MISSION
PERMANENTE DE LA RÉPUBLIQUE DU NIGER
AUPRÈS
DES NATIONS UNiES
417 EAST 50TH STREET, NEW YORK, N.
Y. 10022
Vingt Troisième Session
Extraordinaire de L'Assemblée
Générale des Nations Unies
"LES FEMMES EN L'AN 2000 :
EGALITE DES SEXES,
DEVELOPPEMENT ET PAIX POUR LE XXIè
SIECLE"
New York, 5 ‑ 9 join 2000.
New York, le 9 juin 2000
MONSIEUR LE PRESIDENT,
Je voudrais vous adresser, à vous et
aux autres membres du bureau, mes chaleureuses félicitations pour la manière
remarquable dont vous conduisez les travaux de cette 23ème session
extraordinaire de l'Assemblée Générale de l'ONU, consacrée au suivi de Beijing
+ 5 et pour votre engagement personnel pour la défense de la cause des femmes.
Je souhaite également transmettre, à
travers vous, les cordiales salutations de S.E.M. MAMADOU TANDJA, Président de
la République du Niger, à tous les participants aux présentes assises et leur
communiquer nos voeux de succès dans la poursuite des objectifs qui nous
réunissent ici.
MONSIEUR LE PRESIDENT, HONORABLES
DELEGUES,
A l'instar des autres membres de la
Communauté Internationale, le Niger s'est résolument engagé à mettre en oeuvre
les 12 points critiques de Beijing. Cinq ans après la Conférence de Beijing, il
faut relever que les progrès accomplis par mon pays ne font pas été de façon
linéaire. Its ont été variés dans le temps et selon les domaines.
* Ainsi, au plan institutionnel, le Niger a adopté une
Politique Nationale de Promotion de la Femme en 1996; cette politique fixe les
grandes orientations du Gouvernement en matière de Promotion de la Femme.
Dans ce cadre, il a été créé un
Observatoire National de la Promotion de la Femme qui, une fois opérationnel,
va constituer un creuset de concertation adéquat pour tous les acteurs
intervenant dans le domaine de la promotion de la femme.
En outre, un Comité National chargé
du suivi de la mise en oeuvre des recommandations de Beijing a été mis en
place.
Comme dans les autres pays
représentés ici, la politique nigérienne de la promotion de la femme n'est pas
du seul ressort de l'action gouvernementale. Mieux, elle suscite chez nous un
engouement de tous les partenaires, publics comme privés. De ce fait, l'on
retiendra au Niger une émergence de plusieurs Associations et ONG, émanation de
la société civile, qui concourent de manière dynamique à la promotion des
droits de la femme et de l'enfant.
* Au plan juridique, la Constitution de la 5ème République
assure à tous l'égalité devant la loi sans distinction de sexe, d'origine
sociale, raciale, ethnique ou religieuse. Cependant les femmes nigériennes
subissent encore les effets persistants de pesanteurs sociales dues
essentiellement au poids de la tradition et à une mauvaise interprétation de
certains préceptes de l'Islam, la principale religion du pays.
Ceci dénote avec, d'autant plus
d'éclat, le courage politique des Autorités de la 5ème République qui ont
adopté plusieurs textes devant permettre l'amélioration du statut de la femme.
Certains de ces textes visent l'harmonisation de la législation nationale avec
les conventions et traités internationaux ratifiés par mon pays, comme la
Convention sur l'Elimination de toutes les Formes de Discrimination à l'égard
des Femmes (CEDEF), pour ne citer qu'un exemple.
MONSIEUR LE PRESIDENT, HONORABLES
DELEGUES,
S'il est vrai que certains droits
s'exercent difficilement, du fait qu'ils ne sont pas assortis des conditions
objectives de leur jouissance, les femmes nigériennes estiment avoir franchi un
palier décisif avec l'adhésion de notre pays à la CEDEF. Dois‑je rappeler aussi
que cette phase emporte avec elle un autre bénéfice et non des moindres, à
savoir l'évolution des mentalités.
En effet, les débats qui ont précédé
l'adhésion du Niger à la CEDEF ont donné l'occasion d'expressions plurielles et
démocratiques des opinions. A cette occasion, des sujets naguère considérés
comme tabous, ont pu être abordés en toute liberté avec lucidité. Il reste,
dans ce même élan à les approfondir et à aller de l'avant.
L'année 2000 sera marquée par la
révision de tous les textes juridiques relatifs à la femme en vue de leur
harmonisation avec la CEDEF. Le fait que la société civile, les partenaires au
développement et l'Etat s'inscrivent dans cette logique est en soi une avancée
importante, qui reste à maintenir, consolider et approfondir.
* J'en viens à présent à l'aspect économique des questions
qui nous préoccupent. Mon pays dispose sur ce plan d'un Programme de Relance
Economique dont l'une des priorités est la lutte contre la pauvreté. Il ressort
des études menées que 63% des nigériens sont pauvres, 34% sont très pauvres,
parmi lesquels 73% sont des femmes. 60% de l'enveloppe de notre plan est
justement affectée aux programmes et projets au profit des femmes. Cette option
est hautement appréciée et saluée par les femmes nigériennes, d'autant que
d'augmentation des revenus des femmes fait partie intégrante du Programme Cadre
National de Lutte contre la Pauvreté, ce qui a permis aux bénéficiaires
d'améliorer leur statut social au niveau des communautés de base et d'être
propriétaires surtout dans le domaine foncier.
* Au plan social, le taux brut de scolarisation général
demeure encore faible. Il tourne autour de 32,23%. Ce taux est encore plus faible
au niveau des filles où il se situe à 25,36%.
Face à une telle inégalité, une
Cellule de Scolarisation des Filles a été créée en 1996, cellule dont les
travaux ont contribué à faire passer le taux de scolarisation des filles de 36%
en 1996 à plus de 39% en 1998‑99. La tendance actuelle encourage les écoles à
avoir au moins 50% de filles de l'effectif total, d'ici fin 2000. Les indices
présagent que cet objectif peut être largement atteint dans le délai requis.
Quant à l'analphabétisme, il touche
80% de la population dont 91% de femmes. Pour y faire face, déjà en 1988 mon
pays a opté pour l'alphabétisation fonctionnelle des femmes. Il s'agit de lier
l'alphabétisation à l'organisation des femmes autour des activités génératrices
de revenus.
Les engagements pris à Beijing dans
ce domaine, ont contribué à renforcer cette option.
Ainsi, l'alphabétisation demeure
aujourd'hui une composante essentielle de tous les programmes en direction des
femmes. Les résultats tangibles enregistrés dans ce domaine ont valu au Niger
l'obtention du prix UNESCO en 1999.
A côté de la sous scolarisation de
la petite fille et de l'analphabétisme des femmes, il faut ajouter les
violences diverses dont celles‑ci sont victimes. En effet, la montée de
nouvelles formes de violences notamment sexuelles, exercées sur les femmes et
particulièrement la petite fille est une source de réelle préoccupation. C'est
pourquoi, sous l'impulsion du Gouvernement, un vaste élan national s'est
rapidement créé en faveur de l'éradication de toute forme d'atteinte à
l'intégrité physique et morale de la femme.
A travers leurs campagnes de
sensibilisation sur les violences faites aux femmes et à la jeune fille, les
associations religieuses apportent une contribution inestimable dans la lutte
contre ce phénomène.
A côté de ces associations on peut
aussi noter l'apport des médias à travers l'élaboration et la mise en oeuvre du
plan de communication du Réseau des Techniciens de la Communication. Ce Réseau
s'est particulièrement distingué dans la vulgarisation de la Convention sur les
Droits de l'Enfant et la CEDEF. Il constitue un levier important pour la
nécessaire mobilisation sociale autour des priorités ciblées.
De même, la contribution de
l'Association Nationale des Chefs Traditionnels qui s'est engagée dans la
promotion de la scolarisation de la petite fille et la lutte contre les
violences faites à celle‑ci, est porteuse d'espoir, d'autant que, les Chefs
Traditionnels, en tant qu'Autorité morale, peuvent contribuer à enrayer
certaines pesanteurs sociales.
* Au plan sanitaire, il a été constaté une avancée dans le
domaine de la santé de la reproduction où le taux de prévalence est passé de
4,4 en 1992 à 8,2 en 1998. Ce résultat a été atteint grâce à l'implication des
associations Islamiques dans les campagnes d'information et de sensibilisation
à l'endroit de la population dont, faut‑il le rappeler, plus de 90% est
musulmane.
Monsieur le Président, je
souhaiterais à présent m'appesantir sur la faible participation des femmes dans
les instances de prise de décision et dans la vie publique en général.
Mon pays a connu une instabilité de
1995 à 1999, période au cours de laquelle la participation des femmes au
gouvernement et à l'Assemblée Nationale a connu une chute vertigineuse.
En effet, les femmes sont sous
représentées aux instances de décisions daps l'administration publique. Elles
sont pourtant nombreuses et militent très activement dans les partis politiques
et dans la société civile sans accéder aux instances de décisions.
Force est de constater que l'on est
loin des attentes nées de la démocratisation du pays, en ce qui concerne
l'accession des femmes aux hautes instances de décision. En effet, peu après le
début de ce processus, leur participation à l'Assemblée et au Gouvernement
s'était quelque peu améliorée mais s'est réduite par la suite. Au cours de la
2ème République l'on comptait 5 femmes députées et 1 femme ministre. De 1991 à
1993 l'on comptait 2 femmes au Gouvernement et 3 au Haut Conseil de la
République. Le Premier Gouvernement de la 3ème République a compté 5 femmes
ministres pendant que l'Assemblée Nationale en comptait 2. Trois femmes étaient
dans le Gouvernement dit de transition installé après la dissolution de
l'Assemblée Nationale en 1995. De Janvier 1995 à Janvier 1996, deux femmes sont
nommées ministres daps le Gouvernement de cohabitation et trois femmes sont
élues à l'Assemblée Nationale.
Le premier gouvernement de la 4ème
République comptait 4 femmes ministres dont une ministre d'Etat. Le 2ème
gouvernement de la 4ème République a compté également 4 femmes ministres dont
une ministre d'Etat et la 3ème République en comptait 3 dont une ministre
d'Etat. Pendant la même période, une seine femme est élue à l'Assemblée
Nationale. La 5ème République n'augure pas de meilleures auspices avec 2 femmes
au gouvernement et une seule à l'Assemblée Nationale.
Toutefois, les femmes enregistrent
quelques améliorations dans d'autres sphères comme la diplomatie,
l'enseignement supérieur, l'Administration centrale et territoriale. S'agissant
du cas précis des directions techniques, une lettre circulaire du Gouvernement
de Transition de 1999 instruisait les Ministres afin qu'à diplômes et
compétences égaux, les femmes soient privilégiées dans la promotion aux emplois
supérieurs.
D'autre part, il a été remarqué une
augmentation de la candidature des femmes aux dernières législatives à savoir
63 dont 29 titulaires contre moins de 40 auparavant.
Récemment encore une loi instituant
un système de quota au profit des femmes a été adoptée.
Au terme de cette loi, chaque liste
de candidatures aux différents postes électifs doit comporter au moins 25% de
femmes et 10% des postes acquis doivent revenir aux femmes. En plus 25% des
postes au niveau du Gouvernement, l'Administration territoriale, de
l'Administration centrale et autres instances supérieures non électives doivent
être acquis aux femmes.
MONSIEUR LE PRESIDENT,
HONARABLES DELEGUES,
Beaucoup reste à faire, mais les
réalisations sont à encourager et les stratégies en cours nécessitent tout
l'appui de la Communauté Internationale pour relever tous les défis qui nous
interpellent en ce début du 21 è siècle marqué par la mondialisation.
En parlant de défi, je voudrais
souligner que mon pays reste persuadé qu'une attention soutenue devra être
accordée à la responsabilisation et à la mobilisation de tous à travers un
partenariat mondial dynamique en vue de faire de l'accès universel aux services
sociaux de base et de l'égalité entre les sexes, une réalité vivante.
Mais comment atteindre de tels
objectifs si nous continuons d'assister sans réagir à la baisse drastique de
l'Aide Publique au Développement qui constitue pour les pays les plus pauvres
la source principale d'apport financier extérieur?
Comment atteindre de tels objectifs,
Monsieur le Président, si les pays pauvres lourdement endettés comme le mien ne
bénéficient pas des conditions plus souples d'allégement de la dette qui
grèvent par trop leurs ressources déjà trop maigres?
Voilà, Monsieur le Président,
quelques sujets de réflexion parmi d'autres que je rappelle à la présente
Assemblée.
JE VOUS REMERCIE.