Pour parvenir à gérer la pandémie de COVID-19, l'un des problèmes les plus importants et les plus graves de notre époque, plusieurs approches sont nécessaires. Il est donc essentiel de comprendre les mécanismes biologiques permettant aux virus de se propager, ainsi que la dynamique de diffusion. On peut observer cette dernière en s’appuyant sur la notion d'universalité, selon laquelle différents systèmes ou classes de systèmes peuvent présenter le même comportement et les mêmes caractéristiques sur le plan dynamique, quels que soient les mécanismes sous-jacents et les particularités dynamiques.

Dans cet esprit, une équipe de l'Université de l’Attique occidentale (UNIWA), institution grecque membre de l'UNAI, s’est associée à des chercheurs de l'Université hellénique internationale, de l'Université Aristote de Thessalonique et de l'Université des îles Baléares, afin de mettre au point un nouveau modèle épidémiologique fondé sur la criticité auto-organisée. Ce travail de recherche revêt une importance d’autant plus grande dans le contexte du débat planétaire concernant des questions comme l'efficacité de la vaccination, la distanciation sociale, les mesures de protection, ou encore l'approche dite de l’immunité collective.

Les chercheurs ont présenté un modèle permettant de simuler la dynamique de la propagation d'une épidémie virale au sein d’une population sur la base d’une diffusion auto-organisée à l’échelle d’un réseau. Le modèle proposé (Self Organizing Diffusion Model ou SODM), qui considère la phase de propagation épidémique comme un système auto-organisé, processus plutôt répandu dans la nature, au comportement semblable à celui d’une épidémie sur le plan dynamique, est capable de reconnaître les virus en fonction de leur agressivité. Cet aspect auto-organisationnel est inhérent à la complexité du système lui-même.

Pour vérifier sa validité, le modèle a été appliqué à des données épidémiologiques concernant une population déterminée. Il a permis de révéler une tendance fondamentale du point de vue de la théorie des phénomènes critiques. Selon le principe d'universalité, on peut s'attendre à ce que la pandémie actuelle de COVID-19 suive la dynamique du modèle. La pandémie se rapprochant du point critique tel que défini par le modèle, cela signifie donc que le temps entre le pic et l'élimination s’allonge considérablement et que le nombre d’infections est élevé.

Lorsque le système est lancé sans aucune restriction (comme dans l'approche dite de l'immunité collective), la propagation de l'épidémie est régulière et de courte durée, à la seule condition que le virus ne présente aucun signe d'agressivité accrue. En revanche, si le virus est agressif, le système peut évoluer vers des situations non maitrisées, ce qui se caractérise par un pourcentage élevé de contaminations, et surtout par un allongement de la durée de l'épidémie. Il s’agit là d’une conséquence de la non-linéarité du système et de son comportement d’après la théorie des phénomènes critiques.

L'étude s’intéresse aux virus agressifs à l’image du SARS-CoV-2. Selon le Dr Yiannis Contoyiannis, de l'UNIWA, « dans une telle situation, l'approche dite de l'immunité collective conduit directement à une propagation étendue et prolongée de l'épidémie, une pandémie, en fait ». D’après le professeur Pericles Papadopoulos, « pour maitriser cela, il n’existe pas d’autre moyen que la distanciation sociale et la limitation des contacts physiques ». « Il s’avère que ces deux mesures, en conjonction avec l’un des éléments les plus importants, la vaccination, éloignent le paramètre de contrôle du système de sa valeur critique, ce qui permet d’instaurer un environnement sûr où la présence du virus est moindre », ajoute l’expert.

Le professeur Stelios M. Potirakis estime que le modèle permet « d'évaluer l'efficacité des mesures de restriction en conjonction avec la vaccination, et constitue un outil sur lequel peut s’appuyer la prise de décision ». La conclusion majeure apportée par le modèle présenté est que la pandémie de COVID-19 agit comme un phénomène physique, et peut donc être observée du point de vue de la physique des phénomènes critiques. Il constitue également un exemple de la participation des universités à la mise en œuvre de l'Objectif de développement durable 3 : Bonne santé et bien-être en cette période difficile.

[Les articles scientifiques issus de ce travail de recherche publiés à ce jour sont disponibles ici et ici]