52/137 Situation des droits de l'homme au Myanmar
Date: 12 décembre 1997
Adoptée sans vote
Séance plénière: 70ème
Rapport: A/52/644/Add.3

L'Assemblée générale,

Réaffirmant que tous les États Membres ont l'obligation d'assurer le respect et la défense des droits de l'homme et des libertés fondamentales consacrés dans la Charte des Nations Unies et énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme1/, les Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme2/ et d'autres instruments relatifs aux droits de l'homme,

Sachant que, conformément à la Charte, l'Organisation favorise et encourage le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous et que la Déclaration universelle des droits de l'homme énonce que la volonté du peuple est le fondement de l'autorité des pouvoirs publics,

Rappelant sa résolution 51/117 du 12 décembre 1996,

Rappelant également la résolution 1992/58 de la Commission des droits de l'homme, en date du 3 mars 19923/, dans laquelle la Commission a décidé, entre autres dispositions, de nommer un rapporteur spécial chargé d'établir directement des contacts avec le Gouvernement et avec le peuple du Myanmar, y compris les dirigeants politiques privés de liberté, leurs proches et leurs avocats, afin d'examiner la situation des droits de l'homme dans le pays et de suivre tout progrès réalisé en vue de la passation des pouvoirs à un gouvernement civil et de l'élaboration d'une nouvelle constitution, de la levée des restrictions pesant sur les libertés personnelles et de la restauration des droits de l'homme au Myanmar,

Prenant note de la résolution 1997/64 de la Commission des droits de l'homme, en date du 16 avril 19974/, dans laquelle la Commission a décidé de proroger d'un an le mandat du Rapporteur spécial chargé d'examiner la situation des droits de l'homme au Myanmar,

Notant avec préoccupation que le Gouvernement du Myanmar n'a toujours pas autorisé la visite du Rapporteur spécial,

Gravement préoccupée par le fait que le Gouvernement du Myanmar n'a pas encore fait suivre d'effets les assurances qu'il avait données de prendre toutes les mesures nécessaires en vue d'instaurer la démocratie sur la base des résultats des élections de 1990,

Gravement préoccupée par les restrictions imposées à Aung San Suu Kyi et à d'autres dirigeants politiques, notamment en matière de déplacement, par les arrestations et le harcèlement persistants de membres et de partisans de la Ligue nationale pour la démocratie, de syndicalistes et d'étudiants qui avaient pacifiquement exercé leurs droits à la liberté d'expression, de réunion et d'association, par les démissions forcées de représentants élus et par le fait que tous les établissements d'enseignement supérieur ont été fermés pendant longtemps après les manifestations d'étudiants de décembre 1966,

Rappelant que des membres de la Ligue nationale pour la démocratie se sont retirés de la Convention nationale fin 1995 et qu'ils en ont ensuite été exclus,

Se félicitant des contacts établis entre le Gouvernement du Myanmar et les partis politiques, en particulier la Ligue nationale pour la démocratie, mais regrettant que le Gouvernement du Myanmar n'ait pas engagé un dialogue politique de fond avec Aung San Suu Kyi et d'autres dirigeants politiques, y compris des représentants de groupes ethniques,

Gravement préoccupée par les violations persistantes des droits de l'homme au Myanmar signalées par le Rapporteur spécial, en particulier les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, l'assassinat de civils, la pratique de la torture, les arrestations et détentions arbitraires, les morts en détention, l'absence de garanties d'une procédure régulière, notamment le fait que des détenus sont jugés en secret, sans être assistés par un conseil juridique, les graves restrictions imposées à la liberté d'opinion, d'expression, de réunion et d'association, les violations de la liberté de circulation, les réinstallations forcées, le travail forcé des enfants et des adultes, notamment comme porteurs pour l'armée, les sévices infligés à des femmes et des enfants par des agents du Gouvernement, et l'imposition de mesures répressives visant en particulier les minorités ethniques et religieuses,

Rappelant que le Rapporteur spécial a constaté que le non-respect des droits associés à un gouvernement démocratique était la source de toutes les violations majeures des droits de l'homme au Myanmar,

Rappelant également que des accords de cessez-le-feu ont été conclus entre le Gouvernement du Myanmar et plusieurs groupes ethniques,

Notant que la situation des droits de l'homme au Myanmar a provoqué un afflux de réfugiés dans les pays voisins, mettant ces derniers en difficulté,

1. Remercie le Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme chargé d'examiner la situation des droits de l'homme au Myanmar de son rapport intérimaire5/, et prie instamment le Gouvernement du Myanmar de coopérer pleinement avec lui et de lui assurer l'accès au Myanmar, sans conditions préalables, pour lui permettre de s'acquitter pleinement de son mandat;

2. Remercie également le Secrétaire général de son rapport6/;

3. Déplore la persistance de violations des droits de l'homme au Myanmar;

4. Note que la lauréate du prix Nobel de la paix, Aung San Suu Kyi, a été autorisée à se rendre au bureau de la Ligue nationale pour la démocratie à Thaketa pour y mener pacifiquement des activités politiques normales le 21 octobre 1997, mais qu'elle a été empêchée par la suite d'assister à des réunions de la Ligue à Tamwe le 5 novembre 1997, et à Hlaing le 13 novembre 1997, et demande au Gouvernement du Myanmar d'autoriser les membres et les partisans de la Ligue à communiquer sans entrave avec Aung San Suu Kyi et d'autres dirigeants politiques et à les rencontrer ainsi que d'assurer leur sécurité physique;

5. Demande instamment au Gouvernement du Myanmar de libérer immédiatement et sans conditions les dirigeants politiques incarcérés et tous les prisonniers politiques, de garantir leur intégrité physique et de les autoriser à participer au processus de réconciliation nationale;

6. Exhorte le Gouvernement du Myanmar à poursuivre ses contacts avec la Ligue nationale pour la démocratie en vue d'engager le plus tôt possible un dialogue politique de fond avec la Secrétaire générale de la Ligue, Aung San Suu Kyi, et d'autres dirigeants politiques, y compris des représentants des groupes ethniques, meilleur moyen de favoriser la réconciliation nationale et le plein rétablissement de la démocratie dans les meilleurs délais;

7. Note avec satisfaction que l'Envoyé du Secrétaire général et le Directeur de la Division de l'Asie de l'Est et du Pacifique se sont rendus au Myanmar pendant le premier semestre de 1997 afin de s'entretenir avec le Gouvernement et avec Aung San Suu Kyi et d'autres dirigeants politiques, et encourage le Gouvernement du Myanmar à élargir son dialogue avec le Secrétaire général et à faciliter l'accès du représentant du Secrétaire général aux dirigeants politiques au Myanmar;

8. Demande de nouveau instamment au Gouvernement du Myanmar de prendre, conformément aux assurances qu'il a données à diverses reprises, toutes les mesures voulues pour rétablir la démocratie, respectant ce faisant la volonté du peuple telle qu'elle s'est exprimée lors des élections démocratiques qui ont eu lieu en 1990, et de faire en sorte que tous les partis politiques et toutes les organisations non gouvernementales puissent exercer librement leurs activités;

9. Note avec satisfaction que la Ligue nationale pour la démocratie a tenu son neuvième Congrès annuel les 27 et 28 septembre 1997;

10. Note avec préoccupation que la plupart des représentants démocratiquement élus en 1990 ne sont toujours pas autorisés à participer aux réunions de la Convention nationale qui a été créée pour définir les principes fondamentaux devant présider à l'élaboration d'une nouvelle constitution, qu'il apparaît que l'un des objectifs visés est de conserver aux forces armées une place de premier plan dans la vie politique future du pays et que la composition et les méthodes de travail de la Convention nationale ne permettent pas aux représentants élus du peuple d'exprimer librement leurs opinions et constate que la Convention nationale ne semble pas être le moyen de rétablir la démocratie;

11. Engage vivement le Gouvernement du Myanmar à prendre toutes les mesures voulues pour permettre à tous les citoyens de participer librement au processus politique, conformément aux principes énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, et d'accélérer la transition vers la démocratie, en particulier par la passation des pouvoirs aux représentants démocratiquement élus;

12. Engage de même vivement le Gouvernement du Myanmar à assurer le plein respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment la liberté d'expression et de réunion, le droit à un procès équitable ainsi que la protection des droits des personnes appartenant à des minorités ethniques ou religieuses, à mettre fin aux violations du droit à la vie et à l'intégrité de la personne, à la pratique de la torture, aux mauvais traitements infligés aux femmes, au travail forcé, aux déplacements forcés, aux disparitions forcées et aux exécutions sommaires, à s'acquitter de son obligation de mettre fin à l'impunité des auteurs de violations des droits de l'homme, y compris des membres des forces armées, et, dans tous les cas, à enquêter sur les violations qui auraient été commises par des agents du Gouvernement et à poursuivre en justice le personnes présumées coupables;

13. Demande au Gouvernement du Myanmar d'appliquer intégralement les recommandations du Rapporteur spécial;

14. Note avec satisfaction que, le 22 juillet 1997, le Gouvernement du Myanmar a accédé à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes7/;

15. Engage le Gouvernement du Myanmar à envisager de devenir partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques2/, au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels2/ et à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants8/;

16. Demande fermement au Gouvernement du Myanmar de s'acquitter des obligations qui lui incombent en vertu de la Convention relative aux droits de l'enfant9/, telles qu'elles figurent dans les conclusions du Comité des droits de l'enfant;

17. Demande de même fermement au Gouvernement du Myanmar de s'acquitter des obligations qui lui incombent en tant qu'État partie à la Convention de 1930 concernant le travail forcé ou obligatoire (No 29) et à la Convention de 1948 concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical (No 87) de l'Organisation internationale du Travail, et engage le Gouvernement du Myanmar à coopérer plus étroitement avec l'Organisation internationale du Travail, en particulier avec la Commission d'enquête désignée conformément à l'article 26 de la Constitution de l'Organisation;

18. Souligne qu'il importe que le Gouvernement du Myanmar s'attache particulièrement à améliorer les conditions qui règnent dans les prisons du pays et permette à l'organisation humanitaire internationale compétente de s'entretenir librement et confidentiellement avec les prisonniers;

19. Demande au Gouvernement du Myanmar et aux autres parties aux hostilités au Myanmar de respecter pleinement les obligations qui leur incombent en vertu du droit international humanitaire, y compris de l'article 3 commun aux Conventions de Genève du 12 août 1949 10/, de mettre fin à l'emploi des armes contre la population civile, de protéger tous les civils, notamment les enfants, les femmes et les membres de minorités ethniques ou religieuses, des violations du droit humanitaire et de recourir aux services que peuvent lui offrir des organismes à vocation humanitaires impartiaux;

20. Encourage le Gouvernement du Myanmar à créer les conditions nécessaires pour que l'afflux de réfugiés dans les pays voisins prenne fin et à faciliter leur rapatriement librement consenti et leur pleine réinsertion, dans la sécurité et la dignité;

21. Prie le Secrétaire général de poursuivre ses entretiens avec le Gouvernement du Myanmar afin de l'aider à appliquer la présente résolution et de rendre compte à l'Assemblée générale à sa cinquante-troisième session ainsi qu'à la Commission des droits de l'homme à sa cinquante-quatrième session;

22. Décide de poursuivre l'examen de la question à sa cinquante-troisième session.

__________

1/ Résolution 217 A (III).
2/ Résolution 2200 A (XXI), annexe.
3/ Voir Documents officiels du Conseil économique et social, 1992, Supplément No 2 (E/1992/22), chap. II, sect. A.
4/ Ibid., 1997, Supplément No 3 (E/1997/23), chap. II, sect. A.
5/ Voir A/52/484.
6/ A/52/587.
7/ Résolution 34/180, annexe.
8/ Résolution 39/46, annexe.
9/ Résolution 44/25, annexe.
10/ Nations Unies, Recueil des Traités, vol. 75, Nos 970 à 973.


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