Chronique ONU

« Ne faites rien pour nous sans nous »
Reconnaître les droits des personnes handicapées

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L'article
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Environ 10 % de la population mondiale sont handicapés suite à une déficience mentale, physique ou sensorielle, dont environ 80 % vivent dans les pays en développement. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), le nombre d'handicapés dans le monde ne cesse d'augmenter. La croissance démographique, les progrès médicaux qui prolongent la vie, les blessures de guerre, les mines terrestres, le sida, la malnutrition, la toxicomanie, les accidents et les problèmes liés à l'environnement contribuent à ce phénomène. Il est devenu de plus en plus clair que les handicapés devraient être perçus comme des personnes pouvant exercer tout l'éventail des droits civils, politiques, sociaux, culturels et économiques. Les obstacles physiques ou sociaux limitent leur vie, les empêchent souvent d'avoir accès aux services essentiels, ce qui a des conséquences non seulement sur les handicapés et leur famille mais aussi sur le développement économique et social des sociétés où un important réservoir de compétences est inexploité.

Les handicaps étant fréquemment causés par des activités humaines ou un manque de soins, l'aide de la communauté internationale est nécessaire pour mettre fin à cette « urgence silencieuse ». Certes, le processus est lent, mais il commence à toucher toutes les parties du monde. Le développement du mouvement international des handicapés, avec sa devise « Rien ne se fera pour nous sans nous », montre que la perspective a changé pour prendre en considération la participation et l'intégration des handicapés dans chaque aspect de la vie politique, sociale, économique et culturelle. À l'occasion de la Journée internationale 2004 des handicapés, célébrée le 3 décembre, le Secrétaire général a souligné qu'« aucune société ne peut prétendre reposer sur les principes d'égalité et de justice si les handicapés n'y ont pas voix au chapitre au même titre que tous ses autres membres ».

Tout le monde ne s'accorde pas sur la définition du handicap. Aujourd'hui, le handicap est considéré comme un problème créé par la société et non pas comme un attribut d'une personne. La perspective sociale est reflétée dans la classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé de l'OMS qui définit le handicap comme une expérience humaine universelle et non pas comme un problème d'une minorité : tout être humain peut être atteint d'une déficience médicale et, donc, souffrir d'un handicap. Le vieux « modèle médical » du handicap a été remplacé par le modèle des droits de la personne humaine, reconnaissant que c'est la société qui désavantage les handicapés en les empêchant d'exercer leurs droits de l'homme. Les multiples formes de handicap et la réalisation qu'il fait inévitablement partie de la vie de tous ou de toute société nécessitent que son concept soit lié à la dignité humaine.

Aucun traité n'a encore été créé pour protéger les droits des personnes handicapées, qui sont seulement couverts implicitement par les traités des droits de l'homme. Parmi les huit traités de base de l'ONU, seule la Convention des droits de l'enfant fait une référence explicite aux enfants handicapés. Les déclarations et les principes qui traitent des droits des handicapés sont juridiquement contraignants et sont considérés comme inadéquats par un grand nombre de défenseurs des handicapés, ce qui reflète un changement dans la manière dont les sociétés sont organisées et ont favorisé l'intégration des handicapés. Avec le vieillissement de la population, le nombre de handicapés risque d'augmenter, d'où l'importance de créer un traité.

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En 2001, le Président mexicain, Vicente Fox, a proposé à l'Assemblée générale de l'ONU un projet de convention sur les droits des personnes handicapées. L'Assemblée a créé un comité spécial chargé d'élaborer « une convention internationale globale et intégrée pour la protection et la promotion des droits et la dignité des personnes handicapées ». Comme dans le cas des autres conventions internationales élaborées par les Nations Unies, les 191 États Membres rédigent le traité, lequel est juridiquement contraignant une fois qu'il est ratifié. La participation active des handicapés à l'élaboration de la convention illustre parfaitement comment le principe de pleine participation peut être mis en pratique et contribuer au développement de sociétés véritablement inclusives. Une caractéristique unique de ce projet à l'étude est que le processus est ouvert, consultatif et accessible aux personnes handicapées et aux ONG représentatives qui apportent leur expertise unique. Présidé par l'ambassadeur de l'Équateur, Luis Gallegos, le Comité spécial vient de terminer sa quatrième session et a soumis son rapport à l'Assemblée générale.

M. Gallegos a indiqué que le défi de la convention était d'articuler les droits humains et les pratiques associées afin que les besoins spécifiques des handicapés soient reflétés dans les dispositions juridiques d'un traité. Selon lui, le processus de consultation des parties intéressées, ainsi que le partenariat entre les gouvernements et les organisations des handicapés, était essentiel au succès de la convention.

Il a souligné que malgré la nature complexe du problème, les négociations avaient créé un élan qui, espérait-il, pourraient permettre de soumettre le traité à l'Assemblée générale pour adoption en septembre 2005, en même temps qu'aura lieu le suivi de la mise en ouvre des Objectifs du Millénaire pour le développement. « Si nous manquons cette cible », a-t-il expliqué, nous perdrons notre élan et « cela nous prendra beaucoup plus de temps ». La prochaine réunion du Comité spécial est prévue du 24 janvier au 4 février 2005.

Une fois adoptée, la Convention internationale globale et intégrée pour la protection et la promotion des droits et de la dignité des handicapés établirait un cadre juridique contraignant au sein d'un instrument universel unique, permettant aux handicapés de devenir « détenteurs de droits » et « citoyens à part entière » et de participer pleinement à l'élaboration et à la mise en ouvre des projets et des politiques les concernant. Elle viserait également à promouvoir la compréhension du handicap et à changer la manière dont la société perçoit les handicapés.

La discrimination à l'égard des handicapés
Les handicapés sont souvent exclus de la société et privés de leurs droits humains. La discrimination à leur égard se manifeste sous différentes formes, allant du manque d'opportunités à la ségrégation en passant par l'isolement, à cause d'obstacles physiques et sociaux qui leur sont imposés dans des domaines comme l'éducation, l'emploi, le logement, les transports, la vue culturelle et l'accessibilité aux lieux et aux services publics. La distinction, l'exclusion, la restriction ou le traitement préférentiel, et le refus d'accès à des logements abordables en raison du handicap, en sont la cause, niant ou entravant la reconnaissance, la jouissance ou l'exercice des droits des handicapés.

Le handicap a des conséquences sérieuses en particulier pour les femmes. En effet, elles vivent une double discrimination en tant que femmes et en tant que handicapées. Les femmes risquent davantage de souffrir d'un handicap à cause du manque de soins ou de certaines formes de violence et de pratiques traditionnelles nuisibles à leur santé. Elles ont moins accès aux services de base, tels que les soins de santé, l'éducation et la rééducation professionnelle. Et ce sont elles qui assument les lourdes responsabilités comme s'occuper des handicapés de la communauté.

Malgré certains progrès réalisés au cours de la dernière décennie, les droits humains des handicapés n'ont pas été abordés de manière systématique dans la société. La plupart des lois et des politiques ayant trait aux handicapés sont fondés sur la supposition que ceux-ci ne peuvent pas exercer les mêmes droits que les autres citoyens. Leur situation est, par conséquent, souvent évaluée en termes de rééducation et de services sociaux. Une législation plus complète est nécessaire pour garantir leurs droits sous tous leurs aspects sur un pied d'égalité avec les autres personnes. Des mesures appropriées sont impératives afin d'examiner les formes de discrimination existantes et de donner aux handicapés les opportunités pour qu'ils participent à la vie sociale et au développement au même titre que les autres.

Certaines barrières culturelles et sociales ont également servi à empêcher leur pleine participation. Les pratiques discriminatoires à leur égard sont parfois causées par des normes sociales et culturelles établies par la loi. Le changement dans la perception et la représentation des handicapés nécessitera à la fois un changement d'attitude et une meilleure compréhension à tous les niveaux de la société, ainsi qu'un examen des normes sociales et culturelles qui perpétuent des mythes erronés.
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