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Déclarations

Déclaration commune de M. Thomas Hammarberg, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, et de M. Morten Kjaerum, Directeur de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne : « Une occasion à ne pas manquer pour lutter contre le racisme et la discrimination »

Le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe et le Directeur de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne appellent les gouvernements européens à continuer de participer activement au processus préparatoire de la conférence d’examen du racisme qui sera organisée par l’ONU au mois d’avril 2009.

« Le racisme est un phénomène mondial, un fléau social auquel n’échappe aucun pays, aucune région – pas même les pays européens » déclarent Thomas Hammarberg, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe et Morten Kjaerum, Directeur de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne.

La construction de sociétés démocratiques et inclusives repose sur le principe central du respect de l’égalité dans la diversité. Le Programme d’action de Durban contre le racisme et la discrimination doit se traduire par des mesures concrètes et une vigilance sans relâche aux niveaux local, national et européen. La conférence de suivi offrira aux participants l’occasion de présenter des exemples et d’examiner les importantes actions concrètes menées par certains pays européens pour réaliser les objectifs fixés lors de la conférence mondiale de 2001. Nous pouvons être fiers de ces avancées, mais il reste beaucoup à faire pour combattre le racisme à l’échelle du monde et de ses grandes régions.

L’ONU a invité les États à tirer les enseignements des progrès réalisés depuis la conférence mondiale contre le racisme (Durban, 2001). L’Europe ne doit pas laisser passer cette chance de participer à l’élaboration du nouveau programme d’action.

La Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, organisée en 2001 à Durban, a adopté un Programme d’action mondial visant à lutter contre le racisme et la discrimination sous toutes leurs formes. Alors même que de nombreux pays ont multiplié les initiatives, le racisme, la discrimination, la xénophobie et d’autres formes d’intolérance persistent sur l’ensemble du continent européen. Il ressort de rapports récents du Commissaire aux droits de l’homme, de l’Agence des droits fondamentaux et de la Commission européenne qu’en Europe, le racisme touche plus particulièrement les Roms, les Sintés, les Gens du voyage, les membres des communautés africaine, juive et musulmane, les migrants, les réfugiés, les demandeurs d’asile, d’autres minorités ethniques ou religieuses nationales et les populations autochtones.

D’après une enquête, 62% des personnes interrogée estiment que la forme de discrimination la plus répandue dans l’Union européenne est celle fondée sur l’origine ethnique. La discrimination, qui peut revêtir différents aspects, fait de nombreuses victimes sur le continent. Les personnes âgées ou handicapées issues de minorités, les femmes immigrées, les femmes et les enfants roms, les réfugiés homosexuels et bien d’autres groupes subissent des formes de discrimination particulièrement persistantes et douloureuses. Parallèlement, le discours xénophobe, raciste et antisémite ou antimusulman refait surface en Europe. Loin d’être l’apanage des groupes politiques extrémistes, il alimente la discrimination, le harcèlement et les agressions violentes contre les minorités.

Concrètement, les mesures prises en Europe pour mettre en œuvre le Programme d’action de Durban ont principalement consisté à élaborer des cadres juridiques pour la lutte contre la discrimination, à créer des médiateurs spécialisés et des organismes chargés des questions d’égalité, à adopter des plans d’action nationaux ciblés et à ériger en infraction les comportements à motivation raciste.

Nous devons rester très vigilants pour que ces avancées ne soient pas compromises. Depuis les attentats du 11 septembre 2001, la prévention du racisme, de la discrimination, de la xénophobie et d’autres formes d’intolérance ne peut négliger les menaces qui pèsent sur les droits de l’homme. La tentation de recourir au profilage racial, ethnique ou religieux dans la lutte contre le terrorisme ou les politiques de migration de plus en plus restrictives ne sont que deux exemples parmi d’autres de cette évolution regrettable.

Un grand pas a été franchi en 2000 avec l’adoption par tous les pays de l’Union européenne, d’une nouvelle législation contre la discrimination et pour l’égalité inspirée des traités de l’ONU en matière de droits de l’homme et de la Convention européenne des droits de l’homme. L’UE a également adopté une législation interdisant la diffusion de discours de haine à la télévision et, plus récemment, ses États membres se sont dotés de normes législatives communes visant à un ériger en infraction les comportements racistes et xénophobes. Pourtant, les différents groupes qui existent dans l’Union ne bénéficient pas tous de la même protection juridique contre la discrimination. Il serait bon tous les États membres du Conseil de l’Europe ratifient le Protocole n° 12 à la Convention européenne des droits de l’homme sur l’interdiction générale de la discrimination.

La Commission européenne a proposé une nouvelle législation qui accorderait le même degré de protection quel que soit le motif de discrimination. Les gouvernements des pays de l’UE devraient adopter cette proposition pour garantir l’égalité des droits et l’égalité de traitement à toutes les personnes victimes de discrimination. Des études montrent par ailleurs que l’application de la législation antidiscrimination n’est toujours pas homogène en Europe et que, souvent, les sanctions ne sont pas appliquées. Les organismes chargés des questions d’égalité doivent être dotés d’un mandat ambitieux et indépendant, et bénéficier des ressources nécessaires pour lutter efficacement contre la discrimination.

Il ne fait pas de doute que l’Europe doit relever bien des défis pour venir à bout du racisme mais les responsables politiques, les ONG, les médias et la société dans son ensemble savent de mieux en mieux ce qu’il reste à faire. Il faut aussi suivre de près les effets de la crise économique et financière mondiale, qui pourraient se traduire par une augmentation du racisme et de la discrimination. Le Conseil de l’Europe, les institutions de l’Union européenne et l’Agence des droits fondamentaux offrent de solides mécanismes régionaux, à même de soutenir les États dans la lutte pour les droits de l’homme et contre le racisme.

On dispose d’une mine de connaissances, d’analyses et de bonnes pratiques possibles, rassemblées notamment par le Conseil de l’Europe et l’Agence des droits fondamentaux. La prochaine Conférence d’examen de Durban est l’occasion à ne pas manquer pour l’Europe d’échanger ses expériences avec d’autres régions et de tirer les leçons des succès et des échecs d’autres parties du monde et ce, dès le 15 décembre 2008.