ECOSOC/6285

L'ECOSOC TIENT UNE RÉUNION-DÉBAT SUR LA PROMOTION DE L'EMPLOI ET DU TRAVAIL DÉCENT EN AMÉRIQUE LATINE

9/07/2007
Conseil économique et socialECOSOC/6285
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

L'ECOSOC TIENT UNE RÉUNION-DÉBAT SUR LA PROMOTION DE L'EMPLOI ET DU TRAVAIL DÉCENT EN AMÉRIQUE LATINE


(Publié tel que reçu)


Genève, 9 juillet (Service de l’information des Nations Unies) -– Le Conseil économique et social a tenu ce matin, dans le cadre du débat consacré aux questions de coordination, une réunion-débat sur le rôle du système des Nations Unies dans la promotion de l'emploi et d'un travail décent dans les cadres stratégiques nationaux, en se penchant sur le cas des pays d'Amérique latine.


Le débat était animé par M. Hilario G. Davide, Vice-Président du Conseil, et comptait avec la participation des Directeurs régionaux pour l'Amérique latine et les Caraïbes du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), et du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), ainsi que d'un expert de l'Organisation internationale du travail (OIT).


La Directrice régionale du PNUD, Mme Rebecca Grynspan, a notamment souligné que le Programme a pleinement adopté, dans le cadre de sa collaboration locale avec l'OIT, les principes de l'Agenda pour le travail décent, qui sont: la création d'emplois de qualité, le respect des droits des travailleurs, la promotion du dialogue social, et la protection et l'inclusion sociales des travailleurs.


La Directrice régionale du FNUAP, Mme Marcela Suazo, a indiqué que le Fonds a placé le thème du travail décent au rang de ses priorités et veille à l'intégrer dans les programmes qu'il développe dans les différents pays.  Il est fondamental que soient mis en place des politiques et des programmes pour la promotion et l'amélioration des possibilités d'insertion des femmes sur le marché du travail, a-t-elle en outre souligné.  L'accès universel aux services de santé reproductive, en particulier pour les adolescentes, est un aspect fondamental de la promotion de la femme et de la réduction de la pauvreté, a-t-elle rappelé. 


Le Directeur régional de l'UNICEF, M. Nils Kastberg, a rappelé que l'élimination du travail des enfants est au centre des activités de l'UNICEF et que, dans ce contexte, la promotion d'un travail décent est fondamentale.  En effet, a-t-il expliqué, un appui fort aux programmes de promotion du travail décent pourrait permettre à ces familles de vivre sans que les enfants soient obligés de travailler pour apporter un complément aux revenus des parents. 


M. Philippe Egger, Directeur adjoint du Cabinet du Directeur général de l'Organisation internationale du travail (OIT), a relevé que la croissance économique ne joue pas son rôle de ciment social en Amérique latine.  Toutes les actions en faveur du développement doivent être mesurées à l'aune de leurs effets en termes d'emploi, a-t-il affirmé.  Il a fait part de l'existence d'un accord entre le PNUD et d'autres institutions sur le principe d'un revenu minimal universel au niveau du continent.  Les mesures à prendre pour garantir des salaires décents sont connues; elles sont possibles et politiquement nécessaires, a déclaré M. Egger, assurant qu'il est tout à fait possible d'agir concrètement pour faire aboutir le principe du travail décent.


Les représentants des États suivants ont participé au débat: Portugal au nom de l'Union européenne, Costa Rica, Brésil, Mexique, Bolivie, El Salvador, Honduras, Indonésie, Barbade, Algérie, Finlande, Suède, Islande et Maroc.


Le Conseil se réunira à 15 heures, cet après-midi, pour entendre une présentation du rapport actualisé du Secrétaire général concernant le rôle du Conseil dans l'application et le suivi intégrés et coordonnés des textes issus des grandes conférences et réunions au sommet organisées sous l'égide de l'Organisation des Nations Unies.  Il tiendra ensuite son débat général sur les questions de coordination.


Réunion-débat sur le rôle des Nations Unies dans la promotion du plein-emploi et d'un travail décent dans les cadres stratégiques nationaux: le cas de l'Amérique latine


Introduction et présentation des panélistes


M. HILARIO G. DAVIDE, Vice-Président du Conseil économique et social, a ouvert la réunion-débat du jour consacrée au rôle des Nations Unies dans la promotion du plein-emploi et d'un travail décent dans les cadres stratégiques nationaux.  Cette discussion va s'intéresser aux expériences de l'Amérique latine et des Caraïbes, a-t-il précisé.  Il a rappelé que le travail décent a été défini par l'Organisation internationale du travail (OIT) et par la communauté internationale comme moyen d'offrir aux hommes et aux femmes un travail productif dans des conditions de liberté, d'égalité, de sécurité et de dignité.  En 2000, l’OIT a lancé une initiative pilote afin que l'Agenda pour le travail décent se concrétise en politiques nationales cohérentes.  De 2001 à 2005, l’OIT a lancé dans quelques pays plusieurs programmes nationaux en la matière.  Ces programmes ont cherché à favoriser l'intégration du concept de travail décent dans les stratégies nationales de développement.  La réunion-débat de ce matin permettra d'en savoir davantage sur la coopération aux niveaux régional et national ainsi que sur la façon dont les priorités en matière de travail décent ont permis de renforcer les stratégies nationales de développement.  Elle sera animée par l'équipe des directeurs régionaux du PNUD, de l'UNICEF et du FNUAP en Amérique latine et dans les Caraïbes, ainsi que par un représentant de l'OIT.


MME REBECCA GRYNSPAN, Directrice régionale du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) pour l'Amérique latine et les Caraïbes, a souligné que le PNUD s'est associé avec ses partenaires afin d'établir un programme de travail pour concrétiser son action au niveau régional.  Sur le plan économique, Mme Grynspan a indiqué que si l'Amérique latine connaît depuis quelques années une croissance créatrice d'emplois, le chômage reste toutefois élevé, surtout parmi les femmes.  L'écart entre les revenus des femmes et ceux des hommes est aussi à la hausse.  La situation des jeunes est préoccupante, près d'un quart d'entre eux ne suivant pas de formation ou n'ayant pas de travail.  Ce phénomène nourrit sans doute la recrudescence de criminalité enregistrée dans tout le continent, a ajouté Mme Grynspan.


L'emploi est un problème central de la gouvernance des pays en voie de développement, a poursuivi la Directrice régionale du PNUD.  C'est pourquoi le PNUD travaille en collaboration étroite avec l'Organisation internationale du travail pour s'attaquer au problème.  Dans le cadre de sa collaboration locale avec l'OIT, le Programme des Nations Unies pour le développement a pleinement adopté les principes de l'Agenda pour le travail décent que sont: la création d'emplois de qualité; le respect des droits des travailleurs; la promotion du dialogue social; ainsi que la protection et l'inclusion sociales des travailleurs.  Chaque institution apporte une contribution en fonction de ses aptitudes propres, a indiqué Mme Grynspan.  L'OIT, en ce qui la concerne, apporte des compétences techniques élevées, son système de consultations tripartites (autorités, travailleurs, employeurs), ainsi que la panoplie d'outils pour l'application du principe de travail décent.  Pour sa part, le Programme des Nations Unies pour le développement apporte, entre autres, son expérience multidimensionnelle, sa capacité de rassembler divers secteurs et sa capacité à coordonner le système.


Mme Grynspan a évoqué les programmes gérés par le PNUD au Brésil, au Costa Rica, au Honduras, à la Trinité-et-Tobago, en Uruguay, au Pérou et au Chili.  Elle a aussi présenté l'action menée au Mexique, où a été introduit un «indice de compétitivité sociale», mis à jour tous les six mois et qui regroupe plusieurs indicateurs relatifs aux conditions de travail.  La panoplie d'outils de l'OIT est un instrument très utile pour l'application concrète des principes du travail décent, a insisté Mme Grynspan.


MME MARCELA SUAZO, Directrice régionale du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), a souligné que le système des Nations Unies déploie de nombreux efforts pour améliorer la cohérence de ses travaux.  Les processus de planification et d'exécution d'initiatives conjointes entre les fonds, programmes et institutions spécialisées des Nations Unies présentes dans les pays s'inscrivent dans ce contexte, a-t-elle précisé.  Elle a souligné combien il est important que l'analyse en matière de travail décent tienne compte de trois aspects fondamentaux qui jouent un rôle déterminant dans la région de l'Amérique latine et des Caraïbes, à savoir les tendances démographiques, les processus migratoires et les conditions d'inégalité dans le travail des femmes et des jeunes.  L'Amérique latine et les Caraïbes comptent 560 millions d'habitants, dont la moitié sont en âge de travailler.  La région est marquée par la croissance de la population active et cet avantage démographique offre des possibilités significatives, a fait valoir Mme Suazo.  Les processus migratoires touchent 4% de la population, soit 20 millions de personnes, a-t-elle poursuivi.  Chaque jour davantage de femmes émigrent pour trouver un emploi qui leur permette d'améliorer leurs conditions de vie, a-t-elle souligné.  Ce phénomène migratoire - outre qu'il accroît les risques d'abus, de violence et d'exploitation à l'encontre des femmes - a un autre impact fondamental, à savoir celui de la transformation des ménages et des foyers familiaux.  Aujourd'hui, a insisté Mme Suazo, seuls 20% des ménages de la région sont constitués de familles nucléaires comprenant les deux parents et les enfants.  Les autres foyers familiaux sont des familles monoparentales ou des familles rassemblant les oncles, les grands-parents voire d'autres parents.  Ainsi, parmi les défis à relever, conviendrait-il d'améliorer la collecte de données pour la promotion de politiques publiques au niveau régional et international qui garantissent la protection des droits des femmes migrantes.  D'autre part, si la population active féminine a augmenté, les femmes restent cantonnées à des emplois moins bien rémunérés que ceux des hommes, a poursuivi la Directrice régionale du FNUAP.  En termes de salaires, les femmes perçoivent à travail égal de 20 à 30% de moins que les hommes.  Selon les études, dans 60% des cas, les femmes qui retardent leur entrée dans le marché du travail ou quittent le marché du travail le font pour des raisons qui tiennent à leur rôle reproductif.  S'agissant de la grossesse des adolescentes, il n'y a aucune tendance à la baisse, a par ailleurs souligné Mme Suazo.


Mme Suazo a indiqué que le FNUAP a placé le thème du travail décent au rang de ses priorités et veille donc à l'intégrer dans les programmes qu'il développe dans les pays.  Ainsi, a-t-il notamment apporté son appui au programme en faveur du travail décent au Brésil et proposé une action sur l'emploi des jeunes au Honduras.  La grossesse des adolescentes limitant les possibilités de travail décent, le FNUAP soutient l'initiative des ministres de la santé des pays andins visant la mise en œuvre du Plan andin pour la prévention de la grossesse des adolescentes.  Il est fondamental que soient mises en place des politiques et des programmes qui promeuvent et améliorent les possibilités d'insertion des femmes sur le marché du travail, a insisté Mme Suazo.  L'accès universel aux services de santé génésique, en particulier pour les adolescentes, est un aspect fondamental de la promotion de la femme et de la réduction de la pauvreté, a-t-elle souligné.  Elle a réitéré la volonté du FNUAP d'accroître ses efforts pour assurer le travail décent dans la région. 


M. PHILIPPE EGGER, Directeur adjoint du cabinet du Directeur général de l'Organisation internationale du travail, a relevé que l'Amérique latine et les Caraïbes traversent une période d'essor économique marquée par un malaise simultané au niveau micro-économique.  Ce malaise se traduit notamment par une certaine méfiance à l'égard des responsables politiques, ainsi que par des manifestations d'aspiration à la sécurité et à l'emploi décent.  En Amérique latine, la croissance ne joue pas son rôle de ciment social, a-t-il ajouté.  Un équilibre doit par conséquent être trouvé entre la création de richesses et le principe de l'égalité pour tous, a-t-il insisté.  C'est dans ce contexte que l'OIT a formulé son principe de «travail décent».  De nombreux programmes et politiques régionaux cherchent à promouvoir ce principe sur le terrain; cette démarche doit s'accompagner d'engagements forts de la part des gouvernements et des syndicats.  La lutte contre le travail des enfants bénéficie depuis quelque temps de ce type d'engagements, ce qui laisse entrevoir la possibilité d'une élimination de cette forme de travail forcé, s'est félicité M. Egger.  D'autres progrès ont été accomplis, notamment dans le domaine de l'intégration des femmes sur le marché du travail.  Les dernières statistiques de l'emploi montrent en outre une légère reprise de l'emploi formel, même si la moitié du marché du travail relève encore du secteur informel, marqué par l'absence de protection sociale et l'insécurité.


Toutes les actions en faveur du développement doivent être mesurées à l'aune de leurs effets en termes d'emploi, a affirmé M. Egger.  Les mesures les plus urgentes sont le développement de partenariats privé-public, la formation des jeunes et l'amélioration de la productivité des petites entreprises, a-t-il poursuivi.  Il a fait observer que les réformes introduites au Chili dans les années 1990 n'ont pas abouti à une protection sociale généralisée et que, dans ce contexte, le rôle de l'État reste indispensable.  Il existe par ailleurs un accord entre le Programme des Nations Unies pour le développement et d'autres institutions sur le principe d'un revenu minimal universel au niveau du continent: les mesures à prendre pour garantir des salaires décents sont connues, elles sont possibles et politiquement nécessaires, a affirmé M. Egger, concluant qu'il est tout à fait possible d'agir concrètement pour faire aboutir le principe du travail décent.


M. NILS KASTBERG, Directeur régional du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) pour l'Amérique latine et les Caraïbes, a souligné que le concept de travail décent revêt une importance fondamentale pour l'UNICEF.  L'élimination du travail des enfants est au centre des activités de l'UNICEF, a-t-il ajouté.  Dans ce contexte, la promotion d'un travail décent est fondamentale de par les possibilités qu'elle recèle pour les familles les plus pauvres de la région.  En effet, le plein appui aux programmes de promotion du travail décent pourrait permettre à ces familles de vivre sur la base des salaires qu'elles perçoivent, a insisté M. Kastberg.  Ce n'est actuellement pas le cas et souvent, les enfants sont obligés de travailler pour apporter un complément de revenu aux parents.  L'UNICEF est donc résolu à mener des activités dans ce domaine en Amérique latine.  Le Fonds s'efforce de favoriser la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement en général, a assuré M. Kastberg.


Questions et commentaires de membres du Conseil


La délégation de l'Union européenne a réaffirmé que les mesures de promotion d'un travail décent doivent être intégrées aux stratégies de réduction de la pauvreté adoptées par les pays.  L'Union européenne encourage et appuie la mise en œuvre au plan mondial des conventions et normes de l'Organisation internationale du travail et estime qu'une évaluation permanente des efforts de promotion de l'emploi décent est fondamentale.  Son représentant a voulu savoir si une telle évaluation avait été faite en Amérique latine, et s'il était possible de tirer, à partir des expériences sur le terrain, des «bonnes pratiques» exportables dans d'autres régions.


Une délégation s'est demandé si les Nations Unies étaient vraiment en mesure d'exercer une influence sur la création d'emplois durables, un facteur qui, moins qu'une variable, est la conséquence d'autres mesures, a-t-il estimé. 


Plusieurs délégations ont souligné l'importance de promouvoir à la fois le droit au travail, l'emploi, la protection sociale et le dialogue social.  Il faut accroître la solidarité et la protection, en particulier en faveur des catégories vulnérables de la population, comme les femmes, les migrants, les autochtones, les jeunes venant de contextes familiaux difficiles et les personnes handicapées.  Comment les panélistes ont-ils réfléchi à l'accès au travail décent pour ces catégories de la population, a demandé une participante ?  Une intervenante a à cet égard fait observer que l'exclusion entraîne vulnérabilité sociale et agressivité latente.  Il s'agit d'un terreau qui nourrit la violence et entraîne la formation de bandes organisées comme les maras.  Il faut s'intéresser aussi à ces questions lorsqu'on aborde la question de l'accès à un travail décent, a-t-elle insisté.


Il faut reconnaître que la croissance économique en tant que telle ne suffit pas, a fait observer une délégation.  Il faut la compléter par des politiques publiques.  Est-ce que les organisations représentées ici travaillent sur ces questions en collaboration avec la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement, a-t-elle demandé ?  Une autre intervenante a pour sa part fait observer que le travail décent est une notion qui entre en contradiction avec l'accumulation permanente de richesses.  Il faut se poser des questions à ce sujet et comprendre les conséquences des politiques néolibérales sur les conditions de travail, sur l'environnement et d'autres domaines, a-t-elle souligné.


Un représentant a fait remarquer que la réalisation des objectifs de développement dépend non seulement des décisions politiques, mais aussi des moyens mis à disposition.  Un autre facteur réside dans l'action des institutions financières internationales, qui devraient être encouragées à prendre des mesures dans le domaine du microcrédit.  La «théorie du ruissellement» qui portait ces institutions à favoriser les grandes entreprises n'a jamais donné les résultats escomptés, a rappelé une délégation, il convient donc de changer d'orientation pour parvenir enfin à créer des emplois.  Le représentant a donné des exemples de microprojets de développement au Honduras.  A en outre été soulevé la question de la comptabilisation des transferts d'argent opérés par les travailleurs migrants pour leurs familles dans l'aide officielle au développement.


Une délégation a voulu savoir quels programmes ont été appliqués et comment les indicateurs sont utilisés pour l'évaluation de ces programmes.  Une autre a présenté quelques «bonnes pratiques» en matière de partenariats sociaux autour du développement en général et du développement humain en particulier, estimant que ces pratiques peuvent être appliquées dans de nombreux pays pour le traitement, par exemple, des problèmes migratoires.  Dans ce contexte, les normes de l'OIT sont d'une importance primordiale.


Le travail décent dans son acception originelle devrait être en mesure de donner un visage humain à la tendance à la globalisation des marchés, a fait observer un intervenant.  Cette notion peut permettre d'améliorer les synergies entre la création d'emploi, la promotion du social, les normes du droit des travailleurs et le dialogue social, a-t-il estimé.


Plusieurs intervenants ont insisté sur l'importance d'aborder la question de la cohérence des politiques mises en œuvre au niveau national.  Un intervenant a mis en évidence la nécessité de promouvoir la responsabilité sociale des entreprises.  Il faudrait pouvoir compter sur un environnement propice, et les gouvernements ont un rôle vital à jouer à cet égard.  Le représentant a par ailleurs regretté que les barrières commerciales en place empêchent les pays de la région d'utiliser les échanges comme moyen de croissance et de création d'emplois productifs.


Une participante, soulignant le rôle des institutions financières dans la création d'emploi et de travail décent, notamment la Banque interaméricaine de développement et la Banque mondiale, a demandé comment d'autres organisations internationales pourraient être associées aux efforts pour un travail décent.


Un représentant a fait observer que la création de l'emploi participe au renforcement du doit au développement, tandis qu'un autre s'enquerrait des possibilités de juguler les tendances négatives en matière de parité hommes-femmes et de participation des jeunes au monde du travail.


Une délégation a observé que l'on fait état d'une meilleure convergence quant aux effets de la croissance, mais que des problèmes demeurent en particulier en ce qui concerne l'économie informelle, le chômage des jeunes et l'appartenance à des bandes criminelles.  Le trafic des drogues met en jeu des sommes énormes à l'échelle continentale.  Dans ces conditions, que fait-on pour lutter contre cette économie parallèle?


La course aux parts de marché et la concurrence commerciale font de la régression sociale un véritable outil de compétitivité, a déploré une dernière délégation.


Réponses des panélistes


M. EGGER, de l'OIT, a expliqué qu'à l'instar de toutes les organisations des Nations Unies, l'OIT procède à l'évaluation de son travail.  L'important n'est pas de savoir si l'OIT est tenue de suivre cette politique d'évaluation, mais de voir ce qu'il propose concrètement, de s'intéresser aux programmes spécifiques qu'il propose pour donner suite à l'évaluation.  D'autre part, M. Egger a rappelé que la contribution financière de l'ONU est relativement modeste par rapport à l'aide publique au développement et que, par conséquent, la part d'une institution spécialisée comme l'OIT est encore plus réduite.  Une fois encore, il est toutefois plus important de savoir si les programmes mis en œuvre sont efficaces.


M. Egger a ensuite fait observer qu'en dépit des améliorations générées par les politiques économiques mises en œuvre ces 15 dernières années, des problèmes en matière d'emploi demeurent.  L'OIT a à cet égard essayé de faire comprendre aux décideurs de politiques économiques de ne pas s'intéresser uniquement aux indicateurs économiques, mais également aux conséquences de leurs décisions sur le marché de l'emploi.  S'agissant du travail des jeunes, de nombreux intervenants ont fait observer que la situation est critique et qu'elle engendre des conséquences négatives, a-t-il relevé.  Il a à cet égard rappelé qu'il importe de donner la possibilité aux jeunes de pouvoir suivre un enseignement de base de qualité qui augmentera leurs chances de trouver un emploi digne de ce nom.  Si l'économie offre peu d'emploi et que le système d'éducation n'est offert qu'à un groupe restreint qui en a les moyens, il y a un vrai problème. 


Parmi les mesures permettant de créer des emplois figurent notamment des politiques d'aide et de crédit aux petites entreprises.  Ces mesures doivent être accompagnées d'une plus grande information et ainsi assurer une meilleure connaissance de ces programmes et permettre à toutes les petites entreprises d'en profiter.  Il importe en outre de relier le travail aux mesures de conservation environnementale et à la protection sociale, a-t-il poursuivi.  À cet égard et à titre d'exemple, il a fait observer que le Brésil connaît des cas de travail forcé dans le cadre du programme d'expansion de la culture de canne à sucre pour la production d'éthanol.  L'expansion de cette culture doit être bien réfléchie.  Le dialogue social n'a jamais été une garantie de succès des réformes, a-t-il poursuivi, mais dans la discussion du financement de la politique sociale, il est utile de pouvoir, d'une part, compter sur les conseils de la Banque mondiale, et, d'autre part, d'engager un dialogue soutenu avec représentants des entrepreneurs et des travailleurs.  Pour conclure, s'intéressant à l'économie informelle, il a souligné que le nombre élevé d'emplois informels dans la région s'explique par l'impossibilité pour de nombreux travailleurs de décrocher un emploi dans le secteur formel.  Pour s'attaquer à ce problème, il faut intervenir en dehors du secteur informel et créer des emplois productifs dans le secteur formel.  Il faut aussi promouvoir la productivité des entreprises du secteur informel pour leur permettre d'accéder au secteur formel.


MME SUAZO, du FNUAP, a répondu aux questions des membres du Conseil en rappelant que le mandat de création d'emplois décents ressortit principalement à l'OIT; le Fonds, lui, s'intéresse dans ce contexte aux migrations, un phénomène qui concerne de plus en plus de femmes.  Les conditions de leur émigration doivent faire l'objet d'analyses plus détaillées, a convenu Mme Suazo.  Le FNUAP travaille dans la sensibilisation au respect de la condition féminine dans tous les aspects de la vie sociale, au travail mais aussi dans l'éducation et la santé.  Le Fonds estime également que l'absence de structure familiale, l'oisiveté des jeunes sont source d'exclusion et d'agressivité.  Le problème est cependant plus vaste, puisque même des jeunes formés ne trouvent pas de travail.  Mme Suazo s'est dite d'accord avec les commentaires sur le microcrédit, ajoutant que ces crédits devraient être orientés vers les femmes.  De même, il faut parvenir à concilier les «espaces productif et reproductif», afin de garantir la dignité de la position de la femme dans la société.  Le FNUAP soutient directement l'action de l'OIT dans le cadre de ses travaux visant à la création d'emplois dignes. 


MME GRYNSPAN, du PNUD, a notamment estimé qu'une partie importante du problème en matière d'emploi tient au fait que l'emploi n'est souvent pas la première priorité des politiques macroéconomiques.  Rendre visibles les effets sociaux des politiques mises en œuvre et l'obligation de rendre des comptes sont des facteurs vitaux de l'action pour l'emploi.  Des indices doivent être mis au point pour rendre compte de cette visibilité.  L'indice de compétitivité sociale adopté au Mexique est tout à fait représentatif à cet égard, il englobe des critères tels que l'absence de travail des enfants.  Les indicateurs développés avec l'OIT ne tiennent pas seulement compte de la croissance, mais aussi de la création d'emploi.  La forte croissance en Amérique latine depuis quatre ans a certes créé des emplois, mais de mauvaise qualité, a expliqué l'experte, relevant que plus de 50% de la population active est dépourvue de protection sociale, et que 70% des emplois créés jusqu'en 2003 étaient dans le secteur informel.  Cette tendance a évolué depuis quatre ans dans un sens positif.  On déplore cependant toujours une forte discrimination envers les femmes et les jeunes, a ajouté Mme Grynspan.  Un autre problème propre à la région est l'abandon scolaire de plus de 50% dans l'enseignement secondaire.  Des plans d'action ont été engagés mais dont les résultats sont encore insuffisants, comme en témoigne le nombre de jeunes formés mais toujours sans emploi.  Il faut imaginer des systèmes d'intervention autres que la répression pour «récupérer» les jeunes en flottement et les réintégrer au système scolaire.  Une action sur la gouvernance locale a déjà permis de réduire la délinquance dans certaines villes de Colombie, action qui a permis de tirer des enseignements fructueux. 


Le PNUD collabore par ailleurs avec le Fonds de développement des Nations Unies pour la femme (UNIFEM) dans le domaine de la promotion des femmes sur le marché de l'emploi.  Le problème réside non seulement dans le recrutement, mais dans la discrimination salariale: plus les femmes sont formées, plus l'écart de salaire avec leurs homologues masculins est fort, a relevé Mme Grynspan.  Au plan des politiques migratoires, le PNUD collabore avec l'UNICEF pour en évaluer l'impact sur les enfants et pour quantifier l'ampleur de la féminisation actuelle de l'émigration.  L'Amérique latine est aussi particulièrement vulnérable aux catastrophes naturelles, ce facteur environnemental ayant des implications sur l'extrême volatilité sociale et économique qui se manifeste par une dégradation constante des conditions d'emploi.  Mme Grynspan a enfin fait état d'expériences très fructueuses en matière de dialogue social qui ont permis des changements législatifs importants.


M. KASTBERG, de l'UNICEF, a souligné que la question de l'emploi décent exige une réponse globale intégrale.  L'ONU apporte sa contribution en la matière, par le biais des différents fonds et organisations présentes ici.  Il a fait observer que dans le cadre de son travail, l'UNICEF doit faire face au paradoxe suivant qui existe dans la région: d'un côté il y a le travail des enfants et de l'autre le chômage des jeunes.  Les deux sont assez liés, a-t-il fait observer, car si les enfants travaillent au lieu d'être scolarisés, ils auront plus de peine à obtenir un travail par la suite.  M. Kastberg a à cet égard souligné que les mesures à prendre pour enrayer ces phénomènes ne doivent pas se cantonner à l'enfance.  Il faut intervenir avant, a-t-il insisté, soulignant que les grossesses de femmes victimes de violence ou les grossesses non désirées augurent déjà un mauvais départ.  Il faut cibler ces populations.  En outre, la malnutrition chronique est également un problème en Amérique latine.  D'une manière générale, les équipes régionales essaient de rendre visibles les différents problèmes, afin que les gouvernements de la région s'attachent à les résoudre, a-t-il expliqué.  Il a ainsi souligné que les trois principaux groupes souffrant d'exclusion sont les peuples autochtones, les afro-descendants et les personnes handicapées.  Il y a d'autres problèmes, et notamment celui des migrations.  M. Kastberg a à cet égard indiqué qu'au Costa Rica et en Argentine, on ne demande pas aux enfants s’ils sont fils ou filles d'émigrés.  Tous les enfants bénéficient des services nécessaires sans que les parents aient à justifier leur statut.  Au regard de certaines tendances qui ont cours en Europe en la matière, la région d'Amérique latine offre un exemple, a-t-il souligné.


Pour conclure, le Directeur régional de l'UNICEF a souligné l'importance pour le Conseil économique et social de prendre en compte les nouveaux problèmes auxquels sont confrontés les pays à revenu intermédiaire, qui sont souvent délaissés.  Il a rappelé qu'à l'origine l'Organisation internationale du travail avait regretté que l'emploi ne soit pas un indicateur des objectifs du Millénaire pour le développement, en soulignant que sans travail décent, ces derniers ne peuvent être réalisés.  Le Conseil économique et social a su s'en rendre compte.  Il doit maintenant relever les défis qui sont portés à sa connaissance.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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