Organisation Internationale de La Francophonie

 

Représentation permanente auprès des Nations Unies

 

Intervention au nom du secrétaire général

 

Monsieur Boutros Boutros‑Ghali

 

devant l'Assemblée générale

à l'occasion de la vingt troisième session extraordinaire

" Les femmes en l'an 2000 : égalité entre les sexes,

développement et paix pour le 21~' siècle"

 

présentée

par Madame Alimata Salambere

 

New York, le 9 juin 2000

 

(vérifier au prononcé)

 

801 Second Avenue, suite 605, New York, NY 10017

Téléphone : (212) 867‑6771 ‑ Fax: (212) 867‑3840

 

 

Excellences,

Monsieur le Président de l'Assemblée générale,

Mesdames et Messieurs les Chefs de délégation,

 

Permettez moi, tout d'abord, de vous exprimer mon émotion et la fierté que je ressens en intervenant devant vous au nom de l'Organisation internationale de la Francophonie, et tout particulièrement de son Secrétaire général, Monsieur Boutros Boutros‑Ghali, dont chacun connaît l'engagement personnel dans ce que l'on pourrait appeler le « processus de Pékin ».

 

Mais il me revient également de vous adresser, Monsieur le Président, comme tous les orateurs qui m'ont précédée, nos très vives félicitations et de vous dire notre espoir dans le succès de ces travaux.

 

Excellences,

Mesdames et Messieurs,

 

De notre point de vue, le « processus de Pékin » s'est décliné selon une double approche, depuis de nombreuses années déjà. Et, comme vous pourrez le constater, il demeure encore aujourd'hui ‑ je dirai heureusement ‑ toujours évolutif

 

Souvenons nous du dispositif des grandes Conférences mondiales qui a mobilisé les Etats durant la décennie précédente ; la Francophonie, qui était déjà présente au Sommet mondial de Rio sur l'environnement, s'y est investie de même.

 

On relèvera d'abord, en effet, que la thématique de ces conférences était profondément complémentaire, qu'il s'agisse des droits de l'Homme à Vienne (1993), de la population au Caire (1994), du développement social à Copenhague (mars 1995), des Femmes bien sûr à Pékin (septembre 1995) mais aussi de l'Habitat à Istanbul (1996).

 

On doit également souligner que cette dynamique a voulu appréhender, dans un souci global, toutes les grandes questions intéressant le genre humain dans leurs composantes les plus diverses, pour nous interpeller sur le devenir de l'homme au 21è' siècle. Et il était facile de constater, en chaque occasion, non seulement l'interdépendance des problèmes et des domaines considérés, mais aussi et surtout le rôle et la place de la femme dans l'ensemble de cette problématique.

 

Dans cette perspective, il paraît essentiel d'assurer une participation complète et plus active des femmes aux processus de formulation des politiques et de prise de décision des gouvernements. Depuis des années déjà, l'Organisation internationale de la Francophonie s'est largement impliquée pour favoriser l'engagement des femmes à tous les niveaux de décision, tant local et régional qu'international, que ce soit dans le cadre de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie ou dans celui de l'Association internationale des maires francophones.

 

Et si ce n'est pas là la seule voie qui permettra aux femmes du monde entier de devenir des citoyennes à part entière, c'est en tout cas la première.

 

Dans ce contexte, je voudrais rappeler ici que la première Conférence des femmes de la Francophonie, qui s'est tenue à Luxembourg en février dernier, était précisément consacrée au « pouvoir » et au « développement » : ces deux axes nous ont paru non seulement fondamentaux mais aussi prioritaires au regard des douze domaines critiques identifiés à Pékin.

 

Le pays‑hôte de cette rencontre, le Grand Duché du Luxembourg, a fait déposer comme document officiel de cette Session extraordinaire la Déclaration adoptée à cette occasion par nos 55 Etats et Gouvernements membres et associés.

 

La Déclaration invite l' Organisation internationale de la Francophonie, notamment l'Agence intergouvernementale de la Francophonie et les opérateurs directs des Sommets, comme l'ensemble des Etats et gouvernements membres, à renforcer leur action dans les deux domaines qui concernent, d'une part, les femmes dans la prise de décision et les mécanismes institutionnels de promotion de la femme, ainsi que, d'autre part, la participation des femmes au développement en vue d'améliorer leur situation socio‑économique, dans la perspective d'un développement durable.

 

Et elle réaffirme, à cette fin, que la paix est un facteur indissociable du développement.

 

Permettez‑moi, d'un mot, de rappeler ici que notre communauté, forte de plus d'un pays sur quatre dans le monde, soit près du tiers des Etats membres de l'Organisation des Nations Unies, est ainsi présente sur tous les continents. Elle rapproche, dans le plus profond respect de leur identité, des pays très divers mais tous également attachés, grâce au partage d'une même langue, à la promotion de la paix, de la justice, de la sécurité, de la solidarité, de la démocratie ainsi qu'au respect des droits de l'Homme et des libertés fondamentales qui sont universels et inaliénables.

 

Je saisis cette occasion pour souligner aussi combien le Secrétaire général de notre Organisation, Monsieur Boutros Boutros‑Ghali, souhaite faire entendre la voix de la Francophonie à l'unisson de celle de la Communauté internationale et associer nos efforts à tous ceux qui sont entrepris pour l'appui à la paix et le règlement pacifique des différends, partout dans le monde et spécialement sur le continent africain, qui compte nombre de nos Etats membres, continent encore trop déchiré par de multiples et sanglants conflits.

 

Mesdames et Messieurs,

 

J'évoquais, à l'instant, la double lignée des rencontres internationales dans laquelle la 4é' conférence mondiale sur les femmes s'est tenue à Pékin, ce qui nous conduit maintenant à en dresser le bilan et à tracer des perspectives mieux assurées pour réaliser son plan d'action.

 

La seconde lignée est naturellement celle des grandes conférences consacrées aux femmes et je dirai que nous célébrons aussi aujourd'hui, en quelque sorte, Mexico +25.

 

Un quart de siècle n'aura certainement pas suffi à aplanir toutes les difficultés tant elles tiennent, sans doute, d'abord à la nature humaine.

 

La discrimination à l'égard des femmes, dont les effets s'exercent tant à des niveaux que dans des secteurs divers dans le monde entier, sous‑tend le troisième et dernier thème, après le développement et la paix, assigné à la présente Conférence, celui de l'égalité entre les sexes.

 

Pourtant c'est bien à Vienne aussi, voici près de 10 ans; que l'on affirmait que "les droits fondamentaux des femmes et des fillettes font inaliénablement partie des droits universels de la personne".

 

L'Assemblée générale des Nations Unies a adopté en octobre dernier une résolution qui vient renforcer par un protocole facultatif la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

 

Je voudrais dire ici au nom de notre Secrétaire général, Monsieur Boutros Boutros­Ghali, tout le prix que nous attachons à cette démarche. Et rappeler de même que c'est précisément dans cet esprit que le 8eme Sommet de la Francophonie, auquel le Secrétaire général des Nations Unies, Monsieur Kofi Annan, a bien voulu nous honorer de sa présence, à Moncton au Canada Nouveau Brunswick en septembre 1999, que le Sé,e Sommet donc a demandé à Monsieur Boutros‑Ghali d'oeuvrer, de concert avec les organisations internationales compétentes, à l'établissement d'un rapport sur l'état des ratifications des grands instruments juridiques internationaux et sur leur mise en oeuvre.

 

Mesdames et Messieurs,

 

Tel est donc l'engagement de la communauté francophone qui entend ainsi répondre aux objectifs de la présente Conférence : "les femmes en l'an 2000: égalité, développement et paix pour le 21 éme siècle".

 

Cet engagement se trouve décliné, en particulier, dans la Déclaration de Luxembourg que je mentionnais précédemment.

 

Mais il n'est assurément pas nouveau puisque nous avons procédé à des concertations au sein de l'espace francophone dès 1994 dans la perspective de Pékin, et que nous les avons poursuivies constamment depuis.

 

Les enjeux sont, en effet, déterminants pour l'évolution de la condition des femmes nous avons dû faire, ces jours derniers encore, le constat de beaucoup d'échecs depuis qu'à Mexico nous avions cristallisé nos premières espérances.

Mais ce début de siècle nous invite, maintenant, à relever de nouveaux défis tant la modernité s'impose à nous chaque jour davantage.

 

C'est pourquoi, en dépit des multiples difficultés qui continuent, encore maintenant, d'obstruer pour les femmes la voie de l'égalité, du développement et de la paix au 21ème siècle, nous devons nous mobiliser plus encore grâce à une solidarité agissante, qui suscite des réseaux de partenariat concrets et efficaces, afin de poursuivre nos efforts.

 

De plus, comme on l'a dit à Luxembourg, "si nous voulons véritablement changer les mentalités et faire de l'égalité une réalité, il est essentiel de créer les conditions pour que tant les femmes que les hommes puissent s'impliquer" et contribuer ensemble à y parvenir, ainsi que le souhaitait vivement, en particulier, le Ministre de la Promotion féminine du Luxembourg ici même, en mars dernier.

 

Ne nous laissons donc pas emporter par trop de doutes devant les échecs ou à tout le moins la stagnation de nos actions passées en faveur de la promotion de la femme. Certes, des problèmes majeurs subsistent et notamment dans le domaine économique : au Sommet de Moncton, la Francophonie a clairement marqué sa volonté de poursuivre ses efforts pour lutter contre la pauvreté et s'employer à persuader la communauté internationale d'adopter une attitude plus équitable sur la question de la dette, particulièrement celle des Pays les moins avancés .

 

Les femmes, on l'a souligné ici, sont durement frappées par la pauvreté, et je dirai surtout par la paupérisation croissante dans tous nos pays, aussi bien au Nord qui a dû souffrir de la récession et du chômage, qu'au Sud qui ne s'est pas encore approprié tous les bénéfices de l'industrialisation.

 

Cependant, le monde dans lequel nous vivons, ce 21ème siècle où nous pénétrons, ne doit en aucun cas devenir uniforme : aujourd'hui, comme le rappelle instamment le Secrétaire général de la Francophonie, il est clair que seul le respect des diversités est viable.

 

La Francophonie qui se veut solidaire, s'entend également comme une communauté d'essence plurielle. Et cet élément aussi est primordial pour la femme : la différence est toujours, selon le cas, une force ou une faiblesse. C'est aux femmes elles‑mêmes qu'il revient d'en faire une force : pour que les femmes accèdent, dans lâ dignité et la tolérance, à tous les niveaux de décision, elles devront abandonner leur comportement de minorité dès lors

qu'elles sont la majorité.

 

Permettez moi, pour conclure, d'emprunter à une ethnologue et africaniste de renom cette citation : "il ne faut pas oublier qu'une civilisation nouvelle ne pénètre vraiment et totalement la société que lorsqu'elle a été  assimilée par les femmes. Ce sont elles les gardiennes des traditions, mais c'est par elles qu'une ère nouvelle s'instaurera dans la société, qui changera les relations de personne à personne pour le plus grand bien des individus" .

 

Je vous remercie de votre attention.