L'École d’art et de design d’Alicante, institution espagnole membre de l'UNAI, mène un projet intitulé « L'Art de la protection », imaginé par les professeurs Francisco Oncina et Isabel Alemany. Les spécialistes estiment que l'art et le design ne sauraient être considérés uniquement en tant qu’éléments d’identité culturelle. Compte tenu de leur intérêt commercial, ils représentent également un « moteur » de développement socio-économique. Il convient donc de protéger la propriété intellectuelle pour que les artistes puissent tirer profit de leur travail et continuer à créer.

L'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), institution spécialisée des Nations Unies, explique dans une brochure que « la créativité, l’habileté et le talent des créateurs littéraires et artistiques sont aussi leur principal moyen de générer de la richesse et des emplois. En faisant en sorte que les créateurs soient récompensés et reconnus pour leurs efforts et leur créativité, le droit d'auteur les encourage à produire de nouvelles œuvres. Parce qu’elle permet d’assurer un juste équilibre entre les intérêts des créateurs et ceux du grand public, la législation sur les droits d'auteur est un instrument destiné à favoriser un environnement propice à la créativité et à l'innovation. »

Comme le souligne un article publié par le Programme des Nations Unies pour le développement, « il faut consacrer davantage d’efforts à la protection des droits de propriété intellectuelle. Négliger de récompenser les créateurs convenablement freine la croissance. Il est capital d’établir des cadres juridiques pour protéger les droits des créateurs et leur garantir une rémunération équitable. » L'Art de la protection a justement pour ambition de montrer combien il est important de protéger la propriété intellectuelle des créateurs.

Par le biais d’activités de sensibilisation et de formation, l’initiative vise à faire en sorte que les artistes et les designers puissent vivre de leur activité tout en favorisant le développement de petites entreprises dans le secteur de la création. Il existe un lien entre croissance durable, travail décent et respect du travail d'autrui. Bafouer les droits de propriété intellectuelle des artistes et des designers peut les amener à ressentir un manque de reconnaissance pour leur travail et pour beaucoup, à se tourner vers d'autres moyens de subsistance.

« Nous œuvrons en faveur des droits fondamentaux, car il est de notre devoir de les défendre et de les promouvoir », expliquent les chercheurs impliqués dans ce projet. Leur travail s’appuie sur une étude détaillée de l'exécution proprement dite des lois sur la propriété intellectuelle dans différentes parties du globe. En collaboration avec plusieurs partenaires, le Népal a été le premier pays à accueillir le projet en 2017, suivi du Sénégal en 2019 et de l’Ouzbékistan cette année.

Le projet comprend des ateliers interactifs en présentiel destinés aux professionnels et étudiants du secteur de la création comme l’artisanat, la joaillerie, la peinture ou la musique. Parmi les nombreux thèmes abordés figurent les droits d'auteur, le dépôt de marque, l’image, la conception et autres questions en lien avec la propriété intellectuelle. Les activités incluent des discussions, des enquêtes sur l’état des connaissances en matière de propriété intellectuelle et l’échange d'expériences et de bonnes pratiques.

« Dans les pays ayant déjà accueilli le projet, force est de constater un certain manque de confiance à l’égard du système des droits de propriété intellectuelle. Derrière cela se cache ce qui est perçu comme une lenteur voire un déficit dans la réponse des autorités en matière de protection de ces droits dans le domaine artistique ou de la création en général », expliquent les professeurs Oncina et Alemany. Ils soulignent le risque important que cela comporte quant au développement d’un environnement professionnel structuré, sécurisé et florissant pour les créateurs et artisans.

Néanmoins, en s’entretenant avec les acteurs concernés à l’échelle locale, régionale et nationale, les chercheurs ont noté « une prise de conscience nettement accrue concernant cette question importante et délicate, y compris au sein des gouvernements et des équipes travaillant sur cette problématique ». Ils soulignent le fait que pour beaucoup, les participants aux ateliers ignoraient la conduite à tenir s’ils venaient à être victimes de plagiat ou de contrefaçon, ainsi que les enjeux économiques encourus.

De nos jours, c’est notamment dans l'industrie de la mode que des atteintes aux droits de propriété intellectuelle sont à déplorer. Dans un article publié dans l'OMPI Magazine, Brigitte Vézina, conseillère en droit de la propriété intellectuelle et du patrimoine culturel, explique que « la confection de vêtements traditionnels est une source de revenus pour de nombreux peuples autochtones et communautés locales ; l’appropriation culturelle peut donc avoir des conséquences économiques dévastatrices, altérant la capacité de subsistance des communautés en supplantant la vente de produits authentiques. »

Les experts de l'École d'art et de design d'Alicante estiment que les activités menées dans le cadre du projet sont un moyen de renforcer l'idée selon laquelle la protection de la propriété intellectuelle dans le secteur créatif stimule la production de richesses dans les pays en développement. « Nous devons tous comprendre que derrière chaque création se cache un travail remarquable et acharné », ont-ils ajouté.

Pour en savoir plus sur la protection de la propriété intellectuelle des artistes et des créateurs, consultez ces ressources de l'OMPI : Le marketing des produits de l’artisanat et des arts visuels : le rôle de la propriété intellectuelle et La propriété intellectuelle et l’artisanat traditionnel.