8724e séance – matin
CS/14110

Guinée-Bissau: en attendant la décision finale sur les résultats de la présidentielle, la Représentante spéciale prépare le retrait du BINUGBIS

La Représentante spéciale du Secrétaire général pour la Guinée-Bissau a dit ce matin s’inquiéter de « l’intensification des tensions politiques » dans le pays, au cours d’une séance d’information du Conseil de sécurité où elle a donné des détails sur le retrait du Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Guinée-Bissau (BINUGBIS) prévu le 31 décembre 2020.  Après l’élection présidentielle contestée, le retour à une paix durable ne sera possible que s’il y a la volonté politique de toutes les parties, a estimé Mme Rosine Sori-Coulibaly, qui est à la tête du BINUGBIS.

Elle a rappelé qu’à la suite de l’élection présidentielle en 2019 et de l’annonce par la Commission électorale nationale de la victoire de M. Umaro Sissoco Embaló, candidat du Mouvement pour l’alternance démocratique (MADEM‑G15), le candidat du PAIGC, M. Domingos Simões Pereira, avait déposé une plainte pour fraude électorale devant la Cour suprême.

Après la médiation de haut niveau menée le 4 février par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), la Commission électorale a pu achever sa vérification.  Un nouveau décompte a confirmé les résultats provisoires, ce qui n’a pas empêché le candidat du PAIGC de déposer une nouvelle plainte, concernant le processus de vérification cette fois, et de demander l’annulation des résultats du second tour de l’élection. 

Le 9 février, lors d’un sommet extraordinaire à Addis-Abeba, la CEDEAO a invité la Cour suprême à jouer pleinement son rôle et lui a demandé de parvenir à une décision d’ici le 15 février.  La défiance profonde des deux camps opposés, les divisions au sein de l’exécutif et les changements d’alliances au Parlement, rendent cependant improbable un retour à la stabilité, a averti Mme Sori-Coulibaly.  La période post-électorale pourrait être l’occasion d’un retour à la paix durable, à la stabilité et à la réconciliation nationale, a-t-elle reconnu, mais encore faudrait-il que cela s’accompagne d’une volonté politique des parties prenantes.

Le peuple bissau-guinéen demande une issue claire et positive du processus électoral: ce serait une lueur d’espoir pour l’avenir de leurs enfants, a témoigné la représentante de ce pays, alors que le Ministre nigérien des affaires étrangères s’inquiétait face au « risque d’un scénario catastrophe ».  M. Kala Ankourao, dont le pays assure la présidence de la CEDEAO, a en effet rappelé que le Président de la République de Guinée-Bissau a terminé son mandat depuis 7 mois.  C’est la CEDEAO, a-t-il précisé, qui a demandé son maintien au pouvoir pour éviter un vide institutionnel. 

C’est dans ce contexte que doit intervenir le retrait en trois phases du BINUGBIS, a fait remarquer la Représentante spéciale, selon une transition prévue par la résolution 2458 (2019) du Conseil de sécurité.  Le Bureau s’emploie ainsi à préparer son départ.  La Représentante spéciale a dit œuvrer à l’élaboration d’un programme de transition avec l’équipe de pays de l’ONU ainsi qu’au travers d’échanges avec le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) qui jouera un rôle de bons offices après le départ du BINUGBIS.

En attendant, elle a évoqué le chantier des réformes qui attend les nouvelles autorités qui sortiront des urnes.  Il faut, par exemple, créer une institution nationale indépendante pour les droits de l’homme, en conformité avec les Principes de Paris.  Néanmoins, l’absence de dialogue constructif entre les partis politiques constitue une menace pour ces réformes, en particulier la révision constitutionnelle, qui est au cœur de l’instabilité récurrente du pays.  La Représentante spéciale entend pour cela établir une plateforme de haut niveau réunissant les partenaires internationaux et les autorités nationales afin d’accompagner le pays dans son programme de réformes.  Une plateforme qui sera présidée par le Coordonnateur résident, après le retrait du BINUGBIS.

La Commission de la consolidation de la paix (CCP) de l’ONU a, de son côté, prévu de contribuer à l’identification des priorités de long terme et des défis financiers qui se posent dans ce pays en transition.  Le Président de la formation Guinée-Bissau de la CCP, le représentant du Brésil, a aussi insisté sur la représentation juste des femmes et des jeunes dans les processus de prise de décisions.  L’implication continue de l’ONU à travers l’UNOWAS, les agences, les fonds et les programmes des Nations Unies reste nécessaire, a relevé la représentante de la Guinée-Bissau qui a expliqué compter dessus pour que le pays soit mieux à même de « consolider la démocratie et renforcer les institutions nationales ».

Avec la fermeture prochaine du BINUGBIS, le Ministre nigérien a jugé nécessaire la prolongation du mandat de la mission de la CEDEAO en Guinée-Bissau (ECOMIG) pour assister le pays dans la réforme de son secteur de sécurité et de ces textes fondamentaux.  Il a exhorté les partenaires bilatéraux et multilatéraux de la Guinée-Bissau à rester déterminés à faire appliquer les Accords de Conakry et la feuille de route de la CEDEAO, et à œuvrer au maintien du régime des sanctions.

Le délégué de la France a pourtant jugé que ce cycle électoral et le transfert pacifique du pouvoir pourraient permettre d’envisager une révision du régime des sanctions créé par la résolution 2048 (2012), même si la situation en Guinée-Bissau demeure fragile.  De même, pour la Fédération de Russie, « l’heure est venue de discuter de la levée des sanctions en Guinée-Bissau ».  Selon ce pays, les forces de l’ordre ne sont plus impliquées dans le processus électoral et dans le jeu politique.  Les sanctions ont ainsi atteint leur objectif et, par conséquent, « les conserver dans le contexte de la fin de mandat du BINUGBIS laisserait perplexe », a dit le délégué russe. 

Tandis que l’Afrique du Sud saluait le rôle du BINUGBIS pour assister le pays dans sa lutte contre le trafic des stupéfiants et le crime organisé, en collaboration étroite avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), la Belgique a demandé le renforcement des moyens de cette agence et de l’équipe de pays. 

Dans ce domaine, des progrès ont été faits, a déclaré Mme Sori-Coulibaly en mentionnant la saisie en septembre dernier de 1,8 tonne de cocaïne.  Pour conclure, elle a souhaité que ce pays conserve une place importante dans l’agenda de la communauté internationale, notamment dans les travaux de la CCP.

LA SITUATION EN GUINÉE-BISSAU - S/2020/105

Déclarations

Mme ROSINE SORI-COULIBALY, Représentante spéciale pour la Guinée-Bissau et Chef du Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Guinée-Bissau (BINUGBIS), a commencé son exposé en faisant état d’une intensification des tensions politiques en Guinée-Bissau depuis son dernier briefing.  Elle a ainsi rappelé qu’à la suite de l’élection présidentielle et de l’annonce par la Commission électorale nationale de la victoire de M. Umaro Sissoco Embaló, candidat du Mouvement pour l’alternance démocratique (MADEM‑G15), le candidat du PAIGC, M. Domingos Simões Pereira, a déposé une plainte pour fraude électorale devant la Cour suprême.  En conséquence, a-t-elle précisé, celle-ci a enjoint, le 24 janvier, la Commission de refaire le décompte national, occasionnant une période d’incertitude.  Toutefois, a poursuivi Mme Sori-Coulibaly, dans la foulée d’une médiation de haut niveau menée le 4 février par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), la Commission a pu achever sa vérification, sous l’égide de la CEDEAO et en la présence de représentants des deux candidats.  Le nouveau décompte a confirmé les résultats provisoires annoncés par la Commission, ce qui n’a pas empêché le candidat du PAIGC de déposer une nouvelle plainte concernant le processus de vérification et de demander l’annulation des résultats du second tour de l’élection. 

Le 9 février, a indiqué la Représentante spéciale, la CEDEAO a tenu un sommet extraordinaire à Addis-Abeba, en marge du Sommet de l’Union africaine.  À cette occasion, elle a salué les conclusions du processus de vérification et invité la Cour suprême à jouer pleinement son rôle, conformément aux dispositions constitutionnelles et à la loi électorale, et de finaliser ses travaux d’ici le 15 février.  Dans l’immédiat, a noté Mme Sori-Coulibaly, l’examen de la plainte du PAIGC doit encore être examinée avant qu’il soit permis de procéder au premier transfert de pouvoirs à un chef d’État démocratiquement élu dans ce pays.  La défiance profonde des deux camps opposés, les divisions au sein de l’exécutif et les changements d’alliances au Parlement rendent cependant improbable un retour à la stabilité, a-t-elle averti, appelant le Conseil de sécurité et la communauté internationale à maintenir leur engagement à cette fin, et la société civile à poursuivre son contrôle de la mise en œuvre du Pacte de stabilité et de l’Accord de Conakry. 

Mme Sori-Coulibaly s’est néanmoins félicitée de l’achèvement de ce cycle électoral dans les temps légalement impartis.  Elle a également fait état de progrès dans des domaines comme la lutte contre les trafics de stupéfiants et la criminalité organisée, après la saisie en septembre dernier de 1,8 tonne de cocaïne.  La police judiciaire a conclu ses investigations, lesquelles ont entraîné la condamnation de trois suspects à 10 et 15 ans de prison, a-t-elle indiqué, ajoutant que le nouveau plan d’action national sur ces questions doit servir de feuille de route aux autorités pour combattre ces fléaux.  De plus, a-t-elle souligné, il n’a été relevé aucune interférence de l’armée sur le plan politique, aucune violation majeure des droits de l’homme, et les médias ont pu jouir de leur liberté d’expression. 

Pour la Représentante spéciale, la période post-électorale pourrait être l’occasion d’un retour à la paix durable, à la stabilité et à la réconciliation nationale, encore faudrait-il que cela s’accompagne d’une volonté politique des parties prenantes.  Pour cela, des réformes s’imposent et des efforts doivent être menés pour bâtir une culture de la redevabilité à tous les niveaux de l’État, a-t-elle plaidé.  À ses yeux, la création d’une institution nationale indépendante pour les droits de l’homme, en conformité avec les Principes de Paris, demeure un « pilier fondamental » pour la promotion et la protection des droits humains, dans la perspective du retrait de la BINUGBIS.  De plus, la mise en œuvre du plan national d’action sur le trafic de stupéfiant et la criminalité organisée transnationale est, selon elle, un facteur clef pour la stabilité à long terme du pays. 

Mme Sori-Coulibaly a ensuite assuré que, conformément à la résolution 2458 (2019), qui prévoit une transition et un retrait en trois phases de la BINUGBIS, la Mission s’emploie à préparer son départ d’ici le 31 décembre 2020.  Elle a rappelé, à cet égard, que les quatre bureaux régionaux ont été fermés en 2019.  La Représentante spéciale a dit œuvrer à l’élaboration d’un programme de transition avec l’équipe de pays de l’ONU ainsi qu’au travers d’échanges avec le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) qui jouera un rôle de bons offices après le départ de la Mission.  Un dialogue est également mené avec les autorités nationales et les partenaires régionaux pour garantir que le processus de transition est pleinement soutenu par les parties.  Dans ce cadre, a-t-elle encore annoncé, il sera procédé à une évaluation des capacités de l’Équipe de coordination de l’ONU au regard des priorités nationales en matière de renforcement de la paix, comme prévu dans le cadre de coopération pour le développement durable 2021-2025.  À cette fin, a-t-elle souligné, il importe que la communauté internationale soutienne généreusement le Cadre de coopération en Guinée-Bissau. 

Avec la conclusion du cycle électoral, la Mission s’emploie à soutenir le programme de réformes, tel qu’envisagé par l’Accord de Conakry et le Pacte de stabilité, a expliqué Mme Sori-Coulibaly.  Selon elle, l’absence de dialogue constructif entre les parties politiques nationales constitue cependant une menace pour ces réformes, en particulier la révision constitutionnelle, qui est au cœur de l’instabilité récurrente du pays.  Dans ce contexte, la BINUGBIS continue d’appuyer la tenue d’une conférence nationale sur la paix, la réconciliation et le développement, avec une assistance financière du Fonds des Nations Unies pour la consolidation de la paix.  Invitant le Conseil à exhorter les acteurs pertinents à soutenir ce programme, elle a aussi souhaité que la communauté internationale, à commencer par la CEDEAO, reste engagée en faveur de ce processus.  La Représentante spéciale entend pour cela établir une plateforme de haut niveau réunissant les partenaires internationaux et les autorités nationales afin d’accompagner le pays dans son programme de réformes.  Cette plateforme, a-t-elle noté, restera placée sous la présidence du Coordonnateur résident après le retrait de la BINUGBIS.  Rappelant, enfin, l’investissement considérable consenti par l’ONU en faveur de la Guinée-Bissau ces 20 dernières années, elle a souhaité que ce pays conserve une place importante dans l’agenda de la communauté internationale, notamment dans les travaux de la Commission de consolidation de la paix (CCP). 

M. RONALDO COSTA FILHO, Président de la formation Guinée-Bissau de la Commission de la consolidation de la paix (CCP), a salué la tenue de l’élection présidentielle, qui n’est néanmoins que la première étape de la stabilisation politique sur le long terme du pays.  Les résultats sont contestés, a-t-il noté, en appelant au respect de la Constitution dans le processus de vérification des résultats.  Il a précisé que l’ONU n’est pas au cœur de la transition en Guinée-Bissau mais qu’elle joue un rôle d’accompagnement.  Il a appelé la communauté internationale à appuyer le Gouvernement dans ses efforts de consolidation des institutions.  La situation demeure très instable, a-t-il convenu.

De son côté, la CCP est prête à soutenir le BINUGBIS et le Gouvernement en apportant sa plateforme de coordination, a-t-il poursuivi.  Il a ajouté que la Commission veillera à contribuer à l’identification des priorités de long terme du pays et des défis financiers qui se posent immanquablement dans un pays en transition.  La CCP défendra une représentation juste des femmes et des jeunes dans les processus de prise de décisions dans le pays, a-t-il ajouté.  M. Costa Filho a insisté sur l’importance du Fonds pour la consolidation de la paix, avant de rappeler que la situation en Guinée-Bissau est inscrite à l’ordre du jour de la CCP depuis 2007.  La CCP, qui a été le témoin de progrès mais aussi des difficultés du pays, est prête à fournir des conseils avisés au Conseil de sécurité, a-t-il dit.  « Nous devons travailler main dans la main. »

M. KALLA ANKOURAO, Ministre des affaires étrangères du Niger, de la coopération, de l’intégration africaine et des Nigériens de l’extérieur, a déclaré que les actions conjuguées des partenaires internationaux, en particulier le Groupe des cinq organisations internationales (p5) -l’Union africaine (UA), la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP), l’Union européenne, les Nations Unies- ont contribué aux avancées significatives enregistrées ces dernières années en Guinée Bissau.  Ces progrès ont permis la tenue d’élections législatives et présidentielle, les 24 novembre et 29 décembre 2019.  Tout en se félicitant du succès du processus électoral, le Ministre s’est inquiété de l’impasse politique née après le récente présidentielle, en citant le risque d’un scénario catastrophe.  M. Ankourao a estimé que la Constitution et la loi électorale comportent des germes de malentendus chroniques faisant place à toutes les interprétations partisanes.  Il a rappelé que le Président de la République a fini son mandat depuis 7 mois, et que la CEDEAO l’a maintenu au pouvoir après une résolution prise au Sommet de juillet 2019 pour éviter un vide institutionnel. 

M. Ankourao a noté que le Gouvernement issu des élections législatives de 2019 est dirigé par le Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et de Cabo Verde (PAIGC) qui ne dispose pas à lui seul de la majorité absolue, ce qui le rend fragile.  En vue d’éviter une nouvelle crise politique, le Ministre a réitéré l’appel de la CEDEAO demandant aux différents organes et institutions impliquées dans le processus électoral de contribuer à la normalisation politique et institutionnelle du pays en finalisant leurs travaux au plus tard le 15 février 2020.  Il a exhorté les partenaires bilatéraux et multilatéraux de la Guinée-Bissau à rester déterminés à faire appliquer les Accords de Conakry et la feuille de route de la CEDEAO et à œuvrer au maintien du régime de sanctions.  Avec la fermeture prochaine du BINUGBIS, prévue le 31 décembre 2020, le Ministre a jugé nécessaire la prolongation du mandat de la mission de la CEDEAO en Guinée-Bissau (ECOMIG) pour assister le pays dans la réforme de son secteur de sécurité et de ces textes fondamentaux. 

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) a salué la bonne tenue de la présidentielle en Guinée-Bissau, tout en disant attendre l’arrêt que doit rendre la Cour suprême sur le processus électoral.  Il a encouragé le Gouvernement à continuer de faire preuve d’impartialité, tout en félicitant l’armée qui assure le maintien de l’ordre.  Le représentant a néanmoins déploré la montée d’une rhétorique incendiaire qui pourrait conduire à des violences interreligieuses.  Il a demandé au Gouvernement de mettre sur pied des institutions des droits de l’homme conformes au droit international, tout en déplorant la répression menée par les forces de l’ordre lors des manifestations.  M. Singer Weisinger a rappelé qu’après les élections, les autorités doivent maintenant axer leurs priorités vers les questions économiques et assurer notamment la sécurité alimentaire, qui est l’un des défis majeurs de la Guinée-Bissau.  Il a salué les efforts nationaux de lutte contre le trafic de drogue, lesquels bénéficient du soutien de la communauté internationale. 

M. TAREK LADEB (Tunisie) a souhaité l’apaisement des tensions qui persistent en Guinée-Bissau.  Il a salué la tenue de l’élection présidentielle et apprécié la neutralité observée par l’armée.  Il a évoqué le manque de clarté des résultats électoraux et la crise qui en a découlé, avant de saluer les efforts accomplis pour faire face à la crise.  Il a en particulier salué le choix des partis en lice de recourir à la voie judiciaire pour la vérification des résultats.  L’intérêt suprême du pays doit prévaloir, a-t-il déclaré, en appelant à la retenue afin d’éviter toute escalade. 

Le représentant a dit son appréciation des efforts menés pour mettre en œuvre l’Accord du Conakry, avant d’insister sur l’acuité du défi posé par la criminalité transnationale organisée.  Malgré les signes positifs, le manque d’une stabilité durable pourrait augurer d’un retour en arrière du pays, a averti le délégué de la Tunisie.  Il a indiqué qu’un tel retour en arrière, qui pourrait être exploité par les groupes terroristes et criminels, pourrait avoir des conséquences néfastes sur toute la région.  Enfin, le représentant a fait le lien entre la reconfiguration de la présence de l’ONU et l’amélioration de la situation dans le pays. 

M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) a souhaité que toutes les parties agissent de manière responsable pour assurer le transfert pacifique du pouvoir, ce qui passe d’abord par la publication des résultats finaux de l’élection, a-t-il précisé.  Il a salué la participation des femmes au processus politique et a salué les efforts engagés par les autorités pour mettre fin à l’impunité dans des cas de crimes sexistes.  Il s’est aussi félicité des efforts menés au niveau national pour lutter contre le trafic de drogue et la criminalité organisée. 

M. Schulz a demandé d’éviter que le pays se retrouve sans exécutif et connaisse un vide de pouvoir à la fin du mandat du BINUGBIS.  Il a salué le travail de la formation pays de la CCP en Guinée-Bissau, avant de conclure en rappelant le vœu formé par le Secrétaire général dans son rapport: alors que l’ONU entreprend de transformer sa présence en Guinée-Bissau, l’Organisation doit travailler en coopération avec le Gouvernement afin de veiller à ce que le pays prenne le processus en main.

M. ANTOINE IGNACE MICHON (France) a salué la tenue de l’élection présidentielle en novembre et décembre 2019 en Guinée-Bissau, ainsi que les développements positifs qui en ont suivi et le rôle décisif du Groupe des 5 (CEDEAO, UA, CPLP, UE et ONU).  Selon lui ces évolutions montrent que les outils déployés pour répondre à la crise, y compris les sanctions, ont été efficaces.  L’achèvement de ce cycle électoral et le transfert pacifique du pouvoir pourraient permettre d’envisager une révision du régime des sanctions créé par la résolution 2048 (2012), a estimé le représentant, tout en relevant que la situation en Guinée-Bissau demeure fragile.  Disant attendre la confirmation des résultats de l’élection présidentielle par la Cour suprême, il a plaidé pour que le processus électoral aille à son terme dans les meilleurs délais et dans le respect de l’état de droit. 

La situation actuelle illustre combien le processus en Guinée-Bissau reste à consolider, a poursuivi M. Michon.  Au-delà des élections, le rétablissement d’une paix et d’une stabilité durables passe aussi par des avancées dans d’autres domaines.  L’ensemble des réformes politiques prévues par l’Accord de Conakry de 2016, comme par exemple la révision de la Constitution, doivent être mises en œuvre dans les meilleurs délais, a souhaité le représentant.  Dans ce contexte, la France soutient la mise en œuvre du plan de transition du BINUGBIS décidé au Conseil de sécurité, dans la perspective de sa fermeture en fin d’année.  Alors que le transfert des activités des différentes activités du Bureau commence à s’engager, la France appelle à ce que la mission de soutien à la réforme du secteur de la sécurité soit effectivement prise en charge.  La poursuite des progrès dans la lutte contre la criminalité organisée, et notamment le trafic de drogue, exigera un engagement résolu, dans la durée, des autorités bissau-guinéennes, ainsi qu’un appui continu de la part de la communauté internationale, a conclu M. Michon. 

M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) a félicité le peuple de Guinée-Bissau pour la bonne tenue de la présidentielle, disant espérer que cela va conduire à la stabilité et la prospérité du pays.  Il a jugé impérieux de régler le contentieux électoral et d’assurer un transfert pacifique du pouvoir.  À ce propos, il a souhaité que la dispute postélectorale soit réglée rapidement, par des moyens pacifiques, afin d’empêcher que le pays ne retombe dans une crise politique majeure.  Le représentant a relevé que la Guinée-Bissau connaît des troubles depuis son indépendance et que l’instabilité a trop longtemps sapé l’économie du pays et créé un environnement propice au crime organisé, y compris le trafic de drogue.

Après le transfert du pouvoir, les parties prenantes du pays vont devoir veiller à la stabilité politique, au bon fonctionnement des institutions et à l’amélioration des conditions de vie de la population, a recommandé M. Syihab.  Parmi les priorités, il a évoqué la lutte contre la pauvreté, le trafic de drogue et la criminalité organisée.  Au sujet de la fermeture du BINUGBIS prévue en fin d’année, le représentant a plaidé pour un engagement et un soutien constants de la communauté internationale pour aider à la consolidation de la paix et soutenir les efforts de réformes.  Il a dit s’aligner aux recommandations du Secrétaire général de l’ONU qui a souhaité, dans son rapport sur la Guinée-Bissau, que le processus de transition ne soit pas centré sur l’ONU, mais plutôt qu’il favorise l’appropriation nationale. 

Mme ISIS AZALEA MARIA GONSALVES (Saint-Vincent-et-les Grenadines) a jugé qu’en dépit des avancées que la Guinée-Bissau a connues, il y a un risque de régression du fait de certains défis auxquels le pays fait face.  Elle a salué l’organisation, dans un climat relativement pacifique, de la dernière élection présidentielle, félicitant à ce propos le rôle joué par la CEDEAO et la société civile.  La déléguée a demandé aux différentes parties de respecter le processus juridique d’examen des résultats de la présidentielle, invitant aussi les acteurs politiques à œuvrer en faveur du progrès et de la stabilité du pays.  Elle a également invité les membres du parlement à mettre de côté leurs différences et à travailler ensemble, selon une approche non partisane, afin de réaliser les réformes dans le pays.  Elle a salué les efforts engagés par les autorités nationales dans la lutte contre le trafic de stupéfiants, avant de saluer la mobilisation de quatre millions de dollars par le Fonds de consolidation de la paix pour financer la transition du BINUGBIS aux agences onusiennes dans le pays.

M. DIANBIN ZHANG (Chine) a salué le rôle positif de la CEDEAO dans le bon déroulement du récent scrutin électoral en Guinée-Bissau.  Il a espéré que les différends survenus à l’occasion de ce scrutin seront réglés de manière pacifique.  Le délégué de la Chine a appelé à la bonne mise en œuvre de l’Accord de Conakry et de la feuille de route de la CEDEAO.  La communauté internationale doit aider le pays dans la lutte contre la criminalité transnationale organisée, a-t-il ajouté.  Le représentant a, par ailleurs, invité le BINUGBIS et la CCP à jouer un rôle accru d’appui aux efforts de pérennisation de la paix et de développement durable en Guinée-Bissau.  Une aide sur mesure doit être apportée au pays, a-t-il affirmé.  Enfin, le délégué a appelé le BINUGBIS à renforcer sa coordination avec la CEDEAO et à respecter les opinions du pays hôte dans le cadre du processus de retrait du Bureau, prévu par la résolution 2458 (2019).  

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) s’est félicité du succès de la tenue d’élections législatives et présidentielle qui placent le pays sur la voie de la stabilité.  Il a salué l’appui décisif de la CEDEAO aux efforts de médiation avant d’exhorter les dirigeants de la Guinée-Bissau à poursuivre leur coopération avec la CEDEAO pour mettre en œuvre les projets de réforme arrêtés dans le cadre de l’Accord de Conakry sur les réformes constitutionnelles, le dialogue politique inclusif et les processus de réconciliation nationale.  Il a exhorté la communauté internationale à continuer de soutenir la Guinée-Bissau pour aider ce pays à réaliser son développement économique et social et parvenir à une société inclusive. 

S’agissant de la lutte contre la criminalité transnationale organisée, le représentant de l’Afrique du Sud a fait sien le contenu du rapport du Secrétaire général des Nations Unies qui appelle à renforcer le contrôle des frontières- terrestres, maritimes et aériennes- du pays.  Il a salué le rôle de la BINUGBIS pour assister le pays dans sa lutte contre le trafic des stupéfiants et le crime organisé en collaboration étroite avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le Crime (ONUDC).

M. RODNEY M. HUNTER (États-Unis) a salué la bonne tenue de l’élection présidentielle et, dans l’attente de l’arrêt de la Cour suprême, il a promis que son pays allait continuer à soutenir la Guinée-Bissau.  Les États=Unis entendent ainsi travailler avec le Président élu pour aider le pays à faire face à ses difficultés, notamment la drogue et les questions économiques.  Les États-Unis sont particulièrement préoccupés par le trafic de drogue ainsi que par la criminalité transfrontalière organisée qui menace de déstabiliser la Guinée-Bissau et l’ensemble de la région.  Il a salué le travail du BINUGBIS pour lutter contre ces fléaux et a souhaité que l’ONU poursuive cette mission même après la fin du mandat du Bureau.  Le représentant a d’ailleurs dit soutenir le calendrier présenté par le Secrétaire général de l’ONU, qui a fixé la date du retrait à la fin de cette année.

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) a salué le climat relativement pacifique dans lequel l’élection présidentielle, en Guinée-Bissau, s’est déroulée.  Il a toutefois exhorté les parties à éviter toute rhétorique incendiaire et à ne pas exploiter les tensions potentielles dans la société à des fins politiques.  Il faut que les résultats finaux de cette élection soient annoncés rapidement, a-t-il poursuivi en soulignant l’urgence qu’il y a de créer des conditions de confiance entre les acteurs politiques et aller de l’avant en termes de réformes sur les plans économique et social.

L’Estonie félicite le BINUGBIS et l’Union africaine pour leur implication opportune, à la fin de l’année dernière, en vue d’éviter toute détérioration de la situation politique en Guinée-Bissau et les appelle à poursuivre cet engagement.  Le représentant a insisté sur la participation des femmes et des jeunes dans les processus de réforme et de consolidation de la paix, saluant au passage la forte participation des femmes au processus électoral.  Il a réitéré le soutien de l’Estonie au travail de Représentant spécial et du BINUGBIS.  Il est important, selon lui, que pendant la phase de transition, qui verra les tâches du Bureau passer à l’équipe pays des Nations Unies, à la CEDEAO et à d’autres partenaires, suive une approche holistique de la consolidation de la paix.  À cet égard, il a souligné que la CCP et le Fond de consolidation de la paix peuvent jouer un rôle de soutien important.

M. NHO HUNG DINH (Viet Nam) a dit attendre avec impatience la fin du cycle électoral et la confirmation des résultats par les organes pertinents.  Il est important, a-t-il insisté, que les parties résolvent leurs différends dans le cadre constitutionnel.  Il a appelé le Président de la Guinée-Bissau, les membres du Parlement et toutes les parties concernées à travailler ensemble pour lancer les réformes vitales envisagées dans l’Accord de Conakry, le Pacte de stabilité et la feuille de route de la CEDAO.  Il a insisté sur la lutte contre le trafic de drogues et la criminalité organisée, en coopération avec les partenaires bilatéraux et avec les Nations Unies.  Jugeant important d’accroître la participation des femmes et des jeunes dans les processus de prise de décisions, le représentant a appelé les Nations Unies, la BINUGBIS, l’UNOWAS, la CEDEAO et le futur Gouvernement de la Guinée-Bissau à avancer dans le transfert des activités de consolidation de la paix résiduelles de la BINUGBIS et son retrait graduel, l’échéance étant fixé le 31 décembre 2020. 

M. DAVID CLAY (Royaume-Uni) a salué la tenue pacifique de l’élection présidentielle, « un grand pas en avant » selon lui.  L’incertitude demeure sur les résultats de l’élection, a-t-il cependant noté avec préoccupation.  Le délégué a appelé les parties à régler les différends afin qu’un nouveau gouvernement puisse entrer en fonctions.  Il a salué le rôle joué par le CCP et le BINUGBIS, avant d’insister sur les efforts de médiation cruciaux de la CEDEAO.  Tous les acteurs doivent demeurer impliqués dans la mise en œuvre de l’Accord de Conakry, a-t-il déclaré. 

Le représentant s’est dit en faveur du retrait du BIGNUBIS d’ici à décembre 2020, ajoutant que la CCP et le Fonds pour la consolidation de la paix auront un rôle essentiel à jouer dans la nouvelle phase qui s’ouvrira en Guinée-Bissau.  Enfin, le délégué a appelé à la préservation des progrès enregistrés afin que le pays puisse définitivement tourner cette page sombre de son histoire.  La responsabilité principale incombe au Gouvernement, a conclu le représentant. 

M. ALEXANDER V. REPKIN (Fédération de Russie) a dit sa satisfaction devant la bonne tenue de l’élection présidentielle en Guinée-Bissau, saluant à ce propos le rôle positif du BINUGBIS et de la CEDEAO.  Il a souhaité que le pays se tourne désormais vers la voie du développement économique.  C’est pourquoi, il a appelé toutes les forces politiques et sociales à faire montre de volonté afin de résoudre tous les différends en suspens. 

Pour le représentant, « l’heure est venue de discuter de la levée des sanctions imposées par le Conseil de sécurité en Guinée-Bissau ».  Les forces de l’ordre ne sont plus impliquées dans le processus électoral et dans le jeu politique, a-t-il justifié.  Selon le délégué, les sanctions ont atteint leur objectif et « les conserver dans le contexte de la fin de mandat du BINUGBIS laisserait perplexe ».  Enfin, avec ce retrait du Bureau intégré, l’équipe de pays de l’ONU devrait avoir toutes les capacités nécessaires pour appuyer le développement du pays, a-t-il plaidé. 

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a salué la tenue de l’élection présidentielle, qui s’est déroulée sans incident majeur, et la mobilisation des électeurs bissau-guinéens.  « Toutefois, les tensions et le climat de méfiance continuent de caractériser le champ politique. »  En attendant que la clarté soit faite sur le résultat définitif de l’élection présidentielle, il a appelé au dialogue et à la retenue afin d’éviter une crispation supplémentaire de la situation.  À ce titre, le régime des sanctions demeure pertinent, même si certains ajustements pourraient être envisagés dans un avenir proche, a-t-il dit.  S’agissant du BINUGIS, il a soutenu le plan de transition graduelle tel que prévu par les résolutions de ce Conseil.  Le départ du Bureau ne doit pas signifier un quelconque abandon de la Guinée-Bissau par la communauté internationale, a-t-il affirmé.  Il a par ailleurs jugé indispensable le renforcement de l’équipe-pays et en particulier des moyens de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC).  Enfin, le délégué a invité la CCP à continuer son accompagnement du pays dans la nouvelle phase qui s’ouvre. 

Mme MARIA ANTONIETA PINTO LOPES D’ALVA (Guinée-Bissau) a estimé que le rapport du Secrétaire général donne de l’espoir qu’une paix durable est possible dans le pays.  En dépit de toutes les tensions et les difficultés politiques en 2019 après les élections législatives de mars, le Gouvernement dirigé par M. Aristide Gomes, du Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et de Cabo Verde (PAIGC), a été formé, et le programme de gouvernement a été adopté par le parlement.  Le pays fait aussi face à une série de défis demandant une attention particulière et la présence de l’ONU, a déclaré la représentante.  Elle a relevé que les élections en Guinée-Bissau se déroulent toujours dans un environnement pacifique, les électeurs se rendant aux urnes de façon ordonnée et pacifique.  « La dernière élection a été libre, crédible et transparente. »  Toutefois, comme les résultats du deuxième tour ont été contestés, le processus est suspendu à la décision de la Cour suprême, mais la population reste calme et attend patiemment le verdict final de la Cour.  Le peuple bissau-guinéen demande une issue claire et positive du processus pour qu’il ait une lueur d’espoir pour le futur de leurs enfants.

À cet égard, le Gouvernement de Guinée-Bissau salue les positions de l’ONU, de la CEDEAO et de l’UA sur la nécessité de publier la décision de la Cour sur la crise post-électorale, « parce que nous estimons que seules des élections libres, crédibles et transparentes renforcent l’état de droit démocratique dans le pays dans lequel la volonté souveraine du peuple est respectée ».  « Nous sommes sûrs qu’avant le 15 février, la date recommandée par la conférence extraordinaire de la CEDEAO sur la situation politique en Guinée-Bissau, la Cour suprême de justice rendra sa décision finale sur cette élection conformément à la Constitution afin que le pays puisse retourner à l’ordre constitutionnel », a déclaré la représentante. 

Elle s’est dit convaincue que la communauté internationale et les partenaires de développement continueront de surveiller patiemment la situation politique dans le pays.  Avant de terminer, Mme Pinto Lopes d’Alva a informé qu’elle était consciente des changements structurels, du retrait et de la nouvelle configuration du BINUGBIS.  Toutefois, l’implication continue de l’ONU à travers l’UNOWAS, les agences, les fonds et les programmes des Nations Unies reste nécessaire, a conclu la représentante, pour le renforcement des institutions de la République, la mise en œuvre des réformes et la promotion du développement durable afin d’assurer au peuple de Guinée-Bissau qu’ils sont présents pour eux, « pour nous aider à consolider la démocratie et renforcer les institutions de l’État ». 

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