PRINCIPAUTE DE MONACO

DECLARATION DE

SON ALTESSE SERENISSIME
LE PRINCE HEREDITAIRE ALBERT DE MONACO

 PRESIDENT DE LA DELEGATION MONEGASQUE

AU DEBAT GENERAL DE LA
56EME SESSION DE L'ASSEMBLEE GENERALE DES NATIONS UNIES

11 NOVEMBRE 200 I
NEW YORK

(VERIFIER AU PRONONCE)




Monsieur le Président,
Monsieur le Secrétaire général,
Excellences,
Mesdames, Messieurs,

M'exprimant du Siège de Notre Organisation - Prix Nobel de la Paix 2001- qu'accueille New York si tragiquement meurtrie, Mes premiers mots sont tout naturellement pour renouveler à l'intention de la Délégation des Etats-Unis et, au-delà d'elle, au grand pays ami qu'elle représente et au peuple américain, l'expression de la profonde sympathie de la Principauté de Monaco. Face à des actes insensés ne pouvant que susciter l'horreur et l'indignation, Nous Nous sentons spontanément solidaires dans l'épreuve comme dans ce qu'il revient à la communauté internationale de déterminer et de mettre en oeuvre pour qu'à l'avenir soient épargnées à Nos Etats et à Nos sociétés d'autres violences révoltantes.

Je veux maintenant vous renouveler, Monsieur le Président, en y associant l'ensemble des membres du Bureau, de chaleureuses félicitations pour votre élection à la Présidence de Notre Assemblée générale. Je suis convaincu que Nos travaux seront menés, sous votre haute autorité, dans le sens le plus favorable à l'attente de la communauté internationale. Soyez, en tout cas, assuré de l'esprit de coopération de la Délégation monégasque.

Je tiens aussi à saluer la brillante réélection de Notre Secrétaire général, témoignage hautement significatif de la confiance qu'ont su lui gagner ses qualités d'intelligence et d'humanité, associées à une connaissance très avisée des conditions dans lesquelles doit s'exercer sa noble mission au regard des affaires du monde dont Notre Organisation est saisie. Qu'il soit également assuré de la très grande satisfaction avec laquelle la Principauté de Monaco s'est associée au renouvellement de son mandat et de la collaboration sans réserve qu'elle continuera, avec conviction, à lui offrir.

Nous Nous réjouissons grandement que le Prix Nobel de la paix 2001 lui ait été attribué conjointement avec Notre Organisation, récompense totalement méritée et justifiée qui devrait Nous inciter encore davantage, Nous Etats membres des Nations Unies, à nous unir avec lui pour défendre la paix et combattre les nombreux germes de conflits qui menacent Notre monde, le terrorisme, les violations des droits de l'homme, le sous développement et les pandémies telle celle du SIDA.
 

Monsieur le Président,

Les circonstances tragiques dans lesquelles se déroule cette session de Notre Assemblée générale nous font un devoir de contribuer, avec plus de détermination encore que nous ne l'avons fait dans le passé, à la lutte contre le terrorisme dont les manifestations, comme on l'a constaté, peuvent, par leur ampleur comme par le défi qui les guide, mettre gravement en péril la paix et la sécurité internationale. La Principauté de Monaco apporte un soutien résolu à tout ce qui a été arrêté et mis en oeuvre au niveau de Notre Organisation pour juguler un fléau si dévastateur au regard notamment des principes auxquels tous, Nous Nous identifions.

Que quelques armes blanches par destination, comme les qualifieraient les juristes, aient suffit pour abattre des symboles parmi les plus modernes et les plus sophistiqués du génie humain nous confirme, hélas, la fragilité de Nos sociétés, fragilité que les concentrations urbaines et l'interdépendance dans tous les domaines vitaux de leur fonctionnement rendent encore plus vulnérables face au mépris sans limite de certains pour la vie et la dignité humaines.

Parmi les engagements auxquels Nos Etats ont adhéré, au nom de leur peuple, en signant la Charte de l'ONU ne figure-t-il pas en premier lieu, l'obligation de maintenir la paix et la sécurité internationales, de développer entre les nations des relations amicales et d'encourager le respect des droits de l'homme et des libertés, engagements que quelques terroristes, dans leur aveuglement dépersonnalisé, n'ont pas hésité à renier avec une odieuse insolence et la plus sauvage brutalité.

Deux mois se sont écoulés, jour pour jour, depuis ce dramatique événement. Si l'émotion est loin d'être retombée, le temps bienfaiteur commence à Nous apporter un peu du recul nécessaire à une réflexion moins contingente à propos de ce surprenant défi politique et de cette tragédie humaine inacceptable.

L'Assemblée générale a très rapidement tenu à lancer cette réflexion à l'occasion du débat qu'elle a consacré au début du mois d'octobre aux mesures visant à éliminer le terrorisme international. Le Conseil de sécurité avait déjà, de son côté, parfaitement indiqué les premières voies et les principales orientations à suivre. Le Secrétaire général, quant à lui, n'a pas manqué à plusieurs reprises d'appeler les Etats membres à rester plus que jamais unis. Il semble qu'il ait été parfaitement entendu.

Si le terrorisme n'a pas, ce 11 septembre, changé de nature, il a changé d'échelle. L'Assemblée générale a choisi d'y répondre par une cohésion parfaite, plutôt rare dans son histoire. Le Conseil de sécurité, en adoptant sa résolution 1373, n'a pas hésité lui-même à avoir recours à toute la portée et la plénitude des pouvoirs que lui octroie la Charte au titre de son Chapitre VII. Il a constaté l'existence d'une menace contre la paix et d'un acte d'agression et décidé, en conséquence, de mesures exceptionnelles que la Principauté de Monaco s'honore d'appliquer.

Pour donner suite à ces initiatives avec l'efficacité qui s'impose, il s'agit, pour Nous, non seulement d'appliquer ces résolutions, expression de Notre volonté commune et de Notre engagement contre le terrorisme, d'élaborer de nouveaux accords et de nouvelles conventions mais encore et surtout d'associer Nos expertises pour mettre en ceuvre ceux déjà conclus auxquels nous avons ou Nous Nous proposons d'adhérer. L'amélioration de l'action normative de Notre Organisation est à la fois indispensable et prioritaire. Nous en sommes conscients. Le Gouvernement Princier également. Ainsi, J'ai signé et déposé hier, au nom du Prince Souverain, Mon Père, les instruments de ratification de la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme. La Principauté de Monaco considère en effet comme essentielle une action coordonnée au niveau mondial contre toutes les formes de financement du terrorisme afin de priver les mouvements extrémistes des ressources qui leur permettent de nuire si gravement à la communauté internationale et à ses profondes aspirations à la paix et à la sécurité. L'Afghanistan, pays dont une large part du territoire est occupée et dont le peuple est en partie asservi en est aujourd'hui l'exemple le plus révélateur.
 

Monsieur le Président,

La déclaration du Millénaire, exceptionnelle par sa hauteur de vues autant que les conclusions de conférences mondiales récentes, celle sur le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects ou encore celle tenue à Durban contre le racisme, la discrimination raciale et la xénophobie méritent également une attention particulière. Elles peuvent certainement et très largement contribuer à améliorer, pour la première, la sécurité internationale et, pour la seconde, la compréhension entre les peuples.

S'agissant d'ailleurs de la lutte contre le racisme, objet de la Conférence mondiale de Durban, Je tiens à mentionner que le Gouvernement Princier a décidé de reconnaître la compétence du Comité institué par la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale pour recevoir et traiter les communications émanant de personnes ou groupes de personnes dénonçant une violation de l'un des droits énoncés dans cet instrument dont Monaco est partie.
 

Monsieur le Président,

La coopération économique et financière internationale avec ses conséquences humaines et sociales inéluctables ne devraient pas, non plus, échapper aux réflexions suscitées par les événements, lesquelles s'imposent plus que jamais face aux interrogations actuelles.

La mondialisation des échanges de biens, de produits et de services, tant décriée par certains tant encensée par d'autres, parce qu'elle est en partie le fruit de nouvelles interdépendances, doit également s'inscrire dans Nos démarches intellectuelles et tangibles les plus urgentes afin qu'au-delà des contraintes et des impératifs qui la conduisent, l'être humain retrouve sa juste et légitime place. L'économie ne doit-elle pas avant tout être au service des femmes et des hommes de Notre temps en respectant autant leurs aspirations légitimes et leurs besoins essentiels que la richesse séculaire de leurs diversités.

La coopération régionale et sous-régionale semble particulièrement propice à une ambition de telle nature. Mon pays en est convaincu et s'y emploie au niveau méditerranéen en matière commerciale, culturelle et technique comme en faveur du développement durable et de la protection de l'environnement.

Les activités qui, par leur caractère, tendent à rapprocher les hommes et les femmes d'horizons différents, par exemple, les manifestations artistiques et culturelles, les rencontres académiques et les compétitions sportives ne devraient pas non plus être négligées.

La délégation monégasque interviendra lors de l'examen de la question intitulée "Pour l'édification d'un monde pacifique et meilleur grâce au sport et à l'idéal olympique" afin de rappeler, à ce titre, le rôle irremplaçable de l'éducation physique et du sport.

Autre source de rapprochement entre les communautés humaines, le multilinguisme dont Notre Organisation se doit de donner l'exemple. Ce thème essentiel fera l'objet, cette année, d'un échange de vue. La Principauté de Monaco entend également s'exprimer à ce sujet afin de faire valoir son remarquable et incontestable bienfait pour une compréhension authentique et un respect mutuel des peuples.
 

Monsieur le Président,

Aux côtés des sciences et des techniques modernes qui progressent et s'universalisent rapidement favorisant incontestablement les échanges entre les peuples, une place importante ne devrait-elle pas aussi être réservée à des formes plus traditionnelles de communication.

L'enseignement et l'information ont, à Notre sens, et plus que jamais, un rôle fondamental à jouer pour répandre des idées de paix et d'entente parmi les femmes et les hommes de Notre temps troublé.

La Conférence générale de L'UNSCO nous a doté, à cet égard, de textes normatifs remarquables, d'instruments de travail et de programmes qu'il Nous appartient de faire revivre avec davantage d'allant afin d'offrir une plus grande espérance à Notre jeunesse, souvent déconcertée par l'âpreté de la vie quotidienne.

Nous pensons aussi, et très souvent, aux mers et aux océans qui ont tant contribué dans les temps anciens aux rencontres des civilisations et à la multiplication des connaissances, enrichissant arts et cultures tout en développant le commerce et les solidarités.

La délégation monégasque s'exprimera à ce sujet lors de l'examen, dans quelques jours, de la question concernant les océans et le droit de la mer. Mon Pays reste traditionnellement très attaché à une meilleure connaissance scientifique et à la protection attentive du milieu marin, source indispensable à l'épanouissement harmonieux de la vie.

Ainsi, la Principauté de Monaco, avec d'autres Etats membres, sollicite Notre haute Assemblée, d'accorder à l'Organisation hydrographique internationale dont elle accueille le siège, le statut d'observateur et ce, afin de permettre à cette institution de renforcer sa coopération intergouvernementale et de développer les initiatives et les échanges internationaux en matière de cartographie marine, initiatives et échanges destinés à mieux connaître les fonds marins et les zones côtières en vue notamment de rendre la navigation plus facile et plus sûre.
 

Monsieur le Président,

Le respect des décisions et des résolutions prises par Nos Instances, le renforcement de Notre action normative ainsi que la mise en oeuvre des déclarations et plans d'actions de Nos récentes conférences mondiales, tout cela représente pour le Gouvernement Princier un engagement de valeur auquel les Autorités monégasques, sont très attachées. Dans les temps difficiles qui sont les Nôtres, ils représentent des références partagées qui nous incitent à agir de concert dans l'intérêt de Notre communauté internationale, c'est-à-dire aussi dans l'intérêt, bien compris, de chacun de Nos pays.

Pour clore Mon intervention sur une note optimiste, laissez-Moi espérer, Monsieur le Président, - beaucoup ici, je pense, partage cet espoir - que la sagesse des nations plus que jamais unies, sache tout en extirpant de ce monde les racines perverses qui l'alimentent rapidement triompher de ce mal absolu que représente le terrorisme sous sa forme nouvelle à la fois globale et universelle.

je vous remercie de votre attention.