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Produits pharmaceutiques
Améliorer l'égalité d'accès aux médicaments
Par Eric Noehrenberg

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L'article
L'accès des pays en développement aux médicaments est une question cruciale. La santé est vitale pour le développement économique des nations, et l'un des plus importants devoirs des gouvernements est de promouvoir la santé de leurs populations. Alors que les produits pharmaceutiques sont un moyen efficace et pratique de promouvoir la santé, il n'est pas surprenant que l'accès aux médicaments soit un sujet qui suscite des débats ardents et dont les enjeux politiques sont considérables. Il est donc important de comprendre les facteurs actuels qui entravent cet accès et de chercher comment améliorer celui-ci pour le bénéfice des populations du monde entier. L'accès des pays pauvres aux médicaments de qualité est une question particulièrement importante car ce sont eux qui sont le plus touchés par les maladies telles que le sida, la tuberculose et le paludisme. Pour pouvoir répondre efficacement aux besoins spécifiques de ces pays, la création de partenariats d'acteurs issus de tous les secteurs est indispensable.

Photo ONU
L'industrie pharmaceutique mondiale fondée sur la recherche, que représente la Fédération internationale des associations des industries pharmaceutiques (IFPMA), apporte son appui aux efforts entrepris pour améliorer l'accès aux médicaments essentiels dans les pays en développement, spécialement les plus pauvres. En fait, cette industrie a fourni environ 2 milliards de dollars de médicaments depuis 1998, contribution nettement supérieure à celles de certains pays industrialisés. Ces initiatives et ces partenariats ont permis de sauver des dizaines de millions de vies dans le monde.

Par exemple, le programme MECTIZAN®, lancé par Merck, a permis de sauver plus de 30 millions de personnes atteintes de la cécité des rivières. La distribution gratuite de 50 millions de vaccins anti-polio par Aventis Pasteur a joué un rôle central dans l'effort mondial mené pour éliminer la polio dans le monde — un objectif qui est désormais près d'être atteint grâce à des partenaires tels que Rotary International, l'Organisation mondiale de la santé (OMS), Aventis et d'autres encore. Dans la lutte contre la pandémie du sida, le programme Accelerating Access Initiative (AAI) a permis de faciliter l'accès au traitement antirétroviral en Afrique, le continent le plus sévèrement touché par la pandémie. AAI est l'une des premières initiatives lancées pour exploiter les ressources et l'expertise des secteurs public et privé afin de répondre efficacement aux défis posés par le sida. Cette initiative est un effort coordonné de six laboratoires pharmaceutiques (Abbott Laboratories, Boehringer-Ingelheim, Bristol-Meyers-Squibb, GlaxoSmithKline, Merk & Co. Ldt., F. Hoffmann-La Roche) et cinq institutions de l'ONU (ONUSIDA, OMS, Fonds de l'ONU pour l'enfance, Fonds de l'ONU pour la population, Banque mondiale).

Elle est lancée dans plus de vingt pays et 80 autres ont formulé le désir d'y prendre part.

Boehringer-Ingelhein fournit gratuitement aux gouvernements des pays en développement son antirétroviral, VIRAMUNE®, dans le cadre de ses programmes destinés à prévenir la transmission du VIH entre la mère et l'enfant. D'autres laboratoires internationaux offrent à ces pays leurs médicaments anti-sida au prix coûtant, à un prix inférieur ou même gratuitement.

Ces efforts ont été particulièrement bénéfiques pour les pays pauvres et ont permis d'améliorer l'accès de leurs populations à ces traitements. De plus amples détails concernant ces programmes lancés par les partenariats, ainsi que de nombreux autres, se trouvent sur le site de l'IFPMA (http://www.ifpma.org).

Ces initiatives ont amélioré la distribution des médicaments essentiels, mais elles ont également révélé les obstacles à surmonter pour améliorer et promouvoir l'égalité d'accès entre et dans les pays. Il est particulièrement urgent d'augmenter les fonds consacrés aux soins de santé et de développer l'infrastructure de nombreux pays en développement. En effet, l'expérience a montré que même si les médicaments sont fournis gratuitement, une infrastructure de base est nécessaire pour les distribuer à ceux qui en ont besoin. Trois priorités doivent donc être établies :

L'octroi de fonds supplémentaires pour les pays en développement à revenu faible. Les pays pauvres, dont certains ont un revenu par habitant inférieur à un dollar par jour, ont d'énormes difficultés à fournir des soins de santé à leurs populations. Même si les médicaments sont gratuits, il faut assurer leur transport, la gestion des soins et leur suivi, ces coûts étant parfois au-delà des moyens dont disposent les autorités sanitaires publiques. Il est donc important que les donateurs internationaux et bilatéraux renforcent leur soutien aux pays pauvres en améliorant leurs systèmes de santé. Les experts ont estimé qu'une aide supplémentaire de plus de 10 milliards de dollars par an était nécessaire pour combattre le sida. Par ailleurs, le nouveau Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, utilisé et géré efficacement, pourrait jouer un rôle important dans la construction de capacités de soins de santé dans les pays pauvres. Les initiatives entreprises par les partenariats joueront un rôle essentiel.

Une plus grande priorité accordée aux soins de santé au niveau national. L'engagement des gouvernements à améliorer les soins de santé est un élément essentiel des tentatives visant à améliorer la distribution des médicaments dans les pays. Cependant, les populations, même dans les pays en développement à revenu moyen, ne disposent pas des médicaments dont elles ont besoin, souvent en raison de l'inégalité d'accès aux établissements de santé. Par exemple, les populations rurales risquent d'être défavorisées si les hôpitaux et les dispensaires sont concentrés dans les centres urbains.

Il est clair que dans les budgets et les dépenses gouvernementales, le financement des soins de santé est trop souvent relégué au second plan. Par exemple, le gouvernement de l'Afrique du Sud, bien que n'étant pas en conflit avec ses voisins, a dépensé plusieurs milliards de dollars en 2000 pour la construction de nouveaux sous-marins, alors qu'une majorité de la population n'avait (et n'a toujours pas) pas accès aux traitements antirétroviraux, des laboratoires ayant pourtant proposé de fournir des médicaments à un prix abordable ou même gratuitement.

Engagement à fournir des médicaments de qualité et à assurer une utilisation efficace et adéquate de ceux-ci. Par " accès aux médicaments ", on entend égalité d'accès aux médicaments de qualité conformes aux normes internationales de sécurité, d'efficacité et de qualité. L'industrie pharmaceutique fondée sur la recherche s'est engagée à fournir des médicaments qui satisfont aux normes les plus strictes pour la sécurité du patient — nos laboratoires ne fabriquent pas des médicaments de mauvaise qualité sous prétexte qu'ils sont destinés aux pauvres ni n'appliquent une politique de deux poids deux mesures. De plus, les sociétés multinationales assurent une surveillance du marché pour répondre aux effets néfastes possibles. Finalement, cette industrie consacre d'importantes ressources afin de former les professionnels de la santé sur les bénéfices et l'utilisation adéquate de ses médicaments. Tous ces efforts convergent vers l'amélioration de la qualité des soins de santé dans le monde, y compris dans les pays en développement, et faciliteront l'accès des pauvres aux médicaments de qualité.

Les efforts menés pour améliorer la distribution des médicaments et l'égalité d'accès exigent donc un engagement ferme, une expertise et des ressources d'une variété de partenaires : organisations internationales, donateurs bilatéraux et multilatéraux, autorités nationales, entreprises du secteur privé, y compris les laboratoires pharmaceutiques et les organisations non gouvernementales. Des partenaires potentiels sont cependant absents du débat — les fabricants de médicaments génériques. Tandis que le débat sur l'accès et l'égalité d'accès a porté en grande partie sur les nouveaux médicaments brevetés, le problème concerne, en fait, les médicaments non brevetés. En effet, plus de 95 % des médicaments figurant sur la liste des médicaments essentiels de l'OMS, liste de médicaments considérés comme importants pour la majorité de la population des pays en développement, ne sont pas protégés par des brevets. D'ailleurs, les médicaments brevetés dans les pays industrialisés ne le sont pas nécessairement dans les pays à revenu faible ou moins avancés, certaines entreprises ayant pris la décision de ne pas les faire breveter en raison de considérations commerciales ou de la politique de l'entreprise.

Par exemple, le professeur Amir Attaran, de l'université de Harvard, a clairement montré dans un article de référence [" Do Patents for Antiretroviral Drugs Contains Access to AIDS Treatment in Africa? ", Journal of the American Medical Association, vol. 286, n° 15, 17 octobre 2001] que les antirétroviraux n'étaient pas brevetés dans un grand nombre de pays sub-sahariens. Et pourtant, la population de ces pays n'a pas accès aux médicaments essentiels. En Inde, par exemple, où plus de 22 000 fabricants locaux produisent des médicaments non brevetés, la population connaît d'importants problèmes d'accès. Cela démontre donc la nécessité de surmonter ces obstacles. Cependant, si l'on veut promouvoir davantage l'égalité d'accès, les fabricants de médicaments génériques pourraient jouer un rôle majeur en produisant des versions génériques des médicaments non brevetés dans les pays pauvres ou même en transférant les technologies dans les pays à revenu faible afin de promouvoir l'essor de l'industrie des médicaments génériques de qualité.

Finalement, un aspect essentiel et souvent négligé concerne la création de nouveaux médicaments. Les produits innovants susceptibles de fournir de nouveaux traitements sont extrêmement importants pour la santé publique. En outre, les médicaments plus faciles à administrer ou les traitements plus efficaces peuvent permettre aux autorités de la santé publique de venir en aide à un plus grand nombre de personnes. Mais, pour ce faire, des lois efficaces sur la protection des inventions, tels que les brevets, sont indispensables, car elles fournissent les incitations et la protection nécessaires pour poursuivre l'innovation de produits. En stimulant la recherche et la mise au point de médicaments efficaces, les droits de propriété intellectuelle assurent une plus grande égalité d'accès, avec une production de médicaments plus importante et un portefeuille de médicaments mieux à même de répondre aux besoins de santé publique.

L'égalité d'accès aux médicaments est une question complexe qui nécessite la collaboration de nombreux partenaires. À cet égard, l'industrie pharmaceutique fondée sur la recherche s'est engagée à poursuivre ses efforts. Il est également important de se pencher sur les obstacles réels qui entravent l'accès. C'est ce à quoi nous nous employons, avec la collaboration des organisations internationales, des gouvernements nationaux et des responsables de la société civile, afin que les populations défavorisées puissent bénéficier des médicaments.
La biographie
Eric Noehrenberg est directeur chargé des questions relatives au commerce et au marché international à l'IFPMA. Il a travaillé à ONUSIDA, où il a collaboré à la mise en place de partenariats avec le secteur privé et mené des négociations avec celui-ci. Il est l'auteur de nombreux articles sur la propriété intellectuelle et les questions de santé.
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