30 novembre 2022

La riposte mondiale au sida est en danger. Les inégalités sont une menace pour nous tous. Chaque minute, une vie est perdue à cause de la maladie. Le monde n’est pas sur la bonne voie pour y mettre fin. Des millions de vies sont en jeu.

En 2021, nous avons connu la plus faible baisse des nouvelles infections au VIH depuis 20161. En effet, les nouvelles infections sont actuellement en hausse dans 38 pays. L’année dernière, 1,5 million de personnes ont été infectées, soit un million de plus que les cibles mondiales.

Les crises simultanées liées à la pandémie de COVID-19, la guerre en Ukraine ainsi que leurs retombées économiques ont eu un impact sur les services et augmenté les risques.

Le plus grand défi à relever consiste à ce que le monde s’attaque davantage aux inégalités qui sont à l’origine de la pandémie de sida. Nous pouvons y mettre fin, mais seulement si les dirigeants ont le courage de s’attaquer aux inégalités qui entravent le progrès.

L’une des inégalités les plus flagrantes concerne l’accès au traitement pour les enfants et les adultes. Au niveau mondial, seulement 52 % des enfants vivant avec le VIH reçoivent un traitement qui sauve des vies, loin derrière les adultes, dont 76 % reçoivent des antirétroviraux. Cette disparité a eu des conséquences mortelles. En 2021, les enfants ne représentaient que 4 % des personnes vivant avec le VIH, mais 15 % de tous les décès liés au sida. Combler l’écart en matière de traitement pour les enfants permettra de sauver des vies.

Une autre inégalité dangereuse concerne l’accès à l’éducation. À l’heure actuelle, toutes les deux minutes dans le monde, une adolescente ou une jeune femme contracte le VIH. La crise liée à la COVID-19 a perturbé les principaux services de prévention du VIH ainsi que l’éducation, ce qui peut empêcher des millions de filles de retourner à l’école, provoquer une augmentation des grossesses chez les adolescentes et exposer de nombreuses filles à des violence sexistes et, donc, à un risque accru d’infection par le VIH. En Afrique sub-saharienne, six nouvelles infections sur sept chez les adolescents concernent les filles. Le facteur principal est le pouvoir. Le fait de permettre aux filles de continuer leur scolarité jusqu’à la fin de l’enseignement secondaire réduit jusqu’à 50 % leur vulnérabilité à une infection par le VIH. Dans les pays où les taux d’achèvement du premier cycle de l’enseignement secondaire sont les plus élevés, de meilleurs résultats ont été obtenus en matière de réduction de nouvelles infections chez les adolescentes et les jeunes femmes. Avec la mise en place supplémentaire de mesures d’autonomisation, leurs risques sont encore plus réduits. Nous devons lutter contre les dynamiques de pouvoir qui rendent les filles plus vulnérables au VIH.

Il est essentiel que tous les enfants, notamment ceux qui ont abandonné l’école depuis le début de la pandémie de COVID-19 ainsi que ceux qui étaient déscolarisés avant même la crise, aient la possibilité de suivre un enseignement secondaire complet comprenant une éducation sexuelle complète et l’autonomisation des filles. Pourtant, alors que les pays sont aux prises avec des défis budgétaires, l’éducation et la santé figurent parmi les secteurs qui subissent les plus fortes réductions de budget. C’est la raison pour laquelle le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU-Femmes) ainsi que le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) ont lancé l’Initiative Éducation Plus conjointement avec des gouvernements, la société civile et des partenaires internationaux. L’initiative appelle les dirigeants à accélérer les actions et les investissements nécessaires pour garantir que chaque fille africaine soit scolarisée, en sécurité et forte.

Une autre inégalité empêchant de mettre fin au sida concerne la réalisation des droits de l’homme. Plus de 68 pays criminalisent encore les relations homosexuelles, ce qui fait que les homosexuels ont peur de se rendre dans des établissements où ils pourraient bénéficier de services de prévention, de dépistage et de traitement susceptibles de sauver leur vie et de briser le cycle de l’infection.

Les lois punitives et discriminatoires sapent la riposte au sida. Le risque d’infection est 28 fois plus élevé chez les homosexuels et les bisexuels que chez les hommes âgés de 15 à 49 ans de la population générale. Le risque d’infection est 35 fois plus élevé chez les personnes qui se droguent par voie intraveineuse que chez les adultes qui ne se droguent pas. Les travailleuses du sexe courent un risque 30 fois plus élevé que les femmes adultes de la population générale. Les femmes transgenres présentent un risque 14 fois plus élevé que les autres femmes adultes. Trop souvent, les décisions politiques aggravent les inégalités : les pays qui criminalisent les populations à risque ont fait moins de progrès pour garantir qu’elles connaissent leur état et suivent un traitement antirétroviral efficace que ceux qui évitent ce type de mesures.

Pour vaincre le sida, les gouvernements doivent valoriser les droits et la dignité de chacun. La décriminalisation sauve et change des vies.

Une autre inégalité concerne l’accès aux médicaments. Nous devons mettre les nouveaux médicaments antirétroviraux à longue durée d’action qui faciliteront le traitement et la prévention du VIH à la disposition des populations des pays à revenu faible et intermédiaire dès qu’ils sont disponibles dans les pays riches. Nous devons veiller à ce que tous les médicaments susceptibles d’éviter le décès des personnes vivant avec le VIH soient produits par plusieurs laboratoires à un prix abordable, en particulier dans le Sud où la maladie est concentrée. Cela demande des financements, une réforme des règles inadaptées en matière de propriété intellectuelle ainsi que le soutien à la production décentralisée à l’échelle mondiale de sorte que l’accès aux sciences vitales ne dépende plus du passeport détenu.

Une autre inégalité dangereuse concerne l’accès aux ressources. Lorsque le soutien international a été le plus nécessaire, la solidarité mondiale n’a pas été au rendez-vous. L’aide au développement pour le VIH, provenant de donateurs bilatéraux autres que les États-Unis, a chuté de 57 % au cours de la dernière décennie. Les ressources nationales et internationales nécessaires pour mettre fin au sida d’ici à 2030 sont de plus en plus compromises. En 2021, les fonds disponibles pour les programmes de lutte contre le VIH dans les pays à revenu faible et intermédiaire étaient inférieurs de 8 milliards de dollars aux montants nécessaires. Dans ces mêmes pays, le financement national de la lutte contre le VIH a baissé pendant deux années consécutives. L’augmentation considérable des prix des denrées alimentaires, l’une des conséquences de la guerre en Ukraine, aggravent l’insécurité alimentaire pour les personnes vivant avec le VIH dans le monde et rendent les interruptions de traitement plus probables. Le sous-financement de la riposte au sida exacerbe les inégalités et compromet notre capacité à mettre la lutte contre le VIH sur la bonne voie.

Les communautés du monde entier demandent aux dirigeants de mettre fin aux inégalités en matière d’accès au traitement, de prévention et de soins du VIH en luttant contre les inégalités entre les hommes et les femmes et la masculinité toxique; en comblant l’écart en matière de traitement entre les enfants et les adultes; en supprimant les lois discriminatoires et punitives; et en s’assurant que tout le monde a accès aux meilleures connaissances scientifiques ainsi qu’aux meilleurs médicaments et que toutes les ressources nécessaires sont disponibles.

Les inégalités entravent la fin du sida. Mais elles ne sont pas une fatalité. Nous savons ce qui marche. Avec courage et coopération, les dirigeants politiques peuvent les surmonter.

Nous pouvons mettre fin au sida d’ici à 2030 si nous luttons contre les inégalités.

Pour en savoir plus, consultez le site unaids.org et connectez-vous à l’ONUSIDA sur FacebookTwitterInstagram et YouTube.


Note

1Sauf indication contraire, toutes les données présentées dans cet article figurent dans le rapport de l’ONUSIDA intitulé EN DANGER : Rapport mondial actualisé sur le sida 2022 (Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida), 2022. License : CC BY-NC-SA 3.0 IGO. Disponible sur le site https://www.unaids.org/sites/default/files/media_asset/2022-global-aids-update_en.pdf

 

La Chronique de l’ONU ne constitue pas un document officiel. Elle a le privilège d’accueillir des hauts fonctionnaires des Nations Unies ainsi que des contributeurs distingués ne faisant pas partie du système des Nations Unies dont les points de vue ne reflètent pas nécessairement ceux de l’Organisation. De même, les frontières et les noms indiqués ainsi que les désignations employées sur les cartes ou dans les articles n’impliquent pas nécessairement la reconnaissance ni l’acceptation officielle de l’Organisation des Nations Unies.