FEM/1531

CEDAW: LE COMITÉ ESTIME QUE LA THAÏLANDE DOIT ENCORE PROGRESSER DANS SA PLEINE APPLICATION DE LA CONVENTION

20/01/2006
Assemblée généraleFEM/1531
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Comité pour l’élimination

de la discrimination à l’égard des femmes

Trente-quatrième session

707e & 708e séances – matin & après-midi


CEDAW: LE COMITÉ ESTIME QUE LA THAÏLANDE DOIT ENCORE PROGRESSER DANS SA PLEINE APPLICATION DE LA CONVENTION


Les experts mettent notamment l’accent sur les problèmes

de la violence conjugale et de la traite des femmes


Examinant aujourd’hui la situation des femmes en Thaïlande, le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, connu par son acronyme anglais CEDAW, s’est inquiété de la persistance des problèmes liés à la violence conjugale, à la traite des femmes et aux stéréotypes.  Malgré les progrès réalisés par ce pays depuis sa ratification de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes en 1985, les 23 experts du Comité, qui siègent à titre individuel, ont insisté sur l’importance de régler ces questions afin de faire réellement avancer la condition de la femme dans ce pays. 


Le Ministre du développement social et de la sécurité humaine, M. Wattana Muangsook, a présenté les quatrième et cinquième rapports périodiques combinés de son pays, retraçant les initiatives et mesures prises par le Gouvernement depuis sept ans, date à laquelle la Thaïlande avait rédigé son dernier rapport pour le CEDAW.  Il a ainsi expliqué que la parité était intégrée à l’échelle du pays notamment par la mise en œuvre d’un Plan de développement de la femme et qu’une loi sur la parité fournissait une définition claire de la discrimination en plus d’identifier les pratiques discriminatoires. 


S’agissant spécifiquement de la représentation des femmes dans la sphère politique, le Ministre a aussi fait valoir que son pays s’était engagé à doubler la proportion de femmes au parlement et dans l’administration publique, entre autres, d’ici à 2006.  Il a noté que les élections de 2001 et de 2005 avaient démontré les résultats positifs de cette politique et a par ailleurs souligné que la parité existait, et serait même à l’avenir à l’avantage des femmes, en ce qui concerne les représentants diplomatiques. 


Saluant ces avancées, la majorité des experts du Comité ont toutefois mis l’accent sur le chemin qu’il restait à parcourir pour la Thaïlande.  Plusieurs se sont notamment étonnés de l’impunité face au viol conjugal ou à la violence domestique ainsi que de l’âge légal du mariage, fixé à 17 ans.  Ainsi, ils ont lancé un appel à la Thaïlande pour qu’elle lève toutes les réserves à l’article 16 de la Convention, relatif au mariage et à la vie de famille, émises lors de son adhésion.  Face à ces commentaires, la Thaïlande a expliqué qu’un nouveau code de la famille était en cours d’élaboration avec l’intention de respecter à la fois la richesse des traditions du pays et les principes de la Convention.  Dans le cadre de ce texte, l’âge du mariage sera de 18 ans, a expliqué le Ministre, en affirmant que le Gouvernement s’employait à résoudre les dispositions discriminatoires encore existantes. 


Bien que la Thaïlande ait déclaré la traite des femmes « priorité nationale », le Comité a souligné les problèmes qui persistaient dans ce domaine.  L’experte de la Hongrie a constaté que ce pays était toujours connu comme une destination de tourisme sexuel et de nombreux experts ont insisté sur les mesures à prendre pour remédier à cette situation, notamment par la collecte de données adéquates, la protection des migrantes, le renforcement des capacités des femmes rurales et la coopération régionale.  Le Ministre a quant lui fait part des initiatives de son pays, citant entre autres l’élaboration d’un Plan national et d’un Comité sur la prévention et l’élimination du trafic national et international des enfants et des femmes.  Il a aussi souligné les efforts pour lutter contre ce phénomène en partenariat avec le Cambodge ou la République démocratique populaire lao. 


Enfin, plusieurs expertes ont également fait part de leur préoccupation quant à la situation des minorités en Thaïlande et particulièrement des femmes musulmanes dans les provinces du sud.  À cet égard, elles ont souligné qu’il était essentiel que le Gouvernement thaïlandais traitent celles-ci de manière non discriminatoire et leur offre les mêmes opportunités en matière de santé et d’éducation notamment.


La prochaine réunion du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes sera annoncée dans le Journal.


EXAMEN DES QUATRIÈME ET CINQUIÈME RAPPORTS COMBINÉS DE LA THA Ї LANDE (CEDAW/C/THA/4-5)


Présentation par la délégation thaïlandaise


WATANA MUANGSOOK, Ministre du développement social et de la sécurité humaine de la Thaïlande, a rappelé que son pays avait adopté une nouvelle Constitution en 1977, c’est-à-dire juste deux ans avant sa dernière présentation devant le Comité.  Cette Constitution fait de la société thaïlandaise une des plus libres de la région, a-t-il affirmé. 


S’agissant spécifiquement de la Convention, le Ministre a souligné que son pays s’était attaché à sa pleine application depuis son accession au texte en 1985.  Le Gouvernement comprend que l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes est une partie intégrante de la pleine réalisation des droits de l’homme d’un pays, a-t-il insisté.  Notant que les femmes constituaient 50% de la population, il a affirmé qu’il était essentiel pour le pays de s’assurer que celles-ci aient toute leur place dans les secteurs de production afin que ceux-ci fonctionnent efficacement et favorisent la croissance économique.  Pour ce faire, le Gouvernement doit offrir des opportunités semblables aux hommes et aux femmes, a-t-il poursuivi.


Il a ainsi expliqué que la Thaïlande avait mis en place plusieurs politiques afin d’optimiser les chances pour tous et avait lancé des initiatives pour promouvoir le statut des femmes.  Le Ministre a notamment mis l’accent sur la Constitution de 1997 qui a mené à l’amendement de nombreuses lois et à l’établissement de mécanismes et organisations gouvernementales pour assurer la parité et garantir les droits des femmes.  Il a fait valoir que son propre ministère avait été établi récemment et intégrait dans son mandat le développement, l’assistance et la protection des enfants, des jeunes, des femmes, des personnes âgées et de celles handicapées.  Dans ce contexte, a-t-il ajouté, le pays a créé un Comité national pour la promotion des droits des femmes, des enfants, des jeunes et des personnes handicapées.  En outre, il a expliqué que la parité était intégrée à l’échelle du pays notamment par la mise en œuvre d’un Plan de développement de la femme. 


M. Muangsook a rappelé que, lors du dernier examen de l’application de la Convention en 1999, le Comité avait établi une série de recommandations afin de faire avancer la promotion de la femme en Thaïlande.  Il a affirmé que son pays avait non seulement promulgué ces priorités auprès des secteurs public et non gouvernemental, mais que le Gouvernement avait aussi pris en compte ces questions.  Ainsi, il a noté que son pays avait retiré en 2003 sa réserve sur l’article 16(g) de la Convention, concernant le mariage.  De plus, il a expliqué qu’en 2005, la loi sur le nom avait été amendée pour permettre aux femmes mariées de garder leur nom de jeune fille.  Il a déclaré que les quelques dispositions du Code de la famille du pays qui pouvaient encore être considérées comme discriminatoires, étaient largement débattues dans le milieu juridique, notamment celles concernant le divorce.  La Thaïlande s’emploie à mettre son Code de la famille en conformité avec l’article 16 de la Convention tout en respectant la richesse des traditions du pays, a-t-il avancé. 


Par ailleurs, le Ministre a fait valoir que le Gouvernement avait sérieusement considéré les recommandations du Comité quant à l’introduction de lois antidiscriminatoires.  À cet égard, il a cité la loi sur la parité qui fournit une claire définition de la discrimination et identifie les pratiques discriminatoires. 


Abordant la question de la violence contre les femmes, M. Muangsook a indiqué qu’il existait un projet de loi sur la violence domestique et que deux politiques nationales avaient été mises en place pour faire face à ce problème.  Au niveau local, a-t-il poursuivi, le pays a créé des centres communautaires pour les familles ainsi que des centres de crise dans les hôpitaux publics du pays.  Il a aussi noté que le mois de novembre avait été déclaré mois pour prévenir la violence contre les femmes et les enfants.  Nous prévoyons dans l’avenir de renforcer ces initiatives en assurant le respect des lois sur la violence domestique et en augmentant l’information du public sur ce sujet, a-t-il ajouté. 


Sur la question du trafic des êtres humains et de l’exploitation des femmes, le Ministre a rappelé que le Premier Ministre du pays avait fait de ce problème une priorité nationale depuis 2004 et qu’une loi était en cours d’étude.  Ce projet vise à protéger les droits des victimes et à imposer des peines plus graves aux contrevenants à la loi.  Il a aussi mis en avant l’élaboration d’un Plan national sur la prévention et l’élimination du trafic national et international des enfants et des femmes ainsi que de la création d’un Comité national sur cette question.  Soulignant la nature transnationale du trafic, il a fait part des efforts de son gouvernement pour coopérer avec diverses ONG et les pays voisins pour surmonter ce problème, citant entre autres, une coopération bilatérale avec le Cambodge et la République populaire démocratique lao. 


Le Ministre a aussi fait valoir que son pays s’était engagé à doubler la proportion de femmes au parlement, dans les districts administratifs et dans les positions de pouvoir de l’administration publique d’ici à 2006.  En conséquence, il a affirmé que la représentation des femmes dans la sphère politique s’était considérablement accrue, comme l’avaient démontré les élections de 2001 et de 2005.  Par ailleurs, il a aussi déclaré que son pays s’attachait à assurer une protection et à faire la promotion des droits fondamentaux de tous ses citoyens, et donc des membres des minorités et groupes ethniques.  Il a cité en exemple le cas du million de personnes d’une tribu des collines dont 80% avait obtenu la citoyenneté thaïlandaise ainsi qu’un meilleur accès aux soins de santé et à l’éducation.  Le Ministre s’est penché sur la question de l’emploi et des femmes en soulignant que toutes les femmes, citoyennes ou non, étaient protégées légalement.  Enfin, il a fait savoir que son pays avait atteint l’Objectif du Millénaire pour le développement (OMD) relatif à l’accès universel des filles et des garçons à l’éducation primaire et secondaire. 


M. Muangsook a précisé que les informations fournies dans cet exposé ne constituaient pas une liste exhaustive des initiatives prises depuis sept ans, par son pays pour appliquer la Convention.  Malgré tous nos efforts, nous reconnaissons que nous pouvons faire plus, a-t-il admis.  Il a ainsi expliqué que des mesures supplémentaires étaient prévues pour renforcer la capacité des femmes dans toutes les sphères et pour modifier certains des stéréotypes qui restent encore ancrés dans la société.  Il s’est dit prêt, au nom du Gouvernement de son pays, à travailler étroitement avec tous les secteurs, et particulièrement la société civile, pour optimiser le potentiel des femmes afin qu’il bénéficie à toute la société. 



Questions, commentaires et dialogue avec les experts


Engageant une première série de questions, sur les articles 1 et 2 de la Convention consacrés respectivement à la nature de la discrimination à l’égard des femmes et aux moyens politiques pour l’éliminer, l’experte de la Malaisie, MARY SHANTHI DAIRIAM, a d’abord félicité le Gouvernement pour la mise en œuvre de mesures en faveur de la femme.  Elle a demandé comment était interprétée par les juges des tribunaux la notion de la « discrimination à l’égard des femmes » telle que définie par la Convention, dans la mesure où le droit thaï n’en propose pas de définition spécifique?  Comment cette notion s’est-elle appliquée concrètement: est-ce que les plans de développement se sont basés sur la définition de la Convention?  L’intervenante a souhaité par ailleurs savoir si la nouvelle loi visant à éliminer la discrimination à l’égard des femmes actuellement en cours d’élaboration contiendra une définition plus précise de la discrimination.  Au titre des recommandations, Mme Dairiam a souhaité que cette anomalie du droit thaï soit examinée de près par des experts compétents connaissant bien la Convention.  De plus, l’experte a demandé des précisions sur le calendrier prévu pour la présentation de cette loi au Parlement.  Est-ce que, s’est-elle encore interrogée, des plans existent pour assurer une formation des magistrats afin qu’ils sachent clairement comment ils pourront lutter contre la discrimination à l’égard des femmes?  Elle a attiré l’attention de la délégation sur le Programme du Ministère de la justice sur la promotion des droits et liberté, en lui demandant que ce Programme intègre de façon spécifique le droit des femmes.  Enfin, Mme Dairiam a souhaité avoir des précisions sur le rôle du médiateur ainsi que le budget et les ressources du Bureau des affaires féminines et du développement de la famille, établi il y a trois ans auprès du Ministère des affaires sociales. 


L’experte de Cuba, MAGALYS AROCHA DOMINGUEZ, a estimé qu’il semblait contradictoire que les femmes qui représentent 49% des membres des comités de villages ne soient que 4% des cadres dirigeants de ces comités.  Elle a demandé comment était évaluée l’efficacité des fonds qui leur sont alloués?


Dans sa réponse à Mme Dairiam, M. MUANGSOOK a indiqué que le Gouvernement s’apprêtait à adopter une définition de la discrimination en conformité avec l’article 1 de la Convention, qui inclura l’idée de discrimination directe et indirecte.  Il a indiqué que le Gouvernement comptait prendre exemple sur l’approche des États-Unis et de certains pays européens qui proposent une définition assez large de la discrimination à l’égard des femmes.  S’agissant de la mise en œuvre de la Convention, a-t-il expliqué, nous n’avons pas besoin d’inclure chaque mot de la Convention: l’essentiel, c’est que notre loi nationale soit conforme aux dispositions de cette Convention.  Il a estimé qu’il devrait y avoir des exceptions objectives pour différencier les cas de discrimination, directe ou indirecte.  En ce qui concerne le calendrier de l’adoption de la loi, le Ministre a jugé qu’il était impossible de donner une date exacte.  Il a cependant indiqué qu’on pouvait estimer une durée moyenne de six ou neuf mois pour que le projet de texte soit soumis au Gouvernement, et 4 à 5 ans pour qu’il soit transmis au Parlement.  S’agissant de l’article 2 de la CEDAW, a-t-il expliqué, nous avons maintenant plusieurs organisations indépendantes pour faire respecter les droits et libertés garanties par la Constitution.  Il y a le recours au tribunal administratif qui reste possible, mais nous n’avons pas encore de cas de plainte de discrimination à l’égard des femmes déposés dans ces juridictions. Un grand nombre d’affaires de discrimination en matière d’emploi sont saisis en revanche par les tribunaux du travail.      



Prenant la parole à sa suite, Mme KANDA VAJRABHAYA, Secrétaire adjointe au Ministère du développement social, a insisté sur l’importance du rôle du médiateur pour la préservation des droits de la femme.  Elle a indiqué à l’appui de cette thèse qu’un nombre important des affaires traitées entre 2000 et 2004 concernait directement des femmes.  L’intervenante a par ailleurs indiqué que le personnel des ministères du développement social et de la justice avait été sensibilisé sur les dispositions de la Convention, pour qu’il soit bien conscient de son importance.  En ce qui concerne les comités des villages et l’utilisation des fonds qui leur sont alloués, elle a affirmé que leur but était d’assurer de manière équitable la distribution de prêts à tous les membres, hommes et femmes, qui en faisaient la demande.  Mme Vajrabhaya a assuré que ces comités fonctionnaient bien.  Enfin, sur le statut du nouveau mécanisme institutionnel des femmes du Ministère du développement, venu remplacer celui qui était attaché au cabinet du Premier Ministre, l’intervenante a annoncé que l’objet principal de cette réforme administrative avait été de regrouper toutes les questions liées entre elles, comme par exemple les affaires féminines et familiales, afin de rendre ce mécanisme plus efficace.  Le statut du Bureau des affaires féminines est plus élevé que celui du précédent et ses ressources budgétaires augmentent chaque année en raison de la quantité de travail de plus enplus importante, a-t-elle observé. 


Le Comité a ensuite entamé une deuxième série de questions portant sur les articles 5 et 6 de la Convention relatifs respectivement aux stéréotypes et à la prostitution.  DORCAS COKER-APPIAH, experte du Ghana, a souligné la persistance de stéréotypes discriminatoires en Thaïlande.  Elle s’est particulièrement inquiétée qu’un homme ne puisse être accusé de viol conjugal.  Elle a aussi voulu connaître les mesures entreprises pour faire changer les mentalités.  S’agissant de la prostitution, elle a indiqué que l’amélioration des revenus se faisait au détriment des enfants qui étaient parfois contraints à des activités sexuelles.  Rappelant la réputation du pays comme destination de tourisme sexuel, elle a estimé que malgré les efforts du Gouvernement, le pays n’était pas parvenu aux résultats escomptés.  Elle a souhaité des détails sur le Plan national contre le trafic humain mis en place en 2002 et a demandé si le Gouvernement fournissait des ressources pour appuyer les ONG dans leur travail contre le trafic des femmes. 


L’experte du Brésil, SILVIA PIMENTEL, a d’une part félicité le Gouvernement d’avoir noté dans son rapport que la violence contre les femmes et les enfants entravait le développement et ne constituait pas un problème privé.  Seule une méthode axée sur les droits pourrait régler le problème de la violence familiale, a-t-elle estimé.  Elle s’est d’autre part étonnée que le projet de législation sur la violence familiale prévoit une peine maximale de six mois pour les violences physiques alors que dans le Code pénal, une peine pour sévices peut s’élever à deux ans.  Cela ne risque-t-il pas de renforcer l’idée selon laquelle la violence familiale est moins grave que les autres formes de violence? 


En réponse à cette dernière question, un membre de la délégation thaïlandaise fait valoir que le projet de loi sur la violence domestique visait à aider les victimes de manière plus efficace.  Toutefois, il a affirmé qu’il ne s’agissait pas simplement de punir les auteurs mais de les aider à changer d’attitude.  Nous essayons de réhabiliter les auteurs de ces actes de violence, a-t-il insisté.  En outre, il a expliqué que le projet de loi cherchait à maintenir le cadre de vie familiale de la victime, notant que si l’auteur était emprisonné cela pouvait avoir des conséquences sociales importantes pour toute la famille.  Il a indiqué que ce projet de loi encourageait la médiation et la conciliation, précisant que cela doit être basé sur la volonté de la victime.  S’agissant des sanctions en cas de violence familiale, il a fait valoir qu’une peine moins importante avait en effet été attachée à ces actes mais que la victime pouvait également avoir recours au Code pénal. 


En réponse à la question de l’experte du Ghana sur le viol conjugal, il a admis que ce sujet était un problème très controversé au sein de la société thaïlandaise.  Un projet de loi criminalisant cet acte a fait l’objet d’un vif débat au Conseil d’État, a-t-il indiqué.  Il a ajouté que la question avait été confiée à un groupe de travail spécial afin de sortir de cette impasse et qu’un compromis avait été atteint l’année dernière.  On prévoit d’élargir les circonstances qui permettraient de criminaliser cet acte, comme la transmission de maladie par le mari à la femme, a-t-il précisé.  Avec ce modèle, a-t-il poursuivi, nous pensons que le texte sera accepté par les parties concernées et que nous pourrons ainsi relancer cette question.  Enfin, il a affirmé que le pays est ouvert aux recommandations du Comité afin d’être, autant que possible, en conformité avec la Convention sur cette question. 


Répondant aux questions sur la traite des femmes, un autre membre de la délégation a expliqué que le pays avait des programmes administrés par plusieurs ministères et qui mettaient l’accent sur la lutte contre la pauvreté, principal facteur de ce phénomène.  Elle a de plus annoncé qu’une loi pour éliminer la traite des personnes devait entrer en vigueur en 2007 et que ses dispositions permettraient de mieux protéger les femmes et les enfants.  Elle a souligné que son pays s’employait aussi à aider les personnes originaires d’autres États et victimes de traite et d’exploitation en Thaïlande.  Nous avons assisté plus de 2000 victimes de la traite afin de les rapatrier chez elles notamment, a-t-elle insisté.  Par ailleurs, elle a rappelé qu’un Plan sur la prévention de la traite transnationale avait été adopté par le Parlement en 2003.  Elle a fait part de la mise en place d’indicateurs afin d’obtenir un bilan réel de la situation.  La lutte contre la traite des personnes est au rang des priorités nationales, a-t-elle avancé, en notant que le Gouvernement travaillait notamment en collaboration et en appuyant financièrement les ONG en ce qui concerne l’aide aux victimes.  Des fonds spéciaux à cet égard ont été inscrits pour l’exercice budgétaire 2005, a-t-elle conclu. 


Abordant la coopération internationale dans le cadre de lutte contre la traite des personnes, une autre membre de la délégation a fait part, au niveau bilatéral, de la conclusion de mémorandums d’accords avec le Cambodge en 2003 et la République démocratique populaire lao en 2005.  Des négociations dans ce sens sont actuellement en cours avec le Viet Nam, a-t-elle ajouté.  Elle a aussi souligné, qu’au niveau sous-régional, une coopération existait entre les pays du bassin du Mékong pour lutter contre la traite des  personnes et qu’un accord était en cours d’application en ce moment.  Le but est de mettre en place des mesures visant à réduire les disparités économiques entre les différents pays, une des raisons principales de la traite des personnes selon elle. 


Engageant une autre série de questions, l’expert des Pays-Bas, CORNELIS FLINTERMAN, a souhaité avoir des éléments sur la ratification du Protocole facultatif.  Est-il possible pour les femmes victimes de la violation de leurs droits d’invoquer les dispositions de la Convention et de son Protocole devant les tribunaux?  Est-ce que le Gouvernement thaïlandais a bien fait connaître à la population cette Convention?  L’experte de l’Allemagne, HANNA BEATE SCHÖPP-SCHILLING, a demandé si le projet de loi antidiscrimination stipule expressément la possibilité de recourir à l’application de mesures temporaires spéciales pour lutter contre actes discriminatoires quotidiens à l’égard des femmes?  Le fait de rassembler femmes et enfants dans un même Bureau du Ministère du développement social, est-ce que cela n’entretient pas les stéréotypes sur le rôle attribué à la femme?


De même, l’experte du Portugal, MARIA REGINA TAVARES DA SILVA, a souhaité savoir si, eu égard au statut administratif du Bureau des affaires féminines et familiales, le Gouvernement thaïlandais avait vraiment les moyens de promouvoir l’intégration des femmes dans tous les secteurs de la société.  L’experte de la Hongrie, KRISZTINA MORVAI, a demandé si le fait que la Thaïlande soit considérée comme le centre sexuel du monde était une image qui gênait le pays?  Traitez-vous seulement le problème de la traite des femmes ou est ce que le Gouvernement veut aussi se débarrasser du tourisme sexuel?  Y a-t-il eu des recherches pour évaluer la part qui revient dans l’économie nationale du commerce lié directement ou indirectement au tourisme sexuel?


Répondant à cette dernière question, un membre de la délégation thaïlandaise, a reconnu que cette image était effectivement gênante, et avait fait l’objet de débat parmi les intellectuels et les membres du Gouvernement.  En revanche, dire que le tourisme est lié au seulement au tourisme sexuel est faux parce que la Thaïlande offre aussi de beaux paysages et surtout l’écotourisme, a-t-elle avancé.  Il s’agit là d’une question politique qui exige une réflexion profonde, notamment en matière de coordination.  L’économie est enrichie par le tourisme, mais le tourisme n’a pas besoin du tourisme sexuel, a estimé l’intervenante.


S’agissant de l’application des dispositions de la CEDAW, a dit le Ministre thaïlandais, elles ne peuvent être directement invoquées devant les tribunaux nationaux.  C’est au gouvernement de transformer les engagements internationaux pour qu’ils soient intégrés dans la législation nationale.  Donc il est important pour la Thaïlande de compléter et de réformer notre législation nationale dans un premier temps.  Par exemple, a-t-il expliqué, s’agissant de l’article 16 de la Convention, sur laquelle la Thaïlande avait émis une réserve, la première chose que nous allons faire c’est de réformer notre loi nationale, pour la mettre en harmonie avec la Convention. Après quoi, le Gouvernement pourra retirer sa réserve. Quand un tribunal national est saisi, il se réfère d’abord à la loi nationale et ensuite essaye d’interpréter les instruments du droit international. Mais ceci n’est pas écrit explicitement dans le jugement qui est rendu.


Sur le Protocole facultatif, un autre membre de la délégation a déclaré qu’aucune affaire n’était connue des autorités concernant des dépôts de plaintes de femmes thaïlandaises ayant invoqué le Protocole, ce qui veut dire que toutes les affaires peuvent être réglées dans le cadre des lois nationales.  En ce qui concerne le Bureau du Ministère du développement social consacré aux femmes et à la famille, elle a indiqué que cela ne posait aucun problème particulier parce qu’il existe en son sein deux entités distinctes qui dans certains cas seulement travaillent ensemble.   


Abordant la deuxième partie de la Convention qui regroupe les articles 7, 8 et 9 de la Convention qui portent sur la vie politique, la représentation et la nationalité, HEISOO SHIN, experte de la République de Corée, a estimé que la Thaïlande devait fournir plus d’efforts sur ces questions.  Elle a souhaité des statistiques plus précises sur le nombre de femmes qui votent.  De plus, elle a constaté des chiffres contradictoires concernant le nombre de femmes chefs de village ou juges.  Une collecte plus systématique de données doit être développée à l’avenir afin d’identifier les problèmes et y remédier, a-t-elle lancé à la délégation.  Dans le domaine politique, elle a espéré que lors des élections sénatoriales de cette année un plus grand nombre de femmes seraient élues, encourageant le pays à œuvrer à la parité entre les sexes, notamment au sein des partis.  Enfin, elle s’est arrêtée sur la nécessité d’augmenter le nombre de femmes diplomates.  L’experte de la Chine, ZOU XIAOQIAO, s’est intéressée à la situation des populations tribales des collines.  Demandant de plus amples informations à ce sujet, elle a voulu savoir quelles étaient les mesures prises pour protéger cette minorité et la place de la corruption dans l’octroi de la citoyenneté à ses membres. 


En réponse à cette dernière interrogation sur la place de la corruption, un membre de la délégation a admis que ce phénomène avait été reconnu.  Si quelqu’un est trouvé coupable, il sera puni, a-t-elle avancé.  Elle a aussi déclaré que l’octroi de la citoyenneté dépendait de différents facteurs et que les procédures pouvaient être longues pour déterminer l’éligibilité d’un membre d’une minorité à la citoyenneté.  Elle a affirmé que le Gouvernement voulait accélérer ce processus pour que ces populations puissent obtenir la pleine citoyenneté.  Par ailleurs, s’agissant de la présence des femmes dans le service diplomatique, elle a indiqué que ce chiffre s’élevait à 521 contre 561 hommes.  Il y a eu une forte augmentation du nombre de femmes dans ce secteur et la tendance est très positive car il y maintenant plus de femmes que d’hommes qui entrent dans le service diplomatique depuis 2002, a-t-elle fait valoir.  Elle a toutefois admis que les hommes ont été mieux représentés au niveau supérieur de la hiérarchie mais que ce problème diminuerait de fait au fil du temps.  Enfin, un autre membre de la délégation thaïlandaise a affirmé que le Gouvernement s’apprêtait à lancer une publication portant sur les statistiques dans l’administration du pays.  Ce document, qui doit voir le jour en avril, sera transmis au Comité, a-t-elle précisé. 


FRANÇOISE GASPARD, experte de la France, a souhaité obtenir des précisions sur les conditions d’attribution de la nationalité thaïlandaise.  Dans le cas d’une Thaïlandaise qui épouse un étranger quelle est la nationalité des enfants ?


Répondant, un membre de la délégation a reconnu qu’il s’agissait là d’un élément controversé dans le droit national thaïlandais.  Il a affirmé qu’une proposition d’amendement du droit pour harmoniser les droits des citoyens de femmes et d’hommes avait été faite par le Gouvernement en 1996.  Mais ce projet de texte, a-t-il expliqué, a fait d’objet d’objections par certaines organisations parce que c’était une période où il y avait beaucoup d’étrangers qui rentraient dans notre pays.  Finalement, la Commission nationale des femmes a insisté pour que la réforme de la loi sur la nationalité soit reconsidérée.  L’intervenant a ensuite indiqué qu’une proposition avait alors été faite visant à une modification législative qui accorderait la nationalité thaïlandaise, non pas selon le sexe, mais selon des critères liés à la sécurité du pays.  C’est une proposition qui est actuellement à l’étude, a-t-il précisé.  Enfin, pour ce qui est de la nationalité d’un enfant né d’un père étranger, il peut avoir la nationalité thaïlandaise par sa mère.


Engageant une nouvelle série de questions, sur les articles 10 à 14 de la Convention, l’experte cubaine a demandé des renseignements supplémentaires sur la scolarisation des filles par rapport aux garçons après 2002.  Quelle évaluation a été faite par le Gouvernement pour ce qui est de l’abandon scolaire des filles en 2001-2002?  Quelle en est l’incidence sur ces filles?  Par ailleurs, qu’en est-il de la santé sexuelle, dans le plan de santé du Programme de développement 2003-2006 du Gouvernement?


Pour sa part, l’experte du Bangladesh, SELMA KHAN, a souligné que beaucoup de femmes ayant un emploi souffraient de maladies en raison de lacunes des règlements sanitaires sur les lieux de travail.  Elle a aussi noté que les femmes travaillant à leur domicile étaient défavorisées en ce qui concerne les salaires.  Y a-t-il des mécanismes pour mettre au courant les employées des risques pour leur santé?  De plus, y a-t-il des dispositions garantissant un salaire minimum aux travailleuses à domicile? a-t-elle demandé.  Elle s’est aussi interrogée sur la prise de mesures relatives au VIH/sida qui reflètent les préoccupations de parité ou encore ciblant les groupes marginaux, notamment les prostituées ou les femmes migrantes.  S’agissant du tsunami, elle a voulu connaître ses conséquences sur la santé des femmes, constatant que dans certains groupes, celles appartenant à des minorités se trouvaient dans une situation très précaire. 


L’experte du Bangladesh, SALMA KHAN, a insisté sur la situation particulièrement difficile des femmes dans les provinces du Sud.  Elle a demandé si des mesures avaient été introduites, notamment pour soutenir économiquement les veuves devenues chefs de famille suite aux troubles dans cette région.  Elle a lancé un appel au Gouvernement thaï pour que ces femmes musulmanes du Sud aient accès à l’éducation et à des possibilités économiques.  L’experte du Brésil a demandé s’il existait des politiques et campagnes sur les responsabilités communes des hommes et des femmes en matière de santé de la reproduction.  Sur la question de l’avortement, elle a souhaité savoir si le Gouvernement allait réviser la législation existante pour surmonter les conséquences néfastes des avortements sans assistance médicale. 


FUMIKO SAIGA, experte du Japon, a souhaité savoir si le programme de crédit populaire fournissait les mêmes services aux hommes et aux femmes.  Saluant les efforts du Gouvernement quant à l’amendement de la loi relative au nom, l’une des recommandations du Comité en 1999, elle a toutefois noté que le texte limitait tout de même l’accès au crédit des femmes qui, lorsqu’elles sont mariées, doivent de toute manière obtenir le consentement par écrit de leur conjoint.  De plus, elle s’est interrogée sur la situation des nonnes bouddhistes.  Pour sa part, l’experte de la Chine a estimé que le rapport ne fournissait pas assez d’informations sur la situation des femmes en milieu rural, notamment sur celles appartenant à des minorités.  Notant que neuf groupes minoritaires étaient reconnus en Thaïlande, elle a voulu connaître la politique du Gouvernement à leur égard, particulièrement en ce qui concerne la promotion de la croissance économique.


Répondant aux questions relatives à l’emploi, un membre de la délégation a noté que la parité dans le recrutement était inscrite dans la législation.  Il existe également des mesures de protection pour les femmes, a-t-il noté, entre autres, un congé de maternité de 90 jours et une interdiction pour les femmes enceintes de faire des tâches difficiles.  Il a reconnu qu’il n’existait pas de salaire minimum pour les travailleurs à domicile mais que ceux-ci étaient protégés par la réglementation générale.  Un autre membre de la délégation a précisé que le Gouvernement attachait une grande importance à la question de ses ressortissants travaillant à l’étranger.  Elle a fait valoir que le Gouvernement protégeait les droits et aidait les travailleurs qui ont été trompés par les promesses de futurs employeurs à l’étranger, les femmes étant victimes de traite notamment.  Les ambassades et consulats agissent au nom du Gouvernement auprès des victimes de la traite à l’étranger pour qu’elles soient traitées comme victimes et non comme criminelles et pour les aider à rentrer en Thaïlande au plus vite.  Elle a en outre souligné l’importance des efforts de prévention, notamment en informant les femmes des risques. 


Sur les questions liées à la santé, un membre de la délégation a déclaré qu’un grand pourcentage de la population, et notamment les plus pauvres, avaient désormais accès aux soins de santé.  Elle a aussi relevé que le pays possédait 8 000 centres de santé et des unités mobiles afin de toucher les plus marginalisés comme les minorités en zone rurale.  S’agissant des taux de mortalité maternelle et infantile, elle a fait observer qu’ils étaient plus élevés parmi les tribus des collines.  Nous prêtons désormais une plus grande attention à ce problème et avons l’intention de réduire ces taux de moitié d’ici 2010.  La représentante a aussi fait valoir que son pays assurait l’accès à l’information sur les méthodes de contraception et la santé génésique.  Nos hôpitaux publics et centres sanitaires font partie de ce réseau d’information et nous organisons des campagnes pour encourager le recours au préservatif, a-t-elle ajouté.  En ce qui concerne l’avortement, elle a expliqué que l’avortement était légal si la grossesse affectait la santé physique ou mentale de la mère.  Enfin, cette représentante a aussi avancé que son pays mettait l’accent sur des politiques et programmes visant à réduire la population mais que les femmes étaient réfractaires à ces mesures et n’y avaient pas recours. 


Concernant l’éducation, un membre de la délégation a indiqué que plus de garçons quittaient l’école que de filles aux niveaux primaire et secondaire.  Elle a fait valoir que la progression des taux de scolarisation depuis 1998 était encourageante, notant qu’une parité existait à partir du niveau moyen.  Pour l’enseignement supérieur, il y a plus de femmes que d’hommes qui suivent ces cours, a-t-elle ajouté.  Faisant part des divers programmes de bourses fournis par le pays, elle a souligné qu’il y avait plus de femmes boursières que d’hommes, 63% des bourses leur étant attribuées.  Une représentante thaïlandaise a fait part de la situation dans le sud du pays.  Le Gouvernement considère ce problème comme une priorité nationale et désire réinstaurer la stabilité dans la région par des moyens pacifiques, a-t-elle affirmé.  Elle a estimé que la compréhension et l’appui internationaux étaient primordiaux.  Tous les décès non naturels ont fait l’objet d’enquête, a-t-elle ajouté, en insistant sur les efforts de conciliation.  Elle a déclaré que le Gouvernement tentait d’aider toutes les personnes touchées par cette situation sans distinction de religion ou de sexe.  Elle a de plus affirmé que la Commission prévue à cet effet s’était heurtée à des obstacles majeurs dans ses activités en raison de la situation sécuritaire et du problème de la langue.  La Commission a fait des recommandations pour que les organisations compétentes fournissent une assistance supplémentaire, dont l’éducation des orphelins, l’assistance des veuves, aux invalides et blessés, a-t-elle expliqué. 

De même, s’agissant du tsunami, elle a expliqué que son pays avait réagi rapidement à cette catastrophe pour assister les victimes quel que soit leur statut.  Toutes les victimes ont été traitées sans discrimination, a-t-elle insisté.


Répondant à la question de l’experte du Japon sur la situation des religieuses, un membre de la délégation thaïlandaise a expliqué que les nonnes bouddhistes n’étaient pas nonnes comme dans la religion chrétienne.  Elles ne font pas forcément partie d’un ordre et peuvent décider seules de devenir nonnes, a-t-il insisté.  Pour être réellement reconnues, les religieuses bouddhistes doivent être consacrées par une autre religieuse femme et il y en a peu, a-t-il poursuivi.  En outre, il a souligné que des groupes de nonnes avaient organisé un institut national thaï mais que celui-ci n’avait pas de statut juridique.  Le projet de loi à cet effet n’a guère avancé au Parlement, a-t-il reconnu, en notant que la nécessité de ce statut juridique faisait débat. 


Questions de suivis à la partie III, articles 10 a 14


L’experte de Singapour, ANAMAH TAN, se référant à l’article 14, traitant du rôle des femmes rurales dans la survie de leur famille, s’est interrogée sur l’assistance de l’État thaïlandais aux enfants étrangers qui vivent dans les zones rurales.  Comment les mesures prévues par le Gouvernement en matière d’éducation s’appliquent-elles aux enfants qui n’ont pas la nationalité?  Comment l’assistance de l’État aux victimes de la traite des femmes s’applique-t-elle aux femmes étrangères?  L’experte de la Hongrie a demandé si le Gouvernement s’était penché sur la situation des enfants en zone rurale qui ne disposaient pas d’actes de naissance.  Quant aux jeunes filles enceintes, a-t-elle ajouté, peuvent-elles poursuivre leur scolarité, pour ne pas avoir à choisir entre éducation et maternité?  Se référant aux différentes catégories de travailleurs à domicile mentionnées dans le rapport de la délégation thaïlandaise, l’experte de l’Allemagne a souhaité savoir si le système gouvernemental de sécurité sociale couvrait aussi les travailleurs à domicile non rémunérés.  Elle s’est ensuite interrogée sur l’identité et le salaire élevé des sous-traitants: qui sont-ils, des hommes ou des femmes? Pourquoi les sous-traitants gagnent deux fois plus que les autres domestiques?


Revenant d’abord sur une question posée par l’experte de Singapour sur l’accès au crédit, un membre de la délégation a souligné qu’il y avait des données qui montraient que depuis que le Gouvernement avait institué la Banque populaire, 80% des femmes, notamment de zones rurales, avaient sollicité des prêts.  Des études ont également montré que les femmes membres des Fonds communautaires des comités villageois étaient bien plus responsables dans la gestion de ces fonds.  La constance des femmes dans le suivi de ceux qui ont emprunté est à l’origine du succès de ces Fonds communautaires, s’est-elle félicitée.  Elle a par ailleurs reconnu que le Gouvernement thaïlandais ne disposait pas encore de données ventilées sur le nombre de femmes ayant accès à la propriété.  Quant à la question de la vulnérabilité des femmes rurales menacées de devenir des prostituées, il y a des programmes de bourses pour que les jeunes filles aillent plus longtemps à l’école, a conclu l’intervenante. 


Une représentante de l’État partie s’est exprimée sur l’assistance aux victimes non thaïlandaises de la traite des femmes.  Si on peut prouver que ces femmes ou filles ont résidé en Thaïlande, qu’elles aient des papiers ou non, elles pourront être aidées.  Il suffit d’avoir des preuves et nous examinerons cela au cas par cas, au nom de raisons humanitaires, a-t-elle dit.


Revenant sur la question de l’avortement, une des représentantes de l’État partie a déclaré que le médecin avait l’autorisation de mettre un terme à la grossesse s’il y avait des risques pour la santé physique ou mentale de la mère.  Mais le Gouvernement et les ONG ont mis en place une autre alternative en incluant la possibilité de bénéficier quelques services: la femme peut rester à la maison et recevoir une formation professionnelle jusqu’à ce qu’elle accouche.  La recherche d’une famille pour l’enfant est également entreprise si nécessaire, a-t-elle conclu.


Entamant une série de questions sur les articles 15 et 16 de la Convention relatifs à l’égalité des femmes devant la loi et aux questions de la vie familiale, l’experte de la République de Corée s’est félicitée que la réserve sur l’article 16(g) ait été levée mais a noté que sept autres points devaient être résolus concernant l’article 16 dans son ensemble.  Elle a aussi indiqué qu’elle n’avait pas compris les explications fournies en ce qui concerne la loi qui prévoit qu’un homme n’est pas puni s’il a une relation sexuelle avec une fille de 13 à 15 ans par erreur mais décide ensuite de l’épouser.  Affirmant que l’âge du mariage doit être ramené à 18 ans, elle a estimé inconcevable de ne pas poursuivre un homme lorsqu’il a une relation sexuelle avec une enfant.  Elle a jugé absurde que le droit thaïlandais impose l’expiration d’un délai de 310 jours avant le remariage.  Elle s’est aussi étonnée que le mari donne au préalable son consentement pour la stérilisation.  L’homme, a-t-il besoin de l’accord de sa femme pour subir la même procédure?  S’agissant de la violence conjugale, elle a appelé la délégation à envoyer un message clair aux hommes pour leur expliquer que battre leur femme est un crime. 


En réponse, un membre de la délégation thaïlandaise a expliqué que le Gouvernement faisait de son mieux pour lever les réserves sur l’article 16 de la Convention.  Il a affirmé que le seul problème restant concernait le paragraphe c) de l’article 16, portant sur le divorce et la rupture des fiançailles, où subsistaient encore une discrimination.  Nous essayons de remédier à cette situation mais de nombreuses instances chargées de la réforme judiciaire élèvent des objections en affirmant que la loi sur la famille est sacrée car elle constitue le fondement de la société, a-t-il regretté.  Pour ce qui est  de la possibilité d’éviter une peine en épousant une fille de 13 à 15 ans, il a indiqué que cette exception concernait avant tout les provinces du Sud du pays dans lesquelles la loi islamique a toujours cours et permet aux femmes de se marier dès qu’elle arrivent à la puberté, souvent avant l’âge de 15 ans.  Comment peut-on punir un mari en l’accusant de violer sa femme si elle a consenti au mariage? s’est-il interrogé.  Toujours sur ce sujet, il a avancé que si les deux familles s’entendaient, on ne pouvait les empêcher de contracter un mariage.  La loi prévoit un âge minimum de 18 ans pour se marier, a-t-il ajouté, mais elle fait aussi état de cas exceptionnels avec l’autorisation d’un tribunal.  S’agissant des 310 jours après la dissolution du mariage, il a déclaré que cette disposition visait à éliminer les incertitudes en cas de grossesse.  Il a affirmé qu’il y avait encore certains avantages à maintenir ce principe car le fardeau de la preuve incombait au mari puisque c’est à lui de prouver s’il est le père. 


Concernant la violence domestique, le Ministre a déclaré que selon les psychiatres, dans beaucoup de cas de violence, l’homme avait un esprit « mal formé ».  Si on le met en prison, on empêche la société de l’aider et de le guérir et on empêche le coupable de redevenir une personne normale, a-t-il estimé.  Il a affirmé que dans le cas d’une récidive de violence, les autorités judiciaires pouvaient intervenir.  Il a admis qu’il fallait peut-être reformuler le projet de loi sur la violence conjugale en cours d’examen de sorte qu’il prévoit de meilleures garanties pour la femme. 


Apportant des précisions sur cette question de la violence domestique, un membre de la délégation a assuré tenter de trouver un juste équilibre entre les lois et les mentalités.  Elle a admis que les inégalités persistaient mais a fait valoir que les femmes thaïlandaises jouaient un rôle important dans la société et exerçaient une très grande influence.  Nous pouvons bien sûr mieux faire et c’est la raison de notre présence ici et de notre travail avec les ONG, a-t-elle poursuivi.  Elle a déclaré que le Gouvernement s’efforçait de faire évoluer les mentalités afin d’obtenir un résultat plus solide qu’en procédant uniquement sur la base de la loi. 


Reprenant des questions sur les articles 15 et 16, l’experte de la Jamaïque, après avoir félicité la délégation thaïlandaise pour sa présentation, a remarqué que l’introduction en Thaïlande de la vasectomie comme moyen de contraception n’avait pas donné les résultats escomptés.  Peut-être faut-il alors un programme de sensibilisation destiné aux hommes pour leur expliquer que la vasectomie n’est pas la fin de leur sexualité, a-t-elle suggéré.  


L’experte de la Croatie a demandé quelle était la place de la Convention dans la hiérarchie des normes en droit thaïlandais?  Selon elle, la Thaïlande considère cette Convention comme une Déclaration et non comme un instrument juridique contraignant.  Il s’agit pourtant d’un instrument juridique international contraignant dont les dispositions doivent être incorporées sans délai dans la législation nationale, a-t-elle insisté.  S’exprimant également sur le cadre juridique, l’experte de l’Algérie s’est étonnée de voir que toutes les femmes, en particulier les femmes musulmanes des provinces du sud du pays et les populations autochtones, n’étaient pas soumises aux mêmes lois sur l’ensemble du territoire.  Avec le système de lois spécifiques pour ces femmes, le Gouvernement établit une discrimination entre les Thaïlandaises, a déploré Mme Belmihoub-Zerdani, qui a estimé que des solutions pouvaient être trouvées.  L’experte de Singapour a demandé des précisions sur les mesures prises par le Gouvernement pour que le mari verse une pension alimentaire à son ex-épouse, en cas de divorce.


L’experte de l’Allemagne est revenue sur un point de la Constitution thaïlandaise qui précise qu’un traitement préférentiel accordé aux femmes dans certaines situations n’était pas discriminatoire. Ceci contredit l’article 4.1 de la Convention, a-t-elle souligné.  Elle a rappelé que le Comité avait expliqué, dans une recommandation générale, que les mesures temporaires étaient les plus appropriées à condition que le pays veuille accélérer l’application de la Convention. Or, il semble que les mesures prises actuellement par le Gouvernement ne reposent pas sur une base juridique contraignante.  Il faut donc que le texte de loi à l’étude contienne une disposition qui fait obligation au Gouvernement d’adopter des mesures temporaires pour mettre fin à la discrimination à l’égard des femmes, a-t-elle insisté.


Répondant d’emblée à cette recommandation, le délégué thaïlandais a justifié le bien-fondé de cette disposition de la Constitution permettant de recourir à des mesures temporaires pour permettre à des individus de jouir de leurs droits.  Il a pris l’exemple du taux de scolarisation qui s’améliorait de plus en plus grâce aux mesures temporaires prises par le Gouvernement en faveur des filles.  Mais il a concédé que dans la loi d’exécution en préparation, il sera mentionné clairement que l’État est tenu de prévoir des mesures temporaires, ce qui permettra par la suite de réglementer en détail cette question.  L’intervenant, qui a estimé que la Convention était un instrument contraignant, a rappelé que cette contrainte ne touchait pas encore le citoyen thaïlandais tant que le Gouvernement ne l’avait pas intégré dans la loi nationale.  S’agissant du droit applicable dans les quatre provinces musulmanes du sud du pays, qui représentent 4 à 5% de la population totale, l’Islam n’est pas seulement une religion, mais un mode de vie, a-t-il dit.  Nous ne pouvons pas imposer notre propre loi humaine contre la loi divine.  C’est la limite que nous nous imposons non pas parce que nous le voulons, mais surtout en raison de la situation qui prévaut dans cette région.


Répondant à une question sur la pension alimentaire, le délégué a indiqué que les tribunaux thaïlandais imposaient une retenue dans le salaire, en demandant à l’employeur de leur verser cette partie su salaire afin qu’elle soit reversée à l’ancienne épouse.  Mais pour échapper à cette mesure, les maris dans bien des cas quittent leur emploi.  Alors comment peut-on imposer le respect de cette mesure si le mari est au chômage? s’est interrogé le délégué qui a estimé qu’il était difficile d’envisager une procédure pénale pour faire face à cette situation. Il a cependant assuré qu’une proposition de loi était à l’examen, mais qu’elle prendrait encore du temps.  Enfin, une dernière intervenante thaïlandaise a pris la parole pour contester l’emploi par les experts du Comité du concept « d’indigène ou autochtone » à l’égard de la Thaïlande.  Nous n’estimons pas avoir de populations autochtones, car celles auxquelles il est fait référence ne vivaient pas en Thaïlande avant la création du pays.


En conclusion, ROSARIO G MANALO, Présidente du Comité et experte des Philippines, a souligné que malgré les efforts de la Thaïlande, il restait beaucoup à faire pour améliorer la situation de la femme dans ce pays, notamment en matière de violence, de traite des femmes et des questions d’ordre conjugal.  Rappelant les nombreux commentaires et recommandations avancés au cours de la journée par les experts du Comité, elle a estimé qu’en les suivant, le Gouvernement du pays pouvait parvenir à véritable amélioration des conditions de vie de la femme thaïlandaise. 


Prenant à son tour la parole, M. MUANGSOOK a souligné l’importance de la Convention comme un des piliers de la promotion de la femme en Thaïlande.  Elle met en lumière les moyens d’éliminer les lois, normes, attitudes et pratiques discriminatoires encore existantes et encourage aussi le dialogue, aux niveaux national et international.  Il a affirmé que la mise en œuvre de la Convention et le processus d’examen qui l’accompagne sont des occasions importantes pour permettre à la Thaïlande de promouvoir des changements positifs.  Cela nous permettra de concentrer notre énergie vers des transformations considérables qui changeront le visage de la Thaïlande et bénéficieront à notre population dans son ensemble.  Remerciant le Comité pour ses recommandations, il a assuré que celles-ci seraient prises en compte. 


Composition de la délégation thaïlandaise


M. Wattana Muangsook, Ministre du développement social et de la sécurité humaine; Mme Khunying Laxanachantorn Laohaphan, Représentante permanente de la Thaïlande auprès de l’ONU; Mme Kanda Vajrabhaya, Ministère du développement social; M. Jaran Pukditanakul, Secrétaire général à la Présidence de la Cour suprême; M. Suwit Kantaroj, Directeur général du Bureau des affaires féminines et du développement de la famille, Ministère du développement social; M. Juree Vichit-vadakan, Institut national pour le développement de l’administration; M. Sathaporn Charupa, Ministère du travail; Mme Mandhana Sangkhakrishna, Ministère de l’éducation; Mme Sriwanna Poolsuppasit, Ministère de la santé publique; Mme Rarinthip Sirorat, Mme Chitrapa Soontornpipit, Ministère du développement social; Mme Phantipha Iamsudha, Mme Thanida Menasavet, Ministère des affaires étrangères; Mme Pratana Phonprapha, Assistante personnelle du Ministre du développement social; Theppalit Keadchai, Assistant personnel du Ministre; Mme Pittha Israngkura Na Ayudhya, Ministère du développement social; Mme Nadariya Nopakun Promoyothi, Mission permanente de la Thaïlande à l’ONU.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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