Chronique ONU
Deuxième Commission : économique et financière
Contribuer à la réalisation des OMD
La section sur l'Assemblée générale a été rédigée et
coordonnée par Namrita Talwar.


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L'article


« Nous avons la responsabilité de faire des recommandations appropriées. C'est pourquoi la Deuxième Commission prend des décisions majeures et a un impact direct sur la réalisation des OMD. »

- Marco Balarezo
   Représentant permanent adjoint du    Pérou
   Président de la Deuxième Commission
Qu'il s'agisse des violents ouragans qui ont balayé les îles du Pacifique ou les vagues géantes qui ont fait des milliers de morts, les catastrophes naturelles dévastent de nombreuses régions du monde. Pendant la cinquante-neuvième session de l'Assemblée générale des Nations Unies, la Deuxième Commission a débattu de questions aussi complexes que le renforcement de la coordination de l'aide humanitaire et des secours en cas de catastrophe, l'aide économique aux pays ou aux régions, le déséquilibre des échanges commerciaux et la promotion des technologies de l'information pour le développement.

Avec 2005 marquant le début du compte à rebours jusqu'à 2015, échéance pour réaliser les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) qui visent, entre autres, à réduire de moitié la proportion de personnes qui n'ont pas accès à l'eau potable et à éliminer les disparités entre les sexes dans les enseignements primaire et secondaire, la Commission s'est attachée à aligner ses objectifs sur le cadre des OMD.

« Nous sommes dans une période de transition », a dit le Président de la Commission, Marco Balarezo (Pérou), à la Chronique ONU.

« Avant la soixantième Assemblée générale, la Commission effectuera un suivi de la Déclaration du Millénaire et des Objectifs lors du Sommet de 2005. » Selon lui, il était important que la Deuxième Commission prennent les décisions nécessaires pour réaliser les OMD. L'Assemblée a récemment approuvé pour 2005 un plan de travail en plusieurs étapes qui s'achèvera avec un examen de haut niveau des progrès réalisés dans le monde pour atteindre ces Objectifs avant la commémoration de son soixantième anniversaire en septembre.

Dans la tradition du consensus propre à la Commission, 40 résolutions ont été adoptées sans vote, deux ayant été soumises à un vote. Par un projet de texte sur la dette extérieure et du développement, l'Assemblée a souligné que les ressources dégagées par l'allégement de la dette pouvaient être consacrées à l'éradication de la pauvreté, la croissance économique et le développement durable.
Au cours du débat, Franklin Esipila (Kenya) a affirmé que le fait de consacrer 0,7 % du produit national brut à l'aide publique au développement (APD) était en deçà de l'objectif fixé. L'APD est une aide des pays développés sous forme de prêts, de subventions, d'une assistance technique et d'autres formes de coopération destinée aux pays en développement. Une proportion importante de l'APD est destinée à promouvoir le développement durable dans les pays pauvres, en particulier par le biais de programmes de conservation des ressources naturelles, de protection de l'environnement et pour la population. De nombreuses délégations ont fait remarquer que l'élimination du fardeau de la dette des pays les plus pauvres devait être une priorité pour les aider à relancer leur croissance économique, lutter contre la pandémie du VIH/sida et réaliser les OMD.

Selon la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), pour réduire de moitié la pauvreté d'ici à 2015, la croissance économique des pays Africains doit doubler de 7 % par an au cours de la prochaine décennie. Mais le montant des paiements au titre de service de la dette a empêché les pays pauvres très endettés (PPTE) d'augmenter leurs épargnes et leurs investissements pour promouvoir la croissance économique. Huit ans après le lancement de l'Initiative en faveur des pays pauvres très endettés, l'endettement de ces pays reste encore trop élevé.

© Photo OMS/P. Virot
Selon un rapport publié par la CNUCED, intitulé Endettement viable : oasis ou mirage ?, dans de nombreux pays africains, le service de la dette, quel que soit le niveau, est incompatible avec la réalisation des OMD. Il révèle qu'entre 1970 et 2002, l'Afrique a reçu 540 milliards de dollars en prêts, mais bien qu'elle ait remboursé près de 550 milliards de dollars en principal et en intérêts, elle affichait encore fin 2002 un encours de dette de 295 milliards de dollars. Les chiffres sont encore plus déconcertants pour l'Afrique saharienne, qui a reçu 294 milliards de dollars en prêts et a remboursé 268 milliards de dollars au titre de service de la dette et est toujours débitrice de quelque 210 milliards de dollars. Le rapport conclut que la poursuite du service de la dette constituerait un transfert inverse des ressources de la part du continent le plus pauvre dans le monde. C'est une question brûlante, a dit le Vice-président de la Commission Majdi Ramadan (Liban) à la Chronique. « La dette publique du Liban est immense et constitue un lourd fardeau qui nous empêche de prendre et de mettre en ouvre un grand nombre de décisions en matière de politique économique et étrangère. »

Les institutions financières internationales ont également attiré l'attention sur la crise de la dette. Reinhard Munzberg, représentant spécial du Fonds monétaire international auprès des Nations Unies, a affirmé que l'Initiative PPTE avait été récemment prolongée de deux ans, encourageant les pays éligibles à prendre les mesures nécessaires pour en tirer parti. Se félicitant de cette extension, il a dit à la Commission qu'il était vital de créer un cadre afin d'aider les pays à faible revenu à gérer leurs prêts et éviter d'accumuler une dette insoutenable.

Selon Martin Andjaba (Namibie), les pays en développement devaient prendre eux-mêmes en main leurs programmes de développement et compléter les efforts nationaux avec l'aide extérieure. Le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) est une initiative qui va dans ce sens. C'est une cadre stratégique, créé par cinq chefs d'État (Afrique du Sud, Algérie, Égypte, Nigeria, Sénégal) selon un mandat donné par l'Unité africaine en vue d'établir un cadre de développement économique intégré pour la région. La Namibie s'est engagée à investir dans son pays et a alloué 25 % de son budget à l'éducation et 15 % à la santé, a indiqué M. Andjaba.

Par un autre consensus sur la résolution concernant l'examen triennal des activités opérationnelles de développement du système des Nations Unies, l'Assemblée a appelé les pays donateurs à augmenter de manière significative leur contribution au budget ordinaire du l'ONU. Elle a également exhorté les organisations de développement à intensifier l'échange d'informations entre les institutions. « Cette résolution examinera les activités opérationnelles des fonds et des programmes des Nations Unies aux niveau national et du siège », a indiqué M. Balarezo. « Il est très important de renforcer le système de coordination au niveau national et d'accroître la cohérence de ces programmes car ils ont un impact direct sur les Objectifs du Millénaire pour le développement.

© Photo OMS/P. Virot
Autre question largement débattue dans la Deuxième Commission : l'élimination des subventions agricoles à l'exportation et la réduction des subventions à la production. Alors que le récent accord-cadre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) destiné à équilibrer les disparités économiques et commerciales était encourageant, la reprise des négociations du Cycle de Doha pourrait échouer si les membres de l'OMC étaient inflexibles, en particulier sur la question agricole, ont dit les délégués à la Commission. Plus de 10 millions de personnes en Afrique centrale et en Afrique de l'Ouest dépendent de la production de coton, une source importante en matière d'échanges extérieurs et de revenus pour des pays comme le Burkina Faso, le Mali et le Bénin. Selon la Banque mondiale, les coûts de production de coton dans la région sont parmi les plus bas. Or, malgré cet avantage, elle perd des parts du marché mondial et les producteurs de coton souffrent de la pauvreté à cause des subventions agricoles des pays industrialisés.

En 2004, contrairement aux années précédentes, la résolution sur « le commerce international et le développement » n'a pas fait l'objet d'un consensus avec 116 voix pour, 2 voix contre (États-Unis, Palau) et 6 abstentions (Australie, Canada, Israël, Japon, Nouvelle-Zélande, République de Corée). Aux termes du texte de la résolution, l'Assemblée devrait souligner l'importance d'un processus ouvert et transparent favorisant le fonctionnement du système commercial multilatéral qui permettrait une participation efficace des membres aux négociations commerciales. Lucy Tamly (États-Unis) a dénoncé le fait que « tous les ans, un groupe de pays ou un autre cherche à utiliser les négociations de l'OMC pour convaincre l'Assemblée générale d'appuyer une position particulière même lorsque d'autres pays s'y opposent », et a expliqué que c'était la raison pour laquelle son pays n'avait pas soutenu la résolution.

La Commission s'est également penchée sur le développement de la coopération commerciale « Sud-Sud », c'est-à-dire la promotion du commerce parmi les pays en développement. Le principe de base de cette coopération est que les pays en développement échangent leurs produits de base et leurs produits manufacturés, ce qui accroît le développement et améliore le commerce. Sans la participation des pays industrialisés, les prix de leurs produits sont plus avantageux. Paul Yaw Essel (Ghana) a dit à la Chronique que même si la coopération entre les pays du Sud améliorait les perspectives commerciales mondiales, elle avait des limites car « elle entraîne des contraintes du fait qu'un certain nombre de pays produisent plus ou moins les mêmes produits ». Cependant, a-t-il ajouté, les progrès technologiques de la Chine, de l'Inde et du Brésil pouvaient transformer ces obstacles et faire avancer la coopération commerciale internationale. La coopération Sud-Sud revêt même une dimension sous-régionale, comme le NEPAD, a-t-il également fait remarquer, qui a aidé les pays à s'associer, à créer un plus grand marché et à tirer avantage d'une économie d'échelle réelle ». Cependant les conflits qui ont éclaté en Afrique de l'Ouest ont limité les efforts dans le domaine du commerce international. Il est donc clair que « nous avons besoin d'instaurer la paix, la stabilité et une bonne gouvernance afin de nous unir et éliminer les soupçons et les rivalités qui nous divisent », a-t-il souligné.

En ce qui concerne les conflits, Paul Collier, directeur du Centre d'études des économies africaines et professeur d'économie à l'université d'Oxford, a dit dans son discours de présentation qu'environ deux guerres civiles éclataient chaque année, ce qui représentait une perte annuelle de 100 milliards de dollars. Le taux de croissance économique des pays qui étaient engagés dans un conflit civil chutait de 2 à 2,5 %, créant une situation économique catastrophique. « En revanche, la prévention des conflits pourrait assurer des gains économiques équivalant à trois fois le budget mondial pour lutter contre le VIH/sida », a-t-il indiqué.

Photo HCR/C.Schwetz
Une résolution sur le rôle des Nations Unies dans la promotion du développement dans le contexte de la mondialisation et l'interdépendance a également été adoptée sans vote. Elle met en avant la nécessité d'examiner les déséquilibres mondiaux, la concentration de l'innovation technique dans les pays industrialisés ainsi que d'autres questions, telles que l'augmentation du flux de l'investissement étranger direct et le renforcement de la participation des pays en développement dans les systèmes commerciaux et financiers mondiaux.

Dans son discours ayant pour thème « Assurer la cohérence pour réaliser les Objectifs du Millénaire pour le développement dans le contexte de la mondialisation », Amartya Sen, professeur à l'université Harvard et lauréat du prix Nobel d'économie en 1998, a déclaré qu'alors que la mondialisation économique avait apporté la prospérité à beaucoup, le défi était d'assurer l'accès des pauvres aux technologies modernes, aux médicaments à prix réduit et au marché ainsi qu'une plus grande participation à la prise de décision au niveau international. Selon lui, refuser l'économie de marché au profit d'une économie repliée sur elle-même, tel que le préconisent certains groupes antimondialistes, n'était pas une solution. Pour corriger les déséquilibres, il serait plus efficace de mettre en place des réformes politiques destinées à améliorer et à renforcer l'éducation de base, les droits fonciers et l'utilisation des terres, le microcrédit et les services de santé, a-t-il souligné.

Lors du débat, les responsables de l'ONU ont souligné les efforts réalisés pour s'attaquer aux catastrophes naturelles, à la désertification, au changement climatique et aux autres risques associés au développement, mettant l'accent sur la nécessité d'augmenter le soutien public et privé pour assurer un développement durable. La Commission a adopté deux résolutions sans vote : « Catastrophes naturelles et vulnérabilité » et « Stratégie internationale de prévention des catastrophes ». Jan Egeland, coordonnateur du secours d'urgence de l'ONU, a déclaré que le nombre de victimes de catastrophes naturelles avait plus que doublé au cours des dix dernières années et que les pertes économiques avaient plus que triplé. Introduisant un rapport sur les catastrophes naturelles et le phénomène El Niño, il a exhorté les gouvernements à contribuer à une nouvelle plate-forme internationale d'alerte rapide créée à Bonn, en Allemagne, sous les auspices de la Stratégie internationale de prévention des catastrophes. Les programmes d'éducation régionaux en Afrique, en Asie, en Amérique latine et dans les Caraïbes avaient appuyé les stratégies nationales et régionales de réduction des catastrophes ainsi que des partenariats pour sensibiliser le public.

La Commission a pris acte du rapport du Secrétaire général sur la mise en ouvre de la Stratégie internationale. Selon ce rapport, 700 catastrophes naturelles, qui ont fait 75 000 morts, touché 250 millions de personnes et entraîné des pertes économiques de plus de 65 milliards de dollars, ont eu lieu en 2003. La pauvreté, la dégradation de l'environnement et le manque de préparation ont joué un rôle majeur. Des mesures peu coûteuses et simples alliées à une allocation appropriée des ressources et à des structures institutionnelles solides étaient cependant disponibles pour réduire les conséquences des catastrophes.

En ce qui concerne les effets du développement sur le changement climatique, Joke Waller-Hunter, secrétaire exécutif de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, a noté l'augmentation des coûts économiques pour traiter les problèmes liés au réchauffement de la planète. Un point positif, cependant, a été la ratification par la Russie du Protocole de Kyoto visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre qui est entré en vigueur 90 jours après sa signature, a-t-il indiqué. À partir du 16 février 2005, en vertu du Protocole de l'ONU, un traité juridique contraignant, trente pays industrialisés sont tenus de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre d'environ 5 % par rapport à leurs émissions de 1990. Ils auront jusqu'en 2012 pour réaliser cet objectif.

Bien que la Deuxième Commission repose sur le consensus, la résolution intitulée « Souveraineté permanente du peuple palestinien dans le terri-toire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et de la population arabe dans le Golan syrien occupé sur leurs ressources naturelles », a été adoptée par 156 voix pour, 5 voix contre (États fédérés de Micronésie, États-Unis, îles Marschall, Israël, Palau) et 11 abstentions. Le représentant d'Israël a déclaré que le texte était « partial, trompeur et improductif », ajoutant que la Deuxième Commission n'était pas l'instance appropriée pour débattre de cette question et que « c'était une tentative de se détourner des priorités et des efforts de réforme de l'Assemblée ».

Dans son discours de clôture, M. Balarezo s'est dit satisfait de la cinquante-neuvième session, en particulier des débats interactifs entre les membres de la Commission et les responsables de haut niveau du Secrétariat qui avaient donné lieu à des recommandations importantes. « Nous avons la responsabilité de faire des recommandations appropriées. C'est pourquoi la Deuxième Commission prend des décisions majeures et a un impact direct sur la réalisation des OMD ».
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