CS/2636

LA BOSNIE-HERZEGOVINE CONTINUE A EVOLUER VERS UN ETAT EUROPEEN MODERNE, AFFIRME LE HAUT REPRESENTANT DEVANT LE CONSEIL DE SECURITE

03/03/2004
Communiqué de presse
CS/2636


Conseil de sécurité

4920e séance – matin


LA BOSNIE-HERZEGOVINE CONTINUE A EVOLUER VERS UN ETAT EUROPEEN MODERNE,

AFFIRME LE HAUT REPRESENTANT DEVANT LE CONSEIL DE SECURITE


Présentant ce matin son rapport devant le Conseil de sécurité, en présence de Adnan Terzic, Président du Conseil des ministres de la Bosnie-Herzégovine, le Haut Représentant chargé d’assurer le suivi de l’Accord de paix relatif à la situation en Bosnie-Herzégovine, Lord Paddy Ashdown, a fait état des progrès notables dans la consolidation de l’état de droit, la lutte contre le crime organisé et la réforme des institutions, notamment dans le domaine de la défense.  Conscient toutefois de la nécessité d’insérer les réformes dans le contexte euro-atlantique, il a déclaré que la Bosnie-Herzégovine devait s’efforcer de remplir à l’avenir les conditions indispensables pour lui permettre d’adhérer à moyen terme à l’Union européenne ainsi qu’à l’OTAN.  Lord Ashdown a exhorté la communauté internationale à maintenir l’aide à ce petit mais important pays d’Europe.  La Bosnie-Herzégovine, a-t-il dit, offre l’exemple d’une action réussie de stabilisation de la paix grâce à la communauté internationale et à l’engagement de ses citoyens, qui sont les véritables héros de ce processus. 


A la suite de l’exposé du Haut Représentant, les membres du Conseil se sont unanimement félicités du transfert de souveraineté opéré dans les quatre domaines définis par M. Ashdown dans le cadre des réformes: la justice, la défense, le renseignement et le retour des réfugiés.  Ils ont aussi salué le processus de réunification à l’œuvre dans la ville de Mostar, lieu hautement symbolique de la diversité ethnique de Bosnie-Herzégovine, entrepris par le Haut Représentant afin de permettre aux citoyens de s’impliquer dans la gestion des affaires municipales.


Un problème a toutefois retenu l’attention des membres du Conseil, celui de la certification des policiers locaux.  Plusieurs délégations ont mis en garde contre le risque d’une réintégration dans la force de police d’individus ayant peut-être été impliqués dans des massacres ou des exactions.  Elles ont appelé à respecter la légalité internationale.


Le retour des réfugiés a été également relevé comme l’une des réussites à porter au crédit du Haut Représentant, puisque que plus d’un million, dont 400 000 issus de minorités ethniques, sont revenus s’établir dans le pays.  Il a été noté toutefois, que 350 000 n’ont pas encore pris le chemin du retour, notamment en raison d’un taux de chômage particulièrement élevé.  La Bosnie-Herzégovine est en effet confrontée à d’importantes difficultés économiques, l’Espagne déclarant urgent de relancer les investissements et la création d’emplois afin d’éviter une aggravation de la situation. 


Outre les membres du Conseil, les représentants de la Bosnie-Herzégovine, de l’Irlande et de la Croatie se sont exprimés.  Le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, Jean-Marie Guéhenno, a également pris la parole.


LA SITUATION EN BOSNIE-HERZÉGOVINE


Rapport du Haut Représentant chargé d’assurer le suivi de l’application de l’Accord de paix relatif à la Bosnie-Herzégovine (S/2004/126)


Ce rapport couvre la période du 1er septembre au 31 décembre 2003.  Le Haut Représentant fait état de progrès tangibles dans plusieurs domaines importants.  Ainsi, s’agissant de l’état de droit, il mentionne les avancées dans la mise en place d’un Haut Conseil de la magistrature qui devrait être en principe établi d’ici à avril 2004.  Cet organe multiethnique, qui nommera et sanctionnera juges et procureurs, constituera la base du nouvel appareil judiciaire du pays qui obéira aux plus hautes normes européennes.


Le Bureau du Haut Représentant a par ailleurs continué de superviser la mise en place d’une Agence d’information et de protection de l’État.  Au cours de la période considérée, un certain nombre de projets de loi ont été élaborés en vue de leur examen par le Parlement.  Il s’agit entre autres d’un projet d’amendement visant à doter le nouvel organe des pouvoirs requis en matière de répression et de normes et de procédures professionnelles, ainsi que de moyens lui permettant d’examiner les questions relatives au blanchiment de capitaux et à la protection des témoins.


Il est aussi indiqué que la Section spéciale chargée du crime organisé, du crime économique et de la corruption du Bureau du Procureur a commencé à enquêter sur des affaires importantes liées à la criminalité organisée et à la corruption dans le pays et à poursuivre leurs auteurs en justice.  De son côté, le Tribunal de la Bosnie-Herzégovine a statué sur des affaires de faux, de contrebande, de trafic de drogues et de traite de personnes, et des poursuites ont été engagées à l’encontre de plus de 200 prévenus au titre d’autres chefs d’accusation.  Enfin, le rapport rappelle que lors d’une conférence de donateurs en octobre dernier, à La Haye, des annonces de contribution ont été faites à hauteur de près de 16 millions d’euros (le montant nécessaire ayant été estimé à 38) pour la mise en place d’une chambre des crimes de guerre de la Bosnie-Herzégovine.


S’agissant de la fiscalité, il est souligné que les travaux de la Commission chargée de la réforme de la fiscalité ont abouti à la mise en place d’une autorité chargée de la fiscalité indirecte, organe national qui transfère les compétences des deux gouvernements des entités au niveau de l’État.


Concernant la réforme de la défense, l’Assemblée parlementaire de Bosnie-Herzégovine et les législatures des deux entités ont promulgué une nouvelle loi qui établira un commandement et un contrôle communs des forces armées, plaçant ainsi la Bosnie-Herzégovine sur la voie de l’adhésion au programme Partenariat pour la paix de l’OTAN.  Abordant ensuite la question de la réforme des services de renseignements, le rapport rappelle que le Haut Représentant a présenté un projet de loi élaboré par la Commission d’experts directement à l’Assemblée parlementaire de Bosnie-Herzégovine et demandé à l’organe législatif de prendre les mesures voulues pour qu’il soit adopté avant la fin de mars 2004.


D’autre part, une commission présidée par la communauté internationale a été créée afin d’unifier Mostar, ville divisée en groupes ethniques, et de relancer sa croissance économique.


Il est affirmé en conclusion que les objectifs premiers visant à ce que le pouvoir soit transféré aux autorités nationales, comme garantie du droit au retour, ont été atteints: environ un million de personnes ont ainsi regagné leur foyer, la plupart des gros travaux de reconstruction ont été menés à bien, et presque tous les biens réclamés ont été restitués à leurs propriétaires; de ce fait, le Groupe pour la reconstruction et le retour a pu cesser ses activités, en tant qu’organe séparé du Bureau du Haut Représentant, comme prévu à la fin de 2003.


Déclarations


M. PADDY ASHDOWN, Haut Représentant chargé d’assurer le suivi de l’Accord de paix relatif à la Bosnie-Herzégovine, a rappelé que la Bosnie-Herzégovine a maintenant deux objectifs à atteindre, qui déjà se font jour, et réalisables si le rythme des réformes est maintenu et accéléré: les conditions de son éligibilité au Programme partenariat pour la paix de l’OTAN touchant la réforme en matière de défense et la coopération avec le Tribunal international pour l’ex-Yougoslavie; et les conditions claires et pratiques définies par la Communauté européenne afin que le pays puisse entamer des négociations sur un Accord de stabilisation et d’association avec l’Union européenne.  Il est donc indispensable de s’assurer que la Bosnie-Herzégovine met bien en œuvre toutes les réformes souhaitables pour intégrer les structures euro-atlantiques, a-t-il ajouté. 


Evoquant les progrès réalisés depuis son dernier exposé devant le Conseil, en octobre dernier, il a rappelé la création des quatre commissions de réforme, et notamment celle portant sur la fiscalité et les douanes, qui permettra de combattre la fraude et la corruption et de constituer des ressources de trésorerie pour le Gouvernement.  S’agissant de la défense, un commandement et un contrôle communs des Forces armées de Bosnie-Herzégovine au niveau de l’Etat, y compris notamment la création d’un poste de Ministre de la défense et celle d’une autorité de commandement exercée à partir de la Présidence représentent des progrès tangibles et aideront le pays à remplir les conditions indispensables pour adhérer au partenariat de l’OTAN.  Enfin, Lord Ashdown s’est félicité de la création d’une agence de renseignements unifiée au niveau national.


Le Haut Représentant a ensuite évoqué la situation de la ville de Mostar et les efforts pour la doter d’un statut tenant compte de l’intérêt de tous ses citoyens et permettant d’éviter les violences auxquelles elle a déjà eu à faire par le passé.  Une commission locale n’ayant permis d’engranger que des progrès minimes, une nouvelle commission représentative des citoyens de Mostar est parvenue en revanche à un accord sur de nombreuses questions, même s’il reste à régler les problèmes des élections et des structures municipales.  Un Envoyé spécial et une petite équipe ont par ailleurs été affectés à mettre en œuvre le processus de réunification de la ville.


Poursuivant sur la réforme des institutions judiciaires, M. Ashdown a déclaré qu’une commission avait été créée en vue de combattre le crime organisé et la corruption, qui pendant trop longtemps ont tenu en otage la Bosnie-Herzégovine.  En ce qui concerne la mise en place d’une capacité nationale pour poursuivre les criminels de guerre, il a rappelé qu’une conférence de donateurs avait été organisée, dont les fonds récoltés permettront d’instaurer une chambre de crimes de guerre en Bosnie-Herzégovine, afin de faire traduire en justice entre autres les auteurs des massacres de Srebrenica.


En conclusion, le Haut Représentant a affirmé que l’un de ses principaux soucis était moins la résurgence de rivalités ethniques que la crise économique, qui pourrait avoir de graves conséquences pour le pays, malgré quelques succès localisés.  Il faut mettre en place un cadre attirant pour les investisseurs et s’atteler à des réformes administratives afin de travailler de façon efficace, sans lourdeurs ni paperasserie, a-t-il ajouté, stigmatisant aussi une dette intérieure de 4 milliards d’euros.  Par ailleurs, l’absence d’emplois est souvent invoquée pour justifier le refus de nombreux réfugiés de revenir dans leur pays d’origine, a-t-il regretté.  Toutefois, le retour de ces réfugiés, près d’un million au total, dont 400 000 issus de minorités ethniques, demeure dans l’ensemble un succès.  Enfin, parmi les nombreux défis restant à relever, le Haut Représentant a souligné celui du nombre croissant de contestations du processus de certification des fonctionnaires de police organisé par le Groupe international de police des Nations Unies pendant son mandat dans le pays, expliquant la question du licenciement des officiers de police non certifiés, qui se sont tournés vers les tribunaux nationaux pour contester cette décision.


M. JEAN-MARIE GUEHENNO, Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, faisant référence aux paragraphes 66 et67 du dernier rapport présenté par Lord Ashdown, a rappelé que les décisions du Commissaire du Groupe international de police sont intervenues conformément à l’Accord-cadre général pour la paix.  Les autorités de Bosnie-Herzégovine étaient et restent dans l’obligation contraignante de donner effet à ces décisions.  Il a partagé l’opinion de Lord Ashdown quant à l’importance politique des protestations du processus de certification et l’a assuré du soutien entier des Nations Unies face à ces contestations.  M. Guéhenno a déploré que les tribunaux de Bosnie-Herzégovine aient contesté les décisions du Conseil de mise en œuvre de la paix, s’agissant de certains officiers de police.


M. ADNAN TERZIC, Président du Conseil des ministres de la Bosnie-Herzégovine, a rendu hommage dans un premier temps au Président de la Macédoine décédé la semaine dernière dans un accident d’avion.  Il a ensuite affirmé que le processus de normalisation en Bosnie-Herzégovine était irréversible et que la communauté internationale devait soutenir l’intégration de son pays dans l’espace euro-atlantique.  Reconnaissant que certains domaines nécessitent encore des progrès, comme le souligne le rapport de Lord Ashdown, il a assuré que son Gouvernement était conscient de ces priorités et s’apprêtait actuellement à adopter un plan d’action couvrant les domaines de la sécurité, de la police, de la fiscalité et du redressement économique.  Le document sur la stratégie de réduction de la pauvreté et de développement de la Bosnie-Herzégovine, récemment adopté au plan national, doit être soutenu par la communauté internationale, a dit M. Terzic.  Nous sommes déterminés à intégrer davantage les normes européennes dans nos institutions, a-t-il ajouté, et nous poursuivons nos efforts de coopération avec l’Europe du Sud-Est comme l’a démontré notre participation à la rencontre de Mostar, la semaine dernière.  Les relations de bon voisinage doivent être renforcées, a dit le Président du Conseil des ministres, avant de plaider pour une réforme du mandat de l’EUFOR afin de lui permettre de soutenir les efforts de la Bosnie-Herzégovine en matière de sécurité. 


M. HERALDO MUNOZ (Chili) a admis que la priorité devait être la consolidation de l’état de droit en Bosnie-Herzégovine et le soutien aux institutions.  Il a salué les avancées présentées par Lord Ashdown en matière de sécurité qui ont contribué au retour de nombreux réfugiés et déplacés, ainsi que celles constatées au niveau économique.  S’agissant de la certification des policiers locaux, le représentant a exhorté les dirigeants bosniaques à se conformer aux dispositions des accords de paix, avant de considérer que les questions de sécurité devaient être prises au sérieux dans le contexte de la lutte contre la criminalité organisée et le terrorisme.  En matière de justice, M. Munoz a estimé que les personnes suspectées de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre devaient être traduites en justice. 


M. SERGEY LAVROV (Fédération de Russie) s’est félicité des efforts constants du Haut Représentant pour faire progresser la transformation des structures étatiques de la Bosnie-Herzégovine, comme pour accélérer le rythme des retours des réfugiés.  Il a tout particulièrement fait part de sa satisfaction au sujet du transfert de responsabilités de plus en plus complètes au pays.  Le représentant a d’ailleurs précisé que ces résultats n’ont pu être obtenus que grâce au respect de l’esprit des Accords de Dayton et au consentement de tous les peuples de Bosnie-Herzégovine, ajoutant qu’il faudra en faire un exemple   Il s’est dit toutefois inquiété par la tentative de désavouer les décisions des institutions internationales en Bosnie-Herzégovine au travers du problème des policiers non certifiés.


M. INOCENCIO ARIAS (Espagne) s’est félicité des progrès accomplis pour consolider l’état de droit, notamment avec la mise en place d’une chambre des crimes de guerres grâce à l’organisation d’une conférence des donateurs par le Haut Représentant.  En second lieu, il a accueilli favorablement les avancées faites concernant le retour des réfugiés et la restitution des biens.  Le représentant a souligné que la création d’une autorité de défense unique au niveau national permettra de se rapprocher des exigences d’une adhésion au Pacte de l’OTAN.  Le représentant a toutefois fait part de son inquiétude à propos de la faible activité économique et du manque d’investissements dans le pays, ce qui pourrait le précipiter à long terme dans une situation explosive.  Enfin, il a dit suivre avec attention le problème du licenciement des officiers de police non certifiés et a lancé un appel aux autorités locales pour qu’elles appuient le Haut Représentant et s’est déclaré favorable à ce que le Conseil s’exprime publiquement sur ce point.


M. ISMAEL ABRAAO GASPAR MARTINS (Angola) a salué les efforts déployés en Bosnie-Herzégovine par Lord Paddy Ashdown pour soutenir le processus de normalisation dans ce pays.  Il a réaffirmé l’importance de consolider l’état de droit et s’est dit satisfait à cet égard de la vision claire exposée par le Président du Conseil des ministres de la Bosnie-Herzégovine.  Les priorités sont claires, raisonnables, a-t-il dit, soutenant en particulier les réformes économiques et administratives, et notamment la création d’une autorité de la magistrature ou d’une unité de lutte contre la corruption.  De même, il a salué les efforts déployés pour accélérer les travaux du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie.  Le Plan d’action du Gouvernement dans les domaines de l’agriculture, de la fiscalité et des infrastructures est de la plus haute importance, a fait valoir M. Gaspar Martins, convaincu que la réforme du système de renseignements est de nature à contribuer au renforcement de la sécurité.  Le représentant angolais a invité l’Union européenne à tenir compte des jalons posés par la Bosnie-Herzégovine sur la voie de son intégration dans l’espace euro-atlantique. 


M. GUNTER PLEUGER (Allemagne) a exhorté la communauté internationale à maintenir son appui au processus de normalisation en Bosnie-Herzégovine et a assuré que l’Allemagne poursuivrait son engagement à cette fin.  Il y a encore un manque d’identification des communautés ethniques avec l’État de Bosnie-Herzégovine et il n y’a toujours pas d’économie autonome, a déploré ensuite le représentant, rappelant que l’Union européenne et l’OTAN demeurent déterminées à intégrer une Bosnie-Herzégovine multiethnique et engagée dans les réformes.  S’agissant de son intégration au partenariat pour la paix de l’OTAN, M. Pleuger a jugé que la Bosnie-Herzégovine devrait avant tout réformer sa défense.  Il s’est ensuite tourné vers les questions de justice internationale et a lancé un appel aux dirigeants bosniaques pour qu’ils renforcent les mesures visant à arrêter et traduire en justice les responsables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.  Enfin, il a invité les autorités bosniaques à se conformer au processus de certification des policiers prévu dans les accords de paix, avant de leur rappeler qu’ils étaient les premiers responsables du processus de réformes préalable à leur intégration euro-atlantique. 


M. JONES PARRY (Royaume-Uni) a estimé que, dans la perspective de mettre en œuvre un leadership politique et d’instaurer l’état de droit, la création d’une chambre des crimes de guerre constitue un outil appréciable.  Les réformes économiques sont essentielles, a-t-il ajouté, et doivent se poursuivre, de même que la lutte contre le crime organisé, non seulement en raison du manque à gagner que ses activités constituent pour l’Etat mais aussi en raison de son influence pernicieuse dans la région.  Enfin, il a estimé nécessaire de se pencher sur la question des officiers de police non certifiés qui ont intenté une action au sujet de leur révocation.  Evoquant la possibilité d’une réintégration, il a mis en garde contre le risque d’un retour dans la force de police  d’individus ayant commis dans le passé des actes inacceptables. 


M. LAURO BAJA (Philippines) a déclaré que l’effort de la communauté internationale pour édifier un état de droit en Bosnie-Herzégovine était en train de parvenir à son terme.  Il a insisté sur la nécessité de mobiliser l’appui des populations locales aux réformes, seul moyen de leur donner le sentiment de participer à leur propre histoire.  Il s’est d’ailleurs sur ce point dit satisfait par le transfert effectif des responsabilités aux autorités locales.  Toutefois, il a fait part de sa préoccupation au sujet des contestations du processus de certification des fonctionnaires de police ajoutant qu’il est, selon lui, scandaleux que des officiers de police aient essayé de tirer parti des lacunes des textes pour exiger leur réintégration.  Le représentant a estimé par ailleurs qu’il fallait mettre en accusation les criminels de guerre et a demandé aux autorités de Bosnie-Herzégovine de collaborer pleinement dans les poursuites à mettre en œuvre à cet effet.


M. MIHNEA IOAN MOTOC (Roumanie) a déclaré que son pays attachait la plus grande attention à la stabilité et au développement de la Bosnie-Herzégovine, et à la mise en œuvre complète des Accords de Dayton, ainsi qu’aux réformes indispensables à l’intégration de la Bosnie-Herzégovine à l’Europe.  Les progrès tangibles enregistrés par la Bosnie-Herzégovine, notamment dans le domaine de la cohésion de l’Etat, à travers la mise en place d’un Haut Conseil de la magistrature, l’adoption d’une loi sur la défense, et la création d’un organisme unique chargé de la fiscalité indirecte, témoignent qu’elle reste engagée sur le bon chemin.  La Roumanie espère que cette conduite servira de modèle à l’ensemble de la région des Balkans.  L’étude de faisabilité de la Commission européenne et l’exigence formulée par l’OTAN en ce qui concerne l’adhésion au Partenariat pour la paix donnent la meilleure indication des priorités que la Bosnie-Herzégovine doit suivre pour faire avancer ses aspirations d’intégration dans l’Union européenne et dans l’OTAN, a ensuite estimé le représentant.  La Roumanie encourage la Bosnie-Herzégovine à accélérer les réformes nécessaires à cet effet.  En outre, la pleine coopération avec le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie sera le signe le plus clair indiquant une rupture avec la logique qui prévalait dans le passé, en faveur d’un désir d’avancer vers un avenir plus stable et plus intègre.  La Roumanie, qui s’intéresse aussi au renforcement de la police et à la lutte contre la criminalité organisée, souhaiterait que les autorités de Bosnie-Herzégovine, le Haut Représentant, et les organisations internationales actives sur le terrain, prennent les mesures nécessaires pour régler les questions liées à la certification des fonctionnaires de police.


M. HENRIQUE VALLE (Brésil) s’est félicité des progrès accomplis par le peuple bosniaque depuis la signature des Accords de Dayton en 1995.  Il est encourageant, a-t-il dit, de constater les progrès réels accomplis sur les trois priorités fixées par Lord Ashdown, à savoir, la consolidation de l’état de droit et l’avancement des réformes économiques, tout en continuant d’améliorer le fonctionnement et l’efficacité des institutions de gouvernement centrales en Bosnie-Herzégovine.  Le Brésil se félicite de l’adoption du Code de procédure civile et de la création du Haut Conseil de la magistrature, au niveau national, qui illustre ce qui est possible d’accomplir par la coopération.  Des structures multiethniques sont créées au niveau national –ou sont déjà en place–, a-t-il ajouté, ce qui montre que les barrières ethniques peuvent toujours être surmontées par la voie du dialogue et par le biais d’entreprises politiques et économiques conjointes.  Le Conseil est conscient des défis qui restent à relever, a déclaré M. Valle, notamment concernant le commandement et le contrôle conjoint des forces armées de Bosnie-Herzégovine au niveau national, ou le statut de la ville de Mostar.  A cet égard, le représentant a rendu hommage au rôle joué par la Force de stabilisation (SFOR) et par la Mission de police de l’Union européenne.  Le représentant du Brésil a encouragé les gouvernements de Bosnie-Herzégovine, de Croatie et de Serbie-et-Monténégro à poursuivre leurs efforts afin d’améliorer leurs relations de bon voisinage et de consolider la paix.


M. WANG GUANGYA (Chine) a salué les efforts inlassables de Lord Ashdown dans la mise en œuvre de l’Accord de Dayton, avant de constater que le retour des réfugiés était en cours d’achèvement et que la normalisation de la situation était sur la bonne voie.  Cependant, a-t-il dit, le Haut Représentant doit axer ses priorités en 2004 sur la sécurité et la justice et il disposera du plein soutien de ma délégation à cette fin.  La Chine a toujours suivi de près l’évolution de la situation en Bosnie-Herzégovine, a dit M. Wang, se félicitant des progrès enregistrés en matière de réformes économiques. 


M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a déploré la mort du Président de la Macédoine la semaine dernière dans un accident d’avion, avant d’exhorter la communauté internationale à intensifier son appui à la Bosnie-Herzégovine 12 ans après la guerre et le nettoyage ethnique qui l’a caractérisé.  Il a rendu hommage aux dirigeants bosniaques et surtout au Haut Représentant, Lord Ashdown, pour son soutien à l’édification d’un état de droit, aux réformes économiques et à la normalisation du pays.  Néanmoins, il a déploré la lenteur du processus de réformes qui sape les perspectives de réconciliation, jugeant étrange que l’on ne parvienne pas à localiser Karadzic et Mladic dans un espace géographique assez étroit, surtout si on le compare à la bande frontalière entre le Pakistan et l’Afghanistan où l’on pense que Bin Laden se cache. 


M. JAMES CUNNINGHAM (Etats-Unis), soulignant les réels progrès dans l’édification d’un état de droit en Bosnie-Herzégovine, dans le retour des réfugiés, la réforme de la fiscalité, et la restitution des biens, a exhorté la communauté internationale à ne pas relâcher ses efforts et son soutien.  M. Cunningham a rendu hommage au rôle clef de Lord Ashdown et a soutenu sa position concernant la certification des fonctionnaires de la police et les mesures prises par le Haut représentant contre les personnes soupçonnées d’apporter leur soutien aux responsables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.  Ce soutien ne fait que retarder le retour de la Bosnie-Herzégovine dans le concert euro-atlantique et dans les instances européennes, a-t-il constaté, mettant en garde la Republika Srpska.  Les défis à relever demeurent considérables dans la lutte contre le terrorisme, a-t-il dit, avant d’apporter son appui à la réforme du système de renseignements et à la création d’un commandement unifié de l’armée.  Il a invité les autorités bosniaques à accélérer le rythme des réformes, en particulier par la nomination d’un Ministre de la défense qui devrait intervenir avant le mois de juin pour ne pas compromettre l’intégration de la Bosnie-Herzégovine dans le Partenariat pour la paix de l’OTAN. 


M. EDOUARD AHO GLELE (Bénin) a déclaré que la Bosnie-Herzégovine s’était résolument engagée dans la voie de la réconciliation et de la reconstruction nationales.  Il a exhorté les autorités de la Bosnie-Herzégovine à rechercher des solutions idoines aux problèmes institutionnels auxquels le pays est confronté, notamment en ce qui concerne la police et la mise en place de la chambre des crimes de guerre.  M. Glele a souligné qu’au plan politique, les difficultés énoncées, comme par exemple les divisions sur la base de l’appartenance ethnique ainsi que la tension au niveau des deux grands partis n’étaient pas des problèmes spécifiques à la Bosnie-Herzégovine.  A cet égard, il a vivement encouragé les deux partis à poursuivre le dialogue dans un esprit constructif et dans le respect des normes démocratiques.  Le représentant a par ailleurs noté qu’autant le maintien du statu quo à Mostar comportait de réels risques pour la stabilisation du pays, autant il était urgent de régler le problème relatif au statut de cette ville.  Evoquant Srebrenica, le représentant a indiqué que sa délégation souhaitait « renouveler sa compassion aux parents des victimes de la guerre ».  Il faut souhaiter que « la page douloureuse de la question des personnes disparues ou décédées puisse être rapidement tournée, afin que cette ville retrouve de nouvelles forces pour faire face à son avenir », a-t-il ajouté.


M. ABDALLAH BAALI (Algérie) a rappelé que des progrès significatifs avaient été accomplis dans la consolidation de l’état de droit, du relèvement économiques et du renforcement des capacités institutionnelles de la Bosnie-Herzégovine.  Il s’est ensuite félicité des résultats constatés dans le transfert de compétences, ainsi que dans l’adoption d’une loi sur le système de fiscalité indirecte au niveau national.  Il a ajouté qu’il faudra toutefois consolider ces avantages avec une réforme du système de renseignements.  Il a poursuivi en évoquant la décision de réunifier la ville de Mostar, qui offre aux citoyens la possibilité de participer à la gestion des affaires de leur ville.  Par ailleurs, le représentant a déclaré que les réformes accomplies dans le domaine de la justice devraient à la fois garantir l’état de droit et permettre de prendre le relais des institutions internationales, notamment dans la poursuite des criminels de guerre.  Enfin, l’Algérie a ajouté en conclusion qu’il était nécessaire de relancer l’économie et de réunifier toutes les composantes ethniques de la Bosnie-Herzégovine en accélérant le retour des réfugiés.


M. JEAN-MARC DE LA SABLIERE (France) a réaffirmé le soutien de la France à l’action entreprise par le Haut Représentant Lord Ashdown en Bosnie-Herzégovine, notamment aux priorités suivantes: promotion d’un état de droit et justice, réforme et développement économique, lutte contre le crime organisé, réformes structurelles, retours.  Parmi les progrès observés, il a notamment salué la création d’un Conseil national de la magistrature, la réorganisation au niveau national du secteur de la défense et l’introduction d’une administration nationale pour la fiscalité directe.  Ces progrès, a-t-il estimé, vont dans le sens de la construction d’un État moderne et compatible avec le rapprochement avec l’Union européenne.  Dans ce contexte, il a tout particulièrement remercié le Haut Représentant pour son rôle visant à amener la Bosnie-Herzégovine vers un accord de stabilisation et d’association.  Il a souligné la grande vigilance de la France dans l’application concrète des réformes que le Haut Représentant a su obtenir.  Il a regretté les résistances locales qui perturbent parfois l’adoption puis la mise en œuvre de certaines réformes.  Sur la question particulière de la certification des policiers locaux, il a appelé les autorités de Bosnie-Herzégovine à respecter la légalité internationale.  Nous sommes aussi très attachés, a-t-il ajouté, à la coopération de toutes les autorités du pays avec le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie et notons que des progrès sont nécessaires sur ce plan. 


M. RICHARD RYAN (Irlande), intervenant au nom de l’Union européenne, des pays candidats et des pays associés, a estimé que le Bureau du Haut Représentant, Lord Ashdown, jouait un rôle crucial dans la mise en œuvre de l’Accord de paix de Dayton et dans l’édification d’un Etat de droit en Bosnie-Herzégovine.  Rappelant les orientations définies en juin dernier à Thessalonique par l’Union européenne, M. Ryan a jugé que le rythme d’intégration dépendait désormais des pays concernés qui doivent poursuivre leurs réformes en particulier dans les 16 domaines définis par l’étude de faisabilité.  Il a insisté ensuite sur la réforme du système judiciaire et de police et a exhorté, au nom de l’Union européenne, les autorités bosniaques à coopérer avec la communauté internationale.  La coopération des autorités de la région avec le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie est la condition préalable à leur intégration à l’Union européenne, a-t-il dit ensuite, insistant sur la nécessité de traduire en justice Karadzic, Mladic et Gotovina.  Le représentant de l’Irlande a ensuite apporté son soutien à Lord Ashdown pour ses efforts visant à imposer le processus de certification de la police. 


M. VLADIMIR DROBNJAK (Croatie) a relevé les succès marquants atteints sous l’égide des Nations Unies en Bosnie-Herzégovine, de la stabilisation militaire par la Force de mise en œuvre (IFOR) et la Force de stabilisation (SFOR), à la réforme de la police par le biais du Groupe international de police (ITPF) et au retour des réfugiés.  Ce bilan exemplaire des réalisations de la communauté internationale en matière de renforcement de la confiance et de réconciliation post-conflit doit être suivi d’un effort similaire dans le domaine économique, a-t-il estimé.  En tant que pays engagé irréversiblement dans le processus d’intégration européenne, la Croatie estime que la perspective claire et non ambiguë de l’entrée dans l’Union européenne constitue la meilleure incitation au processus de réforme, au niveau national comme régional.  Le résultat direct en sera l’extension de la stabilité démocratique et l’expansion de l’euro-zone de paix, de coopération et de développement à la Bosnie-Herzégovine et au voisinage de la Croatie.  L’acceptation des normes européennes permettra d’établir un pays pleinement autosuffisant et détaché de l’aide financière extérieure et de l’assistance politique.  A cet égard, l’organisation d’élections par la Bosnie-Herzégovine elle-même est positive, a noté M. Drobnjak, mais les coûts ont été assumés une fois encore par la communauté internationale.


Les relations politiques entre la Croatie et la Bosnie-Herzégovine ouvrent des perspectives engageantes pour le progrès de la coopération économique.  L’accord bilatéral de libre-échange existe depuis 2001, et depuis lors les échanges commerciaux ont cru de 30% par an, pour atteindre un milliard de dollars en 2003.  La Croatie est l’un des investisseurs les plus importants en Bosnie-Herzégovine: les investissements en Bosnie-Herzégovine représentent bien plus qu’une simple opération financière, ou la mise en œuvre d’une stratégie économique ciblée –ce sont des investissements à haut rendement dans la stabilité, la coopération, le développement et la démocratie en Europe du Sud-Est.  La Croatie soutient à cet égard le renforcement du système judiciaire, la réforme du secteur militaire et la création d’un marché unique en Bosnie-Herzégovine, et l’engagement politique des dirigeants des trois Etats parties à l’Accord de Dayton est essentiel.  Sur ce point, M. Drobnjak a rappelé que la mise en œuvre de ces Accords était fondée sur le consensus, et non l’imposition.  Par ailleurs, le représentant de la Croatie a souligné l’importance de poursuivre la recherche de Radovan Karadzic et de Ratko Mladic, tous deux responsables de l’épuration ethnique contre les Croates et les Bosniaques dans les années 90.  Il a aussi souligné l’intérêt de son pays pour le bien-être des Croates de Bosnie-Herzégovine.  La volonté de coopérer dans le domaine politique et dans la mise en place des institutions aux côtés de la population croate en Bosnie-Herzégovine est parfois mal comprise, et n’est pas suffisamment appréciée, a-t-il ajouté, précisant que la Croatie continuait simultanément de soutenir l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine.  Notamment, la Croatie est prête à aider la Bosnie-Herzégovine à l’occasion de son entrée historique au sein du Partenariat pour la paix de l’OTAN et dans ses ambitions d’accès à l’Union européenne.


Répondant au Royaume-Uni, le représentant de la Bosnie-Herzégovine a déclaré que la stratégie de sortie de la communauté internationale de Bosnie-Herzégovine passait par l’adhésion de cette dernière en 2009 à l’Union européenne.  Il a insisté sur la nécessité de promouvoir le succès de la Bosnie-Herzégovine, d’appuyer le Haut Représentant dans ses efforts pour accélérer le transfert de souveraineté aux autorités locales, et enfin, de soutenir la lutte contre le crime organisé.  En ce qui concerne le licenciement des officiers de police sans certification, la Bosnie-Herzégovine a réaffirmé son attachement au respect des instruments internationaux, a-t-il assuré.


Reprenant la parole en fin de séance, le Haut Représentant chargé d’assurer le suivi de l’application de l’Accord de paix relatif à la Bosnie-Herzégovine, Lord Paddy Ashdown, s’est dit encouragé par le soutien des membres du Conseil de sécurité avant d’évoquer de nouveau la question de la certification des membres de la police et de considérer à cet égard que c’est au Conseil de décider et de définir clairement le mandat de la mission de police de l’Union européenne pour lui permettre d’assumer cette fonction.  Il sera difficile pour les autorités bosniaques de gérer les appels concernant la certification, a-t-il dit, avant de rappeler que la Bosnie-Herzégovine avait tout fait pour assumer sa part dans le domaine de la police.  Il faut toutefois que le Gouvernement bosniaque travaille étroitement avec les Nations Unies dans les domaines de la justice et de la police.  Il a salué le rôle de la Russie qui a œuvré pour que les Accords de Dayton ne puissent être utilisés comme frein au processus de normalisation en Bosnie-Herzégovine.  Par ailleurs, a-t-il dit, les pays des Balkans ne peuvent avancer que tous ensemble et les efforts de l’un ne peuvent aboutir sans la mobilisation des autres, avant de souhaiter que Belgrade coopère activement.  Pour ce qui est de la stratégie de sortie, Lord Ashdown a souhaité qu’elle fasse l’objet de propositions et qu’elle soit orientée vers l’intégration dans l’espace euro-atlantique et dans l’Union européenne. 


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