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Vital Voices: L'action des ONG dans la lutte contre la traite des êtres humains
Par Wenchi Yu Perkins

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L'article
La traite des êtres humains est, de nos jours, l'une des violations des droits de l'homme les plus extrêmes. Les trafiquants s'attaquent aux membres les plus vulnérables de la société : les personnes accablées par la pauvreté, atteintes d'incapacité et victimes de la discrimination. La traite des êtres humains c'est le commerce ou « la vente » d'êtres humains par l'enlèvement, le recours à la force ou les menaces, la tromperie et la fraude à des fins d'exploitation sexuelle ou en vue du travail forcé. Toutes les personnes sont touchées, quels que soient le sexe, le race, l'âge et même les frontières (en raison de la mondialisation).

Selon le Rapport sur la traite des êtres humains publié par le Département d'État des États-Unis, chaque année, 600 000 à 800 000 personnes, surtout des femmes et des filles, sont victimes de la traite et traversent les frontières. Le nombre est encore plus élevé si l'on prend en compte la traite au niveau national, c'est-à-dire à l'intérieur des frontières d'un pays. Cependant, malgré son ampleur, la traite des êtres humains demeure inconnue pour beaucoup. Cette industrie de plus en plus lucrative étant souvent associée au crime organisé, la communauté internationale a créé en 2000 la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et le Protocole additionnel à la Convention visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.

Pour la première fois dans un document juridique, le Protocole définit de manière spécifique la traite des êtres humains et la criminalise. Il exhorte également les États à venir en aide aux victimes et à les protéger en évitant leur expulsion et en autorisant leur rapatriement, en renforçant les contrôles aux frontières et en améliorant l'intégrité et la sécurité des documents d'identification. Les États sont également exhortés à faire leur possible pour prévenir la traite en poursuivant les recherches, en lançant des campagnes de sensibilisation ainsi que des initiatives sociales et économiques en vue de réduire la vulnérabilité des victimes. En plus du Protocole, les pays ont également voté une loi contre la traite ou révisé depuis le milieu des années 1990 les lois sur l'immigration et la législation pénale existantes en vue de lutter contre cet esclavage moderne.

Même si cette question reste encore inconnue de beaucoup, le mouvement de lutte grandit grâce aux organisations non gouvernementales (ONG) qui mènent des actions de pression locales, nationales et internationales. Des organisations locales qui identifient les victimes et fournissent des services directs aux organisations qui font pression pour que des lois contre la traite des êtres humains soient adoptées et qui construisent les capacités de la société civile par l'établissement de réseaux, en passant par la formation, l'échange des informations et les campagnes de sensibilisation, les ONG sont le moteur du mouvement de lutte contre la traite dans le monde.
Une fille, qui a été victime de la traite et forcée de travailler comme domestique à Bangkok, en Thaïlande, montre les cicatrices qu'elle a sur les bras après avoir été brûlée avec un fer à repasser par la maîtresse de maison. Pour la punir, on lui a coupé la langue et son corps porte de nombreuses cicatrices dues aux mauvais traitements qu'elle a subis presque toutes les semaines pendant plus de sept ans. Elle a finalement réussi à s'échapper et à retourner dans son village, à Savannakhet, en République démocratique populaire lao. Photo UNICEF/Jim Holmes
Il existe deux types d'ONG contre la traite : celles qui travaillent directement avec les victimes, qui fournissent des services; et les groupes de défense qui, eux, ne travaillent pas directement avec les victimes mais font pression sur les responsables gouvernementaux et les législateurs afin de promouvoir des lois et des politiques contre la traite et de surveiller leur application. Elles engagent également la participation de la société civile en constituant des réseaux actifs avec d'autres organisations et des particuliers, renforçant les alliances parmi les ONG ainsi que leurs actions.

En tant qu'ONG internationale qui travaille à la promotion des droits de la femme dans le monde, Vital Choices Global Partnership poursuit trois stratégies :

Promouvoir une plus grande sensibilisation du public
La sensibilisation de public est essentielle au succès du mouvement contre la traite des êtres humains. Les victimes sont fréquemment isolées et tenues à l'écart et leur secours dépend souvent de bons Samaritains qui signalent des cas aux autorités chargées de faire respecter les lois. Il est aussi important que les personnes vulnérables qui, par exemple, cherchent du travail à l'étranger pour fuir la pauvreté, comprennent comment fonctionne la traite pour éviter d'en devenir les victimes.

Vital Voices publie Trafficking Alert, un bulletin électronique destiné à sensibiliser le public, qui couvre les questions ayant trait à la traite des êtres humains et qui est lu par des responsables gouvernementaux, des ONG, des organisations internationales et des universitaires dans le monde entier. Ce bulletin encourage les discussions sur les meilleures approches à adopter pour lutter contre la traite dans le monde. Vital Voices produit également un kit d'information en huit langues à utiliser aux États-Unis. Il explique comment reconnaître les victimes dans les communautés locales, présente un résumé des lois contre la traite aux États-Unis, une liste de numéros de téléphone afin de rapporter les cas suspects et une fiche d'information destinée aux professionnels de la santé décrivant les effets de la traite sur la santé des victimes. Un autre élément important de la campagne concerne la coopération avec l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime afin de distribuer des annonces publiques aux chaînes de télévision nationales et régionales. Vital Voices joue également un rôle actif auprès des communautés, telles que les universités, les séminaires et les conférences.

Promouvoir des partenariats efficaces entre les gouvernements et les ONG
Même si les ONG sont à la tête du mouvement de lutte contre la traite des êtres humains, les gouvernements ont un rôle pas moins essentiel car ce sont eux qui établissent les politiques contre la traite, sont responsables de l'application des lois et apportent une aide financière aux victimes. Inversement, les politiques gouvernementales ne peuvent être élaborées sans les informations des ONG, en particulier celles qui ont des contacts directs avec les victimes. Malheureusement, dans un grand nombre de pays, la confiance mutuelle entre les gouvernements et les ONG ainsi que les possibilités de discussion sur la traite des êtres humains sont rares ou inexistantes. À cet égard, Vital Voices encourage et facilite ces discussions en réunissant les ONG et les législateurs afin de créer une politique efficace contre la traite des êtres humains.

Former les ONG et construire leur capacité pour lutter contre la traite des êtres humains
Reconnaissant la contribution essentielle des ONG, les gouvernements comme les institutions financières dans le monde poursuivent des stratégies afin de mobiliser la société civile et construire la capacité de ces organisations. Les organismes gouvernementaux s'associent souvent aux ONG dans diverses activités, telles que la formation concernant la protection des victimes, les poursuites judiciaires ou la prévention de la traite. Vital Voices travaille avec un réseau important d'ONG et favorise la formation des femmes leaders. La question de la traite des êtres humains est intégrée à ce type de formation afin d'encourager les efforts de lutte au sein du réseau. Vital Voices assure également une formation afin d'encourager les responsables de l'application des lois, les législateurs, les responsables gouvernementaux et les ONG à adopter les stratégies nécessaires pour mettre fin à la traite.

D'autres organisations contre la traite travaillent également directement avec les victimes. Leur objectif est de les identifier et de les aider à retrouver une vie normale. Elles se concentrent davantage sur la fourniture de services et collaborent souvent avec les groupes de mobilisation pour travailler à l'élaboration de politiques anti-traite. Elles fournissent généralement des services sociaux et une assistance juridique. Des conseillers, des psychologues et des travailleurs sociaux assurent un accompagnement psychosocial des victimes. Ces victimes ont souvent besoin d'une attention médicale, en particulier les filles livrées à la prostitution, pour déterminer si elles sont séropositives ou ont contracté des maladies sexuellement transmissibles. Leur assurer un lieu d'habitation sûr est également primordial. Ces besoins de base urgents sont souvent pris en charge par des associations à but non lucratif de la communauté.

Selon l'ampleur du traumatisme subi, le rétablissement des victimes peut prendre des années. Il est donc nécessaire, en plus de l'aide d'urgence, de créer des projets de réhabilitation à long terme. Les ONG qui fournissent des services facilitent également la réintégration des victimes dans la société. Lorsque les victimes sont mineures et n'ont pas terminé leurs études, une formation professionnelle, des cours de langue ou une éducation de base sont assurés. Les victimes nécessitent souvent une aide juridique dans des domaines comme l'immigration, le droit de la famille ou les droits civils. Comme elles n'ont généralement pas les moyens de payer les honoraires, les ONG peuvent les mettre en contact avec des avocats qui leur fournissent une assistance gratuite ou à peu de frais et assurent leur défense devant les autorités gouvernementales et les tribunaux afin de garantir la pleine protection de leurs droits.

Les ONG sont essentielles dans la lutte contre la traite des êtres humains; elles disposent de l'autonomie et de l'expertise pour porter cette question à l'attention du public et promouvoir des changements de politiques et l'assistance aux victimes. Malgré les différences de stratégies ou d'idéologies, les ONG ont le même objectif : mettre fin à la traite des êtres humains. Ce n'est qu'en collaborant aux niveaux politiques et législatifs et en unissant nos services qu'il sera possible de trouver des solutions complètes et durables pour répondre à cette violation des droits de l'homme. Les trafiquants sont organisés et, pour s'opposer à eux, nous devons nous aussi être unis et organisés. o
Pour en savoir plus, veuillez visiter le site www.vitalvoices.org
Biographie
Wenchi Yu Perkins est responsable de Vital Voices, un programme soutenant les femmes leaders qui encouragent la démocratie, les économies fortes et la paix. Elle est chargée de la gestion des initiatives contre la traite, y compris de la publication de Trafficking Alert.
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