CS/2453

LE CONSEIL DE SECURITE DRESSE LE BILAN DES EFFORTS ENGAGES EN VUE DE LA SECURISATION ET DE LA STABILISATION DE L’AFGHANISTAN

24/02/2003
Communiqué de presse
CS/2453


Conseil de sécurité                                              CS/2453

4711e séance – matin                                               24 février 2003


LE CONSEIL DE SECURITE DRESSE LE BILAN DES EFFORTS ENGAGES EN VUE DE LA SECURISATION ET DE LA STABILISATION DE L’AFGHANISTAN


Réuni ce matin pour sa réunion d’information mensuelle consacrée à la situation en Afghanistan, le Conseil de sécurité a entendu un exposé du Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, M. Jean-Marie Guéhenno, qui a notamment fait état des progrès enregistrés dans la mise en place de la Commission constitutionnelle.  Les membres du Conseil de sécurité ont ensuite eu un échange de vues avec le Coordonnateur pour l’assistance à l’Afghanistan, M. Mutsuyoshi Nishimura, et avec le Représentant spécial du Gouvernement allemand chargé de la formation d’une force de police en Afghanistan, M. Harald Braun.  Cet échange de vues a porté essentiellement sur les questions de sécurité et de stabilisation.


En effet, comme l’a souligné M. Guéhenno, les Afghans continuent de subir les conséquences de l’insécurité en raison de la faiblesse des institutions de police et de l’armée.  Au cours du mois écoulé, a indiqué le Secrétaire général adjoint, les villes de Kandahar et de Kunduz ont été le théâtre de nombreuses attaques à la grenade contre des sièges d’organisations internationales et non gouvernementales.  M. Guéhenno s’est dit satisfait du succès du transfert du commandement de la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) par la Turquie au commandement conjoint de l’Allemagne et des Pays-Bas le 10 février, tout en encourageant la poursuite des réformes dans le secteur de la sécurité, que ce soit dans la police, l’armée, ou dans le domaine du renseignement.  Le succès du processus de normalisation en Afghanistan dépend aussi de la création d’institutions représentatives de toutes les régions et de toutes les communautés du pays, a observé M. Guéhenno. 


Le Secrétaire général adjoint a également exprimé des inquiétudes sur les informations faisant état de réactions hostiles des populations de l’est de l’Afghanistan contre les programmes visant à éradiquer la culture du pavot.  Pour la seule année 2002, une étude du PNUCID évalue à 1,2 milliard de dollars la production d’opium, ce qui représente plus de la moitié de l’aide internationale à l’Afghanistan pour la même année, a indiqué M. Guéhenno.  C’est pourquoi, la consolidation d’un véritable système de sécurité constitue une priorité, a-t-il dit, soulignant les efforts déployés par le Président Karzaï et son nouveau Ministre de l’intérieur, Ali Ahmad Jalali, pour accélérer la création d’une nouvelle force de police.  M. Guéhenno a rappelé que la communauté internationale devait continuer d’apporter une contribution aux Fonds d’affectation spéciale consacrés d’une part au processus de DDR et, d’autre part, à la formation de la police et de l’armée. 


Abordant les questions relatives au processus de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR), M. Nishimura a estimé que le nombre de soldats concernés par le DDR restait difficile à déterminer.  Les chiffres varient de 100 000 à 300 000 hommes, a-t-il indiqué, et selon le Président Karzaï, le processus de désarmement prendra un an.  Cependant, a mis en garde M. Nishimura, il importe que le processus de DDR ait déjà pris une orientation décisive lors de la tenue des élections prévues en juin de l’année prochaine, insistant par ailleurs sur la question de son financement.  Cinquante millions de dollars ont été promis à ce jour par les donateurs, mais il importe de s’assurer de son financement complet à moyen et long terme, a observé le Coordonnateur pour l’assistance à l’Afghanistan.


Pour sa part, le Représentant spécial du Gouvernement allemand chargé de la formation d’une force de police en Afghanistan a expliqué qu’après la Conférence de Bonn qui avait défini les structures de base d’une force de police à Kaboul, la deuxième étape en cours -qui se poursuivra jusqu’à la tenue des élections parlementaires en 2004- consistait dans la consolidation de ces structures et leur extension en dehors de Kaboul.  La troisième étape consistera à garantir le fonctionnement des forces de police fédérales et provinciales et leur interaction avec les autres structures sécuritaires tout en préparant le retrait international de ce processus, graduellement jusqu’à la fin de 2005, a-t-il indiqué.  M. Braun a rappelé ensuite que le coût global de la reconstruction, de la formation et de l’équipement de la police avait été évalué pour les quatre prochaines années à 180 millions d’euros, non compris les salaires des policiers.  En 2003, a-t-il dit, il faudra en outre créer une police des frontières et étendre les résultats obtenus dans Kaboul à d’autres régions du pays. 


Le représentant de l’Afghanistan est intervenu au cours de cette réunion.


Présentations


M. JEAN-MARIE GUEHENNO, Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, a fait état des avancées dans le processus de normalisation en Afghanistan depuis la dernière réunion d’information du Conseil de sécurité, le 31 janvier dernier, ainsi que des progrès enregistrés dans la réforme du secteur de la sécurité.  Un décret présidentiel est en cours d’élaboration à Kaboul pour fixer le cadre du processus constitutionnel et établir une commission constitutionnelle au début du mois de mars.  La commission intègrera les neufs membres actuels du Comité chargé de la rédaction de la Constitution, a indiqué M. Guéhenno, précisant que 80 candidats ont été sélectionnés en vue de compléter la composition de la commission constitutionnelle.  Il a souligné l’importance des consultations publiques prévues d’avril à juin 2003 dans chacune des provinces afghanes et parmi les diasporas d’Iran et du Pakistan afin de recueillir les vues de ces citoyens sur le processus constitutionnel en cours dans le pays.  M. Guéhenno a souligné qu’un soutien d’experts internationaux est important, jugeant cependant important que le processus constitutionnel soit mené par les Afghans eux-mêmes, et les a donc invités à faire preuve de compromis. 


Le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix s’est dit satisfait de l’organisation du processus électoral prévu en juin 2004, et a indiqué que le responsable du volet électoral de la MANUA est arrivé il y a quelques jours à Kaboul, ce après que le Président Karzaï ait invité, dans une lettre adressée le 15 février au Secrétaire général des Nations Unies, la MANUA à apporter son assistance dans l’organisation des élections et la coordination de l’assistance internationale.  Côté afghan, a-t-il poursuivi, le Président Karzaï a identifié une série de personnalités qui pourraient être membres de la Commission électorale, dont la création est prévue en mars, et devrait ensuite prendre la forme d’une autorité électorale chargée de la conduite du processus électoral. 


Le Secrétaire général adjoint a ensuite fait part des préparatifs du Forum sur le développement de l’Afghanistan, qui débute le 13 mars à Kaboul et dont l’objectif est de définir les domaines clés dans lesquels ce pays a besoin d’une assistance, et il a lancé un appel aux bailleurs de fonds afin qu’ils répondent aux besoins exprimés par le Gouvernement afghan pour cette année, qui se chiffrent entre 1,7 et 2 milliards de dollars.  Il a exprimé son inquiétude face à certains agissements de chefs de guerre et à certains abus qui sont dus au fait que les institutions de l’État ne soient pas encore pleinement en place. 


Sur cette question de la sécurité, M. Guéhenno a déploré que les Afghans continuent de subir les conséquences de l’insécurité en raison de la faiblesse des institutions de police et de l’armée.  Au cours du mois écoulé, les villes de Kandahar et de Kunduz ont été le théâtre de nombreuses attaques à la grenade contre des sièges d’organisations internationales et non gouvernementales, a-t-il déploré.  M. Guéhenno a également fait état des réactions hostiles des populations de l’Est du pays face aux programmes visant à éradiquer la culture du pavot.  Il a prôné une approche visant à analyser les incidents sécuritaires au cas par cas et a assuré qu’aucune évacuation du personnel international n’était envisagée.  Nous pouvons éventuellement retirer le personnel des lieux les moins sûrs mais sans pour autant remettre en question l’assistance à d’autres régions et la présence internationale, a-t-il dit.


En dépit des questions d’insécurité, M. Guéhenno a souligné le succès du transfert de commandement de la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) par la Turquie au commandement conjoint de l’Allemagne et des Pays-Bas, le 10 février.  Il a encouragé la poursuite des réformes dans le secteur de la sécurité, que ce soit dans la police, l’armée, ou dans le domaine du renseignement.  La sécurité est la clef du succès de la Loya Jirga et des élections générales lorsqu’elles seront convoquées, a-t-il fait valoir.  Le succès du processus dépend aussi de la création d’institutions représentatives de toutes les régions et les communautés du pays, a dit M. Guéhenno, qui a salué la décision prise le 20 février de remplacer 17 responsables au sein du Ministère de la défense pour tenir compte de cette représentativité. 


M. Guéhenno a lancé un appel au soutien de la communauté internationale au processus de DDR et a souligné, à cet égard, la contribution du Japon.  En outre, il a fait état des efforts du Président Karzaï et de son nouveau Ministre de l’intérieur, Ali Ahmad Jalali, pour accélérer l’adoption d’un décret sur la création d’une nouvelle police sur le modèle du décret du 1er décembre portant création de l’armée.  Il s’est ensuite inquiété de l’impact sur la sécurité de la production de l’opium qui a atteint 1,2 milliard de dollars en 2002, soit plus de la moitié de l’aide internationale dont a besoin l’Afghanistan, citant à cet égard une étude du PNUCID.  Les ressources nécessaires à la mise en place d’une véritable architecture de sécurité en Afghanistan vont bien au-delà des contributions apportées par les pays chefs de file dans ce domaine, a-t-il dit, invitant les autres Etats Membres à contribuer aux quatre fonds d’affectation spéciale créés pour financer la réforme de la sécurité en Afghanistan. 


Le Coordonnateur pour l’assistance à l’Afghanistan, M. MUTSUYOSHI NISHIMURA, a souligné qu’un an après la cessation des hostilités, l’Afghanistan regorgeait toujours d’armes et de munitions et que dans ces conditions, l’édification de l’Etat ne saurait réussir.  Il ne sera pas non plus possible de parvenir à la réconciliation.  Le manque de sécurité reste une source de profonde préoccupation pour la population, a-t-il ajouté, et les soldats et leurs officiers, lassés de la vie militaire, aspirent à reprendre le cours d’une vie normale.  Le manque de sécurité empêche également les ressources des donateurs d’atteindre les zones les plus reculées.  Cette absence de sécurité est, selon le Coordonnateur, le principal défi auquel est confronté l’Afghanistan d’aujourd’hui.  Par conséquent, toutes les parties s’accordent à juger que le désarmement, la démobilisation et la réintégration (DDR) des soldats et officiers relèvent de la plus haute priorité.  Mais la sécurité ne peut être assurée que si l’Etat, et lui seul, exerce le maintien de l’ordre, ce qui suppose la création d’une armée et d’une police nationales.  Des mesures de lutte contre le trafic des stupéfiants sont également indispensables pour garantir la sécurité, a-t-il poursuivi, de même que la mise en place d’un système judiciaire indépendant. 


Sur la base de ces considérations, a-t-il rappelé, le Président Karzaï a publié le 2 décembre un décret considérant les différents points relatifs à la sécurité.  Ce décret stipule qu’une nouvelle armée afghane sera constituée de 70 000 soldats maximum, avec une représentation ethnique équilibrée et que tout autre formation ou groupe armé seront interdits.  Le 11 janvier, le Président Karzaï a pris de nouveaux décrets relatifs au DDR et créant quatre commissions gouvernementales.  Enfin, le 22 février, il a annoncé à Tokyo son intention de parachever le désarmement du pays dans un délai d’un an et indiqué qu’un programme détaillé de DDR sera annoncé le 21 mars.  Ainsi, a souligné M. Nishimura, les bases solides d’un DDR ont-elles été posées et la communauté internationale est prête à soutenir ce programme.


Tous les soldats devant être désarmés passeront devant la  Commission du désarmement et ceux qui voudront rejoindre la nouvelle armée devront passer certains tests de recrutement; ceux qui échoueront se verront proposer différentes solutions de reclassement parmi lesquelles un dédommagement financier, un emploi dans le secteur public ou une formation.  Parallèlement, un mécanisme administratif intitulé «Programme afghan de réforme» sera créé et aura des bureaux dans neuf villes du pays pour enregistrer les individus, les aider à choisir la meilleure option en matière de formation et assurer leur suivi pendant les trois prochaines années.  Tout ce processus, a souligné le représentant, sera mené en étroite coopération avec la Mission d’assistance des Nations Unies à l’Afghanistan (MANUA). 


Conscient des nombreux défis qui devront être relevés tout au long de ce processus, le Coordonnateur a évoqué le nombre élevé d’officiers et de combattants dont il faudra s’occuper et dont le nombre est aujourd’hui difficile à estimer.  Il s’agira également de garantir la transparence dans le ramassage des armes et munitions; de veiller à l’impartialité et à la justice tout au long de ce processus.  Le Président Karzaï estime que le processus de désarmement prendra un an et il conviendra, selon lui, que le programme de DDR ait déjà pris un tour décisif et positif au moment de la tenue des élections prévues en juin de l’année prochaine.  Quant au financement du DDR, 50 millions de dollars ont été, à ce jour, promis par les donateurs, a indiqué M. Nishimura, précisant qu’il conviendra de s’assurer du financement de cette tâche.  Le succès du DDR dépendra également des capacités économiques du pays lui-même, a-t-il également relevé.  Aussi, la communauté internationale doit elle rester engagée en Afghanistan et lui apporter tout le soutien possible. 


M. HARALD BRAUN, Représentant spécial du Gouvernement allemand pour l’Afghanistan, a fait valoir que la reconstruction d’un système policier en Afghanistan constituait une étape vitale dans les efforts internationaux engagés pour rétablir la sécurité dans ce pays.  A la demande des Nations Unies et de l’ancienne administration intérimaire afghane, l’Allemagne joue un rôle clé dans la mise en place d’une police afghane, tâche liée au désarmement des milices et des anciens combattants et à leur réinsertion dans la société civile ainsi qu’à la création d’une armée nationale afghane. 


Une première analyse effectuée au début de 2002 par des experts allemands et afghans avait montré que les infrastructures de la police afghane avaient été largement détruites à Kaboul et dans les provinces; que les policiers n’avaient en général aucune formation, mal équipés et submergés par de nombreuses tâches n’ayant rien à voir avec leur fonction.  En outre, le contrôle de l’administration intérimaire sur la police était limité à Kaboul.  Il s’agissait par conséquent de réorganiser une force de police, de restructurer le Ministère de l’intérieur et les départements concernés, de rétablir un système de formation, de reconstruire les bâtiments de la police et de renforcer les moyens de transport et de communication.


A ce jour, trois étapes ont été identifiées, a expliqué le représentant.  Lors de la conférence de Bonn en décembre 2001, les structures de base d’une force de police à Kaboul avaient été définies; ensuite, deuxième étape en cours et qui se poursuivra jusqu’à la tenue des élections législatives en 2004, consolidation de ces structures et extension en dehors de Kaboul à toutes les provinces; la troisième étape consistera à garantir le fonctionnement des forces de police fédérales et provinciales et leur interaction avec les autres structures sécuritaires tout en préparant notre retrait de ce processus, graduellement jusqu’à la fin de 2005.  Au nombre des conditions indispensables au succès du processus, le représentant a énuméré la pleine mise en œuvre des Accords de Bonn, la poursuite de l’effort international  et de l’assistance financière, le maintien de la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) au moins dans son état actuel; la diminution des ingérences régionales; et une lutte conjointe des forces de police, de justice et des forces armées contre le trafic des stupéfiants.  Or, aucune de ces conditions n’a été pleinement remplie au cours des douze derniers mois, a souligné le représentant.  


A l’exception de Kaboul où la FIAS a garanti un environnement stable, la situation sécuritaire ne s’est pas améliorée.  Le financement des réformes a été également un problème, notamment en ce qui concerne le manque de fonds pour les salaires des policiers : le fonds constitué à cet effet n’a recueilli que onze millions de dollars, ce qui est loin des 65 millions de dollars escomptés, a-t-il indiqué, rappelant que le coût global de la reconstruction, de la formation et de l’équipement de la police a été évalué pour les quatre prochaines années à 180 millions d’euros, sans les salaires des policiers.  Néanmoins, a-t-il précisé, nous sommes actuellement conformes au calendrier défini pour la création de nouvelles forces de police.  M. Braun a ainsi mentionné l’ouverture en août 2002 de l’Académie de police et la mise en place des programmes de formation; la police criminelle et de lutte contre les stupéfiants est à l’œuvre de même que la police de Kaboul grâce à la reconstruction de ses bâtiments et à de nouveaux équipements.  Le Ministère de l’intérieur est en train de se doter de nouvelles structures modernes.  Il a indiqué que le paiement des policiers de Kaboul est garanti par un fonds d’affectation spéciale; qu’un système national informatisé de données policières est en cours d’établissement et que, depuis octobre 2002,  l’Afghanistan est membre d’Interpol.  En outre, l’intégration des provinces a commencé et les besoins de dix provinces sur 22 ont déjà été évalués. 


Convaincu que 2003 sera une année décisive, le Représentant spécial a souligné l’importance de développer la formation, de créer une police des frontières et d’étendre les résultats de Kaboul à d’autres régions du pays.  Les résultats dépendront de l’amélioration de la situation sécuritaire.  Il a rappelé l’ambition d’avoir 50 000 personnes dans la police nationale et 12 000 dans la police des frontières.  Etendre la reconstruction de la police aux provinces est le principal défi d’ici à la fin 2004.  Il est essentiel de faut réduire l’instabilité due aux combats entre chefs régionaux et au trafic des stupéfiants. 


Beaucoup doit encore être fait pour rendre le processus de Bonn irréversible et pour que les structures gouvernementales et administratives de l’Afghanistan s’affermissent et acquièrent l’expérience nécessaire pour mener elles mêmes ces processus à terme, a-t-il souligné.  2003 sera une année importante et nous comptons sur les contributions des membres des Nations Unies pour en assurer le succès, a conclu M. Braun.


Déclarations


Ouvrant ensuite le débat, M. JEREMY GREENSTOCK (Royaume-Uni) a salué les contributions respectives du Japon et de l’Allemagne dans les programmes de DDR et de réformes de la police en Afghanistan.  Il a demandé à M. Braun si, au regard des évaluations faites à ce jour dans le cadre du programme allemand d’assistance à la police, les personnes compétentes pouvaient être sélectionnées rapidement en Afghanistan pour occuper certaines fonctions clefs dans le nouveau système de police.


Pour sa part, le représentant de la Fédération de Russie, M. ALEXANDER V. KONUZIN, a demandé à M. Guéhenno s’il est vrai que la participation éventuelle de l’OTAN avait été envisagée dans les opérations de sécurité en Afghanistan.  Y-a-t-il eu des contacts à ce propos avec le Secrétariat des Nations Unies et envisagerait-on d’élargir la zone de sécurité qui pourrait être contrôlée par les forces internationales au-delà de la ville de Kaboul, a-t-il demandé.  Se tournant vers M. Nishimura, il a souligné la complexité du programme de DDR qui ne peut être volontaire dans la mesure où la situation sécuritaire demeure trop incertaine pour encourager la restitution des armes.  Il a demandé ensuite si la question de la démobilisation s’avère aussi complexe dans l’ensemble du pays.  Enfin, se tournant vers M. Braun, le représentant de la Fédération de Russie a demandé ce qui était entrepris pour lutter contre la contrebande de stupéfiants par les forces de police, quelle coopération était envisagée avec les pays voisins, et comment ils entendent coordonner ce travail.


M. MARTIN BELINGA-EBOUTOU (Cameroun), rappelant les conclusions de la conférence sur le DDR en Afghanistan tenue le 22 février à Tokyo et le soutien des bailleurs de fonds à ce programme, s’est inquiété de savoir si ces moyens seront des ressources additionnelles ou s’ils seront déduits des 2 milliards de dollars promis à Oslo pour l’année 2003.  S’agissant de la réforme du secteur de la justice et de la lutte contre l’insécurité, M. Belinga-Eboutou a demandé dans quelle mesure ces deux missions pouvaient être menées de front, compte tenu de l’influence encore importante des chefs de guerre et de leurs alliés. 


M. ADOLFO AGUILAR ZINSER (Mexique) a salué les efforts du Japon et de l’Allemagne pour le soutien aux processus de DDR et de formation de la police.  S’agissant de la mise en place d’une force de police chargée du maintien de l’ordre public et de la sécurité aux frontières, il a souhaité savoir comment coordonner les efforts au sein de la communauté internationale.  En outre, il a tenu à savoir si cette force de police nationale serait amenée à s’affronter aux factions qui contesteront son espace juridictionnel et quel degré de conflit pouvait être envisagé en Afghanistan.


M. MASOOD KHALID (Pakistan) a fait valoir les efforts engagés par son pays en faveur de la création des forces de sécurité et du déminage de l’Afghanistan.  Il a ensuite demandé à M. Nishimura si le concept du processus de DDR devait comprendre des mesures visant à réprimer le trafic d’armes qui sortent d’Afghanistan et ce qu’il pense de la façon dont la communauté internationale entend s’assurer de la coopération de toutes les factions à ce processus.  Concernant l’aspect financier de ce programme, il a demandé d’expliquer comment on peut s’assurer qu’il sera financé de manière adéquate.


M. INOCENCIO ARIAS (Espagne) a indiqué que sa question avait déjà été posée par le représentant de la Fédération de Russie.


M. JEAN-MARC DE LA SABLIERE (France) a fait remarquer que son pays contribue aux efforts de redressement, en particulier dans le cadre de la formation de l’armée afghane unifiée  En 2002, la France a formé deux bataillons et un troisième est en cours de formation: d’ici à la fin 2003, 7 000 soldats et 270 officiers auront suivi cette formation de base.  Des officiers afghans seront aussi accueillis dans les écoles militaires françaises, a-t-il indiqué.  Le représentant a par ailleurs demandé à M. Guéhenno, qui a évoqué la création de la police des frontières, des indications sur les grandes lignes du décret présidentiel à venir sur ce point et les étapes et difficultés que risque de rencontrer sa mise en œuvre.  A M. Nishimura, il a demandé de préciser dans quelles zones il sera le plus facile d’enclencher la dynamique de mise en œuvre du processus de DDR. 


M. RICHARD S. WILLIAMSON (Etats-Unis) a demandé à M. Nishimura des compléments d’informations sur les besoins de financement du DDR, telle que la formation professionnelle et autres programmes évoqués auparavant.  A M. Braun, il a demandé de donner des compléments d’informations sur les efforts de recrutement dans l’Académie de police et les difficultés auxquelles il avait été confronté.


M. MAMADY TRAORE (Guinée) a remercié l’Allemagne et le Japon pour leur rôle et demandé à M. Nishimura des informations complémentaires sur la production de l’opium.  Rappelant qu’elle avait atteint en 2002 un montant équivalent à plus de la moitié de l’aide promise à l’Afghanistan, il a souhaité savoir quelles devaient être les mesures concrètes à prendre pour lutter contre ce fléau qui risque de compromettre considérablement les chances de reconstruite l’Afghanistan.


M. Cristian Maquieira (Chili) a demandé à M. Nishimura comment il entend travailler et quels sont les défis les plus importants auxquels il estime être confronté.  Il a souhaité des précisions sur les régions qui, selon lui, sont les plus difficiles à intégrer au processus de DDR.  S’agissant de la réinsertion, il lui a demandé si certaines des expériences antérieures des Nations Unies peuvent être mises à profit en Afghanistan.  A M. Braun, il a demandé comment s’assurer que la force de police aura une composition ethnique équilibrée. 


M. FAYSSAL MEKDAD (République arabe syrienne) a demandé quelle vision avaient MM. Braun et Nishimura du lien entre les processus de reconstitution de la police et celui de DDR, ainsi que la lutte contre l’insécurité. 


M. ISMAEL GASPAR MARTINS (Angola) a salué les contributions du Japon et de l’Allemagne dans les processus de DDR et de formation de la police en Afghanistan.  Il s’est inquiété ensuite de la capacité à mobiliser des fonds pour financer les activités de DDR et de formation de la police et a souhaité savoir quels mécanismes de coordination pouvaient être mis en place entre les questions de DDR et de formation de la police.  Est-il réaliste d’envisager des élections en 2004, a enfin demandé le représentant de l’Angola? 


M. RAVAN A. G. FARHADI (Afghanistan) a rendu hommage, à l’instar de tous les intervenants, à la mémoire du Ministre afghan de l’industrie, décédé ce matin dans un accident d’avion survenu au Pakistan.  De hauts responsables pakistanais ont également péri dans cet accident, a rappelé le représentant, qui a présenté ses condoléances à la délégation du Pakistan.


M. ZHANG YISHAN (Chine) a demandé à M. Guéhenno quelles sont les mesures envisagées pour réduire les attaques contre les installations des Nations Unies et des organisations internationales en Afghanistan.  Se tournant vers M. Braun, il lui a demandé si le fait que l’Afghanistan ait rejoint Interpol pouvait l’aider dans la formation de sa police. 


M. GEORGI K. VASSILEV (Bulgarie), rappelant que le bataillon bulgare est arrivé le 20 février en Afghanistan, a demandé quelle était l’évaluation faite à ce jour des mesures prises par les pays chefs de file. 


Répondant aux questions et commentaires formulés par les délégations, le Coordonnateur du Gouvernement japonais pour l’assistance en Afghanistan a relevé les doutes et incertitudes exprimés par les membres du Conseil de sécurité sur le programme de DDR en raison de la résistance des chefs régionaux.  Nous savons qu’il sera très difficile de le mettre en œuvre, mais, a-t-il rappelé, toutes les décisions prises jusqu’à présent par le Gouvernement de Kaboul ont été discutées au Conseil de défense nationale où siègent tous les chefs politiques régionaux.  Donc, d’un point de vue théorique, il existe un consensus entre tous ces chefs pour faire avancer ce processus de DDR des soldats et officiers.  Le problème est de mettre à l’épreuve cette entente politique.  Le Coordonnateur a indiqué que, selon lui, le programme de DDR devrait avoir des retombées économiques et qu’il était important que les différentes communautés mesurent ces retombées.  Certaines communautés sont pressées de commencer ce programme, ce qui pourrait être une nouvelle tendance, un nouvel esprit qui serait ensuite repris ailleurs, a-t-il indiqué. 


Le DDR, a prévenu M. Nishimura, ne va pas permettre de récupérer tous les armements: certaines catégories d’armes devront être reprises mais il ne faudra pas toucher aux armes très légères, a-t-il estimé, indiquant qu’il s’agissait d’une pratique de DDR observée dans d’autres pays.  Enfin, il a mesuré les inquiétudes que suscite l’aspect financier de ce programme: 50 millions de dollars ne suffiront pas pour le programme tout entier qui s’étendra peut-être sur deux à quatre ans.  D’après les estimations du PNUD, le besoin total sur trois à quatre ans sera de 130 à 150 millions de dollars.  Il a donc appelé à œuvrer de concert pour collecter les ressources financières auprès de la communauté internationale.  Tous les pays donateurs peuvent apporter leur contribution et pas seulement sous forme financière au Fonds du PNUD créé pour le DDR, a-t-il signalé.


Par ailleurs, M. Nishimura a rappelé que le nombre de soldats à démobiliser se chiffre entre 100 000 et 300 000 selon les interlocuteurs sur place.  On compte en outre deux millions de réfugiés et de personnes déplacées.  Il a fait remarquer que d’un côté, on est face à des soldats qui vont quitter les forces armées et que de l’autre, on est confronté à un nombre considérable de réfugiés.  La tâche est lourde, mais il  est important d’inciter les soldats à rentrer dans la vie civile pour édifier un nouveau pays, a-t-il fait valoir. 


Reprenant la parole, le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix a assuré qu’à ce jour, il n’y avait pas de contacts entre les Nations Unies et l’OTAN pour assurer la sécurité en Afghanistan.  Toutefois, il a jugé que la question de la sécurité au-delà de Kaboul demeure une des questions les plus sensibles sur lesquelles la communauté internationale aura à travailler dans les prochaines semaines.  Répondant à l’Angola sur la pertinence de tenir des élections en 2004, il a observé que jusqu’ici, la volonté politique du peuple afghan et l’engagement de la communauté internationale avaient permis de respecter les échéances.  S’agissant des enseignements tirés de cette expérience et des autres missions de maintien et de consolidation de la paix, M. Guéhenno a insisté sur le financement des programmes, et également sur les synergies entre les programmes de DDR et de consolidation de la paix et de mise en place d’une police et d’une armée.  Répondant à la délégation de la Chine sur la sécurité du personnel des Nations Unies, il a assuré que le personnel est soumis à des normes très strictes pour limiter au plus les risques.


Pour sa part, le Représentant spécial du Gouvernement allemand chargé de la formation d’une force de police en Afghanistan a assuré que le recrutement de personnel qualifié n’est pas une mission impossible à l’étape actuelle.  Il a souligné notamment que la première vague de recrues avait regroupé des citoyens provenant de 32 provinces.  Pour ce qui est de la formation de la police, M. Braun a déclaré que seize pays étaient présents à la dernière réunion de coordination de Berlin, et il a jugé que les efforts de coordination ne pouvaient qu’être poursuivis.  S’agissant du décret présidentiel en cours de préparation sur la création de la police, il a indiqué avoir apporté des conseils aux autorités afghanes.  S’agissant de la coopération entre polices régionales dans la lutte contre le trafic de stupéfiants, M. Braun a annoncé qu’une conférence régionale devait avoir lieu dans un pays de la région qui a des relations avec l’Afghanistan et tous ses voisins au cours du second semestre de 2003.  Il a ensuite précisé que le programme allemand vise à créer une seule force de police pour l’ensemble de l’Afghanistan, une seule police nationale qui sera contrôlée depuis Kaboul et administrée sur place par des commandements désignés par les autorités afghanes.  Quant à la question sur l’intégration de l’Afghanistan à Interpol posée par la Chine, il a annoncé la mise en place d’une structure Interpol au sein du Ministère afghan de la sécurité. 


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