DH/350

LES PEUPLES AUTOCHTONES DEMANDENT L’APPUI DE L’INSTANCE PERMANENTE POUR PROMOUVOIR UN DEVELOPPEMENT RESPECTUEUX DE LEUR ENVIRONNEMENT ET DE LEURS DROITS

14/05/03
Communiqué de presse
DH/350


Instance permanente sur

les questions autochtones

5ème et 6ème séances – matin et après-midi


LES PEUPLES AUTOCHTONES DEMANDENT L’APPUI DE L’INSTANCE PERMANENTE POUR PROMOUVOIR UN DEVELOPPEMENT RESPECTUEUX DE LEUR ENVIRONNEMENT ET DE LEURS DROITS


Au troisième jour de sa session consacrée aux jeunes et aux enfants autochtones, l’Instance permanente sur les questions autochtones s’est penchée mercredi sur le développement économique et social, donnant l’occasion aux représentants de communautés autochtones d’exprimer leurs aspirations à un développement respectueux de leur environnement, de leurs droits et de leurs cultures et à l’instauration d’un véritable partenariat commercial qui laisserait une chance à leurs productions.


La plupart des interventions ont reflété la volonté de conserver les valeurs des peuples autochtones face à la mondialisation et ont réclamé l’appui de l’Instance pour la défense et la promotion d’une forme de développement qui préserve les systèmes économiques traditionnels et la maîtrise des ressources naturelles.  Pour le représentant de Parlamento del Pueblo Qullana Aymara, les peuples autochtones sont devenus prisonniers des systèmes économiques non autochtones.  Celui de la Fundación para la promoción de Conocimiento a dénoncé le fait qu’aucun instrument international ne protège l’accès des communautés autochtones à leurs propres ressources. 


«Notre souhait est d’avoir la terre et la nature pour vivre, sans nous opposer au développement ni à la recherche mais dans le respect de notre façon de vivre et de notre sagesse», a insisté le délégué d’une coalition d’organisations autochtones d’Amazonie, COICA.  Les communautés autochtones aspirent à devenir des partenaires égaux à la table des négociations, dans le cadre d’un commerce international qui serait respectueux de leurs droits, dont celui à l’autodétermination.  La représentante du Centre d’Etudes Aymara de Bolivie a rappelé que pendant des milliers d’années les peuples autochtones ont participé aux échanges et au commerce et pouvaient ainsi défendre leur identité.  Mais dans bien des régions, même les modes de productions ancestraux ont été oubliés, a-t-elle regretté.


L’Instance a été sollicitée par plusieurs intervenants pour faire valoir auprès de la Banque mondiale, dont les politiques d’ajustement structurel ont été dénoncées à plusieurs reprises, la nécessité d’intégrer les normes émergentes en matière de droits de l’homme, le droit à l’autodétermination, le droit au consentement préalable, la reconnaissance des lois traditionnelles sur l’accès à la terre et aux ressources naturelles et l’interdiction des déplacements forcés de populations, lors de l’élaboration de ses politiques en faveur des peuples autochtones.


Plusieurs des institutions du système des Nations Unies représentées lors du débat ont manifesté devant l’Instance leur volonté de coopérer avec ses membres et avec les communautés autochtones et ont exposé leurs initiatives dans les domaines de l’habitat, de la santé, de l’environnement, tenant compte des spécificités culturelles de ces populations.  Le représentant d’ONU-Habitat, a évoqué la collecte de données sur leurs besoins en logement, indiquant qu’elles permettraient à terme d’offrir un tableau général des discriminations et exclusions dont les autochtones sont la cible en matière de logement. 


Ana Angarita, du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), a présenté plusieurs mesures qui ciblent des peuples autochtones au Panama, Pérou, Equateur et Bolivie: plaidant pour l’élaboration de programmes d’éducation pour les enfants et les jeunes tenant compte de leur contexte culturel, elle a cité un projet qui, en Equateur, associe médecine traditionnelle et médecine moderne et a déjà contribué à une nette amélioration des conditions de santé des femmes et des filles de la région d’Otavalo. 


La séance a été levée au terme d’une cérémonie spirituelle dirigée, au son de deux conques, par la Confédération des Nations Eagle et Condor d’Amérique du Nord, d’Amérique Centrale et d’Amérique du Sud et visant à assurer le succès de la session. 


L’Instance permanente sur les questions autochtones poursuivra ses travaux sur le développement économique et social jeudi 15 mai, à 10h00.


Développement économique et social


Exposés


M. PEKKA PATOSSARI, Directeur du Forum des Nations Unies sur les forêts, a assuré que les questions essentielles de l’Instance permanente sur les questions autochtones sont très proches de celles discutées à propos des forêts.  Environ 60 millions des autochtones dépendent des forêts pour leur bien-être social ou économique; les produits des forêts leur fournissent alimentation, médicaments, ressources et eau.  La forêt joue donc un rôle crucial dans la vie des populations autochtones.  Entre 1995 et 2000, le Groupe spécial sur les forêts a mis au point des propositions et le Forum entend participer à la mise en œuvre des objectifs de développement du Millénaire.  Etant donné le lien évident entre les questions autochtones et les forêts, le représentant a exprimé le désir d’étudier les possibilités de coopération entre son organisme et l’Instance.  Le Président de l’Instance a été invité à la 4ème session du Forum des forêts en mai 2004 à Genève, a-t-il ainsi indiqué, précisant qu’elle traitera des aspects sociaux et culturels des forêts et de leur gestion durable. 


M. SELMAN ERGUDEN, ONU-Habitat, a insisté sur le mode de vie moderne et urbain, alimenté par les migrations et l’exode rural et de plus en plus difficile à vivre pour les jeunes autochtones coupés de leur culture.  ONU-Habitat contribue ainsi à une Campagne mondiale en faveur de la gouvernance urbaine, une Campagne pour un logement décent et adéquat pour les pauvres urbains et notamment pour les autochtones.  En outre le Programme du droit au logement d’ONU-Habitat est soutenu par le Haut Commissariat aux droits de l’homme. 


Les recherches concernant les autochtones sont essentiellement concentrées sur le droit à la terre notamment.  L’agence a lancé une étude sur l’habitat des autochtones qui sera achevée à la fin 2003 et qui permettra d’identifier les besoins dans ce secteur, et de promouvoir le respect des principes d’égalité et de non-discrimination par rapport à des éléments comme le droit à un logement décent, l’accessibilité de ce logement, le prix abordable et l’adéquation culturelle.  L’étude mettra l’accent sur les conditions de vie des femmes, des jeunes et des enfants autochtones, mais aussi sur l’exclusion dans les établissements humains et la spécificité culturelle des logements.  Une documentation sera ainsi assemblée sur les bonnes et mauvaises pratiques en la matière.  Des données ventilées seront compilées pour apporter un tableau général des discriminations et exclusions dont les autochtones sont la cible en matière de logement.  Dans ce cadre, ONU-Habitat et le Haut Commissariat aux droits de l’homme ont préparé un questionnaire distribué aux réseaux et organisations de populations autochtones. 


Mme ANA ANGARITA, Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), Conseillère sur le droit à la reproduction, a indiqué que les populations autochtones, surtout femmes et filles, ont un accès limité aux services de santé de base, notamment à cause de discriminations et du manque de moyens.  Le FNUAP a donc pris des mesures pour souligner que le droit à la santé doit être appliqué à tous.  Ses projets ciblent des populations autochtones au Panama, Pérou, Equateur et Bolivie: en Equateur, par exemple, le FNUAP a lancé un projet qui associe médecine traditionnelle et médecine moderne et qui contribue à une nette amélioration des conditions des femmes et des filles de la région d’Otavalo.  Au Pérou il a appuyé différentes études et programmes dans les Andes et en Amazonie, ainsi qu’un programme d’alphabétisation en Bolivie qui touche 100 000 personnes dont 75% de femmes et filles.


Le FNUAP recommande donc d’intégrer une perspective sexospécifique à tous les programmes destinés aux populations autochtones; de créer des groupes de travail locaux et nationaux permanents, pour veiller à ce que les droits relatifs à la reproduction soient explicitement couverts par les politiques et lois; de garantir l’accès à l’information sur la santé sexuelle et reproductive; d’élaborer des programmes d’éducation pour les enfants et les jeunes dans leur contexte culturel.


M. CHRISTOF KUECHEMANN, Banque interaméricaine de développement a assuré l’Instance de la détermination de la Banque à intégrer les recommandations formulées lors de la première session de l’Instance ainsi que celles des conférences internationales, comme celle de Johannesburg contre le racisme, le Sommet autochtone d’Ottawa ainsi que le Sommet des femmes autochtones d’Otaxaca.  Plusieurs critères  guident l’action de la Banque dans ses relations avec les communautés autochtones: respect du lien étroit entre le développement et l’identité des populations, l’un et l’autre se renforçant mutuellement; la reconnaissance des spécificités autochtones et la promotion de leur visibilité dans les politiques nationales publiques; le renforcement des capacités de gestion des populations autochtones; la promotion de la protection juridique des territoires autochtones ainsi que de l’accès aux services sociaux et aux opportunités économiques qui soient culturellement appropriées. 


Le développement et la protection identitaire des communautés autochtones exigent une approche en trois volets, à savoir le renforcement de l’économie autochtone comme outil de survie des familles; la réduction des discriminations sur les marchés de l’emploi et l’accès accru aux services socioéconomiques; et la promotion de l’économie interculturelle qui tire avantage du potentiel autochtone dans les domaines culturel et social.  En cette période de mondialisation, on assiste à un retour aux ressources naturelles locales, à l’art, l’artisanat, l’ethnopharmacologie ou encore l’ethnotourisme.  L’élimination de la pauvreté ne pourra pas se faire tant que les discriminations, l’exclusion sociale et l’ethnocentrisme perdureront.  Nous avons également appris que les processus ne sont véritablement durables que lorsqu’on applique des méthodologies appropriées d’évaluation socioculturelle permettant de tenir compte des spécificités autochtones et lorsque les populations autochtones participent elles-mêmes à l’élaboration et l’exécution des projets.


Dialogue


Au terme des exposés des différentes agences des Nations Unies, les membres de l’Instance les ont interrogés notamment sur le type et les moyens de leur coopération avec l’Instance permanente sur les questions autochtones: AYITEGAN KOUEVI a ainsi demandé à la Banque interaméricaine de développement d’élargir son action et de transmettre son expérience aux autres banques régionales, d’Afrique et d’Asie, tandis que MARCOS Matias Alonso interrogeait son représentant sur les mécanismes mis en place pour permettre un véritable dialogue avec les peuples autochtones et avec l’Instance. 


Mme Ida Nicolaisen a demandé au FNUAP quels types de programmes ce Fonds avait en Afrique à destination des peuples autochtones; Njuma Ekundanayo l’interpellant sur la nécessité de mener un recensement des femmes autochtones en Afrique, car depuis plus d’un siècle on ne fait que des estimations, a-t-elle souligné.  Wayne Lord a insisté pour sa part sur la nécessité pour les organismes du système des Nations Unies de mieux coordonner leurs actions afin qu’il soit possible de savoir exactement qui fait quoi, d’échanger des informations et leurs expériences, par exemple sur leurs programmes d’alphabétisation.


Le représentant d’ONU-Habitat a donc rappelé qu’il avait proposé la veille que l’Instance nomme une «personne ressource» qui serait pour chaque agence l’interlocuteur ciblé comme lui-même l’est au sein de son organisme pour l’Instance. 


La représentante du FNUAP a reconnu et assuré qu’il était temps maintenant pour le Fonds d’intégrer les préoccupations des membres de l’Instance.  Celui de la Banque de développement interaméricaine a expliqué que cet organisme avait depuis 1994 une unité chargée des questions autochtones en son sein.  Mais il a précisé que son organisme n’était pas affilié aux Nations Unies d’où certaines difficultés pratiques de coopération avec l’Instance. 


Une déclaration collective faite au nom du Conseil Saami, du Réseau des peuples tribaux autochtones asiatiques, de la Conférence Inuit et de Tebtebba, a demandé que la réalisation des Objectifs du Millénaire tienne compte des réalités que connaissent les peuples autochtones et a donc encouragé notamment le PNUD et les banques de développement à coopérer avec l’Instance en ce sens.


Le Président et Directeur exécutif de Aldet Centre-Saint Lucie, au nom des Bethechilokono, peuple autochtone de l’île, a expliqué que l’art et l’artisanat des communautés autochtones de Sainte Lucie constituent un outil de développement et de préservation des savoirs traditionnels.  Il est important que les institutions des Nations Unies appuient le développement de l’art et de l’artisanat autochtones qui permettent aux familles de trouver des moyens de subsistance tout en maintenant leur unité.  La difficulté est de trouver les moyens de commercialiser les produits de cet artisanat.  Nous avons besoin de l’aide des institutions internationales, notamment pour promouvoir l’accès des jeunes aux technologies modernes applicables à l’artisanat.


Les représentants de plusieurs pays ont fait part des programmes nationaux mis en place pour promouvoir le développement socioéconomique de leurs populations autochtones.  Le représentant des Philippinesa rappelé qu’il existait plus de 900 groupes de populations autochtones dans le monde et 45 aux Philippines.  Une mesure importante a été l’adoption d’une législation sur les droits des communautés autochtones qui reconnaît le droit à l’autogouvernance.  L’Instance devrait continuer à accorder une importance particulière au développement socioéconomique des communautés autochtones.  L’Instance doit également permettre la mise en place de modèles de développement durable dans les communautés autochtones.  L’Instance doit également accorder une attention prioritaire à l’accès des populations autochtones aux soins de santé et à une éducation de qualité aux jeunes qui reflète les valeurs de leur communauté.


La représentante de Saulteau First Nation a insisté sur la relation symbiotique qui existe entre les communautés autochtones, la terre et les ressources naturelles.  Elle a dénoncé le fait que le Traité conclu à l’époque, avec la Couronne britannique et les nations autochtones n’ait toujours pas été honoré.  Nous demandons au Canada de respecter ses engagements, notamment la cession inconditionnelle des terres aux peuples autochtones.  De même, la représentante a dénoncé les relations entre les communautés autochtones du Canada et la Banque indienne qu’elle a qualifiées de relation coloniale ainsi que le  système de réserve qui existe depuis la dictature coloniale.  Elle a exhorté le Canada à appuyer le processus d’autodétermination des peuples autochtones.


Le représentant d’une coalition d’organisations autochtones d’Amazonie, COICA, a estimé que le développement économique devait être fondé sur des principes, des valeurs humaines et l’intégrité, compte tenu du lien intime développé avec la terre et l’environnement.  Nous sommes dans une situation de dépendance économique et sociale: nos enfants, avant même de naître, sont obligés de payer une dette dont nous ne sommes pas responsables, a-t-il déploré.  Les différentes formes de développement ont transformé la nature en un néant pollué, fragilisant nos infrastructures et nous spoliant de nos biens matériels et non matériels.  Pour en arriver à un développement juste, il est indispensable que les peuples autochtones prennent elles-mêmes les décisions sur toutes les questions qui les touchent.  Le représentant a demandé aux gouvernements de prendre des mesures réparatrices pour dédommager les pertes qu’ils ont causées à l’environnement, de mettre en œuvre des politiques qui respectent les équilibres culturels et sociaux des autochtones; de mettre en place des conditions permettant une véritable coordination avec les organisations autochtones.  Notre objectif est de nous occuper de nos propres ressources naturelles, a-t-il insisté en réitérant l’importance des connaissances ancestrales pour la durabilité des communautés et de leur environnement.  «Notre souhait est d’avoir la terre et la nature pour vivre», sans nous opposer au développement ni à la recherche mais avec le respect de notre façon de vivre, de notre sagesse et de notre existence.  Il faut éliminer le développement économique basé sur la discrimination.


La déléguée du Centre d’Etudes Aymara de Bolivie a fait valoir que face à la mondialisation, les organisations internationales doivent promouvoir les productions alimentaires et les techniques autochtones et leur assurer un marché.  Depuis des milliers d’années les peuples autochtones participaient aux échanges et au commerce et pouvaient ainsi défendre leur identité.  L’économie indienne doit donc proposer une alternative au développement dans le cadre de la mondialisation.  Dans bien des régions, les modes de productions ancestraux ont été oubliés, a-t-elle regretté, ce qui s’est traduit par un rétrécissement des propriétés dans les Andes et la disparition des grandes exploitations.  Aussi a-t-elle plaidé pour un modèle indien économique, reflet d’une volonté commune.


Le représentant du Partenariat pour l’environnement des populations autochtones a souhaité que l’Instance ouvre un accès aux populations autochtones pour qu’elles deviennent des partenaires dans le commerce international.  Pouvoirs politiques et forces économiques ont oublié les communautés autochtones au fil des siècles, les réduisant à des colonies.  L’Instance doit restaurer la dignité des populations autochtones.  Assurant que ces communautés ne sont pas contre un

commerce qui serait respectueux de leurs droits, dont celui à l’autodétermination, force motrice selon lui, il a ajouté que quand les peuples ont la liberté de choix, ils peuvent choisir leur mode de développement économique.  Les populations autochtones veulent être des partenaires égaux à la table des négociations commerciales.


Le représentant de Parlamento del Pueblo Qullana Aymara, a expliqué que les peuples autochtones sont devenus prisonniers des systèmes économiques non autochtones.  Il a précisé que dans son groupe, la forme d’assistance et de réciprocité entre communautés permet d’échapper aux circuits commerciaux.  La préservation de nos propres systèmes économiques est une nécessité face à la mondialisation dont nous ne voulons pas être les valets.  Nous demandons à l’Instance de nous aider à revivifier notre système économique traditionnel et nous demandons aux peuples autochtones d’afficher une plus grande résistance aux valeurs extérieures.


Le représentant de Consejo International de Trafados Indios, a au nom d’un caucus d’organisations autochtones, recommandé que l’Instance fasse part de sa profonde déception face à la décision de la Banque mondiale de ne pas prendre en compte, lors de la formulation de ses politiques en faveur des peuples autochtones, les normes émergentes en matière de droits de l’homme ainsi que la contribution des communautés à l’examen des questions suivantes; le droit à l’autodétermination comme critère fondamental pour l’application des politiques, la reconnaissance des lois traditionnelles en matière d’accès à la terre et aux ressources naturelles et l’interdiction des déplacements forcés de populations.  Nous demandons que la Commission des droits de l’homme adopte le projet de Déclaration sur les droits des peuples autochtones en son état, en particulier pour ce qui à trait à la terre et aux ressources naturelles.  Nous demandons que la Commission du développement durable intègre, dans le cadre de la mise en œuvre du Programme d’action de Johannesburg, le Programme d’action de Kimberley sur les populations autochtones.


Le représentant de la Fundación para la promoción de Conocimiento a estimé qu’il était urgent que les Nations Unies réaffirment le rôle vital des peuples autochtones dans le développement durable.  Nous souhaitons que l’ECOSOC adopte le plan d’action adopté par le Sommet des populations autochtones à Kimberley ainsi que le projet de déclaration relatif aux droits des peuples autochtones dans sa forme actuelle.  Il a dénoncé l’exploitation des ressources naturelles sans qu’aucun instrument international ne protége l’accès des communautés autochtones à leurs propres ressources.  Les concepts de développement économique et national sont exploités pour justifier la spoliation de nos terres.  Les articles 3, 4, 10, 21 à 24 et 26 à 30, du projet de déclaration doivent rester en état dans la mesure où ils reconnaissent les droits économiques et sociaux de peuples autochtones. 


Mme MILILANI TRASK, membre de l’Instance, a rendu hommage à l’Institut des Nations Unies pour la formation et la recherche (UNITAR) pour l’excellent travail accompli avec les peuples autochtones qui s’est concrétisé notamment par l’organisation d’une session de formation en Asie sur le thème de la résolution des conflits.  L’UNITAR est ainsi le premier organisme du système des Nations Unies qui ait adopté une politique intégrant les besoins des peuples autochtones.


Le représentant du Brésila déclaré que le processus d’élaboration des politiques de son pays tient compte de la nécessité d’y inclure les représentants des populations autochtones comme du besoin de respecter les spécificités des 118 groupes autochtones du Brésil afin de protéger leur identité.  Nous devons renforcer le rôle de l’Instance qui doit servir de catalyseur entre tous les acteurs concernés.  Au Brésil les institutions des Nations Unies ont permis d’améliorer la mise en œuvre des projets dans le domaine du développement et des droits de l’homme.  Les peuples autochtones au Brésil font l’objet d’une marginalisation.  La promotion de leurs droits se heurte à des contraintes structurelles, les mêmes dont souffrent les Brésiliens vivant dans la pauvreté.  Nous avons lancé un programme pour l’élimination de la pauvreté et dans ce cadre un groupe de travail sur les populations autochtones a été constitué dans le but de promouvoir leur autonomie.


Le représentant du Mouvement pour la survie du peuple Ogoni a dénoncé l’exploitation injuste des ressources naturelles de cette nation qui a un taux de chômage chez les jeunes avoisinant les 70%.  Le PIB par habitant est passé à 250 dollars.  Nous voulons que notre territoire devienne une zone de libre-échange.  Il faut savoir que les multinationales de l’industrie du pétrole au Nigéria qui se trouvent sur nos territoires ne recrutent même pas de personnel Ogoni.  Il faut que la Banque mondiale mette un visage humain sur le poids de la dette.  Ce sont les peuples les plus pauvres et les plus marginalisés qui paient le prix des réformes imposées par la Banque mondiale dont les politiques ne font qu’aggraver les souffrances des peuples autochtones.


Le représentant de Tonatierra  a expliqué que le Conseil traditionnel des peuples autochtones a tenu une réunion au cours de laquelle une instance régionale sur les peuples autochtones a été créée.  Un plan d’action a également été adopté et nos documents ont été transmis à l’Instance permanente.  Une des recommandations porte sur la nécessité de disposer d’une base de données et d’une carte géographique précisant les territoires autochtones.


Le représentant du Canada a assuré que son pays vise à long terme la réduction de l’écart socioéconomique entre les autochtones et les autres Canadiens.  Désormais plus de 30 000 entreprises appartiennent ou sont gérées par des autochtones au Canada.  Des mesures sont également prises pour renforcer l’implication des femmes dans l’économie.  Il a souligné le défi qui se pose à son pays: fournir aux premières nations les moyens d’un développement socioéconomique accéléré, inclure les technologies de l’information et l’Internet pour renforcer leurs économies, assurer l’accès aux soins de santé et accroître les possibilités pour les étudiants.


M. STEPHEN LINTER de la Banque Mondiale a reconnu que les populations autochtones connaissent la discrimination dans le domaine culturel, mais aussi dans leur accès aux services de base.  La Banque travaille pour aider les populations autochtones à élaborer leurs objectifs conformément à leurs cultures.  Il s’agit aussi de renforcer les capacités technologiques du développement autonome des organisations autochtones, de créer des partenariats entre ces organisations, les gouvernements et les agences humanitaires pour partager des expériences en développement et de financer des activités spécifiques.


Les actions de la Banque sont conçues pour réduire la pauvreté, promouvoir un développement conforme aux valeurs culturelles, un autodéveloppement fondé sur les connaissances autochtones, permettant à ces communautés d’accéder à des services de santé et d’éducation adéquats et pour créer un capital des communautés autochtones.  De nombreux projets incluent des composantes traitant des questions de régime foncier et de la gestion des ressources naturelles, avec un cadre législatif et une formation en la matière et pour aider à la démarcation des terres autochtones. 


La représentante d’American Indian Community Health a lancé un cri d’alarme sur l’alcoolisme et le désespoir des enfants et jeunes autochtones.  Comment aider les jeunes à surmonter ces obstacles, a-t-elle demandé.  Ces peuples autochtones connaissant diabète, cancer, maladies cardio-vasculaires.  Le racisme est trop lourd sur le marché de l’emploi, le taux de chômage atteint 85% dans les réserves. 


Au nom du caucus d’Amérique latine, le représentant de la Comisión Jurídica a estimé que la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes ne joue pas le rôle qui est le sien: les républiques qui sont installées sur nos territoires vivent grâce à nous, les économies du continent sont des économies perturbées et quand il y a crise, ce sont les peuples autochtones qui appuient l’économie et fournissent des denrées alimentaires aux villes.  Le potentiel dont nous disposons pour surmonter la pauvreté n’est cependant pas utilisé.  Aussi, pour le représentant, l’Instance permanente sur les questions autochtones doit demander à l’ECOSOC d’adopter des mesures pour que la CEPALC transmette rapidement un rapport sur les causes de la pauvreté de nos peuples; elle doit en outre disposer d’un nouveau cadre pour la mise en œuvre de programmes économiques.


La représentante du Caucus des peuples autochtones pour le développement durable aexpliqué que le modèle de développement économique et social qu’imposent la mondialisation et la privatisation des services sociaux de base a eu un impact désastreux sur les peuples autochtones.  Elle a regretté que la Commission du développement durable n’ait pas inclus dans son prochain programme de travail les questions des droits de l’homme et de la diversité culturelle.  Une étude, menée en parallèle à celle menée par la Banque mondiale sur l’industrie minière, a montré que la présence de cette industrie n’a fait que paupériser les communautés autochtones au lieu de contribuer à leur développement, que menacer leur survie et les mener à des déplacements forcés.  L’industrie minière, pétrolière et l’industrie du gaz ont pollué nos terres, nos eaux et divisé nos communautés.  Nous demandons un moratoire sur l’exploitation du gaz et du pétrole tant que nos droits ne seront pas respectés.  Nous recommandons également que la Banque mondiale fasse rapport à l’Instance sur l’évolution de ses politiques pour ce qui touche aux peuples autochtones.


L’OMC, qui est l’organisation multilatérale la plus puissante dans ce domaine, a également participé à la destruction des moyens de subsistance des populations autochtones.  L’Instance devrait inviter l’OMC à être présente à ses sessions.  L’OMC devrait également établir un rapport sur la manière dont elle intègre les besoins des populations autochtones dans ses politiques.  Nous applaudissons l’initiative de la Banque mondiale annoncée hier sur l’allocation de fonds supplémentaires mais nous souhaitons que ces dons ne fassent pas oublier les compensations dues aux peuples autochtones en raison de la destruction de leurs moyens de subsistance.


La représentante de Inuit Circumpolar Conference a, elle aussi, fait état des conséquences négatives des forces mondiales -taux élevés de suicide et d’alcoolisme- qui sont le résultat des pressions exercées sur les modes de vie traditionnels.  Dans le cercle arctique nous disposons d’une autonomie politique qui a finalement peu de valeur compte tenu du fait que nous ne sommes pas en mesure de maîtriser les forces mondiales qui nous entourent.


Le représentant du Forum des autochtones du Bangladesh, a déclaré que le développement exige le respect du droit aux ressources.  Nous avons souffert de deux décennies de conflit avec le Gouvernement du Bangladesh qui s’est achevé avec la signature d’un accord en 1997.  Mais cinq ans plus tard, la plupart des dispositions de cet accord n’ont pas été appliquées, certaines ayant été violées.  Le Gouvernement du Bangladesh ne dispose pas de politique pour les 45 communautés autochtones du pays.  Les peuples autochtones du Bangladesh continuent de souffrir de politiques discriminatoires, notamment le manque d’accès à la terre et aux forêts, qui est leur principal habitat.  Il faut reconnaître le droit de propriété sur les territoires ancestraux et les institutions traditionnelles des peuples autochtones et les associer à tous processus d’élaboration des politiques les touchant.


Le délégué de la Foundation for Aboriginal and Islander Research Action a insisté sur l’utilisation des terres et autres ressources des communautés et a demandé à l’Instance de faire en sorte que les autochtones puissent exercer leurs droits en ce sens.  Il a indiqué que les Australiens ont pris l’an dernier des mesures limitant ces droits.  Or il convient de souligner le droit des peuples autochtones à être propriétaires et à gérer leurs ressources.  Ces peuples ont le droit de déterminer si les programmes de santé, de logement, et toutes les actions économiques et sociales les touchant leur conviennent et ils ont le droit de gérer leurs propres institutions.  L’Instance devrait donc, selon lui, informer les gouvernements comme celui de l’Australie de ces droits et l’obliger à les reconnaître.


C’est sur la souveraineté sur les ressources nationales qu’a insisté le représentant de l’Indigenous People and Nation Coalition; dans de nombreux cas, des territoires ont été éliminés de la liste des territoires autonomes ce qui signifie que leurs richesses ont été enlevées à leurs populations, a-t-il expliqué.  Il a cité de nombreux exemples de résolutions des Nations Unies portant sur ces questions et sur le droit au développement.  Certes, un processus interactif a été mis en place avec l’Instance, mais ce processus avait déjà été lancé dans le cadre du processus de décolonisation au sein de l’ONU.  Et pour lui, si les membres de l’Instance permanente sur les questions autochtones ne sont pas capables d’appliquer le principe d’universalité sur les droits des peuples autochtones, il ne sera pas possible de traiter de nombreuses situations.  Les résolutions de l’ONU n’ont en effet pas été appliquées par la communauté internationale et rien n’a été fait.  Or, à partir du moment où on reconnaît les peuples autochtones, il faut aussi en reconnaître les droits, a-t-il souligné.


La représentante de Pacific Caucus, qui inclut dix organisations et sept individus de la région pacifique, a insisté sur le fait que les peuples autochtones sont soumises à la pression des puissances régionales.  Elle a dénoncé la Banque mondiale et les autres organisations financières qui agissent sans le consentement préalable de ces populations et a recommandé que l’Instance demande à la Banque mondiale de poursuivre des consultations au niveau mondial pour élaborer des politiques en concertation avec les peuples autochtones.  Tout en reconnaissant les progrès de la Banque mondiale, elle a demandé de s’assurer que ses programmes n’auront pas de répercussions négatives sur les peuples autochtones.  Plusieurs questions prêtant à polémique sont en effet restées en suspens comme la mise en œuvre de normes sur le droit coutumier, la reconnaissance des droits des peuples autochtones et des territoires et le droit de consentement préalable pour tout ce qui les concerne.  Le droit à l’autodétermination doit être celui de prendre des décisions pour tout ce qui touche à nos peuples, a t elle poursuivi.  La représentante a également demandé que l’Instance demande à l’ECOSOC de créer un groupe de travail sur le consentement préalable qui se réunirait tous les ans et comprendrait des représentants de tous bords, agences, banques et organisations autochtones. 


Le représentant du Réseau des peuples tribaux asiatiques a regretté que les institutions des Nations Unies n’intègrent pas la notion des droits de l’homme dans leurs politiques.  Le flux des migrants sur les terres autochtones est une menace à la survie des moyens de production autochtone et de leur habitat traditionnel ayant pour autre conséquence des déplacements forcés de population.


Le représentant de la Fondation Tebtebba, confédération des communautés autochtones de l’Equateur, a fait part de sa préoccupation quant à la situation dans laquelle se trouvent les communautés autochtones malgré les progrès législatifs obtenus au cours de cette dernière décennie.  Ainsi au Guatemala, la pauvreté continue de toucher 78% des enfants des campagnes.  Les programmes d’ajustement structurel imposés par les institutions financières internationales n’ont pas permis de trouver des solutions durables ni même de réduire la pauvreté des peuples autochtones en Équateur.  Au contraire, ils n’ont fait que creuser les inégalités.  Les peuples autochtones doivent également assumer les conséquences du paiement de la dette extérieure.  On en arrive à une alliance perverse qui prive les peuples autochtones de leurs droits économiques et sociaux.  Il ne sera pas possible de parler des droits des peuples autochtones tant que ceux-ci vivront dans la pauvreté. 


Le représentant du Conseil des anciens spirituels de la mère Terre, a rappelé que depuis le début des temps, les peuples autochtones ont une relation symbiotique avec les éléments naturels.  Les êtres humains sont les derniers venus lors de ce voyage sacré sur la Terre.  Nous devons retrouver le chemin des débuts pour réveiller les grandes lois dormantes.  Il est temps de revenir à la sagesse originelle pour servir l’harmonie, l’équilibre et la paix.  Nous demandons aux anciens et aux enfants de la mère Terre de prendre possession des 500 prochaines années, le calendrier actuel s’achevant.  Le Conseil des anciens demande aux dirigeants de cette réunion de se concentrer sur la voie sacrée pour les 500 prochaines années.


La représentante de Cordilla People’s Alliance au nom du Caucus de populations autochtones asiatiques, a demandé à l’Instance permanente de travailler à la reconnaissance du droit aux ressources ancestrales, à la mise en œuvre de davantage de services sociaux, à l’habilitation des communautés et à la mise en œuvre du consentement préalable pour les projets devant être développés sur les terres autochtones.


La représentante de l’Association des Shaman limbu du Népal a indiqué que les peuples autochtones du Népal n’avaient accès, ni aux ressources locales, ni aux ressources nationales: certaines sont sur le point de disparaître en raison de l’exclusion et des traitements inégaux et l’écart entre groupes autochtones et groupes dominants va croissant; si les questions ethniques ne sont pas dûment traitées, les conflits violents ne cesseront pas, a-t-elle prévenu.  Expliquant que le Gouvernement résiste aux revendications sur les droits fondamentaux des minorités, elle a prié l’Instance de recommander de faire valoir le droit à l’autodétermination des peuples autochtones et de créer une unité de coordination pour le développement économique et social au sein de son Secrétariat.


Au nom de la Nation autochtone Pimichikimak (Canada), son représentant a évoqué les conséquences des projets de développement sur la vie et les terres des autochtones à propos d’un barrage construit dans les années 70 dans le Manitoba, qui a eu un impact très grave sur l’économie autochtone.  Ces dégâts continuent à ce jour et le scénario est catastrophique, a-t-il insisté.  Dans les années 80, son groupe a adopté ses propres institutions et a mis en place ses propres programmes de développement, conformément au droit international et aux droits qui lui avait été octroyés.  Il a demandé aux Etats Membres de l’ONU de respecter l’autodétermination des peuples autochtones et de s’assurer de leur consentement avant de lancer de grands projets; il a demandé au Canada, d’éviter d’inonder leurs terres et de détruire leur vie économique, et de reconnaître le droit des peuples autochtones à assumer leur propre développement social.


Enfin, le délégué du Seventh Generation Fund a demandé une évaluation des sites sacrés des peuples autochtones, de l’Arizona au Nord du Mexique.  Nous disposons de traditions ancestrales pour préserver ce site, a-t-il expliqué, mais il a été dégradé par des programmes qui risquent de remettre en cause le caractère sacré de ce désert.  Les responsabilités de le préserver seront aussi celles des générations futures.  Il a donc recommandé que ce site sacré soit considéré comme prioritaire et réclamé une enquête des Nations Unies.


WILLIE LITLLECHILD, membre de l’Instance, a souhaité que  l’Instance adopte la Déclaration de Magglingen du 19 février dernier qui constitue un engagement à l’égard du sport et du développement.  Cette déclaration fait du sport un droit de l’homme et un terrain d’apprentissage idéal de la vie.  Les activités sportives sont perçues comme améliorant la santé mentale et physique à un faible coût.  Le jeu et les activités sportives peuvent aider à surmonter les traumatismes de ceux ayant connu des situations de conflit et de crise.  Le sport peut également aider à surmonter les barrières de la race, de la religion et des origines sociales.


FORTUNATO TURPO CHOQUEHUANCA, membre de l’Instance, a observé qu’il y a quelques années les problèmes agricoles et alimentaires étaient au centre des débats sur le développement.  Les questions de sécurité alimentaire ne doivent pourtant pas être limitées à des aspects économiques mais inclure les notions de dignité humaine car l’agriculture de demain, ce sont des territoires et des hommes.  Il faut que l’ECOSOC exhorte les gouvernements et la FAO pour que des enquêtes soient menées sur les pratiques agricoles..


PARSHURAM TAMANG, membre de l’Instance, a estimé qu’il était nécessaire que l’ECOSOC consacre son débat de haut niveau au développement rural et aux tendances mondiales.  Les pratiques de développement ne tiennent pas compte des caractéristiques et de l’identité culturelle des communautés autochtones.  Il est donc fondamental de lancer un appel au système des Nations Unies et aux gouvernements pour qu’ils mettent en place des processus participatifs pour les peuples autochtones, notamment au sein de la Commission du développement durable


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