FEM/1572

LES EXPERTS INQUIETS DE L’IMPACT DE LA PROSTITUTION ET DES DISCRIMINATIONS CONTRE LES FEMMES DANOISES EN MATIÈRE D’EMPLOI ET DE REPRÉSENTATION POLITIQUE

09/08/2006
Assemblée généraleFEM/1572
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Comité pour l’élimination de la

discrimination à l’égard des femmes

Chambre A - 740e & 741e séances – matin & après-midi


LES EXPERTS INQUIETS DE L’IMPACT DE LA PROSTITUTION ET DES DISCRIMINATIONS CONTRE LES FEMMES DANOISES EN MATIÈRE D’EMPLOI ET DE REPRÉSENTATION POLITIQUE


Les experts du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes se sont penchés aujourd’hui sur la condition des femmes danoises.  Ils se sont particulièrement inquiétés de l’incidence de la prostitution, qui est légale dans ce pays; du faible taux de participation des femmes aux activités politiques au niveau local; de la discrimination basée sur le sexe sur le marché de l’emploi, et la rareté des femmes dans l’enseignement supérieur.  Les experts ont également largement commenté le champ d’application de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF), qui est entrée en vigueur au Danemark le 21 mai 1983. 


Échange de vues et recommandations des experts


Mme HUGETTE BOKPE-GNACADJA, experte du Bénin, a dit sa préoccupation quant aux champs d’application de la convention, notamment en ce qui concerne les citoyens des Iles Féroé et ceux du Groenland, qui sont danois, mais où la légalisation issue du principe général de l’égalité ne s’applique pas.  La confusion est accrue par l’existence d’une législation propre à ces territoires en ce qui touche à l’égalité entre les sexes, a relevé l’experte.  Cette préoccupation reprise par Mme SIMS, experte de la Jamaïque, et Mme FRANCOISE GASPARD, experte de la France, qui s’est dite perplexe quant à l’application et au suivi de la Convention dans les territoires autonomes.  « Le Danemark a ratifié la Convention, mais nous n’avons pas l’impression que la CEDEF y soit prise en compte et constitue un élément des politiques qui y sont mises en œuvre », a-t-elle noté.  Mme DRUBRAVKA SIMONOVIC, experte de la Croatie, a rappelé que le Gouvernement du Danemark avait ratifié la Convention au nom de l’ensemble du Royaume, et que les représentants de territoires autonomes s’étaient engagés à veiller à son application. 


Mme VIKEBE ABEL, Secrétaire permanente adjointe et Chef de la délégation danoise, a expliqué que l’égalité entre les sexes était une valeur fondamentale au Danemark, et que sans elle, il n’y aurait pas de démocratie.  La Convention est une source pertinente du droit dans le pays et constitue un instrument contraignant qui peut être utilisé devant les tribunaux, et elle a déjà été utilisée par la Cour suprême, où il a été précisé que les obligations des territoires autonomes sont les mêmes que celles du territoire continental du Danemark, a fait remarquer la représentante.


Mme HANNA BEATE SCHOPP-SCHILLING, experte allemande, a de son côté critiqué la construction du rapport danois, qui ne mentionne pas suffisamment les résultats des mesures prises pas le Gouvernement.  Elle en a cependant félicité les auteurs pour y avoir intégré les critiques des ONG.  Mme ZOU, experte de la Chine, a souhaité de son côté disposer de plus d’informations sur les structures gouvernementales chargées de l’égalité entre les sexes.  Mme FUMIKO SAIGA, experte du Japon, s’est dite surprise de voir que les rapports des Îles Féroé et du Groenland sont annexés et non pas inclus au Rapport du Danemark et se trouvent au même niveau que ceux des ONG.  « Les commentaires des ONG doivent être présentés séparément », a-t-elle estimé, se dissociant en cela de l’experte de l’Allemagne. 


La délégation du Danemark s’est dite surprise par les allégations du Comité selon lesquelles le rapport danois ne comprend pas suffisamment d’indicateurs de résultats, alors que les statistiques en matière d’éducation, d’accès à la vie publique et politique en sont les manifestations.  La présentation distincte des rapports des Îles Féroé et du Groenland ne signifie pas qu’ils sont au même niveau que les remarques des ONG, a estimé la délégation danoise.  Ces dernières sont des institutions avec lesquelles nous avons un dialogue et que nous soutenons sur le plan économique, a-t-elle indiqué.


Mme ANAMA TAN, experte de Singapour, a relevé que peu d’attention est consacrée dans le rapport sur la prostitution, tout en critiquant une circulaire qui semblerait appuyer ce phénomène.  L’État partie est tenu de légiférer pour protéger les femmes de toute forme de violence et non pas l’encourager, a-t-elle souligné.  Les femmes piégées dans la prostitution ont besoin de services d’appui leur permettant d’en sortir, a dit Mme Tan.  Mme SIMMS, experte de la Jamaïque, a relevé avec préoccupation que la prostitution était légale. 


La délégation du Danemark a expliqué que son pays considérait la prostitution comme étant une question sociale très grave, et qu’il avait mis en place un programme d’action qui comporte des équipes de santé, des équipes de psychologues et des équipes de rue pour aider les personnes qui la pratiquent à en sortir.  La délégation a également assuré le Comité qu’il était possible de faire preuve de souplesse pour les conditions de séjour dans les abris, qui sont limité à un mois.  Lorsque les victimes étrangères de la traite rentrent dans leur pays, des conseillers les accompagnent pour éviter qu’elles ne tombent dans les filets des trafiquants, a indiqué la représentante danoise.


Concernant les femmes et la vie politique, l’experte de l’Allemagne s’est demandé quelles étaient les raisons expliquant leur taux de participation inférieur dans les parlements locaux par rapport au parlement national, où elles sont présentes à hauteur de 38%, ce qui est un signe inquiétant.  Les femmes tendent généralement en effet à s’affirmer au niveau local en premier lieu avant de le faire au niveau national, a-t-elle noté.  L’experte a par ailleurs félicité le Gouvernement pour les mesures qu’il a prises directement en liaison avec l’adoption de la résolution sur les femmes et la paix du Conseil de sécurité.  L’experte de la France a pour sa part félicité le Gouvernement danois pour ses directives visant la représentation féminine dans ses conseils et commissions, ainsi qu’au parlement, tout en relevant que le nombre de femmes maires avait baissé et que leur représentation au niveau diplomatique était faible.  Elle a encouragé le Gouvernement à prendre des mesures temporaires spéciales pour redresser cette situation.  « La représentation des femmes au parlement des Îles Féroé est de 9% et au Gouvernement de ces Îles, elle est de 0,4%.  Quelles sont les raisons de ces disparités? », a demandé l’experte de la Croatie.


La délégation danoise a expliqué que manifestement, siéger au niveau local ne répond pas à l’intérêt des femmes, et que l’État ne pratique pas le système de quota sur les listes électorales.  Dans les Îles Féroé, les femmes ont manifesté leur manque d’intérêt vis-à-vis de la vie politique en raison de leurs responsabilités familiales.  Dans la fonction diplomatique, le nombre de femmes au plus haut niveau est passé de 12% à 14 %.  Lors des dernières nominations, en 2004, 33% des personnes nommées étaient des femmes, et en 2005, 30% l’étaient.


Mme SIMMS a regretté que les gains remportés dans le domaine de l’éducation ne se soient pas traduits sur le marché de l’emploi.  De plus, les femmes, aussi éduquées qu’elles soient, restent confinées à des filières traditionnelles.


La délégation du Danemark a reconnu l’existence d’une ségrégation importante basée sur le sexe sur le marché du travail danois qui se manifeste entre autres par des écarts salariaux de 3% à 6 %.  Les mesures du Gouvernement pour engager les femmes au plus haut niveau se sont traduites, entre autres, par des manuels de sensibilisation, et par la mise en place d’initiatives visant les jeunes mères de famille.  Par ailleurs, pour ce qui est de la place des femmes aux postes de décision, la représentante danoise a expliqué que le Gouvernement avait engagé un dialogue avec le secteur privé en faisant valoir une réalité qui veut que les sociétés danoises ayant les meilleurs résultats ont nommé des femmes aux postes de décision.


Un programme de « mentoring » a pour objectif d’inspirer les dirigeantes potentielles et de leur fournir une formation accrue.  Le Ministère du travail et celui de l’égalité des sexes et les partenaires sociaux ont convenu d’une initiative s’adressant aux sociétés privées pour mettre un terme aux discriminations salariales.  Les entreprises de plus de 35 employés doivent présenter des statistiques de rémunération ventilées par sexe.  S’agissant des minorités ethniques, la représentante du Danemark a jugé que les jeunes femmes issues de la troisième génération d’immigrés étaient remarquablement bien intégrées.  Toutefois, les hommes issus de minorité ethnique sont plus indépendants que les femmes et celles-ci sont plus largement placées aux échelons les plus bas.  Une majorité d’entre elles est affectée à des activités de commerce. 


Mme GASPARD, experte de la France, s’est inquiétée de la rareté des femmes dans l’enseignement supérieur d’autant que depuis le dernier rapport, les choses n’ont pas changé.  Il existe un réseau d’hommes qui se réservent les postes, a-t-elle noté, en remarquant que plus de la moitié des comités de nomination dans l’enseignement sont composés exclusivement d’hommes. 


S’agissant de l’égalité entre les sexes devant la loi, l’experte du Bénin a estimé que l’arsenal juridique danois était important et régulièrement soumis à examen.  Elle a relevé que le pays avait procédé au relèvement de l’âge minimal du regroupement familial, qui est passé de 18 à 24 ans, ainsi qu’à celui de l’exigence du consentement préalable au mariage tout en se demandant si cette mesures avait réellement eu un impact sur les mariages forcés et précoces.  L’experte de Singapour s’est elle aussi demandée quel avait été les résultats du plan d’action contre les mariages forcés.


La délégation danoise a expliqué que le relèvement de l’âge du regroupement familial vise à protéger les jeunes femmes contre les mariages précoces et forcés.  D’autres initiatives visent à lutter contre les mariages forcés par le biais de services de conseils.  Nous disposons également d’une initiative qui permet aux femmes se trouvant dans cette situation de déménager, a-t-elle indiqué.


Le Comité entamera l’examen de la situation des femmes en Ouzbékistan demain, jeudi 10 août, à partir de 10 heures en salle de réunion 1.


* Le sixième rapport périodique du Danemark est publié sous la cote CEDAW/C/DNK/6


*   ***   *

À l’intention des organes d’information • Document non officiel
À l’intention des organes d’information. Document non officiel.