour sa part relevé que les modèles de développement en cours ont semblé oublier l’importance de la personne humaine tout en privilégiant les indicateurs économiques classiques.  Il a rappelé que les mouvements de protestation sociale, notamment le « printemps arabe » et les mouvements des « indignés », sont venus rappeler que les individus devraient être au centre des programmes de développement.  Il a par la suite déploré le fait que certaines couches sociales, telles que les personnes handicapées, les femmes, les jeunes et les populations autochtones, continuent d’être marginalisées dans le monde de l’emploi. 


Il a de ce fait estimé qu’il faudrait trouver un équilibre entre les préoccupations sociales et les exigences économiques.  Il a rappelé que la Conférence des Nations Unies sur le développement durable « Rio+20 », qui a eu lieu le mois dernier au Brésil, a souligné une fois encore, que le développement économique ne peut se faire sans le respect de l’environnement et des exigences sociales, et notamment des droits de l’homme.


Débat interactif


À l’ouverture de la discussion interactive, le représentant du Bangladesh a noté que son gouvernement a opté pour une politique de capacitation des populations, afin que les citoyens puissent se prendre en charge.


M. MARTIN RAMA, Économiste en chef du Groupe de recherche sur le développement de la Banque mondiale, a quant à lui suggéré la valorisation de l’esprit d’entreprise, moteur de la création d’emplois.  Il a expliqué que dans les pays développés, les petites et moyennes entreprises (PME) deviennent souvent de grandes multinationales, alors que dans les pays en développement, ces entreprises disparaissent ou perdent de leur productivité.     


Le Directeur du Département des politiques d’intégration à l’Organisation internationale du Travail a estimé que les évaluations des performances économiques des pays devraient sortir des sentiers battus où les indicateurs économiques ont été érigés en facteur décisif d’évaluation, afin de prendre en considération des données sociales telles que le niveau de travail décent dont bénéficie une population.


Déclarations de fin de séance


M. MILOŠ KOTEREC, Président du Conseil économique et social, a indiqué qu’il n’avait malheureusement pas été possible de surmonter les divergences rencontrées au niveau des experts.  « Le texte de la déclaration ministérielle en discussion est pourtant acceptable et je le recommande à l’adoption du Conseil », a-t-il dit, avant d’interroger les délégations.


Les représentants de l’Allemagne, de Cuba, de la Finlande, des Pays-Bas et de la République-Unie de Tanzanie ont pris la parole pour exprimer le souhait de disposer de davantage de temps pour l’examen du texte.  Les délégations du Venezuela et de l’Inde ont également demandé un délai supplémentaire afin notamment de s’assurer que les remarques du Groupe des 77 et de la Chine ont bien été prises en compte dans la mouture de ce texte.  Le représentant du Canada a, pour sa part, indiqué que le texte en discussion était un texte raisonnable qui avait été, au demeurant, distribué vendredi dernier.  Il a fait mention de risques d’enlisement si les membres du Conseil devaient prolonger l’examen du texte.


Après une dernière intervention du représentant de Cuba qui a plaidé pour qu’un délai supplémentaire soit accordé aux délégations pour l’examen du texte, le Président de l’ECOSOC a reporté à demain la clôture du débat de haut niveau du Segment ministériel de la session de fond du Conseil économique et social.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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