Alors qu’une nouvelle saison d’ouragans catastrophique dévaste des Caraïbes, nos collègues sur la ligne de front continuent d’assumer leur rôle viral de coordination de la réponse humanitaire.

Rogerio Mobilia, Chef adjoint du Bureau pour l’Amérique latine et les Caraïbes à OCHA, est l’un d’entre eux. Il nous parle de 30 ans de service humanitaire avec les Nations Unies.

Comment avez-vous commencé avec les Nations Unies ?

Ma carrière humanitaire a commencé presque par chance. Grâce à mes diplôme sen ingénierie électronique, je travaillais au Brésil quand on m’a demandé de partir avec les Nations Unies en Angola, un pays que je connaissais à peine et qui émergeait d’un conflit. J’ai accepté et six mois plus tard, je me suis retrouvé à Luanda, à travailler à la mise en place d’un système d’enregistrement des anciens soldats en leur fournissant une carte d’identité et un peu de dignité retrouvée en utilisant une technologie qui pourrait paraitre obsolète de nos jours.

Nous avons même mis en place un système précoce d’enregistrement par photo numérique, peut-être le premier selfie humanitaire. Cette expérience m’a fait comprendre le pouvoir de l’information et la résilience des gens qui vivent dans des situations de crise, ce qui a impacté l’ensemble de ma carrière.

Qu’est-ce qui a le plus changé en 30 ans ?

Chaque contexte a toujours engendré des défis différents, mais la gestion de l'information a toujours été le dénominateur commun, et cela a radicalement changé.

À l’époque, nous devions assumer de nombreux rôles : analyste, formateur, communiquant, coordinateur. Même si aucun de ces rôles n’était clairement défini, nous savions qu'il nous fallait trouver une solution. Aujourd'hui, la gestion de l'information est devenue une discipline à part entière, qui sous-tend tous les aspects de la prise de décision en situation de crise.

Et qu’est-ce qui n’a pas changé ?

Malheureusement, les conflits continuent de ressurgir, souvent dans des régions qui souffrent depuis des décennies. Trop de personnes vivent dans l'incertitude au quotidien, déplacées ou prises au piège de crises qu'elles n'ont pas provoquées.

Je l'ai constaté à mes débuts, et je le constate encore aujourd'hui. Il est consternant de constater combien de leçons le monde a encore à apprendre et combien les acteurs humanitaires continuent de payer un prix exorbitant.

Mais une chose importante n’a pas changé : la résilience des gens. Même lors des missions les plus difficiles auxquelles j’ai participé, j’ai vu des enfants et des personnes âgées nous accueillir avec joie. Ces rencontres ont façonné mon parcours.

De quoi êtes-vous le plus fier ?

Persévérer. Travailler plus de 30 ans au sein d'une même organisation est rare. Pour moi, il n'a jamais été question de confort ou de facilité, mais de croire en la mission d'OCHA.

De mon tout premier mois de septembre 1995 avec l'ONU, où j'ai eu le privilège de participer à un processus de paix qui a marqué l'histoire d'un pays, jusqu'à aujourd'hui, où je mobilise les ressources et mets en œuvre le mandat humanitaire, le chemin a été long, mais enrichissant.

Trente ans déjà depuis ces premières photos en Angola ! Difficile à croire. Et oui, je suis ravi que mon blazer m’aille encore.