Chronique ONU

Actualités/Millénaire pour le développement
LA RÉPUBLIQUE DOMINICAINE COMME PROJET PILOTE

Par John R. Gagain Jr.

Imprimer
Page d'accueil | Dans ce numéro | Archives | Anglais | Contactez-nous | Abonnez-vous | Liens
L'article

Le Secrétaire général Kofi Annan s'est rendu pour la première fois en République dominicaine le 4 août 2006, à la demande du Président Leonel Fernández, afin de participer à un forum sur la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). En effet, ce pays a été choisi en 2004 comme pays pilote du Projet du Millénaire de l'ONU - une initiative lancée par
M. Annan et menée par un économiste distingué, Jeffrey Sachs - et le seul à ce jour à avoir créé une Commission présidentielle destinée exclusivement à coordonner, à surveiller et à suivre les progrès en matière d'OMD.

Impressionné par la présentation de la Commission, le Secrétaire général a déclaré que la République dominicaine était " dans la bonne voie " et a établi un " modèle " qui sera très utile à de nombreux pays dans la région et dans le monde. C'est " une source d'inspiration pour la communauté internationale et un exemple pour les pays en développement ", a-t-il ajouté. " On ne peut pas avoir de développement sans sécurité et on ne peut pas avoir de sécurité sans développement ", a-t-il poursuivi, une remarque qui a fait mouche, encourageant de nombreux participants à aller au-delà du courant de pensée majoritaire sur le type de modèle établi en République dominicaine.

Le Président Leonel Fernández de la République dominicaine (au centre), accompagné de son épouse Margarita Cedeño, remet au Secrétaire général Kofi Annan les conclusions de la première Évaluation des besoins en matière de réalisation des OMD " Pueblo del Mileno " pour la province d'El Seibo. PHOTO/COPDES, REPUBLIQUE DOMINICAINE

Le " modèle dominicain ", principalement à son stade initial, fait référence à l'engagement du Président Fernandez en matière de réalisation des OMD, sur le plan à la fois politique et institutionnel, en particulier depuis la création de la Commission. L'idée de ce modèle a, depuis, pris de l'importance. Les travaux de la Commission ont évolué pour s'adapter aux besoins du pays, aux défavorisés et aux pauvres.

La République dominicaine est devenue un modèle en matière de sécurité et de développement. Elle est un exemple de ce que les Nations Unies veulent faire dans le domaine de la réforme de l'ONU, en particulier après les efforts de M. Annan pour que l'Organisation mondiale soit mieux adaptée pour répondre aux défis et aux opportunités du XXIe siècle. Ce travail a été documenté par les deux initiatives qu'il a mises en place : le Projet du Millénaire de l'ONU et le Groupe de haut niveau sur les menaces, les défis et le changement. Les Nations Unies ont été créées " pour préserver les générations futures du fléau de la guerre ". Cependant, 61 ans après, les plus grands défis pour le maintien de la paix et de la sécurité ne sont pas nécessairement les conflits entre États, mais d'autres menaces moins conventionnelles, notamment la pauvreté, les maladies infectieuses, la dégradation de l'environnement, la guerre et la violence dans les États, le terrorisme et la criminalité transnationale organisée.

Le 30 novembre 2005, la première dame de la République dominicaine, Margarita Cedeño de Fernández, a inauguré, au nom du Président, l'" Évaluation des besoins et l'analyse des coûts en matière de réalisation des OMD ". Ce processus, appelé " Pueblo del Milenio ", vise à " exploiter le leadership local et l'engagement vis-à-vis de l'éradication de la pauvreté afin que les citoyens prennent en main le processus de développement de leur communauté en adoptant une "approche communautaire participative" permettant d'identifier les besoins les plus urgents et les solutions afin de réaliser les OMD au niveau local ". Il complète également l'approche présidentielle " du sommet vers le bas " en créant une approche communautaire participative au développement durable dans le pays. La fusion du Projet de développement national et des divers projets de développement provinciaux/locaux, dans le cadre de l'Évaluation des besoins en matière de réalisation des OMD, devrait conduire à une vision intégrée et partagée du développement humain durable du pays.

Le processus a également servi de plate-forme au gouvernement central, aux municipalités, aux partis politiques, aux organisations non gouvernementales (ONG), aux institutions locales de l'ONU et au secteur privé pour définir leur propre type de développement et chercher les meilleurs moyens de réaliser les OMD comme, par exemple, accorder un plus grand soutien à l'éducation, à la santé, à l'eau, à l'assainissement, à l'énergie, à l'agriculture et à la nutrition et assurer une meilleure gestion des dépenses dans ces domaines. Le " Modèle dominicain " est devenu un outil pour les citoyens et leur développement, les investissant d'une responsabilité qui est essentielle à la réalisation de la liberté et aux droits inhérents aux OMD et au développement humain durable.

Nous vivons dans un monde où " les menaces et les opportunités sont communes " et " le développement, la sécurité et les droits de l'homme vont de pair ", a dit le Secrétaire général dans son rapport au Sommet du Millénaire cinq ans après. Les études montrent qu'il y a une relation entre le développement et la sécurité, que " les conflits violents détruisent la richesse " et que " la pauvreté affaiblit l'État et ses institutions, le rendant vulnérable au conflit ". En juin 2004, un atelier à Bangkok consacré au Projet du Millénaire, a établi, à l'appui de données de la Banque mondiale, la relation entre la richesse d'une nation et les risques de guerre civile : un pays dont " le produit intérieur brut (PIB) par personne est seulement de 250 dollars risque de connaître une guerre civile dans les cinq années suivantes, avec une probabilité de 15 % […], cette probabilité étant réduite de moitié pour un pays dont le PIB est de 600 dollars par personne ". En revanche, toujours selon le rapport, dans les pays dont le revenu est supérieur à 5 000 dollars par personne, les risques de guerre civile sont très faibles.

Le Groupe de haut niveau sur les menaces, les défis et le changement a défini les menaces pour la sécurité internationale comme " tout événement ou processus de nature à provoquer un très grand nombre de décès ou à réduire les chances de vie ", et les a classées en six catégories : les menaces économiques et sociales, notamment la pauvreté, les maladies infectieuses et la dégradation de l'environnement; le conflit entre les États; le conflit interne, notamment la guerre civile, le génocide et d'autres atrocités à grande échelle; les armes nucléaires, radiologiques, chimiques et biologiques; le terrorisme; et la criminalité transnationale organisée. Les menaces économiques et sociales ainsi que la criminalité transnationale organisée sont les principaux défis auxquels la République dominicaine est confrontée.

À la fin des années 1990, le gouvernement Fernández a enregistré l'un des taux de croissance économique les plus élevés, atteignant une moyenne de 7,8 %, alors que le gouvernement suivant (Mejia) a enregistré des taux de croissance négatifs - probablement la plus grande crise économique de l'histoire du pays - et une augmentation de 1,5 million de pauvres. Cela s'est traduit par un accroissement de la criminalité transnationale organisée, due en grande partie au trafic de la drogue, et a provoqué la perte d'un grand nombre de vies. En termes de menaces économiques et sociales pour la santé, 3 249 enfants des familles les plus pauvres sont morts en 2005, y compris 200 femmes suite à des problèmes liés à la grossesse.

Récemment, la fièvre de dengue est devenu un problème majeur, faisant plus de 30 morts. Devant la flambée de dengue qui coûte au pays des millions de pesos, le Ministre de la santé a fait appel aux autres ministres pour qu'ils l'aident à supporter ce fardeau. Les mesures de soutien comprennent des ateliers d'information sur la prévention de la dengue qui, par le biais du Ministère de l'Éducation et de l'éducation supérieure, touchent les écoles et les universités, y compris plus de 33 000 familles inscrites dans le programme Progressando créé par l'épouse du Président. Les OMD servent de catalyseurs pour investir davantage dans les centres de santé primaire dans les régions rurales.

Relever le défi de la prévention " commence par le "développement", car celui-ci est la base indispensable à un système de sécurité collective qui prend la prévention au sérieux ", a déclaré le Groupe de haut niveau. Cela se situe dans la même optique que les " six leçons apprises " présentées par la Commission présidentielle au Secrétaire général pendant sa visite : la pauvreté est une partie d'un problème plus important; le processus d'évaluation des besoins en termes de réalisation des OMD nécessite une approche globale; la réalisation des OMD nécessite une " plus grande attention "; aborder les besoins des pauvres au niveau local plutôt que national; les OMD forment le " tissu " du gouvernement et de la société; et, plus important, il vaut mieux " prévenir les problèmes plutôt que les confronter ". Ce dernier point est important pas seulement en termes éthiques et pratiques à cause des vies potentielles perdues et des souffrances humaines, mais aussi en termes financiers. Même s'il est difficile d'évaluer le coût des problèmes, des menaces ou d'un conflit, une étude a montré que la valeur nette du coût d'un conflit est de 250 % de la valeur du PIB au moment où le conflit commence - ou, pour un " pays en développement typique ", les coûts totaux associés au conflit représentent environ 54 milliards de dollars.

Le Groupe de haut niveau a conclu que le monde a besoin d'un " nouveau consensus " basé sur un principe fondamental selon lequel " toutes les nations, les riches comme les pauvres, doivent partager les responsabilités en matière de sécurité. " Les travaux de la République dominicaine pour atteindre les OMD sont non seulement un modèle en termes de développement et de sécurité mais aussi un catalyseur pour prévenir les problèmes au lieu de les confronter. La République dominicaine prend les mesures nécessaires pour aborder les problèmes. Non seulement elle œuvre pour son peuple, mais elle sert aussi de " modèle " aux autres, et assume sa responsabilité en matière de réalisation des OMD.

Biographie
John R. Gagain Jr. a été nommé directeur exécutif de la Commission présidentielle sur les Objectifs du Millénaire pour le développement et le développement durable le 16 septembre 2004. Auparavant, il était directeur du Centre consacré à l'étude de la mondialisation à la Fundación Global Democracia y Desarollo (FUNGLOBE), une ONG internationale engagée dans la recherche en République dominicaine.
Page d'accueil | Dans ce numéro | Archives | Anglais | Contactez-nous | Abonnez-vous | Liens
Copyright © Nations Unies
Retour  Haut