CS/8891

CONSEIL: CONFRONTÉ À L’INSÉCURITÉ, À LA CORRUPTION ET AU TRAFIC DE STUPÉFIANTS, l’AFGHANISTAN A PLUS QUE JAMAIS BESOIN DU SOUTIEN DE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE

7/12/2006
Conseil de sécuritéCS/8891
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Conseil de sécurité

5581e séance – matin


CONSEIL: CONFRONTÉ À L’INSÉCURITÉ, À LA CORRUPTION ET AU TRAFIC DE STUPÉFIANTS, l’AFGHANISTAN A PLUS QUE JAMAIS BESOIN DU SOUTIEN DE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE


La multiplication des groupes rebelles et terroristes, conjuguée à la hausse des activités liées à la production et au trafic de stupéfiants, constitue la plus grave menace non seulement à la paix et à la sécurité de l’Afghanistan mais aussi à celles de la région d’Asie centrale, ont diagnostiqué, ce matin, les membres du Conseil de sécurité, réunis pour entendre les conclusions du Représentant du Japon qui a dirigé une mission du Conseil en Afghanistan, du 11 au 16 novembre derniers.


À ces fléaux, Kenzo Oshima a ajouté le manque de bonne gouvernance et de primauté du droit, et la corruption qu’il a décrits comme autant de facteurs interdépendants qui alimentent la déception du peuple afghan à l’égard de ses institutions.  Le fait que des seigneurs de la guerre, qui ont commis des violations massives des droits de l’homme, soient encore aux commandes ne fait que renforcer le sentiment d’impunité.


Le représentant japonais a pourtant souligné les efforts notables déployés depuis quatre ans pour réaliser la réconciliation nationale et promouvoir les institutions démocratiques, conformément à l’Accord de Bonn du 5 décembre 2001.  Mais en 2006, les progrès ont été insuffisants.  La situation semble tout particulièrement inquiétante dans le sud et le sud-est du pays où l’État s’avère incapable d’étendre son autorité, laissant prospérer des zones de non-droit. Tout semble indiquer un retour en force des Taliban et ce climat délétère décourage grandement l’investissement privé, indispensable à la lutte contre un chômage endémique.


À la lumière de ce constat, les membres du Conseil et d’autres délégations se sont accordés à reconnaître la responsabilité cruciale de la communauté internationale vis-à-vis de l’Afghanistan; le Pacte pour l’Afghanistan, lancé le 31 janvier 2006, continuant de sceller le partenariat avec le pays.  En l’occurrence, la coopération régionale est apparue comme cruciale pour sécuriser notamment la frontière commune avec le Pakistan, devenu l’itinéraire privilégié des trafiquants de drogues et des groupes rebelles et terroristes.


Ces groupes, a souligné le représentant de l’Afghanistan, bénéficient d’un soutien logistique et matériel de l’extérieur du pays.  Accusé ainsi d’héberger la rébellion, le représentant pakistanais a rétorqué en affirmant que son gouvernement a pris toutes les dispositions pour assurer la sécurité à la frontière.  Le Pakistan a déployé 80 000 hommes et multiplié les avant-postes.  On ne constate pas les mêmes efforts de l’autre côté de la frontière, a rectifié le représentant pakistanais qui a tout de même reconnu que des sympathisants d’Al-Qaïda et des Taliban avaient pu se mêler aux réfugiés afghans qui se sont enfuis dans son pays, ces dernières années.  Il a cependant rejeté catégoriquement les allégations selon lesquelles le Pakistan serait devenu un sanctuaire pour les terroristes islamistes. 


La communauté internationale a été unanimement invitée à redoubler d’efforts dans la fourniture d’une aide financière et matérielle au Gouvernement afghan et à coordonner ses efforts par le biais de la Mission des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) pour ce qui est de l’action humanitaire et du développement, et par celui de la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS), s’agissant de la normalisation de la situation.  La Norvège a annoncé une augmentation de son aide à hauteur de 72 millions de dollars. 


Outre les membres du Conseil et celles déjà citées, les délégations suivantes ont pris la parole: Finlande (au nom de l’Union européenne), Inde, Canada et République islamique d’Iran.


RAPPORT DE LA MISSION DU CONSEIL DE SÉCURITÉ EN AFGHANISTAN


Exposé


Présentant les conclusions de la mission du Conseil de sécurité qu’il a dirigée en Afghanistan du 11 au 16 novembre dernier, M. KENZO OSHIMA (Japon) a fait état des efforts notables du peuple afghan et de la communauté internationale depuis quatre ans pour réaliser la réconciliation nationale et promouvoir les institutions démocratiques, conformément à l’Accord de Bonn.  L’Afghanistan doit continuer de connaître la croissance économique, d’élargir ses activités commerciales et ses investissements et de reconstruire ses infrastructures, a-t-il encouragé, avant de se féliciter du Pacte pour l’Afghanistan, qui a permis de jeter des bases solides pour le développement et la stabilité.


Toutefois, en 2006 les progrès n’ont pas été évidents, a regretté le représentant, qui a fait état d’efforts inégaux pour rétablir la bonne gouvernance et la primauté du droit, lutter contre l’insécurité, la résurgence du trafic de stupéfiants et la corruption, autant de facteurs qui alimentent la déception des Afghans à l’égard de leurs institutions.  La mission du Conseil a reconnu que le pays devait entamer sa reconstruction après des décennies de conflits, a souligné le représentant du Japon.  Dans un tel contexte, le calendrier et la marche à suivre seront différents de l’accoutumée, a-t-il prévenu, soulignant que ces processus ne pourront pas être terminés rapidement.  Parvenu aujourd’hui à un carrefour, le pays est confronté à plusieurs défis, notamment sur le plan sécuritaire.  Un engagement de la communauté internationale pour appuyer la transition du pays est indispensable, a déclaré M. Oshima, pour qui le Pacte demeure le garant du partenariat avec l’Afghanistan.


La sécurité y demeure la préoccupation principale, a poursuivi le représentant, qui a informé les membres du Conseil de la recrudescence inquiétante d’incidents violents au printemps et cet été dans plusieurs régions du pays.  Évoquant ensuite des activités rebelles et terroristes, il a affirmé que tout semblait indiquer un retour en force des Taliban, notamment en raison de l’incapacité du Gouvernement à assurer la sécurité et à fournir des services sociaux de base à sa population.  En outre, l’industrie des stupéfiants joue un rôle important dans le financement de la rébellion.  La mission du Conseil a certes été informée de recrutements vigoureux par la police nationale en vue de renforcer ses effectifs, tandis que la FIAS continue de déployer des efforts.  Mais une meilleure coordination entre les forces internationales et le Gouvernement afghan est plus que jamais nécessaire pour mettre fin à la corruption et à la culture d’impunité qui règnent actuellement dans le pays.


En matière de gouvernance, le représentant a expliqué que le Gouvernement manquait d’administrateurs pour renforcer la capacité des institutions naissantes et soutenir un service public véritablement efficace.  Le chômage est omniprésent dans le pays, et pour y remédier, il faudrait attirer l’investissement privé, mais les conditions de sécurité décourageantes ne le permettent pas.  Décrite comme un véritable cancer qui ronge le pays, l’expansion du trafic de drogues constitue la menace la plus grave qui pèse actuellement sur le pays, ont estimé la plupart des interlocuteurs de la délégation du Conseil de sécurité.  Selon M. Oshima, la coopération régionale peut jouer un rôle efficace pour résoudre les problèmes sécuritaires qui sont souvent de nature transfrontière.


Le représentant du Japon a affirmé que la propagation des activités terroristes et rebelles, conjuguées aux activités liées à la production et au trafic de stupéfiants, constituait la plus grave menace à la paix et à la sécurité nationales.  Le Conseil de sécurité devra donc œuvrer pour que le Pacte de coopération passé entre le Gouvernement afghan et la communauté internationale soit pleinement mis en œuvre.  Les forces internationales sont également priées de renforcer leur engagement vis-à-vis de la FIAS.  Il est important de mettre des forces de police vraiment efficaces.  Le Gouvernement doit en outre s’efforcer de rétablir l’état de droit en remplaçant les fonctionnaires corrompus et les courtiers locaux du pouvoir. 


Un accent particulier devra aussi être mis sur la protection des droits de l’homme, a poursuivi le représentant.  Pour ce qui est de la coordination et de l’acheminement de l’aide humanitaire, l’assistance devrait être fournie au niveau des collectivités pour obtenir des résultats visibles.  Il faut également encourager la communauté rurale à s’éloigner de la culture du pavot et à reprendre des activités légales.  Enfin, le représentant a demandé que la liste établie en vertu de la résolution 1267 (1999) continue d’être réactualisée sur la base d’informations régulièrement mises à jour.  Il a conclu en demandant à tous les États Membres de fournir à la MANUA les ressources dont elle a besoin pour s’acquitter de son mandat.


Déclarations


Il ne faut pas sous-estimer les défis et les obstacles auxquels fait face l’Afghanistan, a averti M. LARS FAABORG-ANDERSEN (Danemark).  Le processus entamé avec l’Accord de Bonn et le Pacte pour l’Afghanistan est en bonne voie ainsi que les stratégies adéquates.  Cependant, a nuancé le représentant, le maintien d’un engagement fort et à long terme de la part du Gouvernement de Kaboul et de la communauté internationale demeure essentielle.  Si des progrès considérables ont été accomplis, des menaces persistent, a prévenu le représentant, en citant les groupes armés tels que les Taliban, le règne des seigneurs de la guerre et d’autres éléments criminels, la faible présence du Gouvernement central en dehors de Kaboul ainsi que le niveau de corruption et d’impunité dans la haute administration.  Ces menaces, a-t-il souligné, ont affecté la confiance de la population envers l’État.  En outre, on est face à un cercle vicieux.  En effet, l’absence de développement et de possibilités d’emplois productifs entretient l’insécurité et vice versa.


La seule façon de briser ce cycle est, selon la délégation danoise, de persévérer dans ce qui a été entrepris par le Gouvernement national, la communauté internationale et la Mission de l’ONU.  Il faut donc continuer à améliorer le rôle de l’administration, en particulier dans le soutien à la paysannerie pour offrir une alternative à la culture du pavot.  Il faut aussi continuer à renforcer l’état de droit en traduisant les corrompus en justice et en protégeant les droits de l’homme, dont ceux des femmes qui sont de plus en plus attaqués.  Il faut enfin continuer à consolider l’armée et la police, tout en améliorant la coordination entre les Afghans et les forces internationales.


Le représentant du Danemark a aussi souligné la nécessité d’une meilleure coordination de l’aide pour mieux exploiter les ressources limitées.  À cet égard, a-t-il plaidé, le rôle de la Mission de l’ONU doit être renforcé.  Concernant la justice, il a argué que le fait que d’anciens seigneurs de la guerre, qui ont commis des violations massives des droits de l’homme, continuent de jouer un rôle public perpétue la culture de l’impunité et affecte la confiance de la population dans l’état de droit.  Le représentant a conclu en soulignant l’importance de la coopération régionale, en particulier avec le Pakistan voisin.  La bataille contre l’insurrection ne peut être gagnée tant que celle-ci bénéficiera de sanctuaires.


M. EMYR JONES PARRY (Royaume-Uni) a rappelé l’engagement à long terme de son pays en faveur de l’Afghanistan, en l’illustrant par la visite que son Premier Ministre a effectuée à Kaboul, le 20 novembre dernier.  Le représentant s’est félicité de la priorité accordée à la sécurité.  La capacité des forces de l’ordre, en particulier de la police, doit être renforcée et consolidée.  Si cela n’est pas fait, la confiance de la population dans l’État en sortira sapée, a-t-il prévenu.  S’agissant du trafic de drogues, il l’a qualifié de plus grande menace qui pèse sur le pays.  Nous devons accroître notre assistance sur le long terme, a-t-il préconisé, en se félicitant qu’une nouvelle mission d’établissement des faits se trouve actuellement en Afghanistan pour permettre à l’Union européenne d’améliorer son action.  Concernant la situation des femmes, le représentant a reconnu certains progrès depuis 2001.  Mais, a-t-il tempéré, beaucoup reste à faire, entre autres en matière d’éducation.  Il a demandé au Gouvernement de Kaboul de laisser toute la latitude requise au Ministère de la condition féminine.  Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre notre élan, a-t-il conclu, non sans avoir souligné le caractère essentiel de la coopération entre Kaboul et Islamabad pour éliminer la menace des Taliban.  À cet égard, la tenue de jirga transfrontalières peut se révéler le forum idoine.


M. JORGE VOTO-BERNALES (Pérou) a souligné que, si le rapport reconnaît l’existence de progrès encourageants en Afghanistan, notamment dans la réhabilitation des infrastructures, la situation y reste précaire.  Malgré l’enthousiasme soulevé par le Pacte, de graves menaces continuent de compromettre les acquis.  Les efforts pour consolider l’état de droit ont été insuffisants et le pays traverse une transition délicate.  La réapparition des Taliban dans le sud et l’est du pays et l’aggravation de l’insécurité ne font qu’alimenter les activités illégales telles que le trafic d’opium, qui représente aujourd’hui 60% du PNB du pays.  La criminalité, la corruption et le trafic de stupéfiants sont des activités qui vont de pair.  À moins d’y mettre fin, ces facteurs conjugués ne feront que saper la stabilité du pays et provoquer une situation de sous-développement structurel.  L’assistance de la communauté internationale est donc indispensable, notamment à l’appui de la création d’emplois, dans la mesure où l’absence de perspectives ne fait qu’inciter les plus démunis à rejoindre les groupes rebelles ou à se livrer à des activités illégales, a conclu le représentant.


Mme JACKIE WOLCOTT SANDERS (États-Unis) s’est félicitée de l’appui apporté par la communauté internationale à l’Afghanistan et à sa transition démocratique.  Elle a salué l’action de la FIAS et de l’OTAN qui contribuent à la sécurité du pays malgré de nombreux défis.  La mission du Conseil, a-t-elle poursuivi, a démontré que l’appui de la communauté internationale est loin d’être réduite.  Aussi, la représentante a-t-elle affirmé que son Gouvernement attend avec intérêt de travailler avec le Gouvernement afghan pour stabiliser le pays, par le biais de la mise en œuvre du Pacte pour l’Afghanistan.  Elle a insisté sur l’engagement des États-Unis à travailler avec le Gouvernement afghan, les partenaires de la FIAS et les Nations Unies pour consolider la stabilité et les progrès dans le pays.


M. LIU ZHENMIN (Chine) a déclaré que la sécurité demeure la principale préoccupation en Afghanistan, un pays qui a besoin de l’assistance de la communauté internationale.  Il faut en outre hâter la reconstruction économique en mettant en œuvre le Pacte pour l’Afghanistan et les stratégies nationales du Gouvernement.  Le représentant a ensuite affirmé que la culture du pavot constitue une menace contre laquelle il faut lutter vigoureusement.  La Chine a donc encouragé l’ONU et la MANUA à jouer un rôle plus important dans le maintien de la paix et le renforcement de la sécurité en Afghanistan.  Pour sa part, en tant que pays voisin, la Chine reste engagée en faveur du rétablissement de la paix et de la prospérité dans ce pays, a conclu le représentant.


M. VITALY CHURKIN (Fédération de Russie) a estimé que les conclusions de la mission du Conseil constituent une bonne base de travail pour l’avenir.  Il s’est dit très inquiet de l’évolution négative de la situation dans le pays.  Il s’est particulièrement inquiété du rôle joué par les extrémistes, les Taliban en particulier.  Il y a un lien inquiétant, a-t-il relevé, entre le trafic de stupéfiants et les terroristes Taliban.  Il faut renforcer les « ceintures de sécurité » qui existent déjà dans les accords internationaux, a-t-il préconisé.  Il s’est dit convaincu que le règlement du problème afghan n’est possible que par l’application des accords conclus lors de la Conférence de Bonn.  Un accompagnement international plus actif ainsi qu’une plus grande implication des pays voisins peuvent aider l’Afghanistan à avancer.  La Fédération de Russie, a promis le représentant, compte maintenir sa contribution, en particulier au niveau bilatéral.  Elle est prête à collaborer avec le Gouvernement de Kaboul dans la lutte contre le trafic des stupéfiants, en particulier.


Compte-tenu de la crainte d’un désengagement de la communauté internationale, M. JEAN-PIERRE LACROIX (France) a déclaré qu’il est plus que jamais nécessaire de réaffirmer son soutien à l’Afghanistan.  Nous devons intensifier nos efforts pour poursuivre l’équipement et la formation des forces afghanes, a-t-il ajouté, avant de souligner que les problèmes dans le pays sont loin d’être seulement de nature militaire.  Ainsi, les autorités doivent s’efforcer de réaliser dans les délais impartis les objectifs prévus par le Pacte pour l’Afghanistan, notamment en luttant contre la corruption, en démantelant les groupes rebelles et en mettant fin à la production et au trafic de stupéfiants.  En outre, des efforts doivent être déployés pour protéger les droits de l’homme, a ajouté le représentant.  De son côté, la communauté internationale doit poursuivre, au travers de la MANUA, son rôle de coordination dans la reconstruction des institutions afghanes, en s’étendant à de nouvelles provinces.  Enfin, a précisé le représentant, le Pakistan et l’Afghanistan doivent renforcer leur coopération en vue d’assurer la sécurité à la frontière.


M. RAVAN FARHADI (Afghanistan) a estimé que la visite du Conseil de sécurité a permis de faire le bilan de l’action du Gouvernement de Kaboul et du soutien de la communauté internationale.  Cela a été l’occasion de mettre en lumière la contribution de la population afghane dans l’établissement d’un état de droit.  Le représentant a souligné que beaucoup de choses ont changé depuis la précédente visite d’une mission du Conseil, en 2002.  Malgré ces résultats, nous continuons de nous heurter à des défis, sur le plan sécuritaire en particulier, a-t-il reconnu.  Évoquant un attentat-suicide commis récemment dans un restaurant, il a révélé que ce type d’actes est fait de manière organisée.  Les terroristes transfrontaliers reçoivent un soutien logistique et matériel qui vient de l’extérieur du territoire afghan.


Le représentant a cité, à cet égard, le dernier rapport du Secrétaire général qui explique le modus operandi de la rébellion depuis le Pakistan.  Il a rappelé que la résolution 1373 exige que les États traduisent en justice toute personne impliquée dans des actions terroristes ou fournissant des sanctuaires aux responsables de telles actions.  Le plein respect par les États de ce type de texte aiderait grandement l’Afghanistan et profiterait à toute la région, a dit le représentant.  Il a annoncé qu’une prochaine assemblée transfrontalière aura lieu prochainement et que des espoirs importants sont placés dans cet événement.  L’amélioration de la situation sécuritaire exigera des ressources additionnelles aux organes chargés de la sécurité, a-t-il averti, avant de se féliciter du rôle élargi de la FIAS. 


Reconnaissant que la construction se fait lentement, il a souligné la nécessité d’agir plus vite pour que la population voie des changements concrets.  Il s’est félicité du fait que le Conseil commun de coordination et de suivi continue d’enregistrer des progrès.  Il est essentiel, a-t-il dit, d’assurer une plus grande coopération économique régionale.  À cet égard, il a, une nouvelle fois, salué la réunion de deux jours qui s’est tenue récemment sous les auspices de l’Inde.  Concernant le trafic de stupéfiants, le lien de cette activité avec le terrorisme constitue une menace grave, a-t-il rappelé.  Une stratégie globale a été mise en place et les forces de l’ordre afghanes agissent concrètement sur le terrain en saisissant de grandes quantités de drogue, a-t-il affirmé, tout en reconnaissant que le pays est toujours confronté à des difficultés.  Ainsi, il est essentiel d’ouvrir l’accès des paysans à des cultures de substitution mais aussi d’avoir la collaboration des pays voisins pour lutter contre le trafic.  Il est tout aussi essentiel, a souligné le représentant, que les pays consommateurs de drogues fassent plus pour faire baisser la demande.  Concernant la lutte contre la corruption, il a affirmé que son gouvernement a lancé une initiative globale.  Le Président de la Cour suprême devrait, à cet égard, formulé des recommandations très prochainement.


Mme SCHRODERUS-FOX (Finlande), qui s’exprimait au nom de l’Union européenne, a déclaré que si l’Afghanistan a progressé, ces dernières années, il fait encore face à de sérieux défis risquant de remettre en cause ces avancées.  La représentante a tenu à réaffirmer le soutien sans faille et à long terme que le Gouvernement et le peuple de l’Afghanistan peuvent attendre de l’Union européenne.  Cette assistance vise à l’édification d’un État démocratique jouissant de sa souveraineté pleine et entière, protecteur des droits de ses citoyens.  L’Union européenne est particulièrement attachée à cet aspect de la question, a souligné la représentante finlandaise.


La lutte contre la corruption et l’impunité demeure une priorité et les autorités afghanes ont un rôle central, à cet égard, a-t-elle poursuivi.  Elle a rappelé que de 2002 à 2006, l’Union européenne a contribué à hauteur de 3,7 milliards d’euros, soit le tiers de l’aide promise par la communauté internationale.  Elle a aussi rappelé que l’Union européenne a fourni quelque 16 000 soldats à la FIAS, soit la moitié de ses effectifs, et qu’ils ont contribué à la lutte contre le trafic de stupéfiants.


La Commission européenne a l’intention d’accroître ses contributions à la mise en place d’un État de droit, a annoncé la représentante, en encourageant le développement de la coopération régionale et en estimant que le Pacte pour l’Afghanistan est le cadre adéquat pour le développement du pays jusqu’en 2010.  L’impact de l’assistance internationale peut être optimisé grâce à une meilleure coordination, a-t-elle recommandé, avant de se féliciter des plans prévoyant d’élargir la présence de la MANUA à l’ensemble du pays, si la sécurité le permet.


M. NIRUPAM SEM (Inde) a déclaré que la communauté internationale a une responsabilité cruciale pour aider l’Afghanistan à consolider sa gouvernance démocratique, à rétablir la paix et la stabilité, à assurer le développement économique de long terme.  Il a également souligné la responsabilité de la communauté internationale dans la fourniture d’une aide humanitaire.  La tâche la plus urgente, a-t-il estimé, est de surmonter le défi posé par l’insécurité qui alimente les activités des groupes rebelles et terroristes et celles des réseaux de trafiquants.  Les incidents sécuritaires, observés ces derniers mois, montrent qu’une idéologie tactique typique d’Al-Qaïda est à l’œuvre dans certaines régions.  L’inaction collective face à de tels problèmes pourrait avoir des conséquences terribles, a prévenu le représentant.  Il est donc plus que jamais nécessaire d’appliquer les programmes de réformes sécuritaires et de miser sur la coopération régionale, reconnue comme un aspect important des stratégies de mise en œuvre du Pacte pour l’Afghanistan.  Le représentant a enfin vivement encouragé le développement de programmes de substitution en vue de mettre fin à la culture du pavot.


M. JOHN MCNEE (Canada) a déclaré que si le succès de la communauté internationale est vital pour le peuple afghan, il l’est tout autant pour la santé et l’avenir des Nations Unies, comme l’a rappelé le Premier Ministre canadien, John Harper, devant l’Assemblée générale en septembre.  L’année 2006 a connu des progrès importants en Afghanistan.  Partout dans le pays, des institutions gouvernementales émergent, a remarqué le représentant, en rappelant l’engagement constant du Canada, sur le plan militaire en particulier.  M. McNee a appelé tous les États Membres à réfléchir à la manière dont ils pourraient s’engager, dans le sud de l’Afghanistan notamment, là où les besoins sont les plus pressants.  La MANUA, a-t-il dit, est l’organe le plus important dans l’édification de l’État afghan et des ressources plus importantes sont nécessaires.  Le représentant a ainsi applaudi l’élargissement de la MANUA en dehors de Kaboul.


Il a engagé l’Afghanistan et le Pakistan à poursuivre leurs discussions exploratoires dans le contexte de la Mission et s’est dit convaincu qu’elles peuvent mener à des améliorations concrètes.  Concernant la police, à laquelle le Canada fournit des services de formation et de monitorat, il s’agit d’un secteur clef, a-t-il noté, avant de souligner que la capacité du Gouvernement afghan de fournir les services de base et une bonne gouvernance est essentielle au succès.  L’extension des programmes du Gouvernement de Kaboul au sud du pays est cruciale, a-t-il insisté, avant de conclure sur le fait qu’il y va de l’intérêt de tous les pays d’aider les Afghans au moment où ils en ont le plus besoin.  Il a pressé le Conseil de sécurité de continuer d’accorder la priorité à l’Afghanistan, dans les mois qui viennent.


M. RAYMOND JOHANSEN, Secrétaire d’État aux affaires extérieures de la Norvège, a estimé que la situation en Afghanistan exige la mise en œuvre d’une stratégie globale en vue de relever trois défis majeurs: l’amélioration de la coordination de l’assistance internationale; le besoin de renforcement des capacités au sein des institutions gouvernementales, de la police, de la justice et de l’armée; et des efforts plus concertés en vue d’appuyer le Gouvernement afghan à étendre son autorité à l’ensemble du pays.  Pour sa part, la Norvège a l’intention de porter l’an prochain son aide financière à 72 millions de dollars.  Soulignant le rôle important de la FIAS dans le maintien de la sécurité en Afghanistan, le représentant a indiqué qu’elle étudie les moyens de renforcer les capacités de coordination de l’aide humanitaire de la MANUA.  En outre, il a souscrit à la recommandation de rendre plus efficace la police nationale afghane.  La MANUA peut y contribuer, en aidant le Gouvernement afghan à appliquer les réformes sécuritaires, notamment dans les procédures de nomination.  Se félicitant, par ailleurs, des efforts menés pour renforcer la coopération régionale, le représentant a estimé que les Gouvernements de l’Afghanistan et du Pakistan devraient être encouragés à étudier les moyens de renforcer la sécurité à leur frontière commune.  Il a enfin souligné la question transectorielle de l’émancipation des femmes, leurs droits devant se voir accorder une importance particulière.


M. JAVAD ZARIF (République islamique d’Iran) a estimé que la mission du Conseil s’est rendue en Afghanistan à un moment crucial, un moment où le peuple afghan a bien des raisons d’être satisfait des progrès accomplis alors que, dans le même temps, un certain nombre de défis sérieux atténuent leurs espoirs légitimes.  Si des succès importants ont été enregistrés, de très graves difficultés demeurent, a-t-il relevé, en mentionnant tout ce qui menace la reconstruction du pays, qu’il s’agisse de la violence terroriste ou de la corruption.  M. Zarif a mis en garde contre la tentation de nouer des contacts avec les terroristes et les criminels car ce serait des initiatives que ceux-ci pourraient interpréter comme une récompense. 


L’Iran, a-t-il poursuivi, est préoccupé par l’augmentation de la culture du pavot.  C’est un cancer qui menace la stabilité de l’Afghanistan.  L’élimination de la culture du pavot, la diminution de la demande et l’aide à l’introduction de cultures de substitution sont des éléments indispensables si l’on entend venir à bout du trafic de stupéfiants, a souligné M. Zarif, qui a rappelé que son pays avait pris des mesures en ce sens pour son propre territoire.  L’Iran continue de promouvoir la coopération régionale, a-t-il affirmé, en rappelant que l’enveloppe de 560 millions de dollars promise par son pays à la Conférence de Tokyo constitue le montant le plus important par habitant qui a été formulé par les bailleurs de fonds.  Le représentant a, en outre, évoqué les accords conclus entre son pays et l’Afghanistan lors de la visite du Président Hamid Karzai, en mai dernier.


M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a déclaré que la situation en Afghanistan est dangereuse mais qu’il faut comprendre pour quelles raisons.  Selon lui, c’est le résultat de trois grands échecs: tout d’abord, l’échec de la gouvernance, caractérisé par une corruption endémique, une économie de la drogue et une insécurité alarmante.  Il a ensuite cité l’échec de la reconstruction, en particulier dans le sud et le sud-est du pays, qui se trouvent maintenant en dehors de l’autorité de Kaboul, offrant un sanctuaire aux rebelles et aux militants islamistes.  Il a enfin cité l’échec de la réconciliation, comme en témoigne le sort de certaines ethnies, en particulier les pachtounes, qui ont été laissés de côté.  Le Pakistan, a-t-il poursuivi, a affirmé que pour devenir une passerelle avec l’Asie centrale, la paix est nécessaire en Afghanistan.  Mais au-delà des intérêts géostratégiques, notre volonté de paix en Afghanistan est surtout dictée par une histoire commune avec ce pays frère, a précisé le représentant. 


L’entraide doit se fonder sur une confiance mutuelle, a-t-il dit, en demandant pourquoi « ses frères afghans » veulent expliquer leurs échecs en pointant le doigt en direction du Pakistan.  Il a donc demandé à l’Afghanistan d’éviter de faire de telles déclarations à l’avenir s’il veut pouvoir compter sur l’aide du Pakistan.  Poursuivant, le représentant a affirmé que les Taliban sont un phénomène afghan, avant de rejeter les accusations selon lesquelles le Pakistan serait un sanctuaire pour les terroristes islamistes.  Il y a évidemment des sympathisants qui se sont mêlés à l’afflux de réfugiés afghans au Pakistan, a-t-il reconnu, mais, a-t-il nuancé, le Gouvernement pakistanais fait tout son possible pour rétablir la sécurité dans la zone frontalière et éviter les passages illégaux.  Quelque 80 000 hommes y ont été déployés alors qu’il y en a si peu de l’autre côté de la frontière, a-t-il fait observer.  C’est la raison pour laquelle le Gouvernement pakistanais demande une réciprocité dans les efforts visant à assurer la sécurité. 


Rappelant qu’il y a encore trois millions d’Afghans réfugiés au Pakistan, il a demandé à la communauté internationale de se pencher sur leur sort.  Nous avons pour projet de faire retourner ces personnes de l’autre côté de la frontière, ce qui devrait permettre de mettre fin aux accusations de mouvements à travers la frontière, a prévenu le représentant, en rappelant que les propositions de son pays de poser des mines ou d’édifier un mur à la frontière ont été rejetées par ses partenaires.  Il a fait ensuite remarquer que la plupart des combats qui se déroulent actuellement en Afghanistan font rage très loin de la frontière.  En conclusion, a déclaré le représentant, le Pakistan poursuivra sa coopération tout en souhaitant que les problèmes de l’Afghanistan soient envisagés de façon globale.  Le Président Musharaf a d’ailleurs proposé un « Plan Marshall » pour le sud et le sud-est du pays, a encore rappelé le représentant.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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