CS/10528

En dépit des difficultés, l’ONU continuera à assister le CNT à faire face aux défis immenses liés à la sécurité et aux droits de l’homme en Libye, assurent Ian Martin et Navi Pillay

25/01/2012
Conseil de sécuritéCS/10528
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Conseil de sécurité

6707e séance – matin


EN DÉPIT DES DIFFICULTÉS, L’ONU CONTINUERA À ASSISTER LE CNT À FAIRE FACE AUX DÉFIS IMMENSES LIÉS

À LA SÉCURITÉ ET AUX DROITS DE L’HOMME EN LIBYE, ASSURENT IAN MARTIN ET NAVI PILLAY


Le représentant de la Libye réaffirme l’engagement des autorités

de transition à s’acquitter de leur rôle avant la tenue des élections de juin prochain


Ce matin, au cours d’une séance d’information mensuelle du Conseil de sécurité, M. Ian Martin, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL), a exprimé l’espoir que le régime de transition libyen pourra acquérir une certaine légitimité, notamment en vue de tenir des élections en juin prochain.  Après les nombreux incidents violents qui ont eu lieu en janvier, M. Martin a mis l’accent sur le grave problème de sécurité que connaît actuellement la Libye, tandis que la Haut-Commissaire aux droits de l’homme a alerté le Conseil sur la situation très préoccupante des droits de l’homme dans ce pays.


Mme Navi Pillay a toutefois salué la priorité accordée par les autorités au processus de justice transitionnelle.  « La révolution a eu lieu pour protéger les droits de l’homme », a rassuré M. Abdurrahman Mohamed Shalgham, Représentant permanent de la Libye auprès des Nations Unies, tout en attirant l’attention sur les défis auxquels le pays reste confronté, comme par exemple la participation des femmes dans la vie publique et politique.


Le Représentant spécial a rappelé que le peuple libyen critique de plus en plus les institutions de transition, en soulignant notamment la résurgence des combats à Bani Walid où le Conseil national de transition (CNT) tente de nommer de nouveaux dirigeants.


Les manifestations à Benghazi, a précisé M. Martin, ont été déclenchées par les propos largement diffusés selon lesquels les anciens combattants du régime de Qadhafi pourraient éventuellement bénéficier d’une amnistie.  Les manifestants ont demandé une plus grande transparence, exigeant aussi que les anciens militants du régime déchu soient interdits d’accès aux institutions de l’État.


Plaidant en faveur de la réconciliation et rejetant la politique de l’exclusion, le représentant libyen a fait observer qu’il serait difficile de confier la gestion de la Libye à un groupe de personnes qui ont passé plus de 30 ans à l’extérieur du pays.  Il a aussi expliqué que le peuple a besoin d’être rattaché à la religion et c’est pourquoi, il est nécessaire de s’appuyer sur les principes de l’islam, comme la cohérence, la coexistence et le pardon. 


M. Martin a regretté le manque de fiabilité des médias et d’organisation de la société civile, ainsi que la faiblesse des institutions étatiques.  Il a par ailleurs espéré que la radiation de la Banque centrale de Libye et de la Libyan Foreign Bank de la liste des entités visées par des sanctions permettra de surmonter le manque de liquidités.


Le processus de rédaction de la loi électorale en vue de l’élection d’un congrès national d’ici à la fin juin est compliqué par des délais très courts, l’inexpérience, les limites de la communication et le défaut de mécanismes appropriés de consultation, a expliqué M. Martin.  Le représentant de la Libye a cependant indiqué que le projet de loi électorale avait suscité 14 000 commentaires.


Si la Libye n’a jamais eu de partis politiques ni de syndicats, elle a cependant des ressources humaines, a rappelé M. Shalgham, en précisant que 20 000 Libyens avaient étudié à l’étranger et que la majorité des femmes étaient instruites.


Le CNT, a fait remarquer M. Martin, a rejeté la proposition du Comité électoral de prévoir un quota de 10% de femmes au futur congrès national.  Pour Mme Pillay, assurer une représentativité minimale des femmes dans la vie publique et politique est pourtant le meilleur moyen de garantir que la révolution apporte des progrès concrets pour les femmes et les filles.  « Nous ne pouvons pas écarter le rôle de la femme », a assuré le représentant libyen, en déclarant qu’un quota d’au moins 25% devrait être fixé.


M. Martin a ensuite alerté le Conseil sur le grave problème de sécurité qui demeure en Libye, en signalant le nombre important d’armes en circulation dans les rues et la présence de diverses brigades armées.  Il a rappelé les incidents mortels qui ont eu lieu début janvier entre les brigades rivales de Misrata et de Tripoli, ainsi que d’autres incidents récents, notamment à Bani Walid.


Une commission interministérielle a commencé à enregistrer les anciens combattants, a indiqué le Représentant spécial, qui a salué l’aide de la MANUL et du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) dans ce domaine, ainsi que celle de certains États pour la formation de la police.  Son nouveau Conseiller spécial sur les menaces et défis posés par les armes et le matériel connexe en Libye, a-t-il dit, doit coordonner les efforts d’identification et de contrôle des missiles sol-air portables.


Comme beaucoup de ces armes ne se trouvaient plus sur le territoire libyen, la MANUL a créé un sous-groupe sur la question, coprésidé par le Ministère libyen de la défense, a rappelé M. Martin.  À ce jour, 5 000 de ces missiles et matériel connexe ont été saisis.  Le Représentant spécial s’est en outre réjoui de l’aide apportée par de nombreux donateurs pour le déminage, ainsi que des progrès accomplis dans la vérification de produits chimiques.


La sécurité à la frontière reste aussi une grande préoccupation du Gouvernement de transition.  La MANUL coordonne ses efforts avec ceux de l’Union européenne qui va envoyer sur le terrain une équipe d’évaluation de la gestion des frontières, a-t-il assuré.


Sur la question des droits de l’homme, la MANUL exhorte le Gouvernement à accélérer les transferts des prisonniers pour pouvoir examiner leur cas.  La nouvelle loi sur la justice transitionnelle n’a pas encore été promulguée, a-t-il ajouté.


« Je serai le premier à me soumettre à un procès en tant qu’ancien Ambassadeur sous le régime de Qadhafi », a assuré M. Shalgham.  Il s’est dit très préoccupé par l’existence de centres de détention qui ne sont toujours pas localisés par les autorités libyennes de transition.


De son côté, Mme Pillay a jugé urgent de mettre un terme aux abus en demandant que tous les centres de détention soient soumis au contrôle du Ministère de la justice.  Elle a souligné « l’insuffisance de vision d’ensemble des autorités centrales » qui favorise un environnement propice aux mauvais traitements, dont la torture.


Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et la Section des droits de l’homme de la MANUL se tiennent prêts à répondre à toute demande d’assistance technique de la Libye en matière de réforme juridique et institutionnelle, a ajouté Mme Pillay.


Par ailleurs, le représentant libyen a affirmé avoir des preuves que le colonel Qadhafi avait manipulé l’information en faisant filmer des cadavres pour faire croire qu’ils étaient ceux des victimes des bombardements de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN).  « J’espère qu’on ne va pas utiliser le prétexte de l’OTAN pour protéger d’autres tyrans », a-t-il déclaré.


La nouvelle Libye est prête à coopérer avec toute commission d’enquête internationale sous les auspices des Nations Unies et nous allons mettre en place un mécanisme d’indemnisation des victimes, a ajouté M. Shalgham, avant de dire que des membres de sa propre famille figuraient parmi ces victimes.  Mme Pillay a invité l’OTAN à transmettre toutes les informations nécessaires sur cette question et à coopérer avec la Commission d’enquête qui doit rendre ses conclusions le 9 mars 2012. 


Mme Pillay a par ailleurs indiqué que 60% des Libyens déplacés au cours du conflit ont regagné leur domicile en janvier 2012, même si certains groupes sont récalcitrants de crainte de faire l’objet de représailles.  À ce jour, a-t-elle précisé, 35 000 résidents de Tawergha -qui sont accusés de crimes graves par les résidents de Misrata, ville voisine– continuent de vivre dans des camps.


C’est maintenant le Ministère de l’assistance aux familles des martyrs et des personnes disparues qui a la responsabilité de localiser et d’identifier les personnes portées disparues, a indiqué pour sa part M. Martin.  Un Conseil national des libertés publiques et des droits de l’homme a été créé, a-t-il ajouté.


Enfin, M. Martin a annoncé la tenue à la fin du mois d’une réunion avec des représentants de l’Union européenne et de la Banque mondiale, afin d’aligner l’aide internationale avec les sept priorités du Gouvernement: la société civile et les médias, les élections, l’administration publique, la gestion des finances publiques, la fourniture des services sociaux, la communication stratégique et la justice transitionnelle.  Il s’est en outre réjoui d’avoir signé avec le Ministère des affaires étrangères l’accord sur le statut de la mission, le 10 janvier.


L’Ambassadeur Shalgham a remercié le Conseil de sécurité pour avoir eu le courage de porter secours à la Libye, ainsi que les pays qui ont envoyé leurs avions et leurs soldats pour protéger la population civile.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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