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Actualités/Désarmement
Tout aussi dangereux que la cigarette
Par Luis Alfonso de Alba

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L'article
Photo: Mikel Flamm
L'attention soutenue accordée depuis ces dernières années au problème de la fabrication, du transfert et de la circulation illicites des armes légères et de petit calibre, ainsi que de leur accumulation excessive, a permis d'accomplir des progrès importants, particulièrement au niveau régional. Il reste cependant beaucoup à faire dans le développement et la mise en ouvre des programmes, des politiques et des mesures législatives efficaces visant à combattre, à prévenir et à éliminer la prolifération de ces armes.

La reconnaissance de l'ampleur du problème, ainsi que de son caractère global et multidimensionnel, a été un point fort de la Conférence des Nations Unies de 2001 sur le commerce illicite des armes légères et de petit calibre sous tous ses aspects et une étape décisive vers une entreprise collective fondée sur le principe de la responsabilité partagée. La compréhension globale du problème, non seulement du point de vue du désarmement mais aussi en tant qu'instrument permettant de combattre la criminalité et le terrorisme ainsi que de protéger les droits de l'homme et le droit humanitaire, nous a amenés à travailler simultanément dans différents domaines et forums.

L'heure est donc venue d'adopter des mesures pour contrôler et, dans certains cas, interdire la fabrication, le commerce, l'acquisition et la possession de ces armes par les gouvernements et les personnes, y compris par la création d'instruments juridiquement contraignants, de politiques et d'actions communes et le renforcement de la coopération internationale dans ce domaine.

Dans ce contexte, il est important de déterminer les questions cruciales qu'il reste à résoudre, telles que l'établissement d'un système mondial de marquage et de traçage des armes légères, la nécessité de mettre en place une législation universelle afin de contrôler les activités des courtiers en armes et des autres intermédiaires, l'établissement de limites strictes ou l'interdiction de transferts et d'autres transactions à partir d'un État ou entre ce dernier et des acteurs non étatiques. En matière de contrôle des armes légères, le marquage est essentiel car il permet d'identifier et de suivre leur trace, tel que convenu par tous les États, même par ceux qui sont contre l'instauration d'un marquage standard. Il est donc urgent de réaliser des progrès dans ce domaine.

Au niveau régional, la Convention interaméricaine contre la fabrication et le trafic illicites des armes à feu, des munitions, des explosifs et d'autre matériel connexe a joué un rôle important en exigeant le marquage du nom du fabricant, du lieu de fabrication et le numéro de série au moment de la fabrication, le nom et l'adresse des personnes engagées dans l'importation des armes à feu ainsi que le marquage approprié de toutes les armes à feu confisquées ou saisies.

Le Protocole contre la fabrication et le trafic illicites des armes à feu, négocié à Vienne à la suite d'un long différend avec la Chine, a autorisé deux méthodes de marquage au moment de la fabrication au lieu de proposer l'établissement d'une norme. Cet instrument a accepté tout autre marquage unique et facile à utiliser comportant des symboles géométriques simples combinés à un code numérique et/ou alphanumérique permettant à tous les États d'identifier facilement le pays de fabrication.

Le Programme d'action adopté lors de la Conférence de 2001 n'a pas résolu le problème, car il demandait seulement de s'assurer que les fabricants autorisés procèdent en cours de production à un marquage approprié et fiable, notant que ce marquage devrait être unique, identifier le pays de fabrication et fournir des informations permettant aux autorités nationales de connaître le fabricant et le numéro de série afin de pouvoir identifier chaque arme et d'en suivre la trace. Il est donc important de souligner les travaux actuels du Groupe d'experts gouvernementaux sur le traçage des armes légères, établi par l'Assemblée générale, ainsi que la nécessité de négocier un instrument d'application universelle contraignant.

Dans le cadre du Programme d'action, les États parties s'engagent à " adopter une position commune concernant les principales questions et l'ampleur des problèmes liés au courtage illicite des armes légères en vue de prévenir, de combattre et d'éliminer les activités des courtiers ".

Au cours des dernières années, cet engagement a fait l'objet de plusieurs débats officieux mais il est indispensable qu'il se matérialise par le biais d'une proposition concrète qui permettra d'adopter une politique et une législation communes afin de contrôler les activités des courtiers, qui sont souvent difficiles à localiser, et pouvoir ainsi identifier le pays de juridiction. Les courtiers et les autres intermédiaires autorisés reconnaissent la nécessité des contrôles, conscients de l'importance de leurs activités en matière de réduction du commerce illicite des armes légères. Leur coopération, ainsi que celle des fabricants, est très importante dans l'identification des personnes engagées dans des activités criminelles.

La question de l'acquisition et de la possession d'armes légères par des civils a été examinée lors de la Conférence de 2001, mais certains pays, particulièrement les États-Unis, ont fait clairement savoir qu'ils n'accepteraient aucune forme de contrôle ou de limite, refusant même d'examiner ces questions au niveau national. La version préliminaire proposait seulement aux États d'envisager l'interdiction du commerce illimité et de la possession individuelle d'armes légères spécialement conçues à des fins militaires. Une version révisée reconnaissait même explicitement que cela ne porterait pas atteinte aux activités sportives telles que le tir, la chasse et d'autres formes de possession et d'usage d'armes autorisées par les États.

Pourtant, des restrictions ont été mises en ouvre dans presque tous les États membres, les pays du monde entier reconnaissant la nécessité d'établir un contrôle des armes. Les civils ne peuvent pas posséder n'importe quel type d'armes, et en nombre illimité, sans représenter un danger pour autrui. Les abus et les accidents sont nombreux et l'absence de limites favorise également le trafic illicite par les organisations criminelles, mettant en danger la sécurité des États. Il est temps que ces armes soient considérées comme étant tout aussi dangereuses que la cigarette ou les somnifères.

Les transactions entre les États et les acteurs non étatiques ne sont pas autorisées dans le cadre de la Convention de l'Organisation des États américains (OEA), même si ce point n'a pas été explicitement approuvé. L'article 9 de cet instrument, concernant l'exportation, l'importation et les licences ou les autorisations de transit, indique clairement que les transactions légales ne peuvent avoir lieu qu'entre États, ou entre eux et des personnes dûment autorisées par un État. Au cours des négociations de Vienne portant sur le Protocole, un accord différent a été obtenu à la fin même du processus, un consensus n'étant pas possible sans qu'une formulation soit acceptée, qui prenait en compte la demande des États-Unis et de la Chine de laisser la porte ouverte à de tels transferts ou à de telles transactions dans des circonstances exceptionnelles. Le Programme d'action ne fait aucune mention de cette question, quelques pays seulement s'étant fortement opposés à une proposition acceptée par une large majorité, engageant les États membres à fournir des armes légères seulement aux gouvernements, soit directement soit par l'intermédiaire d'agents autorisés à se procurer des armes au nom des gouvernements.

La biographie
Luis Alfonso de Alba est ambassadeur et représentant adjoint permanent du Mexique auprès des Nations Unies depuis mars 2002. Membre du Service extérieur mexicain depuis 1981, il a été directeur général pour les Nations Unies au Ministère des Affaires étrangères et représentant permanent adjoint auprès de l'Organisation des États américains, à Washington. Il a participé à de nombreuses réunions internationales et régionales.
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