CS/8805

LE CONSEIL IDENTIFIE LES ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS D’UNE APPROCHE GLOBALE ET COORDONNÉE DE LA CONSOLIDATION DE LA PAIX EN AFRIQUE DE L’OUEST

9/08/2006
Conseil de sécuritéCS/8805
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Conseil de sécurité

5509e séance – matin & après-midi


LE CONSEIL IDENTIFIE LES ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS D’UNE APPROCHE GLOBALE ET COORDONNÉE DE LA CONSOLIDATION DE LA PAIX EN AFRIQUE DE L’OUEST


Au centre de l’approche, la coopération pour la lutte contre le chômage des jeunes, le commerce illicite des armes, la pauvreté, la mauvaise gouvernance et l’impunité


Avant de rendre publique une déclaration présidentielle sur les éléments constitutifs d’une approche globale et coordonnée de la consolidation de la paix en Afrique de l’Ouest, le Conseil de sécurité en a énuméré les défis avec le Représentant spécial du Secrétaire général dans la région, le Secrétaire exécutif de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et les Ministres des affaires étrangères de la Côte d’Ivoire, de la Guinée et du Ghana, ce dernier assurant la présidence du Conseil pour le mois d’août.


Région en transition politique, économique et démographique, l’Afrique de l’Ouest, qui vient d’enregistrer des succès au Libéria et en Sierra Leone, compte une population de 270 millions d’habitants dont 60% a moins de 30 ans.  Largement sans emploi, la grande majorité de ces jeunes, au lieu d’être une source d’espoir, constitue une menace à la stabilité, ont reconnu les intervenants, en soulignant le caractère « explosif » d’une situation dans laquelle les jeunes « désœuvrés » constituent un réservoir d’enfants soldats et de miliciens. 


La démobilisation, le désarmement et la réintégration (DDR) des anciens combattants ainsi que la lutte contre le commerce illicite des armes légères ont donc été perçus comme la condition préalable à tout effort de consolidation de la paix.  Ce fait a été reconnu dans la déclaration présidentielle.  Les membres du Conseil y félicitent, en conséquence, la CEDEAO d’avoir transformé le moratoire sur l’importation, l’exportation et la fabrication d’armes légères en convention à caractère juridiquement contraignant.  Après avoir demandé à tous les États de veiller au respect des embargos sur les armes qu’il a décrétés, les membres du Conseil disent voir dans la réforme du secteur de la sécurité un élément essentiel à une paix et à une stabilité durables.  


Au-delà de la dimension sécuritaire, cette paix et cette stabilité sont largement tributaires du développement durable, ont ajouté les délégations, avant d’inviter la nouvelle Commission de consolidation de la paix, qui a inscrit la Sierra Leone et le Burundi à son ordre du jour, à placer les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) au centre de ses travaux et à s’assurer de l’appropriation par les pays concernés du processus lancé en leur faveur. 


Les intervenants ont, en effet, identifié comme « causes sous-jacentes » des conflits, la pauvreté et le sous-développement servis abondamment par un manque de démocratie et de bonne gouvernance politique et économique ainsi que par l’absence de l’état de droit et l’impunité.  Toutefois, le Ministre des affaires étrangères de la Côte d’Ivoire a estimé qu’une justice réparatrice trop précoce est susceptible de saper une paix encore fragile et remettre en cause la confiance encore hésitante entre les ennemis d’hier.


D’autres comme lui ont aussi dénoncé comme vecteurs de la pauvreté et du sous-développement, le poids écrasant de la dette, les contraintes des politiques d’ajustement structurel et la raréfaction des investissements privés et de l’aide publique au développement (APD).  Un appel à l’assistance des donateurs et des institutions financières est lancé dans la déclaration présidentielle qui précise que ces derniers « doivent veiller à mieux coordonner leurs initiatives afin de faire le meilleur usage des ressources disponibles ». 


En la matière, les membres du Conseil soulignent la nécessité de fonds pour régler les problèmes liés aux activités transfrontières illicites, aux personnes déplacées et aux réfugiés « qui peuvent compliquer une situation déjà délicate » dans les pays concernés.  En toutes choses, ils insistent sur la nécessité de poursuivre et d’améliorer la coopération entre l’ONU, d’une part, et la CEDEAO et l’Union africaine, d’autre part. 


Si le maintien de la paix et de la sécurité internationales incombent à l’ONU, a par exemple estimé le Ministre ivoirien des affaires étrangères, la prévention des conflits devrait être l’une des responsabilités premières des organisations régionales et sous-régionales.  Le représentant du Gouvernement ivoirien a reçu de nombreux appels à la mise en œuvre de la Feuille de route et à la responsabilité dans le respect des échéances électorales.


Outre les orateurs cités et les 15 membres du Conseil, les représentants des pays suivants ont pris la parole: Guatemala, Finlande (au nom de l’Union européenne), Namibie, Égypte, Sénégal, Brésil, Inde, Jamahiriya arabe libyenne, Sierra Leone, Venezuela, République de Corée, Nigéria, Norvège, Pakistan, Niger et Libéria. 



CONSOLIDATION DE LA PAIX EN AFRIQUE DE L’OUEST


Déclarations


M. NANA ADDO DANKWA AKUFO-ADDO, Ministre des affaires étrangères du Ghana, a souligné que la consolidation de la paix est une œuvre globale qui comprend des activités relatives à la prévention, à la gestion et au règlement des conflits et aussi des actions de maintien de la paix.  Toutes ces actions, a dit le Ministre, doivent couvrir toutes les couches de la société et englober l’ensemble des régions, des nations et de la communauté internationale.  La paix et la stabilité sont liées au développement durable qui doit lui-même se fonder sur la bonne gouvernance.  Les efforts doivent porter sur les causes profondes des conflits et sur les solutions durables. 


La création de la Commission de consolidation de la paix vient à point nommé, a estimé le Ministre.  Son rôle, a-t-il voulu, devrait renforcer les approches globales en matière de redressement postconflit et assurer un engagement à long terme de la communauté internationale.  La Commission doit également reconnaître les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) comme des jalons vitaux de la longue voie vers la paix durable.  En la matière, l’Afrique de l’Ouest est à la croisée des chemins.  Elle abrite encore des tensions en Côte d’Ivoire et en Guinée-Bissau, mais il ne faut pas perdre de vue la nécessité de renforcer les fondations de la paix même dans les pays qui n’ont pas connu de conflit majeur. 


Il faut en effet garder à l’esprit que tous les pays de la région figurent parmi les 25% d’États inscrits au bas de la liste du développement humain.  À ce jour, la région n’a connu que l’ombre de la vision qui a présidé à la création de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).  L’instabilité politique a hanté la région et est à l’origine d’un déclin vertigineux du niveau de vie des populations.  Les problèmes sont à attribuer aux régimes autoritaires, au manque de bonne gouvernance et à l’absence du sens de responsabilité de la part du chef des dirigeants. 


Grâce aux Nations Unies et au Conseil de sécurité, qui a apporté tout son soutien à la CEDEAO, il a été possible d’éviter la catastrophe, a estimé le Ministre.  Les conflits ont montré l’efficacité et la résilience de la CEDEAO qui a pu maîtriser la situation volatile de la région.  La CEDEAO, qui continue pourtant de faire face à des contraintes importantes en matière de capacités et de ressources, dispose d’un cadre juridique, d’institutions et de mécanismes pour poursuivre l’œuvre de la paix dans la région.  Elle a compris que toute stratégie de consolidation de la paix doit résoudre les conflits en cours mais aussi prévenir leur résurgence et l’apparition de nouveaux conflits, développer un cadre institutionnel pour lancer des initiatives de paix, mobiliser des ressources nécessaires aux initiatives de paix et attaquer les causes sous-jacentes des conflits. 


Ces objectifs doivent être consacrés dans des programmes et des plans d’action, a voulu le Ministre ghanéen des affaires étrangères, en jugeant qu’il est extrêmement important que l’on redouble d’efforts pour résoudre certaines questions qui menacent la paix.  Il faut multiplier les efforts pour démobiliser, désarmer et réintégrer les ex-combattants, surtout les enfants soldats et les mercenaires. 


Il faut aussi s’attaquer au commerce illicite et à la prolifération des armes légères, à celui des minerais, à la contrebande, à la traite des êtres humains, et à la question des réfugiés et des personnes déplacées.  La croissance économique et le développement durable doivent être au cœur des objectifs en Afrique de l’Ouest.  La communauté internationale ne devrait accepter rien de moins que la paix durable, la stabilité et le développement.  La détermination des peuples d’Afrique de l’Ouest à construire de nouvelles sociétés est réelle.  L’exemple du développement du Ghana sous la direction d’une nouvelle génération de dirigeants est une bonne illustration de cette détermination et il faut espérer que celui durera, a conclu le Ministre. 


M. KOFI ANNAN, Secrétaire général de l’ONU, a déclaré que la stabilité et la prospérité continuaient de fuir la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest.  De graves lacunes en matière de gouvernance les empêchent de tirer parti de leurs ressources naturelles et de leurs potentiels économique et social, a-t-il regretté.  Nous avons donc conclu qu’il fallait adopter une approche globale face à ces conflits, vis-à-vis desquels il faut s’engager pleinement.  Ils génèrent en effet des flots de réfugiés, qui deviennent rapidement le problème des pays voisins.  Il faut accorder la priorité à la fin des conflits pour restaurer la paix et prendre des initiatives visant à rétablir la confiance et l’état de droit, en particulier dans les pays qui se relèvent d’un conflit, tels que la Sierra Leone, le Libéria et la Guinée-Bissau.  Le Secrétaire général a en outre indiqué que le manque de fonds et de coordination, ainsi que la tendance de la communauté internationale à se retirer trop tôt, ont sapé des efforts en vue de mettre en place des régimes démocratiques sociaux solides.  C’est la raison pour laquelle la Commission de consolidation de la paix a été créée l’an dernier, ainsi qu’un Bureau régional de l’ONU en Afrique de l’Ouest, basé à Dakar.  À travers la présence de trois missions de la paix et d’un Bureau d’appui à la consolidation de la paix dans la sous-région, l’Organisation a démontré sa volonté de mettre fin au cycle de violences qui a détruit tant de vies et d’infrastructures, a conclu M. Annan.


M. AHMEDOU OULD-ABDALLAH, Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afrique de l’Ouest, a rappelé que l’Afrique de l’Ouest était la région d’une triple transition: transition politique, transition économique et transition démographique.  S’agissant de ce dernier point, il a indiqué que 60% des 270 millions d’habitants des 15 pays de la région avait moins de 30 ans.  Largement sans emploi, la grande majorité de ces jeunes constitue aujourd’hui une menace à la stabilité.  En outre, la migration irrégulière des jeunes est en train de se transformer progressivement en défi politique majeur pour les gouvernements de la région.


Comparée à la situation il y a cinq ou 10 ans, les progrès en matière de paix et de sécurité en Afrique de l’Ouest sont réels, a poursuivi M. Ould-Abdallah.  Le Conseil devrait toutefois renforcer son appui à ces efforts et en particulier dans deux domaines, à savoir la consolidation des progrès et l’action préventive face aux nouvelles menaces, a préconisé le Représentant spécial.  Parmi les menaces émergentes, il a identifié la porosité et la fragilité des frontières Nord et Est de la région, théâtre d’activités criminelles multiples, telles que le trafic d’armes, de drogues et de ressources naturelles.  M. Ould-Abdallah a également pointé du doigt l’influence grandissante exercée par des groupes religieux, qui se substituent à l’État, et le développement de la piraterie en haute mer. 


Évoquant ensuite l’engagement des Nations Unies, le Représentant spécial a salué son rôle auprès des populations au travers des opérations de maintien de la paix déployées dans les pays de la région.  Leurs responsables politiques et militaires se réunissent d’ailleurs régulièrement pour échanger des informations en vue d’élaborer une approche cohérente et intégrée des engagements, ce qui permet à l’ONU de parler d’une même voix dans la gestion des crises sous-régionales.


La situation sous-régionale se présente ainsi: les populations sont de plus en plus connectées, grâce aux radios, la télévision et l’Internet.  Cette communication au niveau mondial génère de puissants réseaux, a affirmé M. Ould-Abdallah, qui a fait distribuer une radio à chaque membre du Conseil pour illustrer son propos.  Tout en appuyant la gestion des conflits et la sortie des crises en Afrique de l’Ouest, le Conseil devrait accorder une attention spéciale aux pays en transformation, qui sont des États stables, en voie de démocratisation, mais encore fragiles.  En 2007, nos priorités devraient être ciblées sur les pays qui vont organiser des élections présidentielles et législatives (Bénin, Côte d’Ivoire, Mali, Nigéria, Sénégal et Sierra Leone), a estimé le Représentant.  Il faudrait en outre s’attaquer au chômage des jeunes, aux migrations irrégulières, à l’urbanisation galopante, à l’accroissement des risques d’insécurité et au déficit de libre circulation des biens et des personnes.


M. MOHAMED IBN CHAMBAS, Secrétaire exécutif de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), a, à son tour, souligné que la crise de la jeunesse a des effets potentiellement explosifs en Afrique de l’Ouest.  Il a estimé qu’en la matière, l’ONU a pris une mesure audacieuse en créant la Commission de consolidation de la paix qui vient à point nommé pour combler une lacune béante.  De juillet 2004 à juillet 2005, l’ONU a dépensé 4,5 milliards de dollars en opérations de maintien de la paix.  Ces dépenses seraient vaines si l’accent n’était pas mis sur les efforts de consolidation de la paix.  La paix reste fragile dans beaucoup de pays d’Afrique de l’Ouest, a-t-il prévenu.  Le Libéria, par exemple, a besoin de beaucoup d’appui pour pouvoir s’engager sur la voie d’une paix irréversible.  Le rétablissement des institutions démocratiques, la réforme de l’appareil de sécurité, le renforcement des capacités des gouvernements à reconstruire les infrastructures et à offrir des services sociaux, le développement du secteur privé pour créer des emplois et offrir des perspectives économiques aux personnes sans emploi, sont les éléments clefs de la consolidation de la paix. 


La communauté doit alors, a poursuivi le Secrétaire exécutif, multiplier les programmes d’appui aux budgets pour élargir, dans les pays concernés, l’assiette fiscale nécessaire au financement des projets.  Elle doit aussi appuyer les projets nationaux, en particulier, ceux de la reconstruction des infrastructures.  La communauté internationale devrait également contribuer au renforcement des capacités institutionnelles clefs de la gouvernance nationale.  Elle doit, en outre, reconnaître les problèmes que les pays émergeant d’un conflit rencontre dans la formulation des politiques économiques. 


En la matière, la communauté internationale doit les aider à mobiliser leur diaspora.  Celle du Libéria est très bien formée en Amérique du Nord et elle doit être mobilisée pour relancer l’économie du pays.  Le Secrétaire exécutif a conclu en mettant l’accent sur les « obligations réciproques » des pays sortant d’un conflit qui doivent aussi répondre de leurs actes devant leurs populations et leurs partenaires internationaux.  Il a conclu en souhaitant un appui plus renforcé au Bureau de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest, à la CEDEAO et au Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD).  


M. HAMAD BIN JASSEM JABR AL-THANI, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères du Qatar, a déclaré que pour la première fois après tant d’années de souffrances, l’Afrique de l’Ouest était aujourd’hui plus proche que jamais de consolider la paix régionale.  Toutefois, à cette fin, il est extrêmement important que la communauté internationale soutienne les Gouvernements de Sierra Leone, de Guinée-Bissau, de Côte d’Ivoire et du Libéria dans leur transition délicate.  Il a toutefois prévenu que des progrès dans les domaines politique et de la gouvernance ne sont pas suffisants pour aboutir à la consolidation de la paix et à la sécurité.  Il est également nécessaire, a-t-il estimé, de doter la région de nouvelles perspectives de stabilité et de relance, pour empêcher une reprise des violences.  La consolidation de la paix exige en effet des approches créatives de la part de la communauté internationale.  Le Vice-Premier Ministre a estimé qu’il faudrait mettre en place de nouveaux cadres institutionnels qui permettraient d’inculquer aux populations un sens civique et de cultiver chez elles un sens de l’appartenance communautaire.  Il faut en outre renforcer l’intégration sociale et s’attaquer au problème du chômage des jeunes et à la fuite des cerveaux en réformant le secteur éducatif.  L’Afrique de l’Ouest a besoin d’un soutien financier de la part des bailleurs de fonds en mobilisant des ressources au profit des secteurs sociaux, pour s’attaquer au problème des groupes vulnérables, tels que les enfants soldats.  Le Conseil de sécurité doit reconnaître l’éducation comme moyen d’accompagner la transition de la guerre vers la paix, a insisté M. Al-Thani avant de conclure.


M. YOUSSOUF BAKAYOKO, Ministre des affaires étrangères de la Côte d’Ivoire, a espéré que le débat permettra au Conseil de mieux comprendre les réalités complexes de la région et de mettre tout en œuvre pour conforter davantage les États ouest-africains dans leur quête d’un espace apaisé, condition préalable du développement économique et social de la sous-région.  Les conclusions du débat doivent déboucher sur des actions concrètes et durables, orientées vers la coexistence pacifique des populations de la sous-région. 


La paix durable, a-t-il souligné, ne peut être réalisée que si elle est accompagnée d’une stratégie de réduction des tensions et de la pauvreté, de promotion de la démocratie et de la bonne gouvernance.  La paix ne peut pas non plus être assurée qu’à travers le règlement pacifique des différends et la prévention des conflits dans un contexte de respect des droits de l’homme.  Ici, il ne doit plus s’agir de préparer ou de faire la guerre pour obtenir la paix mais de soutenir la paix pour prévenir la guerre au sens le plus large possible. 


La sous-région a besoin de paix et elle ne peut pas continuer à s’offrir le luxe d’inutiles et coûteuses guerres entre les peuples et encore moins entre les citoyens d’un même pays.  Cette paix exige le dialogue, la concertation, la recherche obstinée des voies consensuelles face à des intérêts apparemment contradictoires, la tolérance, le respect de la personne humaine et de la vie devant redevenir les valeurs qui fondent les actions des populations et des gouvernants de cette sous-région. 


Par ailleurs, il importe que dans les États, la justice soit conçue comme un idéal de responsabilité et d’équité.  Néanmoins, dans un contexte postconflit, une justice réparatrice précoce serait de nature à saper une paix encore fragile et à remettre en cause la confiance encore hésitante entre les ennemis d’hier.  La région attend des partenaires internationaux un soutien durable au renforcement de ses capacités d’intervention et à celui des mécanismes de règlement des différents existants.  Elle attend qu’ils appuient son processus de démocratisation et d’édification de l’état de droit, comme gages de paix et de stabilité. 


Si le maintien de la paix revient à l’ONU, la prévention des conflits doit être l’une des responsabilités premières des organisations régionales et sous-régionales.  À son tour, le Ministre a souligné l’importance du problème de la circulation illicite des armes légères, d’une culture de la paix et du développement économique.  La pauvreté, a-t-il insisté, reste une menace à la paix et à la stabilité d’une région dont les États sont confrontés aux poids écrasant de la dette, aux contraintes des politiques d’ajustement structurel et à la raréfaction des investissements privés et publics et de l’aide publique au développement.  L’une des conséquences de ces contraintes est le chômage, notamment des jeunes qui, désœuvrés, constituent facilement un réservoir d’enfants soldats et de miliciens en cas de conflit, a déploré le Ministre.


M. MOHAMED LAMINE TOURÉ, Secrétaire général du Ministère d’État chargé des affaires étrangères et de la coopération internationale de Guinée, a noté que la persistance des foyers de tension en Afrique de l’Ouest résultait de l’insuffisance de la mise en œuvre d’un cadre pertinent de la consolidation de la paix reposant sur plusieurs éléments: la concrétisation des programmes de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR); la restructuration des forces de sécurité; l’application effective des processus de réconciliation nationale; la gouvernance nationale et internationale; l’adoption et l’exécution des plans de développement, ainsi que le règlement durable des problèmes transfrontaliers. 


C’est pourquoi la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest s’est impliquée dans la recherche de solutions durables aux problèmes de la paix, de la sécurité et du développement.  Pour sa part, la République de Guinée a joué un rôle important dans la prévention des conflits, le maintien et la consolidation de la paix dans la sous-région et en particulier dans le bassin du fleuve Mano, a souligné M. Touré. 


La République de Guinée a cependant énormément souffert des conséquences découlant des troubles qui ont affecté quatre des six pays avec lesquels elle partage des frontières, caractérisés par une importante présence de réfugiés, la dégradation de l’environnement, l’insécurité, la propagation des maladie.  À cela, il faut noter les attaques rebelles perpétrées en 2000-2001, qui ont fait de nombreuses victimes et provoqué le déplacement de centaines de milliers de personnes.  


Le Secrétaire général du Ministère guinéen des affaires étrangères s’est toutefois félicité de la mise en place de la Commission de consolidation de la paix et de la transformation du Fonds central autorenouvelable d’urgence en Fonds central d’intervention d’urgence et de l’allocation de 32 millions de dollars au titre des crises sous-financées, dont 1 million à la Guinée.  Le représentant a cependant lancé un appel à la communauté internationale pour une meilleure assistance à son pays.  Conscient que sans la paix, la stabilité et la sécurité, aucun développement ne saurait être atteint, M. Touré a annoncé que son gouvernement était prêt à organiser une conférence sous-régionale sur le renforcement du bon voisinage et la consolidation de la paix et de la sécurité.  Cette manifestation pourrait permettre aux participants d’adopter des mesures de confiance réciproque de nature à renforcer la solidarité, la paix et la sécurité au sein et entre les États membres de l’Union, par la signature d’un pacte de bon voisinage, a-t-il suggéré. 


M. VITALY CHURKIN (Fédération de Russie) a estimé que l’état de droit, le renforcement de la démocratie et une gouvernance fiable sont les piliers de la stabilité économique.  En Afrique de l’Ouest, a-t-il déploré, on constate trop souvent des problèmes de non-respect des calendriers politiques, des délais électoraux et des programmes de désarmement et d’impunité.  Pour favoriser la recherche des solutions, il faut intensifier la coopération avec la CEDEAO, a-t-il estimé, en jugeant que les initiatives de cette dernière méritent un encouragement très grand de la part du Conseil.  Toutefois, sans l’appui des bailleurs de fonds et des institutions financières internationales, ces initiatives seront vouées à l’échec.  Le redressement postconflit et l’aide au développement doivent être les composantes principales de toute stratégie visant à prévenir les conflits.  En la matière, a estimé le représentant, les programmes et les fonds de l’ONU peuvent jouer un rôle important dans l’analyse des risques pour empêcher toute récidive des crises.  En tant que membre permanent du Conseil et Président du G-8, la Fédération de Russie accorde une importance toute particulière au règlement des conflits africains.  La recherche de solutions a d’ailleurs constitué une partie importante de l’ordre du jour du Sommet du G-8 qui s’était tenu à Saint-Pétersbourg.  La démarche russe, a précisé le représentant, est fondée sur l’égalité et l’intérêt mutuel, étant entendu que l’aide étrangère vient compléter et non pas suppléer les efforts que les pays africains doivent eux-mêmes déployer. 


M. LIU ZHENMIN (Chine) a réaffirmé que son pays soutenait la formulation d’une stratégie intégrée en matière de consolidation de la paix dans les pays d’Afrique de l’Ouest qui soit basée sur une optique régionale.  Il a souligné que la reconstruction après un conflit représentait une entreprise considérable et que les pays concernés devaient élaborer une planification systématique qui prenne en compte les domaines de la réconciliation nationale, de l’élaboration des institutions, de la refonte du secteur sécuritaire, de la réinstallation des anciens combattants, du relèvement économique, de l’emploi des jeunes, tout en veillant à maintenir la stabilité interne.  


Le représentant s’est déclaré convaincu que les institutions des Nations Unies, y compris les institutions financières internationales, ainsi que les organisations régionales et sous-régionales pouvaient jouer un rôle conséquent dans le processus de consolidation de la paix en Afrique de l’Ouest.  La Commission de consolidation de la paix constitue, a-t-il estimé, un lieu privilégié de discussion visant à édifier une reconstruction paisible de l’Afrique de l’Ouest, où les membres de la Commission, représentant des parties variées, pourraient proposer des solutions concrètes concernant la sécurité, l’économie, le secteur social, et l’état de droit, en se fondant sur leurs propres perspectives et à la lumière de la situation réelle des pays concernés et des besoins de leurs populations. 


M. CESAR MAYORAL (Argentine) a déclaré que sa délégation attachait une grande importance à la situation des pays qui forment la sous-région d’Afrique de l’Ouest.  Malgré leurs différences, ils partagent tous un certain nombre d’éléments communs, comme leur passé colonial, qui a manifestement eu une influence sur leurs faiblesses institutionnelles actuelles.  En outre, ils ont en commun des possibilités limitées de croissance économique; un besoin cruel de renforcer l’autorité de l’État; et une expérience limitée en matière de gestion des affaires publiques et de corruption.  En même temps, ces pays font face à un problème d’afflux de réfugiés, à la nécessité de réformer le secteur de la sécurité, de mettre en place des programmes de désarmement, de démobilisation et de réinsertion, et à une grave situation humanitaire.  


C’est la raison pour laquelle l’Argentine préconise l’adoption d’une approche coordonnée dans la recherche de solutions durables aux causes des conflits.  À cet égard, il est crucial de souligner la contribution des acteurs régionaux, tels que la CEDEAO, et les avantages d’une coopération étroite entre les Nations Unies et les organisations régionales.  La Commission de la consolidation de la paix joue également un rôle significatif en aidant les pays concernés à ne pas retomber dans les conflits.  Pour ce faire, il faudrait identifier les éléments essentiels pour atteindre la stabilité, passer de l’assistance humanitaire immédiate aux conditions de sécurité nécessaires, tout en renforçant les institutions, a conclu le représentant. 


Mme ELLEN MARGRETHE LØJ (Danemark) a rappelé que la consolidation de la paix en Afrique de l’Ouest était liée au développement de trois volets principaux, à savoir un maintien de la paix plus efficace associé à une consolidation de la paix plus soutenue, une maîtrise, une volonté politique et un partenariat dans le processus de paix, et le rôle des femmes dans la consolidation de la paix. 


S’agissant du maintien de la paix, elle a indiqué que la coopération transfrontière avait été accrue, mais qu’elle pouvait être améliorée, notamment en coordonnant les ressources opérationnelles –y compris des forces de police– et l’adoption de procédures plus souples permettant le transfert de troupes.  Elle a suggéré que d’autres moyens facilitant les mouvements transfrontaliers des contingents de maintien de la paix soient étudiés, ce qui permettrait d’assurer un suivi du trafic d’armes, de l’exploitation illégale des ressources naturelles, et de la traite des êtres humains. 


La représentante a précisé que le Danemark, par le biais de son Programme de paix pour l’Afrique, avait alloué plus de 40 millions de dollars sur une période de cinq ans afin d’appuyer les initiatives africaines visant à renforcer la paix et la stabilité sur le continent.  Elle a rappelé qu’au titre de ce programme, son pays soutenait tant l’Union africaine que les organisations sous-régionales, y compris la CEDEAO, en consolidant leurs capacités d’intervention et de prévention de crises, ainsi qu’en termes de gestion et de riposte.  Elle a par ailleurs souligné le rôle important que revêtait une collaboration plus poussée avec la société civile, qui dispose de ressources inexploitées, allant de l’alerte rapide au règlement de conflits.  Enfin, elle a indiqué que dans l’instauration d’une paix durable les initiatives postconflits seraient plus concluantes si les femmes avaient la possibilité de faire partie intégrante du processus de paix, et ce, en tant que partenaires égales. 


M. ADAMANTIOS TH. VASSILAKIS (Grèce) a souligné que les politiques et stratégies de consolidation de la paix manquaient de cohérence, et que ces initiatives étaient compromises tant par la fragmentation institutionnelle que par l’insuffisance des ressources.  Il a précisé également que l’incohérence et le manque de coordination des mesures multilatérales entraînaient souvent des acteurs individuels à poursuivre leurs intérêts individuels, compromettant ainsi les chances de succès global. 


Il a ensuite rappelé que la consolidation de la paix se trouvait à mi-chemin entre le maintien de la paix et le développement, du fait qu’elle s’efforçait de remédier aux défis à moyen terme, à savoir la consolidation de la paix existante et l’élaboration des bases du développement futur. 


La Commission de consolidation de la paix, a-t-il estimé, doit coopérer plus étroitement avec la Banque mondiale, le Fonds monétaire international, les autorités nationales, ainsi que la CEDEAO, afin de réaliser les objectifs multiples de l’Afrique de l’Ouest, qui sont en l’occurrence une gestion transparente et responsable des ressources naturelles, la lutte contre le chômage des jeunes, la relance de l’économie, le partage des richesses et la distribution équitable des ressources, la croissance et les investissements à long terme, l’apport de services sanitaires, sociaux et éducatifs, et enfin la refonte des secteurs bancaires et financiers. 


M. RUIZ ROSAS (Pérou) s’est attardé sur cinq aspects de la consolidation de la paix en Afrique de l’Ouest.  D’abord, a-t-il dit, il ne faut pas confondre le calme et la paix, cette dernière allant bien au-delà du simple calme et  correspondant à une interaction sociale harmonieuse.  Bien souvent, a-t-il souligné, une évaluation erronée de la situation a fait que les forces de maintien de la paix se sont retirées trop vite, laissant libre cours à une résurgence des conflits.  Il ne peut y avoir de paix si l’attention n’est pas portée sur les causes sous-jacentes des conflits, à savoir la satisfaction des besoins les plus fondamentaux des populations et la viabilité à long terme des économies.  Les problèmes de ces économies ont trait à la commercialisation de biens à faible valeur ajoutée, à des programmes budgets faibles, des conditions démographiques défavorables, et une exploitation des ressources naturelles non saines.  Tant que ces paramètres persisteront, il ne pourra y avoir de paix durable, a prévenu le représentant en ajoutant que la sous-région doit aussi s’attaquer à ses problèmes dans les domaines de la sécurité et des institutions publiques et de l’état de droit.  Il a tout de même insisté sur le fait que c’est la faiblesse de l’attention accordée aux domaines social et économique qui empêche les pays de répondre aux revendications des populations, ouvrant ainsi la voie aux tensions et aux troubles. 


C’est ce défi-là que doit relever la Commission de consolidation de la paix, a-t-il dit en appelant à des mesures concrètes pour stabiliser les économies et assurer le développement économique des pays, ce qui exige, a-t-il insisté, de s’attaquer aux problèmes de la dette, des droits de douane, de l’aide publique au développement ou encore de l’accès aux nouvelles technologies.  Il faut aussi mettre en place des mécanismes de certification des ressources naturelles pour que les profits commerciaux puissent bénéficier à l’ensemble de la population.  Il faut également renforcer les institutions des pouvoirs publics, y compris ceux liés à la lutte contre le commerce illicite des armes légères.  En la matière, le volontarisme de la société civile est tout à fait essentiel dans les processus de pacification ainsi que la participation de la CEDEAO et de l’Union africaine.


M. MICHEL DUCLOS (France) a fait observer qu’il y a trois ans, la communauté internationale s’interrogeait sur les moyens de faire partir Charles Taylor, qui était encore au pouvoir en Sierra Leone, et la Côte d’Ivoire entrait en crise.  Or, dans cette région, chaque crise est la pièce d’un puzzle, qui se propage d’un pays à l’autre.  Aujourd’hui, M. Taylor est à la place qui lui revient, des autorités légitimes ont été mises en place au Libéria et la Sierra Leone a été choisie comme l’un des premiers pays sur lesquels la Commission de consolidation de la paix concentrera ses efforts.  En Côte d’Ivoire, malgré des reculs, la communauté internationale a réussi à contenir les débordements.  Le représentant de la France a saisi cette occasion pour demander aux Ivoiriens de faire preuve de responsabilité dans le respect des échéances électorales.  Pour que la région parvienne à la fin d’un cycle de troubles et de violences, il est en outre nécessaire de préserver les acquis de la CEDEAO, qui a fait preuve d’une grande capacité d’adaptation en partenariat avec les Nations Unies, notamment dans les efforts à fournir pour résoudre les problèmes transfrontaliers, tels que celui des réfugiés en Guinée.  Il faut également développer la bonne gouvernance, dont l’absence est à l’origine de nombreux conflits, a poursuivi M. Duclos.  Enfin, le représentant a souligné l’importance d’investir dans la jeunesse, notamment dans l’éducation, comme l’a fait observer le représentant du Qatar.  Il est indispensable, a-t-il dit, d’achever dans de bonnes conditions le cycle qui se referme aujourd’hui, dont l’un des points de passage obligés est le processus de paix en Côte d’Ivoire, qui doit être mené à bien dans les conditions que la communauté internationale a fixées pour ce pays.


M. BASILE IKOUEBE (Congo) a commenté les efforts de consolidation de la paix au Libéria et en Sierra Leone.  Concernant le premier, il s’est dit préoccupé par la persistance d’un certain nombre de facteurs déstabilisants dont la menace représentée par les anciens combattants et miliciens de l’ex-Président Charles Taylor.  En Sierra Leone, la sécurité et la stabilité politique sont toujours menacées par un certain nombre de risques, en particulier le chômage des jeunes, la corruption dans le secteur public, les lacunes du système judiciaire et un manque de ressources qui limite les capacités d’intervention de l’État.  La Guinée-Bissau n’a guère enregistré de progrès dans la consolidation de la paix et en Côte d’Ivoire, nous n’en sommes qu’à la recherche de solutions de sortie de crise, a regretté le représentant.  Il a attiré l’attention sur le rapport du Secrétaire général « toujours actuel » sur les « causes des conflits et la promotion d’une paix et d’un développement durables en Afrique ».  Examinant l’application des recommandations formulées dans le rapport, a rappelé le représentant, l’Assemblée générale a adopté la résolution 60/223 qui met le doigt sur les principales questions et les défis à relever.  Le représentant s’est donc dit satisfait que la déclaration présidentielle reprenne les principaux points de la résolution.  La déclaration, a-t-il conclu, contient tous les éléments d’une approche réaliste et dynamique du problème posé.


M. PETER BURIAN (Slovaquie) a souligné le rôle de la CEDEAO en matière de renforcement de la coopération et de la création d’un climat de confiance au sein des pays de la sous-région, en tant qu’incarnation de la maîtrise locale et sous-régionale visant à remédier aux défis et problèmes communs.   Il a précisé qu’un certain nombre de problèmes demeuraient, notamment les incidences transfrontalières des conflits de la région qui tendaient à déborder d’un pays sur l’autre, la persistance d’une pauvreté généralisée due principalement à l’exploitation illégale des ressources naturelles, et le lien étroit qui existait entre paix et consolidation économique d’une part et renforcement de la démocratie, de la bonne gouvernance et du respect des droit de l’homme, d’autre part.


Le représentant a suggéré qu’il existait plusieurs manières de traiter les problèmes relatifs à l’Afrique de l’Ouest.  Il a estimé que tant les peuples que les gouvernements de la région devraient être prêts à adopter des mesures difficiles et impopulaires afin d’améliorer la gouvernance.  Les pays de la région doivent bénéficier d’un appui international solide qui se traduit par un transfert de compétences spécialisées et une aide au développement.  La Commission de consolidation de la paix devrait être amenée à jouer un rôle essentiel en matière d’initiatives de consolidation de la paix sur le plan international et, enfin, les États africains devraient aborder le problème de l’impunité.


De l’avis de sa délégation, des élections démocratiques, la lutte contre la corruption, l’introduction de politiques et de réformes économiques judicieuses, le renforcement de l’état de droit et la réforme du secteur judiciaire, contribueraient à attirer les investissements étrangers et à promouvoir la croissance des industries et de l’esprit d’entreprise au niveau local, et encourager la réforme essentielle du secteur de la sécurité.


Mme JACKIE W. SANDERS (États-Unis) a affirmé que l’Afrique de l’Ouest avait parcouru un long chemin en peu de temps.  Pour beaucoup de ses habitants, cette région est maintenant plus sûre, notamment grâce aux efforts des Nations Unies.  À cet égard, la représentante s’est félicitée de la poursuite des efforts de l’ONU pour veiller au bon déroulement du processus de paix en Côte d’Ivoire.  La communauté internationale doit cependant continuer à apporter son soutien à la réforme de la sécurité, à la bonne gouvernance et à la consolidation des institutions des régimes d’Afrique de l’Ouest.  Les États-Unis estiment en outre que la liberté démocratique et les investissements privés seront de nature à garantir la prospérité économique pour les pays de la sous-région.  Mais pour cela, a-t-elle fait remarquer, il est indispensable de mettre au préalable en place les cadres politiques appropriés pour attirer les investisseurs étrangers.  À cet égard, le Ghana est un bon exemple, a poursuivi la représentante, qui a annoncé que la semaine dernière, la « Coopération des défis du Millénaire » avait engagé plus d’un million de dollars dans la lutte contre la pauvreté dans ce pays.  La représentante a conclu en soulignant la nécessité de tenir les individus pour responsables des crimes qu’ils ont commis.


M. KENZO OSHIMA (Japon) a dit constater en Afrique de l’Ouest une transition du conflit à l’ordre constitutionnel ainsi que des progrès vers la consolidation de la paix.  Les conflits étant susceptibles de se répandre dans d’autres pays, il est important de saluer les nombreuses initiatives prises par la CEDEAO et le rôle clef qu’il continue à jouer dans la sous-région, a estimé le représentant, en annonçant que son pays continuera d’apporter une assistance financière au Secrétariat de la CEDEAO.  Il a aussi jugé important de définir les défis communs et de coordonner les efforts.  C’est exactement ce qu’a essayé de faire la Conférence internationale de Tokyo pour le développement de l’Afrique (TICAD) en discutant, lors de sa dernière convocation, des questions de sécurité, de gouvernance politique et de transition, de la reconstruction des communautés et du développement économique.  Ces questions, a souligné le représentant, sont essentielles à la mise en œuvre d’une approche globale et intégrée de consolidation de la paix.  La tâche première devrait être de créer un environnement sûr et stable, en s’attaquant aux questions liées au désarmement, à la démobilisation et à la réinsertion (DDR) et à la réforme des appareils de sécurité et de justice.  Dans le domaine de la gouvernance et de la transition politique, toutes les parties doivent être amenées à adhérer aux principes démocratiques et à participer au processus politique.  Enfin, concernant la reconstruction de la communauté et le développement socioéconomique, l’objectif doit être de pouvoir répondre aux besoins premiers des populations, en traitant de questions telles que les anciens combattants, le chômage des jeunes et le développement du secteur privé.  Le représentant a estimé que la Commission de consolidation de la paix pourra contribuer aux travaux du Conseil de deux manières: d’abord en établissant les questions prioritaires dans le cadre d’une approche intégrée, et ensuite, en examinant les stratégies de consolidation de la paix pour chaque pays concerné, en incorporant dans ses recommandations les opinions des États, des experts, des missions de l’ONU, des ONG et des autres acteurs, étant entendu que chaque État doit s’approprier le processus.  Le représentant a illustré l’attachement de son pays au développement de l’Afrique en rappelant une nouvelle initiative du TICAD qui consiste à débourser régulièrement une somme de 60 millions de dollars pour l’Afrique de l’Ouest, le Soudan et en particulier la région des Grands Lacs.


M. EMYR JONES PARRY (Royaume-Uni) a salué les efforts de la CEDEAO pour ramener la paix dans la région et indiqué que son gouvernement était prêt à œuvrer en concertation avec cette organisation pour rechercher une paix durable dans la sous-région.  Celle-ci commence à s’enraciner, malgré des incidents, comme ceux qui se produisent en Côte d’Ivoire.  Bien entendu, le chemin à parcourir est encore long, mais la Sierra Leone et le Libéria sont sur le point de devenir des exemples pour les autres pays de la région, et ils peuvent désormais axer leurs efforts sur leur croissance économique, que le Royaume-Uni continuera à appuyer, a assuré le représentant.  Par ailleurs, l’arrestation de Charles Taylor est un acquis qui prouve que la culture d’impunité peut prendre fin et qu’elle constitue un signal important dans la région.  Rappelant ensuite que son pays suivait de près la situation dans la région du fleuve Mano, le représentant a indiqué qu’il était important pour les pays de la région de respecter leurs échéances électorales et de mener à bien les programmes de désarmement, de démobilisation et de réinsertion.  À cette fin, il faut que la région continue à bénéficier de l’appui du Conseil de sécurité, des institutions financières internationales et du système des Nations Unies, a-t-il préconisé. 


M. TUVAKO MANONGI (République-Unie de Tanzanie) a estimé que ce qui manque, au stade actuel, c’est la volonté, la détermination et les ressources pour mettre des recommandations qui existent déjà.  Le Secrétaire général a fait des propositions très pertinentes et très concrètes et le Conseil de sécurité n’a pas été en reste, en multipliant les mesures qui néanmoins ne porteront leur fruit que si elles sont supervisées de près, s’est expliqué le représentant.  Pour leur part, les pays d’Afrique de l’Ouest ont formulé toute une gamme de recommandations pour parvenir à une paix durable.  Les causes des troubles sociaux et civils ont été clairement identifiées comme contrevenant à la Déclaration de la CEDEAO sur la démocratie et  la gouvernance.  Se félicitant des efforts en matière de lutte contre l’impunité comme l’illustre le transfèrement de Charles Taylor auprès du Tribunal pour la Sierra Leone, le représentant a appelé les pays de l’Afrique de l’Ouest à renforcer leurs institutions de gouvernance, à promouvoir la transparence dans la gestion des ressources naturelles, à respecter l’état de droit et à réformer les secteurs de la sécurité et du pouvoir judiciaire.  Ils doivent aussi réorganiser leurs économies et coopérer avec la société civile pour éduquer les populations à l’exercice de leurs droits.  L’Union africaine et la CEDEAO doivent collaborer plus étroitement avec les pays en situation de conflit et la communauté internationale doit continuer à accroître son appui financier aux pays qui se remettent d’un conflit.  À cet égard, le représentant a encouragé les pays occidentaux à nouer des liens de partenariats avec leurs anciennes colonies plutôt que des liens de dépendance.


M. JORGE SKINNER-KLÉE (Guatemala) a déclaré que son pays suivait de près les conflits ayant touché l’Afrique de l’Ouest et comprenait les avantages que l’on pouvait tirer d’un mécanisme de coopération.  Dans les efforts en vue de parvenir à un développement durable, l’assistance des Nations Unies et d’autres acteurs internationaux constitue un élément déterminant, a-t-il estimé, soulignant la nécessité d’adopter, en la matière, des mesures concertées.  Il s’agit cependant de veiller à ce que ces mécanismes restent efficaces et soient flexibles.  Les questions de sécurité sont absolument prioritaires, de même que la situation humanitaire des personnes réfugiées.  À cet égard, l’expertise de la CEDEAO est précieuse.  La bonne gouvernance et le renforcement du pouvoir judiciaire ne seront possibles qu’avec le renforcement des capacités nationales, a poursuivi le représentant.  À ce propos, il a évoqué le rôle de la Commission de consolidation de la paix, se déclarant satisfait de l’appui qu’elle fournit aux gouvernements pour élaborer des stratégies de sortie de crise qui tiennent compte des spécificités propres à chaque pays.  La Commission doit cependant aller au-delà et transformer les structures étatiques de façon à ce que les citoyens retrouvent confiance en leurs institutions.  À cette fin, toutes les parties prenantes à un processus de transition et de redressement pourraient intervenir dans chaque domaine relevant de ses responsabilités.


Mme KIRSTI LINTONEN (Finlande), s’exprimant au nom de l’Union européenne, a d’abord salué les progrès accomplis dans la région de l’Afrique de l’Ouest, notamment la tenue d’élections libres et équitables au Libéria et l’élection d’une femme à sa présidence, l’adoption par ce pays de mesures courageuses visant à une transparence du budget, l’arrestation et le transfèrement de l’ancien Président Charles Taylor auprès du Tribunal spécial pour la Sierra Leone afin de répondre de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, et l’inclusion de la Sierra Leone à l’ordre du jour de la Commission de consolidation de la paix, nouvellement constituée.  La représentante a noté cependant la situation précaire de nombreux pays d’Afrique de l’Ouest, notamment la situation politique, sociale et économique de la Guinée-Bissau qui demeurait fragile, le processus de réforme en Guinée qui est au point mort, ainsi que la situation volatile en Côte d’Ivoire qui continue de compromettre la paix et la stabilité de la région.


L’Union européenne, a rappelé Mme Lintonen, avait adopté une stratégie intégrée pour l’Afrique en décembre 2005.  La représentante a indiqué que le dialogue UE-CEDEAO, outre la prévention des conflits, la paix et la sécurité, était axé sur l’économie et les échanges, la bonne gouvernance, l’état de droit, les droits de l’homme, et que le recrutement d’enfants soldats et la traite des êtres humains étaient des points prioritaires.  S’agissant de la coopération avec les Nations Unies, elle a précisé que l’Union européenne entretenait une concertation permanente avec le Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afrique de l’Ouest, afin de mettre l’accent sur la prévention des conflits et les problèmes transfrontaliers, et d’élaborer une démarche commune en matière de reconstruction postconflit, d’édification des institutions, de réforme du secteur sécuritaire, et la question des armes légères.  Enfin, elle a réitéré l’attachement de l’Union européenne au développement de la prévention, de la gestion et des capacités de règlement des crises en Afrique, comme l’attestait l’adoption du Plan d’action de l’Union européenne pour l’initiative d’appui à la paix et à la sécurité en Afrique, par le biais de la Politique européenne de sécurité et de défense (PESD) en 2004. 


M. JULIUS ZAYA SHIWEVA (Namibie) a rappelé que son pays est un contributeur de troupes dans les missions de l’ONU déployées en Afrique de l’Ouest.  Se félicitant ensuite de la transition politique encourageante dans les pays concernés, il a néanmoins souligné l’importance du DDR et du retour des personnes déplacées et des réfugiés.  Les efforts de consolidation de la paix, a-t-il poursuivi, doivent viser le rétablissement de la sécurité, de l’état de droit, des prestations de services et la satisfaction des besoins socioéconomiques.  Il s’est également dit encouragé par les efforts de l’ONU, de la CEDEAO et de l’Union africaine pour apporter la paix en Côte d’Ivoire.  Il a toutefois douté que les efforts de maintien de la paix dans le pays, en particulier les relations entre la Force de l’ONU et les autres forces, soient réellement fructueux.  Il s’est dit aussi préoccupé par le report des élections dans ce pays, en espérant que le DDR, l’enregistrement des électeurs et la désignation des bureaux de vote et des scrutateurs seront achevés en temps voulu.  La réconciliation, a-t-il encore dit, est l’une des clefs d’une paix durable laquelle est un processus à deux voies qui doit entretenir un esprit de pardon plutôt que de vengeance et de représailles.  Mais il faut distinguer réconciliation et justice.  Les responsables des crimes commis pendant les conflits doivent répondre de leurs actes.  Mais il est tout aussi important, a jugé le représentant, de mettre en place un système judiciaire indépendant et d’organiser des procès ouverts non pas pour punir les responsables des crimes mais pour corriger les erreurs.  À son tour, le représentant a souligné que le fait que l’Afrique doive prendre ses responsabilités ne veut pas dire que l’ONU et la communauté internationale doivent abdiquer.  Il a donc appelé à un renforcement de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales.  Saluant, dans ce contexte, la création de la Commission de consolidation de la paix, il a renouvelé l’appel de son pays pour la mise au point d’un système d’alerte rapide pour détecter les signes précurseurs d’un conflit et les prévenir. 


M. MAGED ABDELFATTAH ABDELAZIZ (Égypte) a déclaré que son pays s’était engagé en faveur de la stabilité et du développement des pays africains et tout particulièrement du renforcement d’une approche régionale dans la consolidation de la paix.  À cette fin, l’Égypte est favorable au développement du partenariat institutionnel entre l’Union africaine et les organisations africaines sous-régionales d’une part, et avec les Nations Unies d’autre part.  Pour qu’un tel partenariat soit fructueux, il est nécessaire de l’appuyer sur une vision globale de la consolidation de la paix, qui prenne en compte simultanément tous les aspects de la consolidation, qu’il s’agisse de la sécurité, de la politique, du développement, ou des questions culturelles et humaines.


L’Égypte a donc estimé qu’il était nécessaire d’adopter une stratégie intégrée en deux parties de maintien et de consolidation de la paix en Afrique de l’Ouest.  Un premier volet porterait sur les besoins directs et individuels des pays concernés, tandis qu’un second permettrait de faire face aux besoins de l’Afrique de l’Ouest dans une perspective sous-régionale.  En ce qui concerne les besoins directs, la stratégie en question doit être élaborée par le pays concerné, de manière à permettre la plus grande coopération parmi les acteurs impliqués et de donner un élan politique au niveau national.  La Commission de la consolidation de la paix devrait jouer un rôle essentiel dans une telle coordination, a estimé le représentant.  M. Abdelaziz a souligné de nouveau que le succès des efforts régionaux et internationaux dépendait du fait que ces efforts répondaient à la nature et à la spécificité de chaque pays.  En ce qui concerne le second volet de la stratégie, le représentant a souligné l’importance de renforcer les rôles de l’Union africaine et de la CEDEAO dans l’établissement d’un système de sécurité et d’intégration basé sur le respect de la souveraineté territoriale des États, a conclu M. Abdelaziz.


M. PAUL BADJI (Sénégal) a estimé que la sous-région vit en ce moment des circonstances propices où l’appui diligent de la communauté internationale aiderait à l’ancrer définitivement dans une dynamique salutaire de paix et de coprospérité.  Pour ce faire, il a cité, comme mesures de consolidation, des mesures de confiance comme le DDR et l’intégration dans les institutions étatiques des éléments issus des différentes factions; l’accélération du processus d’intégration du pays concerné à la communauté sous-régionale par l’accession aux différents traités et conventions; la promotion du binôme sécurité/développement par la lutte contre la prolifération des armes légères, le mercenariat et la pauvreté des jeunes; et enfin, la consolidation de la démocratie et de l’état de droit. 


Doivent participer à la mise en œuvre de la dernière mesure tous les secteurs de la vie nationale, dont les journalistes qui doivent être mieux formés.  À cet égard, le représentant a appelé à la mise en place de comités d’éthique et de déontologie, afin d’éviter que, par irresponsabilité ou incurie, se créent des tensions et des conflits aux effets dévastateurs.  La justice doit également participer à la consolidation de la démocratie et de l’état de droit, à condition qu’elle soit libre et indépendante dans une société où le citoyen a la possibilité de recourir à un ombudsman ou à un médiateur et où coexistent, dans une stricte indépendance, les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire.  La normalisation de la situation politique dans l’espace CEDEAO ne doit guère être considérée comme un phénomène irréversible, a prévenu le représentant, en attirant l’attention sur le « cas d’école » qu’est la Guinée-Bissau où un manque d’appui de la communauté internationale au moment où le pays avait besoin de consolider les acquis de la paix avait vite entraîné le retour des démons de la violence.


M. PIRAGIBE TARRAGÔ (Brésil) a estimé que la sécurité, la paix et le développement n’étaient pas seulement déterminants pour les peuples de la région, mais avaient aussi contribué à des progrès au-delà du continent.  Ainsi, le Brésil considère la Zone de paix et de coopération de l’Atlantique Sud (ZOPACAS), qui rassemble pays d’Afrique de l’Ouest et d’Amérique du Sud, comme un instrument de nature à renforcer la coopération entre les deux rives de l’océan Atlantique.  Le représentant s’est ensuite déclaré favorable au maintien et au renforcement des opérations de maintien de la paix dans la région, qui devraient agir de façon concertée face aux problèmes transfrontaliers.  Un tel effort doit cependant reconnaître qu’aucune paix ne sera possible tant que les causes profondes des conflits n’auront pas été prises en compte.  Deux questions liées entre elles méritent une attention spéciale, la réduction du chômage des jeunes et les programmes de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR), ainsi que celle des ressources naturelles, dont il faut prévenir l’exploitation illégale, a prévenu le représentant.  La création de la Commission de consolidation de la paix peut également représenter un outil important pour assurer la stabilité de la sous-région.  Le Brésil a estimé qu’en Afrique occidentale, la Guinée-Bissau méritait une attention particulière, en raison de son manque de croissance économique et de la faiblesse de ses institutions démocratiques.  La communauté des pays lusophones et le IBSA Forum aident actuellement ce pays pour certains de ses projets, qui devraient avoir un impact positif sur la population.  Le représentant a conclu en soulignant la nécessité d’élargir le mandat du Bureau des Nations Unies en Guinée-Bissau (BANUGBIS). 


M. NIRUPAM SEN (Inde) a estimé que la consolidation de la paix exige la promotion d’une croissance économique durable, équitable et génératrice d’emplois.  Pour parvenir à ces objectifs, les efforts doivent être déployés avec l’aide de la communauté internationale, d’où la pertinence de la nouvelle Commission de consolidation de la paix, a souligné le représentant.  La prévention des conflits, a-t-il poursuivi, doit inclure une prévention « opérationnelle » comme la diplomatie préventive et une prévention « structurelle » qui implique des mesures préventives à long terme pour prévenir les crises ou leur résurgence.  Le dernier type de prévention implique souvent un engagement à long terme pour aider les pays à développer des ressources humaines et institutionnelles, par une augmentation de l’aide au développement.  Le maintien de la paix et la consolidation de la paix doivent participer au même élan pour assurer leur succès.


Le succès d’une approche préventive à long terme, s’est expliqué le représentant, réside dans la mise en place de politiques macroéconomiques saines et les dépenses dans le secteur social créent les conditions de la croissance économique.  Malheureusement, le fardeau écrasant de la dette a fait que ce secteur n’a pas reçu l’attention requise.  En conséquence, l’allègement de la dette, la réforme et la démocratisation des institutions économiques et monétaires internationales sont un pilier de la consolidation de la paix.  Pour sa part, a indiqué le représentant, l’Inde poursuivra ses initiatives telles que TEAM 9 qui porte sur l’octroi d’un crédit de 500 millions de dollars et le transfert de technologies aux pays d’Afrique de l’Ouest.  Elle poursuivra aussi sa coopération avec le NEPAD, ainsi que sa mission de connexion satellite et optique dans l’ensemble du continent africain. 


Soulignant aussi l’importance de la bonne gouvernance démocratique pour prévenir les tensions sociales, entre autres, il a ensuite estimé que la Commission de consolidation de la paix doit non seulement travailler avec le Conseil de sécurité mais aussi tenir compte des contributions de l’Assemblée générale.  Un autre pilier de la consolidation de la paix est le développement d’une stratégie globale pour traiter de la reconstruction post-conflit, en veillant à l’appropriation nationale.  Il est important que le processus de consolidation de la paix soit mis en œuvre non seulement au niveau de la Commission mais aussi au niveau de la CEDAO et de l’Union africaine.  


M. MUBARAK (Jamahiriya arabe libyenne) a déclaré que son gouvernement souhaitait voir la paix s’établir dans les pays d’Afrique de l’Ouest, avec lesquels il entretient des relations bilatérales.  Les conflits qui ont éclaté dans la sous-région ont en effet fait de nombreuses victimes innocentes et débouché sur la destruction d’infrastructures civiles et de biens privés, à l’origine d’une grave crise économique.  Le recours aux moyens pacifiques est le moyen le plus sûr d’obtenir des résultats, a estimé la Libye, qui a pour sa part déployé des efforts pour contribuer au maintien de la paix en Afrique de l’Ouest, comme lors de l’initiative de reconstruction commune qui s’est tenue en 2002 à Tripoli.  Le représentant s’est déclaré optimiste quant à la transition démocratique dans les pays concernés.  Il a remercié le Secrétaire général pour l’importance qu’il accorde aux pays africains, et notamment au problème de gouvernance qui les empêche de profiter pleinement des ressources naturelles dont ils disposent.  La création de conditions de sécurité durables passe par le maintien de la paix, à laquelle la Libye s’est dite prête à contribuer, a indiqué le représentant, avant de lancer un appel à la mobilisation de la communauté internationale et à la coopération régionale.


M. SYLVESTER ROWE (Sierra Leone) a estimé que les Nations Unies peuvent être fières de ce qu’elles ont accompli en Afrique de l’Ouest.  Les efforts de maintien de la paix étant vains sans ceux de consolidation de la paix, le représentant s’est félicité de la création de la Commission de consolidation de la paix et du fait qu’elle a inscrit la situation de la Sierra Leone à son ordre du jour.  Il a espéré que la Guinée-Bissau et le Libéria suivront dans un avenir proche.  La consolidation de la paix, a-t-il dit, ne vise pas seulement à prévenir la résurgence des conflits mais aussi à atteindre le développement durable.  La consolidation de la paix est un véritable exercice de développement et doit être abordée sous l’angle des programmes d’élimination de la pauvreté.  Saluant la contribution de la CEDEAO dans le rétablissement de la stabilité dans la sous-région, il a souligné que l’organisme a besoin d’un appui de la communauté internationale.  Tout en reconnaissant la responsabilité de chaque État concerné, il s’est dit convaincu que les Nations Unies et la communauté internationale doivent mobiliser les ressources pour appuyer la reconstruction et les programmes de développement à long terme; réagir au lien entre l’élimination de la pauvreté, le développement et le maintien et la consolidation de la paix; ainsi que le lien entre la consolidation de la paix et la mise en œuvre des directives et engagements agréés en matière de commerce international et de financement du développement, y compris l’allègement de la dette.  En Sierra Leone, a conclu le représentant, la paix est toujours menacée par les flux croissants d’armes légères.  Il a une nouvelle fois regretté l’incapacité de la Conférence d’examen de parvenir à un texte agréé tout comme celle du Conseil de sécurité. 


M. ROY CHADERTON LATOS (Venezuela) a déclaré que son pays était en faveur d’une stabilisation de l’Afrique de l’Ouest, qui devrait donner lieu au « cycle vertueux » de paix et de développement.  M. Latos a indiqué que son Gouvernement avait approfondi ses relations avec l’Afrique en s’inspirant de ses propres racines africaines pour s’intégrer dans une société multiculturelle et mondialisée.  La participation du Président Chavez au dernier Sommet de l’Union africaine met bien en lumière ce projet économique, culturel et spirituel dans lequel s’est lancé le Venezuela, de même que son appui à la plupart des pays de la sous-région.  Ainsi, riche de son expérience, le pays a ouvert un centre d’études régionales et lancé un programme éducatif au Mali, parmi tant d’autres initiatives dans la région.  L’extrême pauvreté est la menace la plus grave qui pèse sur la paix, la faim, la mauvaise santé et le manque d’éducation constituant un cocktail que les plus puissants ont l’habitude d’aggraver en faisant preuve de davantage de violences.  Le Venezuela a déclaré que son pays souhaitait appuyer les pays d’Afrique de l’Ouest dans leurs progrès vers la paix et le développement.  À cette fin, M. Latos a proposé que l’Assemblée générale mette en place un mécanisme par le biais duquel les États de la sous-région présenteraient des rapports d’évaluation.


M. CHOI YOUNG-JIN (République de Corée) s’est dit convaincu que la consolidation de la paix doit se réaliser sur une base régionale.  La paix et la stabilité d’un pays nécessitent la coopération des autres pays de la région.  Il a donc appuyé le rôle de la CEDEAO.  Pour éviter la résurgence des conflits, l’Afrique de l’Ouest devra bénéficier d’un appui à ses nouvelles institutions, à ses efforts de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR) ou à sa relance économique.  À cet égard, le représentant s’est dit convaincu du rôle important que jouera la Commission de consolidation de la paix.  Il est également important, a-t-il poursuivi, de traiter des causes sous-jacentes de l’instabilité en Afrique de l’Ouest, telles que les tensions régionales, ethniques ou socioéconomiques.  Il faut donc formuler des stratégies économiques et de développement social à long terme avec l’assistance de la communauté internationale.  Enfin, le représentant a réaffirmé le plan de son pays de doubler l’aide publique au développement d’ici à 2009


M. AMINU BASHIR WALI (Nigéria) a rappelé que l’Afrique occidentale détenait jusqu’à une date récente le record peu enviable de la région la plus instable du continent africain.  Je suis heureux de constater que ce record a pris fin grâce à l’élection de Gouvernements démocratiques en Sierra Leone, au Libéria et en Guinée-Bissau, a déclaré M. Wali.  En outre, l’arrestation de Charles Taylor a adressé un signal fort aux dirigeants de la région, qui ont compris qu’il n’était plus possible de poursuivre des intérêts personnels en Afrique de l’Ouest.  Il reste toutefois des défis formidables à relever dans la sous-région, notamment la situation instable de la Côte d’Ivoire, qui pourrait s’avérer contagieuse si elle n’était pas résolue rapidement, alors que la paix est encore fragile en Guinée-Bissau, au Libéria et en Sierra Leone.  En outre, les facilités d’accès aux armes

légères découragent les acteurs non étatiques de choisir la voie de la paix, tandis que les perspectives de croissance économiques devraient être élargies.  Enfin, la question des capacités d’appui aux institutions requiert une attention particulière pour les pays de la région, a souligné en conclusion le représentant nigérian, qui a estimé que la nouvelle Commission de consolidation de la paix devrait permettre de répondre à cette attente. 


Mme BERIT ENGE (Norvège) a estimé que la communauté internationale doit continuer d’apporter un appui pour consolider la paix en Afrique de l’Ouest.  Une assistance élargie, constante et à long terme aux organisations régionales est essentielle, a-t-elle ajouté.  Il est dans notre intérêt de fournir une assistance aux gouvernements qui luttent pour renforcer la sécurité, promouvoir la réconciliation nationale et édifier la paix.  Cette année, a annoncé la représentante, la Norvège débloquera 27,5 millions de dollars pour les efforts humanitaires, la consolidation de la paix et la reconstruction en Côte d’Ivoire, en Sierra Leone et au Libéria.  Soulignant l’importance de la CEDEAO et l’Union africaine, la représentante a jugé important d’appuyer les organisations régionales et de traiter des questions transfrontières qui peuvent alimenter les conflits et accroître les tensions.  Elle a donc salué les efforts de la CEDEAO visant la formation d’une composante pour les futures forces en attente de l’Union africaine.  Elle a aussi annoncé que son pays est sur le point de signer un accord avec la CEDEAO sur une assistance financière à son Fonds pour la paix et à son programme sur le contrôle des armes légères.  Elle a conclu en se félicitant que de nombreux pays de la sous-région aient signé l’Initiative sur la transparence des industries extractives (EITI) qui vise la bonne gestion des ressources naturelles, et pour ce faire, la création de mécanismes de contrôle. 


M. MUNIR AKRAM (Pakistan) s’est félicité que l’Afrique de l’Ouest occupe à juste titre une part importante des travaux du Conseil de sécurité, notamment dans le domaine de la consolidation de la paix.  La Sierra Leone est, à cet égard, un bel exemple de maintien de la paix sous l’égide des Nations Unies et nous espérons que la Commission de consolidation de la paix renforcera les progrès déjà réalisés.  Le Pakistan a apporté sa contribution à cet effort, notamment en fournissant des contingents à la MINUSIL, à la MINUL et à l’ONUCI et s’est déclaré prêt à prendre part à la reconstruction de la Sierra Leone dans le cadre des travaux de la Commission.  Le représentant a fait observer que la plupart des situations dans la sous-région étaient des crises complexes qui exigent toute une gamme de solutions qui vont de l’aide humanitaire à la consolidation de la paix.  Une démarche intégrée, de longue durée et multisectorielle, est indispensable, a-t-il plaidé.  En dépit des progrès, a-t-il cependant fait remarquer, il reste beaucoup de questions en suspens qu’il ne sera possible de régler qu’en s’attaquant aux causes profondes des conflits.


M. ABOUBACAR IBRAHIM ABANI (Niger) a souligné que la pauvreté endémique, le poids de la dette et les faiblesses institutionnelles peuvent constituer autant de dangers à la paix et hypothéquer le développement de la sous-région.  Se félicitant de la création de la Commission de consolidation de la paix, le représentant a jugé indispensable, pour assurer son succès, que les pays concernés procèdent d’abord à un renforcement de leurs capacités institutionnelles, en particulier judiciaires et sécuritaires, dont les lacunes ont facilité la circulation illicite des armes légères.  Il a donc salué la transformation du moratoire de la CEDEAO en une convention juridiquement contraignante.  Il a aussi salué le Protocole de la CEDEAO sur la bonne gouvernance, en particulier son potentiel de dissuasion.  Soulignant également l’importance du Mécanisme d’évaluation par les pairs de la NEPAD, le représentant a fermement défendu le principe d’appropriation des programmes et des politiques, définis avec l’aide de la communauté internationale, par les pays concernés.  La recherche de partenariats pourrait, lorsque ces derniers prennent une orientation strictement économique, être en contradiction avec les fragiles équilibres en matière de paix et de sécurité, s’est expliqué le représentant.  Il a appelé la Commission de consolidation de la paix à mettre pleinement en œuvre les cadres de coopération déjà existants entre l’Afrique de l’Ouest et l’Union africaine, d’une part, et entre l’Afrique de l’Ouest et les Nations Unies, d’autre part. 


M. JAMES Z. EESIAH (Libéria) a déclaré que son pays avait connu plus de 14 années de guerre civile et les problèmes qui se sont ensuivis ont eu des effets dévastateurs sur la jeunesse du pays.  Toute la sous-région en a été déstabilisée.  Il a reconnu qu’il ne faisait aucun doute que les grandes organisations internationales, la société civile et les États-Unis avaient consenti d’immenses sacrifices pour ramener la paix au Libéria.  Le représentant a déclaré que son pays était prêt à mettre en œuvre le document final qui serait adopté à la fin de cette réunion ministérielle, notamment pour mettre fin au recrutement d’enfants soldats dans les pays voisins.  Tous les efforts doivent en effet être déployés pour venir à bout de ce fléau.  C’est pourquoi il a lancé un appel au Conseil de sécurité pour qu’il fasse de la fin de l’importation d’armes dans la sous-région une question prioritaire, en raison de l’impact qu’elle a sur la jeunesse locale.


Réagissant aux déclarations précédentes, le Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afrique de l’Ouest a insisté sur la nécessité de prendre en compte le chômage des jeunes, qui constitue une menace pour la stabilité régionale.  Ensuite, il est souhaitable que le Conseil se penche sur les meilleurs moyens d’appuyer les élections qui auront lieu en 2007 dans plusieurs pays de la sous-région, et qui pourraient s’avérer des facteurs de tensions.  M. Ould-Abdallah s’est enfin félicité du fait que l’opinion publique africaine était mieux informée des décisions du Conseil de sécurité, notamment grâce à la généralisation de la radio. 


Déclaration présidentielle


Le Conseil de sécurité, rappelant ses résolutions pertinentes et les déclarations de son président, souligne qu’il importe de régler la question de la consolidation de la paix en Afrique de l’Ouest de manière globale et coordonnée.  Il considère qu’une telle approche s’impose pour trouver des solutions durables aux conflits en Afrique de l’Ouest et qu’il faut réfléchir aux moyens de promouvoir une paix, une sécurité et un développement durables.


Le Conseil se félicite de voir que la guerre a cédé la place à l’ordre démocratique en Sierra Leone, en Guinée-Bissau et au Libéria, et que des efforts sont actuellement déployés en vue d’appliquer des mesures devant déboucher sur des élections libres et équitables en Côte d’Ivoire.  Il note également que la situation sur le plan de la sécurité dans ces pays demeure généralement stable mais précaire.


Le Conseil souligne la nécessité de donner aux institutions nationales les moyens de s’attaquer aux causes profondes des conflits comme facteur essentiel de consolidation de la paix, en particulier dans les domaines de la gouvernance politique et économique ainsi que dans celui de l’état de droit et de la lutte contre l’impunité.


Le Conseil rappelle les mesures qu’il a mises en œuvre à propos de l’exploitation illégale des ressources naturelles dans la région et encourage les États membres de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) à promouvoir la transparence et l’exploitation durable de ces ressources.


Le Conseil souligne le rôle primordial que doit jouer chaque gouvernement en Afrique de l’Ouest pour consolider la paix dans l’intérêt de tous les citoyens et réaffirme combien il importe que tous les dirigeants œuvrent de concert en faveur de la paix et de la sécurité dans la région.


Le Conseil estime que le trafic illicite d’armes légères continue de faire peser une menace sur la paix et la sécurité dans la région.  À cet égard, il se félicite de la décision prise par les États membres de la CEDEAO de transformer le moratoire sur l’importation, l’exportation et la fabrication d’armes légères en convention sur les armes légères, leurs munitions et autres matériels connexes revêtue de force exécutoire.  Il demande en outre instamment à tous les États, à l’intérieur comme à l’extérieur de la région, de veiller au respect des embargos sur les armes en Afrique de l’Ouest qu’il a décrétés et aux États membres de la CEDEAO de ratifier la convention dès que possible afin qu’elle entre en vigueur dans  les meilleurs délais.


Le Conseil estime que la société civile, y compris les organisations de femmes, a un rôle à jouer s’agissant d’appuyer les initiatives de consolidation de la paix dans la région et que les efforts qu’elle fait à cet égard méritent d’être soutenus selon qu’il conviendra.


Le Conseil insiste sur l’importance capitale du désarmement, de la démobilisation et de la réintégration (DDR) des ex-combattants, en tenant compte des besoins particuliers des enfants soldats et des femmes, et encourage la communauté internationale à œuvrer dans le cadre d’un partenariat étroit avec les pays concernés.  Il réaffirme en outre la nécessité de trouver des solutions durables au problème du chômage des jeunes afin d’éviter que ces derniers soient recrutés par des groupes armées illégaux.


Le Conseil voit dans la réforme du secteur de la sécurité un élément essentiel d’une paix et d’une stabilité durables en Afrique de l’Ouest et lance un appel pressant aux donateurs et aux institutions financières internationales afin qu’ils coordonnent leurs efforts pour venir en aide aux États concernés.


Le Conseil insiste sur la nécessité de continuer d’aider les États d’Afrique de l’Ouest à lutter contre les activités transfrontières illicites. 


Le Conseil réitère qu’il importe de trouver des solutions efficaces au problème des réfugiés et des personnes déplacées dans la région et demande instamment aux États de la région, en collaboration avec les organisations internationales compétentes et les pays donateurs, de créer les conditions nécessaires à leur retour volontaire et en toute sécurité.


Le Conseil se félicite du rôle positif joué par la communauté internationale et la société civile pour faire face à la situation humanitaire dans nombre de parties de la région et leur demande instamment de mettre à disposition des ressources suffisantes, dans le cadre d’une stratégie d’intervention humanitaire coordonnée, pour améliorer la sécurité des populations d’Afrique de l’Ouest qui ont besoin de cette protection.


Le Conseil insiste sur la nécessité de veiller à mieux coordonner les initiatives des donateurs afin de faire le meilleur usage des ressources disponibles et encourage les donateurs partenaires à verser les contributions annoncées en temps voulu.


Le Conseil insiste en outre sur la nécessité de poursuivre et d’améliorer la coopération entre l’Organisation des Nations Unies, la CEDEAO et l’Union africaine dans les initiatives de consolidation de la paix, selon une approche intégrée et dans le but de maximiser l’utilisation des ressources disponibles.  À cet égard, il félicite le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest ainsi que les autres bureaux, missions et organismes des Nations Unies présents dans la région du rôle qu’ils jouent pour faciliter, en étroite coopération avec le secrétariat exécutif de la CEDEAO et ses États membres, la réalisation des priorités en matière de paix et de sécurité dans la région.  Il encourage en outre le Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afrique de l’Ouest et les missions des Nations Unies dans la région à poursuivre leurs efforts pour coordonner les activités des Nations Unies en vue d’en accroître la cohérence et l’efficacité.


Le Conseil souligne l’importance et le rôle de la Commission de consolidation de la paix pour ce qui est d’aider les pays qui sortent d’un conflit à assurer une paix et une stabilité durables.


Le Conseil insiste sur la dimension régionale de la paix et de la sécurité en Afrique de l’Ouest et prie le Secrétaire général, en consultation avec le secrétariat de la CEDEAO, de lui présenter, d’ici à la fin de l’année, un rapport assorti de recommandations sur la coopération entre les missions des Nations Unies déployées dans la région et sur les questions transfrontières en Afrique de l’Ouest.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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