Dans sa lutte contre le COVID-19, les partenariats internationaux sont indispensables à l'Afrique.

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Dans sa lutte contre le COVID-19, les partenariats internationaux sont indispensables à l'Afrique.

Ms. Bience Gawanas
4 Avril 2020
Under-Secretary-General Bience GAWANAS, Special Adviser on Africa to the United Nations Secretary-General
UN Photo/Eskinder Debebe
Mme Bience Gawanas, Conseillère spéciale du Secrétaire général pour l'Afrique

Pour lutter pour les droits à la santé, une solidarité et une coopération mondiale à grande échelle n’auront jamais été aussi appropriés qu’aujourd’hui. Pour une raison très simple, aucun pays ne pourrait, par lui-même, prévenir ou contrôler entièrement la pandémie COVID-19. Avec la propagation rapide du COVID-19, l’humanité est confrontée à la plus grande urgence de santé publique de notre temps.

En effet, le COVID-19 a d’ores et déjà déclenché une crise humanitaire et socio-économique dévastant les sociétés et menaçant de réduire à néant les acquis essentiels du développement humain.  L'ampleur de la crise devient chaque jour plus claire. Elle pourrait avoir un lourd impact sur la paix et la sécurité, le développement, les droits de l'homme mais surtout sur la vie et les moyens de subsistance des gens ordinaires, en particulier des pauvres et des plus vulnérables, qui luttent pour gagner leur vie dans un monde déjà très inégalitaire. Malheureusement, la dure réalité est que de nombreuses vies seront perdues avant que la pandémie ne soit maîtrisée et que ses ramifications plus larges ne se fassent ressentir pendant des années. Son impact immédiat et les répercussions à long terme sur le monde en développement pourraient prendre des proportions désastreuses. Sans une intervention agressive et concertée et compte tenu des vulnérabilités connues de l'Afrique, le bilan humain de la crise et de ses ramifications socio-économiques pourraient être insondables. Si la solidarité mondiale ne se manifeste pas clairement, l'Afrique risque, une fois de plus, d’être laissée pour compte. 

Au début de la pandémie, la plupart des pays se sont concentrés, à juste titre, sur la protection de leurs ressortissants. Toutefois, il est devenu très vite évident que la lutte contre la maladie à l'intérieur de frontières nationales ne sera pas efficace pour combattre une pandémie qui, par nature, est mondiale. Le soutien et la solidarité de la communauté internationale sont indispensables pour vaincre le COVID-19.

Que ce soit à titre individuel ou collectif, les pays africains ont déjà fait preuve de leur capacité à gérer cette crise sanitaire. Afin d'élaborer une stratégie unifiée à l'échelle du continent, l'Union africaine a ainsi mis sur pied le groupe de travail africain sur le coronavirus (AFTCOR). Par ailleurs, des stratégies sectorielles de lutte contre le virus et son impact sont en cours d'élaboration. Pour contenir la propagation du virus et atténuer son impact socio-économique, les États membres africains continuent de prendre un certain nombre de mesures. Il est clair que cela ne suffira pas. 

L'Afrique ne dispose pas des ressources financières, des infrastructures et des capacités humaines nécessaires pour mettre en place une réponse efficace et globale à la hauteur de l'ampleur du problème. La mise en œuvre de la stratégie de lutte et de prévention recommandée par le Centre de Contrôle des Maladies en Afrique (CCM-Afrique) est estimée, à elle seule, à plus de 200 milliards de dollars US . Pour faire face aux conséquences directes et indirectes de cette crise sur le plan non sanitaire, il faudra déployer des ressources supplémentaires. Les Nations unies et l'Union africaine s'unissent pour relever ce défi. Le secrétaire général a appelé les dirigeants du G20 à adopter un plan de relance pour les pays en développement. Un appel humanitaire à hauteur de 2 milliards de dollars US a été lancé. Un fonds africain anti-Covid-19 a été créé par le Bureau de l'Assemblée des chefs d'État et de gouvernement de l'Union africaine. Des appels à l'annulation et à la suspension de la dette ont été lancés. Par ailleurs, on assiste, ici et là, à un certain soutien de la communauté internationale et à l’intervention de donateurs privés.

Mais, là encore, il faudra faire plus. N'oublions pas qu'il s'agit, en fin de compte, de sauver des vies et des moyens de subsistance. À court terme, les efforts devront se concentrer sur l'arrêt de la pandémie COVID-19 et sur le renforcement de la protection sociale et des filets de sécurité pour faire face à ses effets immédiats.  La pauvreté et l'inégalité sont une réalité sur le continent qui laisse de nombreuses personnes vulnérables et démunies. Les segments les plus vulnérables de la population seront victimes du virus et ont donc besoin d'un soutien urgent. L'isolement social et le lavage des mains font partie des mesures importantes, mais ne sont pas faciles à appliquer pour les personnes qui vivent dans des maisons et des quartiers surpeuplés, sans eau ni assainissement et qui se nourrissent en portant leurs mains à la bouche. Sans aucun doute, cette réalité met à rude épreuve les capacités de réaction des gouvernements africains. Même si le virus attaque tout le monde sur son passage sans discrimination, il met malgré tout en évidence le niveau des inégalités qui existent dans le monde.

Dès aujourd’hui, le continent doit gérer l’après-crise COVID-19, en jetant les bases d'une forte reprise à moyen et à long terme. A cet égard, les objectifs de développement durable (ODD) et l'Agenda 2063 constituent la voie claire pour l'avenir. En septembre dernier, lorsque l'Assemblée générale des Nations unies a lancé la Décennie d'actions pour accélérer l’accomplissement des ODD, elle nous avait déjà averti que le monde était à la traîne. Malheureusement, nous en voyons aujourd'hui les conséquences. Des systèmes de santé solides, une bonne nutrition et un air pur sont des instruments de base pour lutter contre le COVID-19 et la pneumonie. Le monde doit absolument agir et réaliser que le développement durable et inclusif constitue le meilleur moyen de prévenir une future pandémie. Comme l'a dit le Secrétaire général, "si nous agissons correctement, nous pouvons orienter la reprise vers une voie plus durable et plus inclusive".

Ne perdons pas cette occasion. Nous pouvons le faire. Nous devons simplement travailler ensemble. Comme le dit un proverbe africain, "il faut tous les doigts pour ramasser la farine". Unissons nos efforts pour vaincre ce virus en Afrique et dans le monde. Il n'est pas trop tard. Les chiffres montrent que le virus commence à se répandre en Afrique. Si le monde réagit rapidement, si le soutien à l'Afrique s'intensifie, nous pouvons encore arrêter, à temps, son expansion. Il est dans l'intérêt du monde entier de le faire : ce virus ne connaît pas de frontières.

Dès lors, nous demandons à tous les acteurs africains en conflit de répondre, par une action immédiate, à l'appel du Secrétaire général António Guterres en faveur d'un cessez-le-feu mondial. Certains ont déjà accepté cet appel. La dynamique s'intensifie. Il n'y a pas, en ce jour, de plus grand adversaire pour l'humanité tout entière que le virus COVID-19. Cet adversaire, aveugle à toutes les différences qui nous divisent, nous dévaste sans discernement.

Dans le cadre de sa mission de soutien à l'Afrique, le bureau du conseiller spécial pour l'Afrique  des Nations unies continuera d’intensifier son plaidoyer mondial pour aider l’Afrique dans son combat contre le COVID-19 et à soutenir les efforts du Secrétaire général pour favoriser une réponse cohérente et coordonnée du système des Nations unies. C’est seulement en agissant de la sorte que nous pourrons réaliser l'Afrique que nous voulons et nous assurer de n’abandonner personne sur le bord du chemin.