SG/SM/7837

POUR FAIRE DE L’URBANISATION UNE FORCE POSITIVE AU SERVICE D’UN DEVELOPPEMENT DURABLE, IL FAUT RENFORCER LES PARTENARIATS, GARANTIR LA GOUVERNANCE URBAINE ET ASSURER LE STATUT D’OCCUPATION

06/06/2001
Communiqué de presse
SG/SM/7837


                                                                  HAB/174


POUR FAIRE DE L’URBANISATION UNE FORCE POSITIVE AU SERVICE D’UN DEVELOPPEMENT DURABLE, IL FAUT RENFORCER LES PARTENARIATS, GARANTIR LA GOUVERNANCE URBAINE ET ASSURER LE STATUT D’OCCUPATION


Vous trouverez ci-après le texte intégral de l’allocution prononcée ce matin par le Secrétaire général, M. Kofi Annan, à la session extraordinaire de l’Assemblée générale consacrée à un examen et à une évaluation d’ensemble de l’application du programme pour l’Habitat:


La deuxième Conférence des Nations Unies sur les établissements humains, dont cette session extraordinaire marque le cinquième anniversaire, n’a pas été une manifestation isolée. Elle s’inscrivait dans une série de conférences historiques organisées par l’Organisation des Nations Unies pendant les années 90. Chacune de ces conférences avait son thème propre, mais elles étaient indissociables, car elles avaient un objectif commun qui les transcendait toutes : donner aux hommes, aux femmes et aux enfants des villes et villages du monde entier la chance d'avoir part à la prospérité et de tirer parti des possibilités qu'offre notre époque.


Le monde est à un tournant et connaît une transformation radicale qui ne touche pas seulement notre mode de vie, mais aussi le lieu où nous vivons. Les citadins sont désormais en majorité dans le monde, et on prévoit que l’accélération de l’urbanisation se poursuivra, pour la plus grande part dans les pays en développement. Les villes ont toujours été des carrefours, lieux de rencontre des gens et des idées, foyers de culture et d'innovations. À notre époque, les zones urbaines sont le grand moteur du développement et de la mondialisation.


Mais avec ce mouvement vers les villes, l'on voit aussi s'urbaniser bien des inégalités et des maux de la société. Dans les deux tiers des villes du monde en développement, les eaux usées ne sont pas traitées. Dans les pays en transition, 75% des déchets solides aboutissent dans des dépotoirs. Et partout, partout, l'on voit des contrastes criants :


¨     Faute d’urbanisme, les taudis s’étendent aux côtés de gratte-ciel étincelants;


¨     À la consommation ostentatoire font pendant de grandes pyramides de déchets qui menacent l’environnement et la santé humaine;


¨     Et l’écart se creuse entre les prix du logement et l’offre de logements, comme entre les prix du logement et les salaires offerts sur les marchés du travail.


Mais cela ne doit pas nous faire oublier les besoins des agglomérations et communautés rurales. Après tout, si le rythme de l’urbanisation est si rapide dans les pays en développement, c’est en grande partie le résultat des échecs passés du développement rural. Il y a dans le monde plus de 1,2 milliard de pauvres, et les trois quarts d’entre eux vivent en milieu rural. Pour que l’humanité ait un avenir viable, il nous faudra améliorer partout la vie des pauvres.


La conférence d’Istanbul a tenté de faire comprendre que convenablement pilotée, l’urbanisation pouvait être une force positive au service de l'atténuation de la misère et de la réalisation du développement durable. Depuis cinq ans qu’on a entamé la mise en œuvre du Programme pour l’Habitat, quelques constatations s’imposent.


Tout d’abord, l’importance des partenariats. Les deux tiers des villes du monde ont forgé dans les cinq dernières années de nouveaux partenariats entre secteur public et secteur privé. La plupart des pays ont adapté leurs politiques en matière de logement et dans d'autres domaines, en fonction des principes convenus à l’échelon international. Or ce n’est pas là le résultat d’une intervention des seuls États. Les pouvoirs locaux, les organisations non gouvernementales, les organisations féminines et d’autres groupes de la société civile ont apporté un concours immense à cette action. Ce sont eux qui ont fait connaître les enjeux, eux encore qui ont mobilisé les gens et poussé au changement.


Un deuxième aspect essentiel est celui de la gouvernance urbaine : sans elle, pas d’efficacité économique possible, ni d’administration performante. Une société saine est une société qui offre à tous ses membres une chance d’intervenir dans les décisions qui influent sur leur vie. Pour améliorer la gouvernance urbaine, il faut donc développer la démocratie et renforcer les pouvoirs locaux. Il faut tout particulièrement accroître le rôle des femmes et faire en sorte que tous les décideurs, hommes et femmes, s’attaquent à tous les problèmes qui les touchent, elles dont l’héroïsme quotidien, dans les quartiers pauvres des villes, passe trop souvent inaperçu.


Un troisième problème très important pour des dizaines de millions de familles des villes est que leur statut d'occupation n’est pas assuré. Certains ont une maison, mais n’ont pas de titre de propriété sur cette maison, et vivent dans la crainte d’une expulsion forcée arbitraire. D’autres ont une activité commerciale mais n’ont pas la licence d’exploitation correspondante. Et faute d’être protégés et soutenus par la loi, ils vont souvent grossir le secteur informel : cela leur permet de se nourrir, mais les empêche de trouver des fonds, d’attirer des investissements, de se faire approvisionner en eau ou d’obtenir d’autres services de base. Il nous faut réduire cette insécurité et mettre en place les fondements juridiques et autres dont dépendent des collectivités stables. Il y a là un domaine d’intervention où l’on peut susciter de vastes possibilités d’enrichissement, offrant un excellent moyen d’échapper à la pauvreté.


Les villes du monde sont confrontées à une longue liste de problèmes communs, face auxquels pays riches et pays pauvres devraient pouvoir trouver une réponse commune. Mais il n'y aura pas de progrès si les chefs font défaut. Et c’est là que vous intervenez, vous tous, ministres et maires responsables des politiques d’urbanisme, organisations non gouvernementales, associations féminines et autres groupes de la société civile. Tous, chacun à votre manière, vous êtes responsables devant les habitants des taudis, des favelas, des ghettos, des bidonvilles et des squats du monde.

Le logement est souvent un aspect négligé du développement économique et social. Notre tâche, à la session extraordinaire, est de créer une dynamique d'action durable face à ces problèmes. Si l’Assemblée générale fait ce qu’elle a à faire lors de cette session, elle s’accordera sur les mesures nécessaires pour mettre en œuvre non seulement le Programme pour l’Habitat, mais aussi la Déclaration du millénaire, dans laquelle les dirigeants du monde se sont engagés à améliorer sensiblement la vie d’au moins 100 millions d'habitants des bidonvilles, d’ici à 2020. Cette session est aussi l’occasion de contribuer au Sommet mondial pour le développement durable, qui se tiendra l’an prochain à Johannesburg.


Le monde est entré dans le millénaire des villes. Soyons à la hauteur des nombreuses tâches que cela nous impose. Je vous souhaite une session enrichissante et fructueuse. Je vous remercie.


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