REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

DECLARATION DE
Son Excellence Monsieur AGBA OTIKPO MEZODE
Ministre des Affaires Étrangères
57ème Session de l'Assemblée Générale des Nations Unies
New York, le 19 septembre 2002

Monsieur le Président,
Monsieur le Secrétaire général des Nations Unies,
Mesdames et Messieurs les Chefs de Délégation,
Distingués Délégués,

La 57ème Session de l'Assemblée générale se tient un an après l'effroyable attentat terroriste du 11 septembre 2001.

La Délégation de la République Centrafricaine ressent encore intimement la forte émotion suscitée par cet acte attentatoire à la liberté et à la Démocratie.

Le Président de la République, Chef de l'État, Son Excellence ANGE FÉLIX PATASSE en conduisant lui-même la délégation de la République Centrafricaine à la Commémoration de la Journée du souvenir a voulu renouveler son amicale sympathie au Gouvernement et au Peuple américains et à réaffirmer la ferme détermination de son Pays à tout mettre en œuvre pour contribuer efficacement à la légitime croisade internationale contre le terrorisme sous toutes ses formes.

Nos travaux s'ouvrent dans un contexte particulier de l'histoire des relations internationales, car jamais, l'humanité n'aura autant pris conscience de la nécessité d'asseoir sa cohésion pour assurer un monde de concorde, de solidarité et de paix.

Mais avant de nous étendre sur cette réalité, je voudrais, Monsieur le Président, au nom de ma délégation vous adresser ainsi qu'aux membres de votre Bureau, nos chaleureuses félicitations pour votre élection à la présidence de notre session. Votre riche expérience de grand homme d'État et de diplomate nous assure déjà du succès de nos travaux qui bénéficieront de la totale coopération de la délégation de la République Centrafricaine.

Je profite de l'occasion pour exprimer notre admiration à votre éminent prédécesseur, Monsieur HAN SEÜNG SOO pour la dextérité et la compétence avec lesquelles il a accompli son mandat.

Monsieur le Président,

La détermination avec laquelle le Secrétaire Général de notre organisation, Monsieur Kofi ANNAN s'emploie en toutes circonstances à faire prévaloir les principes et les idéaux des Nations Unies force une fois de plus notre admiration. Le Président de la République, le Peuple et le Gouvernement centrafricains tiennent ici à l'assurer de tout leur soutien et lui renouvellent leur profonde gratitude pour ses rapports objectifs sur la situation en République Centrafricaine.

Enfin, l'admission de la Confédération Suisse aux Nations Unies et bientôt celle de la République Démocratique du Timor Oriental, atteste de la marche résolue de notre Organisation vers l'universalité.

La République centrafricaine souhaite la bienvenue à la Suisse et espère entretenir activement une coopération avec elle dans le cadre des Nations Unies.

Monsieur le Président,

Il y a deux ans, 189 Etats Membres se sont réunis ici même ; ils se sont fixé des objectifs de développement pour le Millénaire parmi lesquels la réduction de l'extrême pauvreté, l'assurance de l'Education Primaire pour tous ;


- la promotion de l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes ;
- la réduction de la mortalité infantile ;
- l'amélioration de la santé maternelle ;
- le combat contre le V.I.H./SIDA et autres maladies dont le paludisme et la tuberculose ;
- la préservation d'un environnement durable ;
- la mise en place d'un partenariat mondial pour le Développement.

Tous les Etats à l'unanimité, se sont engagés dans une DECLARATION dite du MILLENAIRE à atteindre ces objectifs au bout de 15 ans, au moyen de la coopération multilatérale.

Monsieur le Président,

Le constat que nous avons dressé à l'occasion du Sommet du Millénaire sur l'état de la marche du monde a révélé de profonds manquements quant à notre volonté de satisfaire collectivement aux idéaux légués par les pères fondateurs de notre organisation.

Toutefois, par cette même volonté, nous avons entrepris, à travers la Déclaration du Millénaire, de nous remettre en cause afin de contribuer à imprimer au monde un cours qui corresponde aux aspirations et aux attentes des peuples.

Or, loin s'en faut ! La révolution de l'information et des communications, le progrès de la science et de la technique, la libéralisation des échanges, la disparition des frontières étatiques tout en accentuant le phénomène de la mondialisation n'ont pas moins secrété un autre cours, celui d'avoir rendu l'avenir tout aussi incertain qu'imprévisible, au point que le monde court aujourd'hui des menaces susceptibles à terme d'en saper l'équilibre.

Les Etats devraient pleinement explorer tous les ressorts qu'offre la coopération multilatérale, dans le cadre des Nations Unies, notamment, pour faire échec à ces menaces qui sont essentiellement de quatre ordres du point de vue de ma délégation.

La première, vous vous en doutez, Monsieur le Président, est cette menace qui a fait basculer le monde en une heure et qui a pour nom le terrorisme. Cette forme diffuse de criminalité organisée, transfrontalière, qui déjoue les armées les plus puissantes soientelles, ne saurait être tolérée. La réaction réservée par la communauté internationale à cette nouvelle forme d'agression doit être soutenue aussi bien par l'adhésion aux Résolutions condamnant fermement ces actes que par l'attitude à observer devant les pays et institutions qui sont complaisants avec les auteurs. Ainsi, tous ensemble, par le jeu de la solidarité, par le jeu de la coopération multilatérale, nous vaincrons le terrorisme, qu'il soit d'Etat ou de groupuscule.

La destruction de l'environnement qui hypothèque chaque jour notre avenir constitue également une menace réelle. Nous devons oeuvrer à la préservation durable de la forêts, de la faune et de la biodiversité dans l'intérêt des générations actuelles et futures. Le diagnostic dressé sur la question par le Sommet pour le Développement Durable tenu récemment à Johannesburg est plus qu'éloquent. Ma délégation ne doute pas que la solidarité internationale puisse encore ici être d'un recours pour la sauvegarde de la nature. C'est l'occasion d'apprécier l'initiative américaine soutenue par la Communauté internationale pour la protection du Bassin du Congo dont fait partie la République Centrafricaine.

Monsieur le Président,

Il est une menace qui ne dit pas son nom tant elle est évidente: c'est la pauvreté dont l'état, au lieu de reculer, s'amplifie au fils des ans. La Déclaration parle de sa réduction, mais encore faut il cesser de la produire ? La famine, les maladies endémiques, le VIH/SIDA, le paludisme sont le lot quotidien des 2/3 de l'humanité qui ne vivent qu'avec 1 dollar américain à peine par jour! Comment ne pas. s'en émouvoir ? Cette frange de l'humanité ne demande simplement que joue la solidarité à son égard pour lui permettre de vivre dans des conditions dignes de notre civilisation.

Devant le tarissement de l'aide publique au développement et par rapport aux échecs enregistrés ici et là quant au lancement de certaines initiatives destinées à favoriser le développement, les pays africains ont estimé qu'il leur fallait plutôt développer une sorte de partenariat avec les pays du Nord. Ils ont donc ainsi proposé un plan original pour le développement de l'Afrique à travers le NEPAD. La délégation de la
République Centrafricaine appelle de ses voeux le soutien de la communauté internationale sous toutes les latitudes pour la mise en couvre de ce plan.

Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,

Ces nombreux défis recensés par le Sommet du Millénaire et définis en termes d'objectifs à atteindre ainsi que ce nouveau plan de développement pour l'Afrique n'auront de chance de succès que s'ils bénéficient d'un environnement de Paix, de Sécurité et de Stabilité.

Cependant, le constat actuel n'incite pas beaucoup à l'optimisme quoique, ici et là, on note quelques inflexions positives dans le règlement de quelques conflits. Mais il demeure encore des crises régionales qui ne sont pas moins sources de menace contre la Paix.

Fidèle à sa doctrine, la République Centrafricaine estime que la situation au Proche Orient ne peut être réglée que par une application stricte des résolutions pertinentes des Nations Unies sur la question. Elle déplore l'escalade de la violence dans cette région.

Monsieur le Président,

Nous situant dans notre sphère régionale et sous-régionale, la République centrafricaine apprécie hautement la dernière évolution intervenue dans la situation en République Démocratique du Congo, notamment la signature de l'Accord de Paix de Pretoria avec le Rwanda d'une part ainsi que l'accord de désengagement signé avec l'Ouganda d'autre part.

Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Distingués Délégués,

Je me dois de constater, pour conclure, que mon pays, la République Centrafricaine est victime d'un ostracisme international, d'une indifférence qui frise le mépris ! Sinon comment comprendre le silence de la Communauté Internationale, des Institutions financières internationales en dépit des appels à intervention, des résolutions du Conseil de sécurité suite aux rapports du Secrétaire général depuis ce fameux 20 mai 2000 ? Malgré les appels de l'Organisation de l'Unité africaine (OUA) devenue aujourd'hui Union africaine et en dépit de ceux de la CENSAD (Communauté des Etats Sahelo-Sahariens) et de la CEMAC (Communauté Economique de l'Afrique Centrale) ?

Pourtant ! Que de chemin parcouru par notre Pays en matière de bonne gouvernance, ce mot FETICHE ! que ce soit en politique, en économie ainsi que dans les Finances!

Depuis le début de l'année 2002, l'option réduction de la corruption n'est plus une vue de l'esprit ; les actions dans les régies financières en portent témoignage.

Monsieur le Président,
Mesdames, Messsieurs les Chefs de Délégations,
Distinguées Délégués,

Cette situation de mon pays m'incite à proposer à votre méditation ces vers de l'écrivain algérien KHATEB YACINE, je cite:

« Il faut que notre sang s'allume et que nous prenions feu. Pour que s'émeuvent les spectateurs !
Et que le monde ouvre les yeux Non pas sur nos dépouilles, mais sur les plaies des survivants. » Fin de citation.

Le Développement durable dont nous rêvons tous ne deviendra réalité que si, aujourd'hui et maintenant, nous intégrons la solidarité dans les relations internationales.

Je vous remercie.

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