CS/9192

CONSEIL DE SÉCURITÉ: LES PRÉSIDENTS ET PROCUREURS DES TRIBUNAUX POUR L’EX-YOUGOSLAVIE ET POUR LE RWANDA IDENTIFIENT LES PROBLÈMES SUSCEPTIBLES DE RETARDER L’ACHÈVEMENT DE LEURS TRAVAUX

10/12/2007
Conseil de sécuritéCS/9192
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Conseil de sécurité                                        

5796e séance – matin                                       


CONSEIL DE SÉCURITÉ: LES PRÉSIDENTS ET PROCUREURS DES TRIBUNAUX POUR L’EX-YOUGOSLAVIE ET POUR LE RWANDA IDENTIFIENT LES PROBLÈMES SUSCEPTIBLES DE RETARDER L’ACHÈVEMENT DE LEURS TRAVAUX


Le Président et le Procureur du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et leurs homologues du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) ont présenté aujourd’hui au Conseil de sécurité leur rapport semestriel*.  Les quatre magistrats ont fait état des progrès enregistrés par leur juridiction respective mais aussi des problèmes qui pourraient compromettre l’achèvement des travaux d’ici à 2010, tels que la capacité des juridictions nationales à connaître des affaires renvoyées par les deux Tribunaux, le manque de personnel et l’arrestation des fugitifs.


« Je quitterai mes fonctions avec un sentiment de déception face aux engagements qui n’ont pas été tenus et à l’héritage que l’on risque de léguer si les nombreuses victimes n’obtiennent pas justice », a affirmé la Procureure du TPIY, Mme Carla Del Ponte, en parlant des quatre accusés toujours en fuite dont Ratko Mladic et Radovan Karadzic.  La Procureure a souhaité au Conseil que son successeur, Serge Brammertz actuellement à la tête de la Commission d’enquête indépendante sur l’assassinat de l’ancien Premier Ministre libanais, Rafik Hariri, ne tienne pas les mêmes propos sur « les graves insuffisances structurelles du Gouvernement serbe et sa volonté de faire obstacle à une coopération avec le Tribunal ».


Mladic et Karadzic ne peuvent pas être jugés à Belgrade où ils sont considérés comme des héros, a-t-elle prévenu, en plaçant le Conseil devant ses responsabilités.  Son homologue du TPIR a exprimé les mêmes craintes face aux 14 fugitifs que le Tribunal recherche toujours.  Le Procureur, Hassan Jallow, s’est attardé en particulier sur le cas de Félicien Kabuga qui a trouvé refuge au Kenya.  Les membres du Conseil ont rappelé aux États Membres, en particulier la Serbie, la République démocratique du Congo (RDC) et le Kenya, à leurs obligations+ morale et juridique d’arrêter et de transférer les personnes accusées aux Tribunaux.


Devant le risque que les deux Tribunaux ne puissent achever leurs travaux d’ici à 2010, les représentants de la France et de la Belgique ont souligné que le Conseil n’a fixé cette date butoir qu’à titre indicatif.  Le Conseil doit se montrer souple et garder à l’esprit la contribution importante des Tribunaux à la lutte contre l’impunité et à la paix et à la stabilité, ont dit en écho de nombreuses délégations alors que celle de la Fédération de Russie a, au contraire, soutenu que l’absence de certains accusés ne justifie pas une prorogation illimitée du mandat des Tribunaux. 


Les Tribunaux doivent se montrer plus audacieux et renvoyer davantage d’affaires aux juridictions nationales, a encouragé le représentant de la Fédération de Russie, appuyé par celui de la Serbie qui s’est dit convaincu de l’arrestation prochaine des quatre derniers fugitifs serbes.  Le représentant de la Serbie, qui après celui du Rwanda, a donné le détail des mesures prises pour incorporer les normes utilisées par les Tribunaux dans son système judiciaire, a en effet estimé qu’une des conditions préalables au succès de la stratégie d’achèvement est la faculté des juridictions nationales à connaître des affaires renvoyées par les Tribunaux.  Son homologue du Rwanda a aussi demandé que les personnes condamnées purgent leur peine là où ils ont commis leurs crimes.


La question du renforcement des juridictions nationales a en effet été placée au cœur des questions liées à l’héritage des Tribunaux, à savoir les « fonctions résiduelles ».  Les Présidents des deux Tribunaux ont attiré l’attention du Conseil sur le rapport final qu’ils ont remis au Bureau des affaires juridiques, en septembre dernier.  Des questions telles que le jugement des fugitifs, les appels, l’application des peines et le dépôt des archives après la date butoir de 2010 feront l’objet demain, de la réunion du Groupe de travail du Conseil, a annoncé le Président du Conseil pour le mois de décembre.  À ce propos, la représentante de la Croatie s’est déclarée surprise qu’aucun appel n’ait été interjeté après l’acquittement par le TPIY de Miroslav Radic, accusé avec trois personnes pour son rôle dans l’exécution de près de 200 civils à Vukovar en 1991.


La réflexion sur les fonctions résiduelles doit inclure les États concernés, les deux Tribunaux et la société civile, et à long terme tous les États Membres de l’ONU, ont estimé plusieurs délégations.  La stratégie d’achèvement du TPIR doit aussi impliquer le transfert de tous les documents au Rwanda, a estimé le représentant du Rwanda, en soulignant l’importance de ces témoignages de l’histoire récente du pays pour la réconciliation nationale et l’éducation civique.


Les Présidents du TPIY et du TPIR ont aussi soulevé le problème des départs du personnel des deux Tribunaux.  M. Fausto Pocar du TPIY a fait part au Conseil du mécontentement des juges concernant les retards pris dans la réalisation de l’étude sur les différentes conceptions possibles de leur régime de retraite.  Avec son homologue du TPIR, M. Dennis Byron, il a plaidé pour que le Conseil appuie les efforts visant à mettre en place des mesures suffisamment incitatives pour garantir que les meilleurs éléments restent jusqu’à la fin des travaux.  M. Pocar a demandé au Conseil de nommer temporairement des juges ad litem supplémentaires. 


*S/2007/663 et S/2007/676


TRIBUNAL PÉNAL INTERNATIONAL CHARGÉ DE JUGER LES PERSONNES ACCUSÉES DE VIOLATIONS GRAVES DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE COMMISES SUR LE TERRITOIRE DE L’EX-YOUGOSLAVIE DEPUIS 1991; TRIBUNAL PÉNAL INTERNATIONAL CHARGÉ DE JUGER LES PERSONNES ACCUSÉES D’ACTES DE GÉNOCIDE OU D’AUTRES VIOLATIONS GRAVES DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE COMMIS SUR LE TERRITOIRE DU RWANDA ET LES CITOYENS RWANDAIS ACCUSÉS DE TELS ACTES OU VIOLATIONS COMMIS SUR LE TERRITOIRE D’ÉTATS VOISINS ENTRE LE 1ER JANVIER ET LE 31 DÉCEMBRE 1994


Exposés


M. FAUSTO POCAR, Président du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), a d’emblée souligné que le Tribunal laissera aux institutions pénales internationales actuelles et futures un héritage incroyablement riche, que ce soit en droit matériel, procédural ou sur le plan institutionnel.  Les procès en première instance et en appel de 111 des 161 personnes mises en accusation par le Tribunal sont terminés.  Sur les 50 accusés dont les affaires ne sont pas encore closes, quatre sont toujours en fuite, huit en sont actuellement au stade du procès en appel, 27 au stade du procès en première instance et 11 au stade de la mise en état.  Deux procédures pour outrage à magistrat ont par ailleurs été engagées.  Ces chiffres dépassent toutes nos espérances, s’est réjoui le Président, en indiquant que le Tribunal a pu commencer le procès de Vojislav Seselj, le 7 novembre 2007.


La Chambre d’appel, s’est-il encore réjoui, a aussi fait preuve d’une célérité redoublée.  En 2007, elle a rendu 235 décisions écrites et 15 arrêts, y compris quatre décisions sur des demandes en révision et des demandes de renvoi et deux arrêts au fond supplémentaire du TPIR.  Le Tribunal a continué de réfléchir à de nouveaux moyens de rationaliser encore les procédures en première instance et en appel.  Le 12 juillet 2007, deux autres modifications du Règlement de procédure et de preuve ont été adoptées, qui permettent de recourir plus souvent à la déposition par vidéoconférence et de fixer des dates butoirs pour le dépôt, par les accusés qui ne sont pas défendus par un conseil, de requêtes au stade de la mise en état.


À l’exception des procès des deux accusés appréhendés récemment, le Tribunal pense être en mesure d’achever tous ses procès, y compris les procès Liman Lukic et Sredoje Lukic, d’ici à la fin 2009.  Les procès des deux accusés nouvellement arrivés à La Haye devraient se terminer au début de l’année 2010 mais tous les procès en appel pourront être conclus d’ici à 2011, a assuré le Président.  Le maintien en fonction des juges expérimentés est donc indispensable à la réalisation des objectifs de la stratégie d’achèvement.  À cet égard, il a fait part du mécontentement des juges concernant les retards pris dans la réalisation de l’étude sur les différentes conceptions possibles de leur régime de retraite.  Il a aussi indiqué que le nombre de fonctionnaires, qui ont quitté le Tribunal pour un emploi plus sûr au sein d’une autre organisation, a augmenté.  Il a donc prié le Conseil et les États Membres d’appuyer le Tribunal dans ses efforts pour mettre en place des mesures suffisamment incitatives afin de garantir, dans la mesure du possible, que ses meilleurs éléments resteront à son service jusqu’à ce qu’il ait achevé ses travaux.  Il a aussi souligné l’importance du travail accompli par les juges ad litem du Tribunal.


Abordant la question du partenariat avec les juridictions nationales, le Président a indiqué que le renvoi des accusés de rang intermédiaire et subalterne devant ces juridictions a été de plus en plus fréquent dans le cadre de la stratégie d’achèvement des travaux du Tribunal.  Treize accusés ont été jugés par des juridictions nationales.  Dix ont été déférés devant la chambre spéciale chargée de juger les crimes de guerre en Bosnie-Herzégovine, deux accusés ont été renvoyés devant les juridictions nationales en Croatie et un autre en Serbie.  Il est impératif, a souligné le Président, que la communauté internationale continue d’aider au renforcement des capacités judiciaires dans la région.  Il reste un long chemin à parcourir avant que les juridictions ne soient en mesure de reprendre le flambeau du Tribunal. 


Venant à la question de la coopération des États Membres, M. Pocar a reconnu que des progrès ont été accomplis.  L’arrestation de deux fugitifs Zdravko Tolimir et Vlastimir Dordevic, et leur transfert à la Haye est sans conteste un signe encourageant.  Mais les États n’ont toujours pas pu arrêter et transférer les quatre accusés de haut rang encore en fuite que sont Radovan Karadzic, Ratko Mladic, Stojan Zulpljanin et Goran Hadzic.  Le Tribunal ne saurait fermer ses portes avant que les accusés encore en fuite ne soient arrêtés et jugés, a prévenu le Président.


Concernant les fonctions résiduelles, M. Pocar a attiré l’attention du Conseil sur le rapport définitif que les deux Tribunaux ont remis en septembre 2007.  Il a averti que le fait que quatre accusés soient encore en fuite entraînera immanquablement d’autres retards.  Si ces accusés sont arrêtés aujourd’hui, seuls certains pourront être jugés dans le cadre des procès déjà en cours.  Mais si leur arrestation tarde encore, même ceux-là devront être jugés séparément et il faudra encore revoir les dates limites actuellement prévues pour l’achèvement des travaux.  Après être revenu aux conditions qui permettraient de limiter autant que possible l’incidence des arrestations tardives sur les échéances fixées et de maintenir le même niveau de productivité pendant la majeure partie de 2008 et 2009, le Président a conclu en disant que le succès de la mission du Tribunal réside surtout dans le fait d’avoir créé un précédent précieux qui fait respecter le droit international humanitaire et d’avoir contribué à rétablir la paix et la stabilité dans les pays de l’ex-Yougoslavie. 


Le Tribunal a clairement démontré que la justice internationale peut être efficace sans sacrifier les garanties de procédure.  Au cours des deux dernières années, nous avons sans cesse recherché des solutions novatrices qui nous ont permis de réaliser les objectifs fixés ainsi que les prévisions de la stratégie d’achèvement, a dit le Président en soulignant qu’il appartient au Conseil de réaffirmer aujourd’hui son soutien à la mission du Tribunal et à son plein succès dans l’accomplissement de ses travaux.


M. DENNIS BYRON, Président du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), a présenté le deuxième rapport annuel sur la stratégie d’achèvement de ce Tribunal, pour la période allant de juin 2007 à aujourd’hui.  Il a indiqué qu’en août, le Tribunal avait, pour la première fois, poursuivi un témoin pour faux témoignage.  Pendant la période examinée, a-t-il ajouté, 18 procès concernant des accusés multiples étaient en cours et le procès d’un seul accusé avait débuté.  En résumé, a-t-il fait remarquer, sur les 91 mises en accusation, 41 ont fait l’objet de procédures qui ont abouti, 36 sont encore à l’examen et 14 accusés sont toujours en fuite.  Le Président du TPIR a assuré que les procès dont les jugements sont en phase de rédaction seront achevés en 2008.  Il a également affirmé que la phase de preuves d’accusés dont le procès est en cours devrait être complétée en 2008, à l’exception de deux procès.  Il a aussi déclaré que les procès des accusés en détention devraient avoir lieu en 2008, alors que les quatre chambres seront au maximum de leurs capacités d’utilisation.  Il a toutefois averti que si de nouveaux cas se présentaient, par exemple à la suite de l’arrestation des 14 fugitifs ou de nouvelles mises en accusations par exemple, il serait nécessaire de prendre des mesures spéciales.


S’agissant de la Chambre d’appel, M. Byron a noté que deux jugements, relatifs à quatre accusés, avaient été rendus au cours de la période examinée.  Cela porte à 24 le total de personnes dont les jugements ont été finalisés en appel, a-t-il fait remarquer.  Par ailleurs, il a estimé qu’il n’était pas trop tôt pour faire des projets concernant l’achèvement des fonctions d’appel du Tribunal.  Il a rappelé que, selon les estimations, le nombre d’appels devrait augmenter au cours de l’année 2008.  Ainsi, il a argué que, sans soutien suffisant, la Chambre d’appel n’aurait pas les capacités suffisantes pour terminer la charge de travail prévue d’ici à décembre 2010.  Il a souligné la nécessité d’examiner cette question de façon urgente, et même dès juin 2008.


Le Président du TPIR a fait remarquer que l’efficacité du Tribunal dépendait de sa capacité à maintenir son personnel.  Rappelant ses efforts pour convaincre le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale de prendre des dispositions spéciales dans ce sens, il a estimé que la crise du personnel se développerait à mesure que l’on approcherait de la date butoir, à savoir décembre 2008.  Il a invité le Conseil de sécurité à autoriser le Secrétaire général à prendre toutes les mesures raisonnables pour assurer que le Tribunal puisse maintenir son personnel, dans le but de réaliser sa stratégie d’achèvement.


M. Byron a aussi salué la coopération et l’assistance des États Membres, éléments essentiels selon lui pour permettre au Tribunal de s’acquitter de sa mission.  Deux des fugitifs arrêtés au cours de la période examinée, un en France et un en Allemagne, attendent la finalisation du processus judiciaire pour leur transfert au Tribunal.  Mais il reste encore 14 fugitifs, a-t-il regretté en appelant les États Membres à garantir leur arrestation et leur transfert sans délai.


Enfin, M. Byron a estimé que l’influence du travail du Tribunal allait déjà au-delà du nombre de personnes poursuivies et des jugements rendus.  Une des contributions fondamentales du Tribunal c’est d’amener la justice au peuple du Rwanda et à l’ensemble de la région des Grands Lacs, a-t-il affirmé.  Il a déclaré qu’il n’y aurait pas de paix durable sans une justice internationale crédible, qui est fondamentale pour la réconciliation.


Mme CARLA DEL PONTE, Procureure du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), a souligné que la coopération des États Membres demeure essentielle pour le travail du Bureau du Procureur et pour permettre au Tribunal de mener à bien sa mission.  Malgré les engagements, a-t-elle accusé, la Serbie n’a pris aucune mesure pour arrêter et transférer les fugitifs.  Quatre accusés sont toujours en fuite et la dernière visite à Belgrade a considérablement modéré l’optimisme qui prévalait, il y a six mois, a dit la Procureure.  Les accusés sont toujours en fuite, la volonté de les arrêter fait largement défaut et les mesures concrètes prises à cet effet sont trop peu nombreuses.


Depuis juin dernier, si les communications se sont améliorées, l’encadrement et la coordination des deux services de sécurité engagés dans la traque des fugitifs restent problématiques.  Leur supervision semble présenter de graves lacunes et même les informations spécifiques transmises par le Bureau du Procureur ne sont pas systématiquement vérifiées ni traitées.  Elles restent souvent sans suite, a encore regretté la Procureure.  Craignant les répercussions politiques, les autorités serbes ont refusé de prendre la moindre mesure d’information, telle qu’une perquisition du domicile d’un proche des fugitifs.  Le service de renseignement civil rechigne à coopérer plus étroitement avec le service de renseignement militaire.  Aujourd’hui, les autorités serbes ne disposent toujours pas d’un plan pour rechercher les fugitifs.  Aucune piste sérieuse ne se dessine et rien n’indique que de réels efforts ont été entrepris pour arrêter les accusés.


Ce n’est un secret pour personne, s’est avancée la Procureure, que Radovan Karadzic et Ratko Mladic ont été vus à plusieurs reprises en Serbie.  Elle a dit savoir de source sûre que Radovan Karadzic a vécu à Belgrade sous son vrai nom jusqu’en 2004.  L’incapacité de la Serbie d’appréhender les principaux responsables des crimes les plus odieux s’explique par de graves insuffisances structurelles et par une volonté de faire obstacle à une coopération avec le Tribunal, a-t-elle insisté.  Alors que les autorités serbes savaient précisément où Ratko Mladic se trouvait jusqu’au printemps 2006, elles ont néanmoins choisi de ne pas l’arrêter.


La Procureure a donc invité l’Union européenne et la Commission européenne à s’en tenir à leur position de principe en continuant à subordonner l’ouverture des négociations en vue de l’adhésion de la Serbie à une coopération pleine et entière avec le Tribunal international.  Quand je dis « coopération pleine et entière », a-t-elle précisé, je veux dire que Ratko Mladic doit être appréhendé et transféré.  Je quitterai, a-t-elle conclu, mes fonctions en éprouvant un sentiment de déception face aux engagements non tenus et à l’héritage que l’on risque de léguer si de nombreuses victimes n’obtiennent pas justice.  Si j’ai accepté que mon mandat soit prolongé, c’est pour terminer une tâche inachevée: arrêter Ratko Mladic et Radovan Karadzic.  La Procureure a donc souhaité au Conseil que son successeur ne vienne pas tenir les mêmes propos sur les questions de la coopération de la Serbie et de l’arrestation des fugitifs.


M. HASSAN B. JALLOW, Procureur du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), a rappelé que la stratégie révisée d’achèvement soumise le 16 novembre 2007, donnait de nombreux détails sur les progrès réalisés à ce stade par le TPIR pour s’acquitter de son mandat.  Il a précisé que, depuis cette date, deux cas supplémentaires avaient abouti à des jugements les 16 novembre et 7 décembre derniers.  Cela porte le total d’accusés dont les procès ont abouti à 35, a-t-il ajouté.  Il a également noté que six accusés attendaient leur procès à Arusha alors que 23 procès étaient actuellement en cours.  Grâce à la coopération des États Membres, s’est-il réjoui, le nombre des fugitifs est passé de 18 à 14.


L’année à venir est d’une importance critique pour la stratégie d’achèvement du TPIR, a-t-il souligné.  La question cruciale, a-t-il poursuivi, est maintenant de savoir si le Tribunal serait en mesure de conclure ses activités de procès d’ici à la fin de 2008 comme le prévoit la stratégie d’achèvement.  M. Jallow a noté que l’engagement du Tribunal à parvenir à cet objectif était intact.  Il a noté que seul le procès de Karemera, qui concerne plusieurs accusés, pourrait continuer en 2009.  Mis à part cette exception, il a estimé que tous les autres procès devraient prendre fin en décembre 2008.  Toutefois, il a fait valoir que si de nouvelles arrestations étaient faites en 2008, le Conseil devrait décider s’il souhaite que le Tribunal poursuive son travail ou recherche plutôt d’autres solutions.  Si sa charge de travail augmentait en 2008, le TPIR devrait soumettre des recommandations spécifiques au Conseil de sécurité, a indiqué M. Jallow.


Le Procureur du TPIR a aussi souligné les efforts entrepris pour traquer les fugitifs et qui ont permis de procéder à quatre arrestations depuis le dernier rapport.  INTERPOL a offert sa coopération pour contribuer à l’arrestation de ces fugitifs et a conclu un accord avec le Tribunal sur les mesures de coopération envisagées, a-t-il indiqué.  Il a aussi noté que des discussions étaient en cours avec le Secrétariat des Nations Unies, la MONUC, et le Gouvernement de la République démocratique du Congo concernant les fugitifs qui seraient dans ce pays.  Par ailleurs, il a souligné que le Rwanda continuait de coopérer avec le Tribunal et que les programmes pour le renforcement des capacités dans le secteur judiciaire continuaient à être mis en œuvre. 


Enfin, M. Jallow s’est félicité que de nombreux pays aient mis en place des bureaux spéciaux afin de traiter des crimes de génocide ou des crimes contre l’humanité sur leur territoire.  Il a estimé que cela pouvait contribuer considérablement à la campagne mondiale contre ces violations.


Déclarations


Mme CAROLYN L. WILLSON (États-Unis) s’est dit encouragée par le rythme actuel des procès et par la détermination des deux Tribunaux à achever les travaux dans les délais impartis.  Mais ces travaux ne seront pas terminés tant que le destin des fugitifs ne sera pas réglé, a prévenu la représentante.  Elle a demandé à tous les États Membres de coopérer pleinement avec les deux Tribunaux et, en particulier à la Serbie, qui doit prendre d’autres mesures pour honorer ses obligations d’arrêter et de transférer tous les fugitifs qui seraient encore sur son territoire.  La coopération régionale demeure essentielle, a-t-elle ajouté avant de se tourner vers la République démocratique du Congo (RDC) et le Kenya et de leur demander les mêmes efforts.  Elle a salué l’accord signé en novembre entre les Gouvernements congolais et rwandais sur le démantèlement des forces négatives qui opèrent toujours dans l’est de la RDC.  Elle a espéré que tout fugitif arrêté pendant cette campagne sera dûment transféré au Tribunal.  Il est impensable, a-t-elle insisté, que ces personnes échappent à la compétence du Tribunal.  La représentante a conclu en soulignant qu’il était impératif de renforcer les efforts visant à renforcer les capacités des juridictions nationales et a assuré que les Etats-Unis coopéreraient avec les Tribunaux pour régler les questions résiduelles.


Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a aussi souligné l’importance qu’il y a à arrêter et transférer tous les fugitifs.  Elle s’est clairement dite déçue par le manque de coopération de la Serbie qui est une « insulte » pour les victimes.  L’arrestation et le transfert des fugitifs sont une priorité pour tous et pas seulement dans la région.  Concernant la stratégie d’achèvement, elle a estimé qu’il faut reconnaître les efforts importants accomplis par le TPIY.  La représentante a prié le Tribunal de poursuivre ses efforts.  Elle s’est félicitée des travaux relatifs aux questions résiduelles et a appelé le Groupe du Conseil de sécurité à assurer des progrès en la matière.  Les choses doivent être claires, a-t-elle précisé.  Il n’est pas question de suggérer la fermeture automatique du Tribunal.  La communauté internationale doit appuyer les efforts pour que l’on puisse juger les premiers responsables des crimes relevant de la compétence du Tribunal.  Se tournant vers le TPIR, la représentante a jugé inquiétant qu’à ce jour, 14 accusés soient toujours en fuite.  C’est pourquoi, elle a appelé les États Membres à honorer leur obligation de coopérer avec le TPIR.  Nous attendons du Kenya, en particulier, qu’il coopère au plus tôt.  Elle s’est également dite préoccupée par le nombre d’accusés qui se trouvent encore en RDC.  Elle a exhorté le Gouvernement congolais à arrêter et à transférer ces accusés avec l’aide de la MONUC.


M. PETER BURIAN (Slovaquie) a salué les efforts entrepris par les deux Tribunaux pour respecter la date butoir concernant l’achèvement de leurs travaux.  Il s’est aussi félicité du renforcement de la coopération entre les deux Tribunaux et les autorités nationales concernées.  Il a également souligné que le nombre d’accru de renvois d’affaires aux juridictions compétentes constituaient un bon moyen de renforcer les capacités des tribunaux nationaux.  Pour la Slovaquie, a-t-il poursuivi, le TPIY et le TPIR doivent se concentrer sur les procès des accusés de haut rang.  Soulignant qu’il reste un certain nombre de fugitifs, il a estimé que cette situation était très grave et réitéré l’appel de sa délégation pour que les États Membres coopèrent rapidement dans la poursuite, l’arrestation et le transfert des personnes recherchées par les deux Tribunaux.  Tant que ces personnes ne seront pas traduites en justice, les deux Tribunaux n’auront pas réellement achevé leurs travaux et leur mission ne sera pas complète, a-t-il insisté.  Le représentant s’est particulièrement félicité des programmes de sensibilisation et de communication des deux Tribunaux.  Ces programmes sont une contribution importante à la réconciliation nationale.  C’est pourquoi, le représentant a souhaité que les deux Tribunaux accordent l’attention nécessaire à ces programmes de communication.  Avant de conclure, il a rendu hommage au travail de Mme Carla Del Ponte en tant que Procureure du TPIY.


M. LUIS ENRIQUE CHÁVEZ (Pérou) a estimé que parfois il faudrait que le Conseil revoie la situation pour déterminer sur ce qui peut vraiment être fait.  Les Tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda comptent sur la pleine coopération des États Membres, a-t-il souligné, tout en regrettant que des dirigeants de haut niveau soient encore en fuite.  Il n’est pas acceptable que l’impunité subsiste après la fin des travaux des deux Tribunaux et le Conseil doit tenir compte de ces faits quand il décidera de l’avenir de ces Tribunaux.  Il doit, a proposé le représentant, maintenir un mécanisme en place pour juger les fugitifs.  Le représentant a appuyé l’avis du Président du Tribunal pour le Rwanda sur une implication de la MONUC dans l’arrestation et le transfèrement des fugitifs.  Il a aussi appuyé l’avis des deux Tribunaux sur le renforcement des juridictions nationales qui, a-t-il prédit, aura des répercussions à long terme sur l’état de droit dans les pays concernés.  La communauté internationale doit fournir une aide en la matière, a-t-il dit avant d’appeler le Conseil de se saisir de la question de l’héritage des deux Tribunaux.  Dans cette réflexion, le Conseil doit impliquer les États concernés, les Tribunaux et la société civile, et à long terme, tous les États Membres de l’ONU au moment venu.  Le représentant a conclu en soulignant que le travail des deux Tribunaux risque d’être affecté par le départ d’un personnel compétent et expérimenté.  Il faut dûment répondre à ces préoccupations, a-t-il estimé.


M. NASSIR ABDULAZIZ AL-NASSER (Qatar) a noté les efforts entrepris par les deux Tribunaux pour progresser dans la mise en œuvre de leur stratégie respective d’achèvement.  Tout en reconnaissant la nécessité pour ces Tribunaux de s’acquitter de leur mission dans les délais déterminés par le Conseil de sécurité, il a souligné qu’il était nécessaire de trouver un équilibre entre le respect de ces délais et la mise en œuvre complète des mandats des tribunaux de manière à garantir un procès équitable pour tous.  Par ailleurs, il a mis en avant l’importance, pour le Conseil de sécurité et tous les États, de s’engager à arrêter et traduire en justice les accusés qui sont toujours en fuite.  Il a donc appelé les États Membres à remplir leurs obligations auprès des deux tribunaux, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité pertinentes en arrêtant ces fugitifs, et avant tout, Mladic, Karadzic et Kabuga, et à les transférer aux deux Tribunaux.  Alors qu’ils s’apprêtent à achever leur mandat, il faudrait mettre l’accent sur leurs accomplissements et l’héritage qu’ils laisseront à d’autres juridictions.  Il a estimé que les deux Tribunaux ne pouvaient pas compléter leur travail sans traduire en justice les accusés les plus importants.  Cela, a-t-il conclu, exige la coopération de tous les États concernés afin d’encourager le retour à la stabilité dans la région des Grands Lacs et dans les Balkans.


Nous sommes à la dernière étape d’un long parcours, a estimé M. ALFREDO SUESCUM (Panama).  Il a pris note de la collaboration des autorités serbes dans l’arrestation des fugitifs qui ont été transférés tout en les appelant à redoubler d’efforts pour capturer les quatre derniers fugitifs.  Il a aussi rendu hommage aux autorités allemandes qui, dans le cadre de la coopération internationale, ont accepté qu’une personne en attente d’être jugée par le TPIR soit détenue en Allemagne.  Prenant note des propositions des deux Tribunaux sur les fonctions résiduelles, il a invité le Conseil à y réfléchir afin de mettre au point des mécanismes capables de suivre les procédures restantes après 2010.  Il a aussi jugé essentiel de répondre aux préoccupations quant au maintien de personnel expérimenté.


Mme CHEN PEIJIE (Chine) a affirmé que les deux Tribunaux pénaux internationaux devaient pouvoir compter sur la coopération des autorités nationales.  Elle a aussi estimé que le renvoi d’affaires faisait partie intégrante de la stratégie d’achèvement de ces Tribunaux tout en renforçant les capacités judiciaires nationales.  À cet égard, la représentante a émis l’espoir que les deux Tribunaux travailleraient davantage avec les pays concernés.  À cette fin, a-t-elle dit, les États, qui peuvent le faire, devraient les assister à renforcer leurs capacités et leur permettre ainsi de poursuivre ce qui a été accompli par les deux Tribunaux.  Notant que les deux Tribunaux faisaient face à certains problèmes, dont la protection des témoins, la coopération avec les États ou le maintien en fonction de son personnel, la représentante a souhaité que les Tribunaux renforcent leur coopération avec toutes les parties concernées pour trouver des solutions à ces questions.  Enfin, elle a estimé que les principes et le calendrier de fin de mandat devraient être rigoureusement respectés par les deux Tribunaux.  Elle a admis que les Tribunaux seraient certainement confrontés à des défis dans la mise en œuvre de leur stratégie d’achèvement.  Ces difficultés, a-t-il cependant estimé, pourraient être résolues si toutes les parties travaillaient de bonne foi.


M. HUBERT RENIE (France) a salué la manière dont les Tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie et pour le Rwanda ont contribué à faire justice, à apaiser les tensions et à rétablir la paix et la sécurité.  Les deux Tribunaux ont répondu à l’attente placée en eux.  Les limites fixées ont un caractère indicatif, a-t-il souligné.  Il est essentiel et nécessaire que justice soit faite contre ceux qui sont les plus lourdement responsables, a-t-il encore souligné, en rappelant les États à leur obligations de coopérer avec les Tribunaux.  Ces derniers, a-t-il tout de même voulu, doivent faire tout leur possible pour raccourcir le plus possible les dépassements.  Il a appelé le Conseil à réfléchir aux décisions qui devront être prises concernant les questions résiduelles.


M. JOHAN VERBEKE (Belgique) a réaffirmé l’appui de son pays aux Tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie et pour le Rwanda, soulignant que ce soutien doit être exprimé à plus forte raison en ces temps où l’exigence de justice pénale internationale est souvent négligée, voire reléguée au rang de préoccupation subalterne.  S’agissant du Tribunal pour l’ex-Yougoslavie, il a fait observer que le retard de ses travaux par rapport aux dates initialement prévues est dû à des circonstances échappant entièrement au contrôle du Tribunal, comme l’arrestation tardive de certains accusés, ou à d’autres éléments impondérables.  Il s’est dit d’avis que, dans ce contexte, les dates d’achèvement des travaux fixées par la résolution 1503 (2003) sont indicatives et devraient pouvoir être reportées si des motifs valables le justifient.  Le représentant a déclaré que sa délégation était sensible aux problèmes posés par l’exode d’une partie du personnel hautement qualifié des Tribunaux, dans le contexte de fin de mandat.  Il s’agit là d’une question délicate liée à la nature tout à fait spécifique des Tribunaux spéciaux qui ont une durée limitée dans le temps, a-t-il souligné, avant d’appeler les États Membres à prêter l’attention nécessaire à cette problématique et aux mesures incitatives qui sont proposées par les Tribunaux.


Les Tribunaux ne pourront pas être vus comme ayant rendu adéquatement la justice si les accusés qui restent en fuite ne sont pas jugés, a-t-il poursuivi, précisant que cela est particulièrement vrai des fugitifs accusés des crimes les plus graves, MM. Radovan Karadzic, Ratko Mladic et Félicien Kabuga.  Le représentant de la Belgique a ainsi appelé tous les États concernés à coopérer pleinement avec ces Tribunaux, comme ils en ont l’obligation, en vue d’arrêter des personnes et les transférer à La Haye.  Il a aussi dit avoir pris note avec regret des informations données par Mme Carla Del Ponte sur la détérioration de la coopération de la Serbie avec le TPIY et appelé le Gouvernement de Belgrade à mettre tout en œuvre afin de réaliser une pleine et entière coopération avec le Tribunal.


M. LUC JOSEPH OKIO (Congo) s’est félicité que le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) mènent leurs activités avec célérité.  Il a noté que pour le seul TPIY, 106 accusés sur 161 ont été définitivement jugés et que le TPR a mené à terme les procès de 33 accusés.  Quelles que soient les difficultés rencontrées, ce sont là autant d’avancées significatives dans le domaine de la justice pénale internationale, a-t-il estimé.  Le représentant a toutefois relevé de nombreux motifs d’inquiétude et de frustration, en particulier concernant la question de l’arrestation des personnes accusées, encore en liberté, et qui bénéficient de nombreuses complicités.  Il a déploré le manque de coopération de certains États en vue de l’arrestation des personnes soupçonnées de crimes les plus graves.  Le fait que quatre accusés pour le cas de l’ex-Yougoslavie, en particulier Radovan Karadzic et Ratko Mladic restent en liberté, demeure un motif de préoccupation, a-t-il dit.  De l’avis de M. Okio, le Conseil de sécurité devrait veiller à exercer de fortes pressions sur les États Membres peu enclins à coopérer avec les deux Tribunaux pénaux internationaux.  Concernant la mise en œuvre de la stratégie d’achèvement des travaux des deux Tribunaux, il a jugé nécessaire de réfléchir sur la flexibilité dont le Conseil conviendrait de faire preuve au cas où le TPIY et le TPIR se trouveraient dans l’incapacité de terminer leurs travaux dans les délais prescrits.  Il a également apporté son soutien à la création d’une prime de fidélisation pour inciter les fonctionnaires à rester en fonction jusqu’à l’achèvement des travaux.


M. SABELO SIVUYILE MAQUNGO (Afrique du Sud) a salué les mesures prises par les deux Tribunaux pénaux internationaux pour respecter leur stratégie d’achèvement, et notamment celles qui ont permis d’améliorer leur efficacité en menant plusieurs procès à la fois.  Concernant la période après l’achèvement des travaux, a-t-il noté, certains plaident en faveur d’une réouverture des Tribunaux, si certaines arrestations étaient faites.  Sa délégation, a-t-il dit, n’est pas convaincu de la nécessité d’une telle réouverture.  C’est pourquoi, il a recommandé de renvoyer des affaires aux juridictions nationales, estimant qu’il s’agissait d’une partie intégrante des stratégies d’achèvement.  Il s’est félicité des pays qui avaient accepté de tels renvois d’affaires par les deux Tribunaux et a appelé à l’assistance technique et financière de ces pays, afin qu’ils puissent réformer leurs systèmes judiciaire et carcéral en vue de traiter de ces affaires.  Par ailleurs, M. Maqungo a constaté que des accusés, dont certains de haut rang, demeuraient en fuite, notamment Félicien Kabuga, Radon Karadzic et Ratko Mladic.  Il a souligné qu’il était important que ces fugitifs soient traduits en justice et a appelé à la pleine coopération avec les deux Tribunaux pour procéder à leur arrestation et à les remettre aux Tribunaux.  M. Maqungo a indiqué que les deux Tribunaux devaient bénéficier des ressources suffisantes pour s’acquitter pleinement de leur mandat.  Il a aussi insisté sur la nécessité de préserver leurs accomplissements.


M. ILYA I. ROGACHEV (Fédération de Russie) a promis d’étudier avec soin le rapport des deux Tribunaux sur les questions résiduelles.  Il a noté les progrès évidents enregistrés par le TPIR.  La pertinence des efforts pour développer le système judiciaire rwandais doit être reconnue, a-t-il dit avant d’en venir au rapport du TPIY.  Il s’est dit inquiet des évaluations sur les dates d’achèvement de ces institutions pénales internationales.  Les deux Tribunaux doivent s’inspirer des délais fixés par le Conseil et faire de leur mieux pour que les travaux soient terminés avant la fin de 2010.  L’absence de certains accusés, a estimé le représentant, ne saurait justifier la poursuite illimitée des activités du Tribunal.  Ce dernier doit renvoyer avec « plus d’audace » les affaires aux juridictions nationales.  Le représentant a attiré l’attention du Conseil sur le paragraphe 35 du rapport du TPIY.  De nouveaux témoins, en a-t-il conclu, refusent de témoigner par peur pour leur vie et celle des leurs.  Le représentant a en outre jugé « illusoire » de confier à la MINUK la protection des témoins.  Il a demandé plus de précisions à la Procureure.


M. ROBERT TACHIE-MENSON (Ghana) a noté avec satisfaction, concernant le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), que sur 161 personnes inculpées, seules 11 étaient toujours dans la phase d’avant procès, même si quatre étaient toujours en fuite.  Il a appelé tous les États Membres à apporter leur aide au TPIY dans la traque et l’arrestation de ces fugitifs.  Il a regretté que deux d’entre eux soient les plus célèbres et a appelé les États concernés à prendre les mesures nécessaires pour les arrêter et les remettre au Tribunal.  S’agissant du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), le représentant du Ghana s’est dit impressionné par les progrès réalisés.  Il a noté toutefois les difficultés rencontrées par les Tribunaux pénaux internationaux à transférer certains des dossiers aux juridictions nationales compétentes, en particulier en Afrique.  Il a estimé que le TPIR pourrait avoir besoin de mettre en place des programmes d’assistance technique dans certains pays pour permettre ces transferts.  Il a appelé la communauté internationale à fournir au Tribunal les ressources nécessaires.  Enfin, le représentant du Ghana a jugé que s’agissant de la stratégie d’achèvement des travaux des deux Tribunaux, la communauté internationale allait être confrontée à la question des fugitifs, de la supervision des peines de prison et des archives.  Il a estimé qu’une structure plus réduite des deux Tribunaux devrait être mise en place pour accomplir ces tâches.


M. HASAN KLEIB (Indonésie) a réaffirmé le soutien de sa délégation aux travaux du TPIY et du TPIR visant à traduire en justice les responsables de crimes contre l’humanité.  Il a salué les mesures concrètes prises par les deux Tribunaux pour assurer la mise en œuvre de leur stratégie respective d’achèvement, dans les délais prévus.  Soulignant l’importance des fonctions résiduelles en ce qui concerne l’héritage des deux Tribunaux, il a estimé que le Conseil de sécurité devrait traiter de la question de manière systématique et globale, dans un processus large et inclusif qui réunit les États concernés, les Tribunaux et la société civile.  Il a affirmé que les leçons tirées des fonctions résiduelles des tribunaux de la Deuxième Guerre mondiale pourraient être utiles dans cet examen.  M. Kleib a déclaré que la question des fugitifs constituait une des plus importantes fonctions résiduelles.  Les deux Tribunaux, a-t-il rappelé, ne pourront s’acquitter pleinement de leur mission tant que les principaux accusés ne seront pas appréhendés et traduits devant eux.  Pour réaliser cet objectif, tous les États concernés doivent coopérer avec les Tribunaux, a-t-il fait valoir.  Par ailleurs, le représentant a souligné l’importance du renvoi d’affaires aux juridictions nationales, reconnaissant à la fois les mérites et les défis de ces mesures.  Dans ce contexte, a-t-il souligné, les programmes de renforcement des capacités judiciaires nationales sont nécessaires.


M. ALDO MANTOVANI (Italie) s’est félicité de la coopération entre les deux Tribunaux et les pays concernés.  Il a jugé impératif que les mandats d’arrêts en suspens soient exécutés.  Tant que ces affaires ne seront pas entendues, les deux Tribunaux laisseront l’impression qu’ils ont trahi leur mandat.  Le respect des victimes exige que les auteurs des crimes les plus graves ne restent pas impunis.  Le message selon lequel le temps est en faveur des auteurs présumés de ces crimes ne saurait passer, a averti le représentant.  Il a d’ailleurs appelé à l’intensification des activités liées au renforcement des juridictions nationales.  Il a conclu en rappelant que l’héritage des deux Tribunaux fait l’objet d’un examen au sein du Conseil et qu’une réunion du Groupe de travail du Conseil est prévue demain car des questions délicates sont en jeu, qu’elles soient judiciaires ou administratives.  Le représentant a conclu en demandant au Juge Pocar plus de précisions sur le nombre de juges ad litem dont le TPIY a besoin.


M.JOSEPH NSENGIMANA (Rwanda) a noté que si le nombre de fugitifs était passé récemment de 18 à 14, parmi lesquels figurent les « cerveaux » du génocide rwandais, comme Félicien Kabuga, le colonel Serubuga et le colonel Rwagafirita.  Il a appelé le Conseil de sécurité à prendre des mesures urgentes pour s’assurer que ces fugitifs n’échappent pas à la justice et a estimé que les États Membres qui ne coopéraient pas à ces efforts devaient en rendre compte au Conseil.  Il s’est félicité des renvois d’affaires des deux Tribunaux aux juridictions nationales, en particulier au Rwanda, indiquant que son pays avait réalisé des progrès considérables dans l’examen de ces affaires.  Il a aussi estimé que les affaires en suspens devraient être renvoyées aux juridictions rwandaises.  Parmi les arguments mis en avant, il a fait valoir que la justice devrait être rendue là où les crimes ont été commis.  Les procédures judiciaires seraient plus efficaces dans la mesure où la plupart des preuves et des témoins se trouvent au Rwanda.


Le représentant a souligné que le Rwanda était fermement engagé à prendre en charge toutes les affaires du TPIR et à suivre l’exécution des jugements rendus par le Tribunal pénal international pour le Rwanda.  Il a souligné que tous les préparatifs dans ce sens avaient été entrepris, en partenariat avec le TPIR et les partenaires de développement.  Ainsi, il a indiqué qu’une loi avait été adoptée pour déterminer les règles applicables aux procédures de renvoi des affaires par le TPIR, tout en précisant que cette même loi avait aboli la peine de mort.  Le représentant a aussi affirmé que le Gouvernement du Rwanda avait prévu dans son budget 2008 des ressources pour l’assistance judiciaire.  En outre, le Rwanda met actuellement en place un mécanisme pour assister les témoins et les victimes.


Avant de conclure, M. Nsengimana a souhaité que le Conseil de sécurité continue à accorder son attention à la question du transfert des prisonniers au Rwanda, afin qu’ils y exécutent leur peine.  S’agissant de l’héritage du Tribunal, il a estimé que tous les documents et équipement du Tribunal devraient être transférés au Rwanda.  Cela constitue une étape importante de l’histoire récente du Rwanda et contribue considérablement aux efforts de réconciliation nationale et d’éducation civique, a-t-il souligné en demandant que des discussions au sein du Conseil soient engagées rapidement sur cette question.


M. PAVLE JEVREMOVIĆ (Serbie) s’est dit convaincu que les quatre derniers fugitifs seront très bientôt localisés et arrêtés.  Il a d’ailleurs rappelé que les progrès politiques et opérationnels enregistrés dans son pays ont été reconnus dans la dernière évaluation de la Procureure.  Il a aussi souligné que son Gouvernement a promis une récompense à quiconque fournira des informations conduisant à l’arrestation des fugitifs et que le Parlement serbe a adopté une loi pour élargir le rôle du Procureur de la République chargé des crimes de guerre aux personnes qui ont aidé et protégé les fugitifs.  Le représentant a aussi mis l’accent sur d’autres aspects de la coopération de son pays comme l’accès aux témoins, la présentation de documents, l’accès aux archives et l’amélioration de la coopération régionale.  Une des conditions préalables au succès de la stratégie d’achèvement, a-t-il estimé, est la capacité des juridictions nationales à connaître des affaires renvoyées par le Tribunal.  La Serbie, a-t-il dit, accueille avec satisfaction l’accord signé entre l’OSCE et le Tribunal permettant aux missions de la première de surveiller les procès tenus par les juridictions compétentes en Bosnie-Herzévogine, en Croatie, au Monténégro et en Serbie.  Il a aussi remercié l’OSCE, le PNUD, le Conseil de l’Europe et les autres institutions pour avoir aidé son pays à harmoniser sa législation pénale avec les normes du TPIY et à former les procureurs et les juges.  Le représentant a conclu en mettant l’accent sur la ferme détermination de son pays à reléguer dans le passé le régime de Milosevic, comme contribution au processus de réconciliation dans le territoire de l’ex-Yougoslavie.


Mme MIRJANA MLADINEO (Croatie) a d’abord rendu hommage à Carla Del Ponte, à son courage et à sa persévérance pendant ces quatre dernières années.  Elle s’est félicitée, qu’alors que les activités du Tribunal étaient sur le point de prendre fin, des efforts avaient été entrepris pour mettre en place des mécanismes résiduels qui permettront de poursuivre les fonctions essentielles du Tribunal.  Elle a souligné l’importance des archives, question qui selon elle va au-delà des procédures judiciaires.  Elle a également estimé qu’il était maintenant possible pour les juridictions nationales des pays de la région de traiter de certaines affaires et a prié le Conseil de sécurité de prendre cela en compte lors de discussions sur les arrangements futurs.  Elle a insisté sur le rôle que pouvaient jouer les juridictions nationales dans les fonctions résiduelles et a appelé le Conseil de sécurité à accorder une plus grande attention à cette question.  Le système judiciaire croate a preuve de maturité en jugeant de manière équitable des affaires sensibles, a-t-elle fait observer.  Le TPIY a-t-elle indiqué, a renvoyé une de ses affaires à la Croatie.  Dans le cadre de la stratégie d’achèvement du Tribunal, la Croatie est prête à reprendre les affaires qui impliquent des citoyens croates, a-t-elle déclaré.  Elle a toutefois fait remarquer que tant que le TPIY n’aura pas jugé Radovan Karadzic, Ratko Mladic et Goran Hadzic, son mandat restera inachevé et son héritage incomplet.


Rappelant que la justice était une condition essentielle à l’instauration d’une paix durable, Mme Mladineo s’est félicitée du travail accompli dans cette voie par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie.  Toutefois, elle a indiqué que le jugement rendu dans l’affaire des « Trois de Vukavar » avait provoqué de fortes réactions en Croatie et ailleurs, rappelant que deux accusés, Mile Mrksic et Veselin Sljivancanin, avaient été condamnés respectivement à des peines de prison de 20 et 5 ans alors qu’un troisième, Miroslav Radic, avait été acquitté.  Elle a noté que d’autres personnes, jugées par le Tribunal de Belgrade pour les crimes de guerre, avaient été condamnées à des peines plus lourdes que celles imposées à leurs responsables par le TPIY.  Elle s’est aussi inquiétée de ce qu’aucun appel n’ait été interjeté après l’acquittement de Miroslav Radic.


En réponse aux questions des délégations, le Président du TPIY a souligné que le Tribunal continue de rechercher d’autres moyens pour optimiser l’utilisation des ressources et achever les travaux en temps voulu.  Or, a-t-il réitéré, le Tribunal devra bientôt se séparer de ses juges ad litem qui sont pourtant essentiels pour l’ouverture de nouveaux procès.  La procédure exige en effet que le mandat de ces juges expire avant d’en nommer d’autres.  Le Président a donc demandé qu’à titre provisoire, des juges ad litem supplémentaires soient recrutés en attendant que le mandat des premiers s’achève.  Le Tribunal aurait ainsi temporairement plus de 12 juges ad litem.  Un précédent existe, a rappelé le Président du TPIY.  En 2005, a-t-il précisé, le juge permanent qui a été nommé à l’avance, a servi pendant deux mois comme juge supplémentaire, ce qui a permis d’accélérer les procédures et la mise en œuvre de la stratégie de fin de mandat.


Après avoir remercié le Conseil pour l’appui qu’il apporte aux travaux du TPIR, son Président a tenu à souligner la qualité de la coopération du Rwanda avec le Tribunal.  S’agissant de l’héritage du Tribunal, il a rappelé qu’il participera à la réunion prévue demain avec le Groupe de travail.  Le TPIR fera tout son possible pour s’acquitter de son mandat dans le cadre de la stratégie d’achèvement, a-t-il dit avant de céder la parole à la Procureure du TPIY qui a remercié tous les membres du Conseil pour leurs paroles aimables.  Le TPIY a été créé, a-t-elle rappelé, pour juger les plus grands responsables des crimes perpétrés en ex-Yougoslavie, dont Karadzic et Mladic.  C’est au Conseil de décider s’il veut que le Tribunal remplisse son mandat.  On ne peut envisager que ces deux hommes ne soient pas traduits en justice.  Or, ils ne peuvent l’être à Belgrade où ils sont considérés comme des héros.  La balle est donc dans le camp du Conseil, a insisté la Procureure.


*   ***   *

À l’intention des organes d’information • Document non officiel
À l’intention des organes d’information. Document non officiel.