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Le développement durable mondial :
la responsabilité des entreprises

C’est aussi dans l’intérêt des entreprises

Par Wolfgang Sauer

Dans le village de Shia Huang Loui, en Chine, un enfant est vacciné dans une clinique recevant l’appui de l’UNICEF. (Photo reproduite avec l’autorisation de l’UNFIP/Robert Lemoyne)

Peut-on espérer que l’économie mondialisée améliore la vie des pauvres ? Oui et non. Tout dépend du comportement des pays capitalistes, non seulement des pays riches mais aussi des classes dirigeantes des pays pauvres, qui se montrent souvent peu enclines à encourager les investissements étrangers de peur de perdre le contrôle économique dans leur pays.

Pour y parvenir, la liberté sera indispensable, dans tous les sens du terme - la liberté d’une société démocratique qui fonctionne, contrôle et combat la corruption, spécialement dans les pays qui devraient promouvoir les investissements pour la création d’entreprises privées. L’expérience a montré que ces investissements, qui créent des emplois, favorisent un comportement social responsable, fournissent une formation aux employés et créent un environnement humain, doivent également avoir des garanties :

  • une garantie d’investissement;
  • un accord international en matière d’impôts;
  • un environnement éthique positif dans le cadre de leur responsabilité; et
  • une coopération ouverte avec les gouvernements et les autorités locales pour améliorer la vie dans la région.
Ces garanties ne peuvent exister que dans des sociétés respectueuses de la liberté d’expression, qui est le fondement de la démocratie et donc de la richesse. Il est indiscutable que le capitalisme a une obligation morale de contribuer à la résolution des problèmes mondiaux.

La liberté est la garantie de la propriété, qui est la base de la mondialisation ! Mais pour maintenir la liberté, il faut faire preuve de vigilance. Il faut éviter à tout prix que la mondialisation engendre un chaos social, où les pays riches s’enrichissent et les pauvres s’enlisent dans la pauvreté. L’écrivain mexicain Carlos Fuentes exprime le dilemme en ces termes : " Si elle est dirigée, la mondialisation sera bénéfique pour tous, sinon, elle accentuera les inégalités. "

Réduire le nombre de pauvres est l’un des défis les plus importants du développement durable et un engagement que les États et les organisations internationales doivent assumer. Je pense que les entreprises sont prêtes à participer à cet effort mondial.

Pourquoi les entreprises sont-elles un partenaire important ? À mon avis, les entreprises sont les grandes bénéficiaires de l’économie capitaliste. Grâce à leur forte productivité, elles ont prospéré et acquis un pouvoir tel, spécialement dans les années 1990, qu’elles sont, de nos jours, les organisations les plus productives du monde moderne. Ce profond changement économique et social est dû à l’utilisation de nouvelles compétences administratives. Peter Drucker a dit que la gestion était la fonction la plus importante de la société moderne et, dans ce domaine, les entreprises excellent plus que tout autre.

Quel rôle les entreprises peuvent-elles donc jouer ? En règle générale, elles peuvent chercher à stimuler la croissance économique : premièrement, en développant des activités et des marchés dans leur secteur, c’est-à-dire créer des emplois et des richesses; deuxièmement, en soutenant les initiatives d’aide, spécialement dans le troisième secteur.

C’est également l’occasion pour les entreprises de montrer pourquoi elles sont des leaders, une occasion de mettre à profit leurs compétences pour réduire la pauvreté et améliorer la situation de l’emploi ainsi que les ressources pour le bien de tous.

Je pense que la contribution des citoyens aux questions d’intérêt public a considérablement changé depuis le début du capitalisme. À cette époque, les dons offerts par Ford, Carnegie et Rockfeller étaient destinés aux hôpitaux, aux bibliothèques et aux universités. Par rapport à la philanthropie traditionnelle, il existe aujourd’hui de nouvelles stratégies pour aider les pauvres. Par exemple, la Bill and Melinda Gates Foundation, qui finance des programmes internationaux de vaccination et de santé pour les enfants, ou la Turner Foundation, qui soutient des programmes internationaux de santé pour les enfants ainsi que des programmes environnementaux.

Il faut créer un environnement favorable à la création d’entreprises. Dans la plupart des pays, le parcours administratif est si complexe qu’il décourage les créateurs d’entreprises qui, dans de nombreux cas, choisissent l’illégalité. Les gouvernements peuvent simplifier ces procédures. Il est vrai que le mode de fonctionnement des institutions publiques peut être désavantageux pour les pauvres. Aussi, est-il fréquent, par exemple, que ces derniers ne profitent pas des investissements publics dans les domaines de l’éducation et de la santé. C’est dans ces secteurs que les entreprises peuvent apporter leur aide. Les chefs d’entreprise, par exemple, peuvent utiliser les méthodes qui leur ont permis de réussir et les appliquer d’une manière rationnelle à la création de services sociaux. Cela signifie non seulement consacrer un certain temps à la recherche avant de dépenser l’argent mais aussi créer des programmes dûment élaborés et participer à leur exécution. Une comptabilité efficace et la vérification des résultats sont également essentielles.

C’est peut-être par le biais de fondations privées et d’organisations non gouvernementales que les entreprises peuvent le mieux organiser l’aide. Dans une ONG, les chefs d’entreprise peuvent appliquer leur savoir-faire et apporter des changements dans notre monde « sous-administré » de manière chronique. Le champ d’action des ONG est pratiquement illimité. En raison de son caractère neutre, le troisième secteur, qui participe à des projets d’intérêt public, peut jouer un rôle efficace dans n’importe quel projet. Dans ce cadre, les entreprises peuvent apporter une contribution importante : aider à construire la capacité des organisations à but non lucratif afin qu’elles fonctionnent de manière autonome. Pour être efficaces, les ONG doivent être prêtes non seulement à gérer leurs finances mais aussi à résoudre les problèmes sociaux à moindres coûts. Faut-il que je rappelle une fois de plus l’importance d’une bonne administration ?

À mon avis, l’éducation publique est cruciale. Pour être compétitif dans une économie moderne, il faut avoir à son actif au moins huit ans d’études. Au Brésil, 30 % de la population de plus de 15 ans sont analphabètes, n’ont fait que quatre ans d’études et ont des difficultés à lire et à écrire. Si le but de l’administration publique est d’atteindre « zéro illettrisme », le défi des entreprises est d’assurer à 100 % la formation professionnelle.

Pourquoi les entreprises privées devraient-elles s’engager à participer aux actions d’aide ? Certes, pour des raisons humanitaires mais aussi dans leur propre intérêt. Au fond, c’est la raison qui a motivé Henri Ford à augmenter les salaires de ses employés, leur donnant ainsi les moyens d’acheter ses voitures. Les pauvres d’aujourd’hui devraient être les consommateurs de demain. En outre, les salariés compétents et diplômés sont de plus en plus nécessaires pour assurer la croissance. Au Brésil, les banques offrent leurs services aux personnes « sans importance », ce qui inclut des groupes importants de la population au processus de modernisation. Une telle initiative favorisera sans aucun doute le développement des marchés. Il existe, bien sûr, de nombreux autres domaines où les entreprises peuvent apporter leur contribution. Mais l’éducation est l’un des meilleurs outils qui permet d’atteindre un développement durable mondial.


Liens:
United Nations Global Compact


Wolfgang Sauer est membre du Conseil consultatif pour le Programme Global Compact des Nations Unies et Ambassadeur de l’Ordre souverain de Malte au Brésil. Il a été Président de Volkswagen et d’Autolina au Brésil et en Argentine.




Ordre du jour 2002

À bien des égards, la situation mondiale actuelle est très différente de celle du Sommet Planète Terre de 1992 - alimentée par les décisions des gouvernements de libéraliser le commerce et les marchés des capitaux, et accompagnée par la privatisation et la dérégulation des activités économiques ainsi que par le développement rapide des technologies de l’information et de la communication - a rapidement changé le contexte économique mondial. La production annuelle de l’économie mondiale est passée de 31 trillions de dollars en 1990 à 42 trillions en 2000, comparé à tout juste 6,2 trillions en 1950, ce qui a permis de créer de nouveaux emplois et d’augmenter la consommation. Par exemple, le nombre de connections téléphoniques sont passées de 520 millions de en 1990 à 844 millions en 1998, soit une augmentation de 62 %.

Les gouvernements ont employé des mesures incitatives économiques aussi bien que réglementaires pour améliorer la consommation et la production, telles que les taxes écologiques, les droits de la pollution, des permis négociables pour les émissions polluantes et l’utilisation de l’eau, des systèmes de remboursement et de consigne pour la gestion des déchets, des amendes de non-conformité, des garanties de bonne exécution, et les codes de conduite d’application facultatives.

Les entreprises ont commencé à employer des méthodes de production plus propres et plus efficaces sur le plan écologique et à réduire leur pollution et les autres impacts sur l’environnement grâce à une conception, un emballage et un étiquetage écologiques.

Le public est de plus en plus conscient de ses responsabilités en tant que consommateur et des choix qui s’offrent à lui. En plus de la pratique de plus en plus répandue des trois « R » - réduction, réutilisation et recyclage -, on accepte de payer davantage pour des produits biologiques et qui respectent l’environnement.

Les propositions et recommandations du rapport Action 21 lancé par le Secrétaire général comprennent en autres :
  • cesser les subventions qui exercent des effets de distorsion sur le marché et améliorer l’accès aux marchés des pays développés des produits et des services en provenance des pays en développement, particulièrement les produits pour lesquels ces pays ont un avantage compétitif, tels que les produits de l’agriculture et les textiles;
  • éliminer les accords qui autorisent les pays les moins développés à exporter sans quotas et sans taxes;
  • renforcer l’Organisation mondiale du travail afin de garantir un cadre à un système commercial international, ouvert, équitable et non discriminatoire;
  • aider les pays en développement à combler le fossé numérique;
  • multiplier par quatre l’efficacité énergétique et des ressources dans les pays développés au cours des deux ou trois prochaines décennies, et, éventuellement, multiplier par dix l’efficacité des ressources dans les pays développés;
  • accroître la responsabilité des entreprises grâce à des initiatives comme le Pacte mondial et l’Initiative mondiale sur les rapports de performance et des outils comme la comptabilité de la gestion de l’environnement et l’établissement de rapports sur l’environnement pour offrir des incitations au secteur industriel et aux institutions publiques afin d’améliorer la recherche et le développement des technologies moins polluantes;
  • promouvoir les modes de consommation viables grâce à l’action gouvernementale, y compris la comptabilité nationale « verte », la réforme fiscale favorisant la conservation des ressources et les politiques d’achat « verts ».

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