CAMEROON
 

Déclaration
de
S.E.M. Martin BELINGA EBOUTOU
Ambassadeur Extraordinaire et Plenipotentiaire
Representant Permanent du Cameroun auprès des Nations Unies

56è Session de 1'Assemblée
Générale des Nations Unies
 

New York, le 15 novembre 2001

(à verifier à l'audition)

Monsieur le Président,

Rarement Session de l'Assemblée Générale des Nations Unies n'aura autant focalisé l'attention de l'opinion publique internationale et mobilisée les grands médias d'information de la planète, que celle-ci.

Les assises annuelles de l'Assemblée symbolisent hautement le rapprochement entre les Nations, la promotion des cultures, les respects des différences et des libertés. Cette année, nos assises sont voilées de sombre par le souvenir, très proche dans l'espace et le temps des terribles attentats du 11 septembre 2001. Le Cameroun a eu à s'exprimer sur cette question le 05 octobre lors du débat sur le terrorisme international.

Qu'il me suffise, aujourd'hui, de renouveler au nom de Son Excellence le Président de la République du Cameroun, Paul BIYA, nos sincères condoléances aux familles éprouvées par ce drame, notre solidarité à la ville de New York et au Gouvernement des Etats-Unis.

Naturellement, il nous faut émerger du deuil. Nous devons unir nos forces pour éliminer les foyers destructeurs à l'origine de cette tragédie. Tous ensemble, chacun des Etats membres des Nations Unies, nous devons étouffer dans l'oeuf toute propagation du terrorisme international. Baisser les bras face à ce peril majeur ou apnaraître désarmé face aux fanatiques criminels qui sèment la terreur reviendrait à exposer chaque individu vivant sur cette terre, à exposer chacun de nos Etats à être une victime potentielle de ce danger mortel.
 

Monsieur le President,

Vous appartenez au peuple patient, sage et résolu de Corée, votre pays, qui mène de longue date un courageux combat politique en faveur de la cicatrisation des déchirures du passé entre les peuples coréens. Nous sommes convaincus que vous saurez assurer la présidence de cette 56è Session de cette Assemble Générale qui intervient dans une période de forte turbulence. La coopération pleine et entière de ma délégation vous est acquise.

La délégation du Cameroun voudrait dire, toute son appréciation à votre prédécesseur Son Excellence Harri HOLKERI,qui a présidé avec maestria la 55è Session de l'Assemblée Générale. Il a su parfaitement restituer cette image d'une Finlande modeste, généreuse et solidaire.

L'attribution du Prix Nobel de la Paix à l'Organisation des Nations Unies et à Son Secrétaire Général constitue un motif d'espoir et d'optimisme quant aux ressorts de l'Organisation. Le Cameroun se félicite de ce double couronnement.

Comme l'a indiqué dans son message de félicitations au Secrétaire Général, le Chef de l'Etat du Cameroun, l'Afrique est fière du choix de Son Excellence Kofi ANNAN par le jury d'Oslo.

Cette récompense renforce et confirme l'unanimité et la confiance de l'Assemblée Générale, qui ont présidé à la reconduction quasi naturelle de ce grand serviteur des peuples des Nations Unies pour un second mandat consécutif de Secrétaire Général.

Enfin, tous les Etats membres des Nations Unies doivent être fiers de l'attribution conjointe du Nobel de la Paix à l'Organisation. C'est la première fois qu'une telle distinction honore l'Organisation des Nations Unies elle?méme. Ce geste confirme si besoin est que l'ONU dont nous sommes tous acteurs, incarne bel et bien ce rôle d'instrument majeur de la paix mondiale.
 

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs,

Instrument de la paix mondiale, les Nations Unies se sont saisies presque au lendemain des attaques du 11 septembre, à la fois du dossier de la lutte contre le terrorisme international et de celui de la crise en Afghanistan.

La communauté internationale dans son ensemble, à travers les résolutions du Conseil de Sécurité et celles de l'Assemblée Générale, a soutenu l'intervention militaire menée contre les cerveaux présumés des attaques, leurs réseaux et contre leurs protecteurs Talibans.

De la même façon que nous nous sommes inclinés devant la mémoire des victimes de New York, Washington et de la Pennsylvanie, nous nous inclinons devant la mémoire des victimes civiles en Afghanistan et notamment des trois journalistes français et allemand.

Pour le Cameroun, les criminels présumés doivent répondre de leurs actes. Nous invitons par ailleurs la communauté internationale à tout mettre en oeuvre pour éviter que l'Afghanistan ne renôue avec les vieux démons des conflits entre les clans armés qui ont défait Talibans. Voilà pourquoi le Cameroun en appelle à une manifestation immédiate de la présence des Nations Unies à Kaboul

En vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par la communauté internationale, notamment en vertu du chapitre 7 de la Charte, le Conseil de Sécurité, avec le soutien nécessaire de l'ensemble des membres de notre Organisation, doit sans délai mettre en oeuvre toutes les actions nécessaires pour restaurer et maintenir la paix en Afghanistan et porter une assistance humanitaire aux populations démunies et traumatisées par les affres d'une guerre civile qui n'en finit plus.

Il faut d'urgence éviter que le feu de la guerre ne se propage durable à travers l'Afghanistan. Mais nous nous devons pas également de rappeler à cette tribune qu'il est plus que temps d'éteindre les feux qui embrasent depuis des décennies la Palestine, pourtant terre de paix ; il nous faut éteindre les feux qui dévorent, conflit après conflit, la République Démocratique du Congo et la region des Grands Lacs, les feux qui consument depuis plus d'un quart de siècle l'Angola. Il est grand temps, Mesdames et Messieurs que se dressent des pompiers, à l'image des soldats du feu de New York, le 11 septembre dernier, pour mettre fin aux guerres fratricides du continent africain, d'Amérique Centrale et d'autres contrées déshéritées de la planète.

Mesdames et Messieurs, nous devons demeurer vigilants afin de préserver la paix particulièrement fragile dans la région des Balkans.

Le meilleur pompier pour endiguer les ravages de la guerre, les menaces qui planent sur la paix et la sécurité daps le monde est, nous en sommes convaincus l'Organisation des Nations Unies. Mais sans la volonté des Etats, sans le respect par ces Etats des règles communes adoptées par l'ONU, il est vain d'espérer parvenir au résultat que la Charte fixe à l'Organisation.

L'action de l'ONU sera sans effet, dès lors que les résolutions adoptées par l'Organisation pour contribuer au règlement d'un conflit ne sont pas respectées par les parties concernées et intéressées.

Pourquoi depuis plus d'un demi-siècle n'a t-on pas trouvé un terme au conflit du Moyen Orient qui oppose plus brutalement, plus violemment que jamais palestiniens et israéliens ?

Pourquoi, ne trouve t-on pas toujours les ressources nécessaires aux Nations Unies afin de juguler dès le départ, ces guerres fratricides qui saignent et disloquent des régions entières du continent africain depuis l'aube des indépendances ?

Ces questions sont lancinantes et permanentes dans l'opinion publique internationale.

De la même façon que tous les hommes doivent naturellement être égaux en droit, les Etats se doivent d'être traités sur le même pied d'égalité dans le respect du droit international et des principes définis par les Nations Unies.

La mise en oeuvre de l'application des résolutions et recommandations, adoptées lors du Sommet du Millénaire, permettraient de faire une grande avancée vers ce monde d'harmonie que la mondialisation est censée instaurer. L'homme, la préservation de sa vie et de sa dignité, sous quelque latitude que ce soit, doivent redevenir nos priorités et occuper la place centrale de nos actions.

Les attaques du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis et l'apparition au grand jour du terrorisme international doivent nous inciter à l'action bien sûr, mais également à la réflexion.

Nous avons en effet vu que les promoteurs de ceux qui mettent ainsi en danger le nouvel ordre mondial invoquent aussi la politique du poids deux mesures pour justifier leurs actes fanatiques. Nous avons pu lire aussi dans nombre de leurs communiqués qu'ils prétendaient mener une croisade au nom d'une communauté religieuse qui serait injustement maltraitée par une autre. Enfin nous avons compris qû'ils ont également avancé comme argument, les conditions de vie de plusieurs centaines de millions d' individus des peuples les plus pauvres parmi les pauvres, pour soi-disant combattre la partie du monde qui les pille et les domine en les maintenant dans une totale indifférence.

Nous devons tout faire pour ne pas offrir pareils alibis et prétextes à des individus et à des groupes qui n'ont en fait que des motivations criminelles.

Le Cameroun a soutenu et soutient toujours que les Nations Unies doivent plus que jamais continuer à affirmer les nécessaires liens de solidarité au sein de la communauté internationale, elles doivent continuer à affirmer la nécessité d'un équilibre duns les relations internationales. Le soutien et l'aide au développement des régions les plus pauvres du monde sont un impératif rappelé dans les résolutions du Sommet du Millénaire mais également lors du dernier Sommet sur les pays les moins avancés tenu cette année à Bruxelles. Les efforts déployés par les pays du Sud, pour leur redressement, notamment la nouvelle initiative africaine en matière économique, doivent être accompagnés et appuyés par les Etats les plus prospères.

Au cours de la session annuelle du Conseil Economique et Social, l'été dernier à Genève, que le Cameroun a eu l'honneur de présider, ces principes et exigences ont largement été rappelés.
 

Mesdames et Messieurs,

En dépit des engagements pris Sommet Mondial après Sommet Mondial, le fossé entre les régions du Nord et le Sud se creuse chaque jour davantage. La misère, la pauvreté, les épidémies, la pandémie du Sida, le décalage technologie ne sont pas une fatalité. Outre le jeu de la solidarité, une pratique plus juste et plus équilibrée des échanges commerciaux, avec notamment l'ouverture du marché aux pays les plus défavorisés, peuvent aussi contribuer à combler ce fossé. La prochaine Conférence internationale sur le financement du développement sous l'égide des Nations Unies, l'année prochaine au Mexique, devrait être l'opportunité d'une réflexion approfondie autour des ces priorités.

Monsieur le Président, le ler janvier 2002 le Cameroun siègera au conseil de Sécurité au titre de l'Afrique, comme membre non permanent. Je voudrais exprimer au nom de Son Excellence Paul BIYA, Président de la République du Cameroun toute notre gratitude à l'ensemble des Etats membres de notre Organisation pour la confiance faite à mon pays.

Dans les circonstances internationales du moment nous mesurons à sa juste valeur cette confiance.

Le Cameroun s'engage à assumer pleinement le devoir de sa charge en apportant, au Conseil, sa modeste contribution au maintien de la paix et de la sécurité internationales.

Le Cameroun vous remercie.