Pour atteindre l'objectif
convenu à l'échelle internationale de réduire
la pauvreté de moitié d'ici à 2015, la valeur
effective de l'aide au développement devra doubler, c'est-à-dire
passer à plus de 100 milliards de dollars par an. L'inefficacité
apparente de l'aide est un obstacle, mais des améliorations
sont actuellement apportées à la conception et aux
modalités de l'aide.
L'aide publique au développement
(APD) est l'une des questions les plus importantes qui seront
examinées à la Conférence internationale
sur le financement du développement qui se tiendra en mars
2002 à Monterrey (Mexique) - et ce non seulement pour les
pays bénéficiaires en proie aux difficultés
financières mais aussi parce qu'elle constitue un investissement
primordial visant à assurer un avenir plus certain pour
tous les pays.
L'aide au développement est à
son niveau le plus bas depuis trente ans.
Exprimée en pourcentage du produit
national brut (PNB) des pays donateurs, l'APD était, en
moyenne, déjà en baisse lorsque la communauté
internationale a fixé pour la première fois en 1970
l'objectif consistant à y consacrer 0,7% du PNB. Le taux
s'est stabilisé à entre 0,3% et 0,35% jusqu'au début
des années 90, mais s'est ensuite remis à baisser.
En 2000, l'APD consentie par les 22 pays membres du Comité
d'aide au développement de l'Organisation de coopération
et de développement économiques (OCDE) représentait
en moyenne 0,22% de leur PNB. Même lorsqu'on exclut les
Etats-Unis, qui ne se sont jamais engagés en faveur de
l'objectif de 0,7%, la moyenne n'était que de 0,33%.
En valeur absolue (non ajustée
pour tenir compte de l'inflation), le montant de l'aide n'a cessé
d'augmenter jusqu'en 1992. Toutefois, même en valeur absolue,
l'aide totale est loin de recouvrer son niveau record de 1992,
soit 60 milliards de dollars. Elle est en effet tombée
de 56,4 milliards de dollars en 1999 à 53,1 milliards en
2000, soit une baisse de 6% en valeur nominale ou 1,6% si l'on
tient compte de l'inflation et de l'évolution des taux
de change [La situation économique et sociale dans le monde
,ONU, 2001].
La baisse de l'APD dans les années
90 a été parfois imputée aux déficits
budgétaires dans les pays donateurs. Cependant, depuis
le milieu des années 90, la situation budgétaire
de la plupart des pays donateurs s'est considérablement
améliorée. Parmi les autres facteurs présentés
comme des causes de la baisse de l'aide dans les années
90, on peut citer la démotivation à la fin de la
guerre froide, le doute persistant quant à l'efficacité
des programmes et projets financés par l'APD et l'augmentation
des apports privés en faveur des pays en développement.
(Ce dernier point est sujet à polémique: les capitaux
privés ne financent pas la plupart des projets que l'APD
finance généralement et, pour les investisseurs
privés étrangers, les pays qui sont le plus tributaires
de l'APD n'offrent souvent pas de bonnes perspectives d'affaires.)
L'APD demeure indispensable pour les 49
pays les moins avancés (PMA), dont le PIB par habitant
est inférieur à 900 dollars. En 1998, l'APD a représenté
84% des flux de ressources en faveur de 48 PMA. La même
année, les PMA ont reçu moins de 4% des apports
de capitaux à long terme en faveur de tous les pays en
développement.
Atteindre les objectifs du Millénaire
Certains signes récents indiquent
que la tendance à la baisse de l'aide des 30 dernières
années est peut-être sur le point d'être renversée.
Le Royaume Uni s'est engagé à accroître son
aide, la faisant passer de 0,26% de son PNB en 1997 à 0,33%
en 2003-2004, et en novembre 2001 les ministres de la coopération
pour le développement de l'Union européenne sont
convenus de fixer une date butoir pour atteindre l'objectif consistant
à consacrer 0,7% du PNB à l'APD. Au lendemain des
attaques terroristes contre les Etats-Unis, de plus en plus de
voix se sont élevées pour soutenir qu'il faut investir
davantage en faveur du développement.
Cependant, étant donné que
certains gouvernements donateurs ont annoncé leur intention
de réduire l'APD, on ignore dans quelle mesure le montant
net augmentera. Selon la Commission Zedillo, constituée
d'experts de haut niveau nommés par le Secrétaire
général de l'ONU en 2001, il faut 50 milliards de
dollars d'aide supplémentaire pour réaliser les
objectifs du Millénaire, soit en gros le double du montant
actuel de l'APD. Cela exigera un effort concerté des donateurs.
Selon la Banque mondiale, l'objectif consistant à réduire
de moitié la pauvreté en termes de revenu dans les
pays en développement d'ici à 2015 - adopté
par les Etats Membres au Sommet du Millénaire en septembre
2000 - risque sérieusement de ne pas être atteint.
Dans certains pays en développement, les mauvaises politiques
réduisent l'efficacité des programmes de développement
et donc de l'aide. Les donateurs sont de moins en moins enclins
à fournir plus que de l'aide humanitaire dans ces cas.
En revanche, d'autres pays appliquent des politiques plus judicieuses
et peuvent utiliser à bon escient une aide additionnelle.
La question qui se pose est de savoir si le montant qui sera fourni
sera suffisant.
"[La Conférence de ]
Monterrey doit marquer un tournant dans l'histoire de l'aide publique
au développement", a déclaré
le Secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan,
à la séance de janvier 2002 du Comité préparatoire
de la Conférence internationale sur le financement du développement.
"Nous ne pouvons simplement pas permettre que l'APD
continue de baisser, si nous voulons que les engagements que nous
avons pris en faveur des objectifs du Millénaire soient
pris au sérieux".
Efficacité de l'aide
Ces dernières années, on
s'est attaché à mieux comprendre les conditions
préalables à satisfaire pour assurer l'efficacité
de l'aide. On pense que celle-ci obéit à deux principes
fondamentaux: d'une part, elle devrait réduire la pauvreté
et, d'autre part, elle doit se fonder sur des politiques que les
gouvernements et la société civile des pays bénéficiaires
ont contribué à élaborer et dont ils ont
le sentiment d'être propriétaires.
Les études ont montré que
l'aide peut avoir une incidence directe sur la pauvreté
lorsqu'elle vise des programmes portant notamment sur les enfants,
la nutrition et les secours d'urgence. Qui plus est, l'aide peut
jouer un important rôle d'appui dans les pays où
l'environnement est propice aux réformes, d'où l'importance
d'un engagement national en faveur du processus de réforme.
Au lieu de baser l'aide sur les desseins et les priorités
des donateurs, on admet de plus en plus que les initiatives internes
de réforme sont indispensables.
Certains problèmes qui compromettent
l'efficacité de l'aide proviennent des pays donateurs.
Une pratique largement critiquée
est celle de l'aide "liée", au titre de laquelle
les marchés concernant les projets financés doivent
être passés avec des entreprises des pays donateurs.
A la réunion de l'OCDE tenue à Paris en mai 2001,
les pays donateurs ont pris une mesure positive lorsqu'ils ont
convenu de ne pas lier une aide additionnelle d'un montant de
2 milliards en faveur des PMA.
Les normes peu claires et parfois contradictoires
posent un autre problème. Chacun des 22 pays donateurs
et un large éventail d'institutions internationales disposent
de systèmes de décision, de suivi et d'évaluation
propres. Il faut une flopée de documents et d'agents dans
les pays bénéficiaires pour simplement respecter
les exigences en matière d'établissement de rapports.
Il est admis qu'une meilleure coordination s'impose; aussi, des
efforts sont-ils entrepris pour harmoniser les critères
et la présentation des rapports.