8698e séance – matin
CS/14069

Afrique de l’Ouest et Sahel: le Chef de l’UNOWAS plaide devant le Conseil de sécurité pour un soutien effectif aux États de la région face au terrorisme

À l’occasion de sa première séance publique de l’année, le Conseil de sécurité a entendu, ce matin, le Représentant spécial pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel présenter les activités de son Bureau (UNOWAS) et les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, l’occasion pour M. Mohamed Ibn Chambas de plaider pour un soutien effectif aux pays de la région dans leur lutte contre le terrorisme, alors que des élections sont programmées en 2020 dans six d’entre eux.

Dans un contexte marqué par la dégradation de la situation sécuritaire au Sahel, le Burkina Faso et le Mali étant particulièrement touchés par cette flambée d’attaques contre des cibles civiles et militaires, M. Chambas a estimé qu’il est « aujourd’hui temps d’agir ».  Exhortant les dirigeants régionaux et sous-régionaux à honorer leurs engagements et les partenaires internationaux à soutenir pleinement les mécanismes existants, il a appelé de ses vœux une « approche transversale » à tous les niveaux afin de garantir un soutien efficace aux gouvernements de la région.

En effet, a précisé le Représentant spécial, le nombre des victimes des violences terroristes au Burkina Faso, au Mali et au Niger a été multiplié par 5 depuis 2016.  Au cours de la seule année 2019, on a dénombré 4 000 morts, contre 770 en 2016, tandis que les attaques se déportent vers l’est, depuis le Mali vers le Burkina Faso, et menacent désormais les États côtiers.  Dans le même temps, le nombre des personnes déplacées a été multiplié par 10, atteignant un demi-million, sans compter les 25 000 personnes qui ont cherché refuge dans d’autres pays.

À cet égard, la Fédération de Russie a souhaité que l’on n’oublie pas la menace de déstabilisation qui plane sur les États du golfe de Guinée.  Au-delà des problèmes fondamentaux que représentent les affrontements intercommunautaires et la relative faiblesse des États, le « véritable élément déclencheur », ce sont, selon elle, « les activités aventuristes de ceux qui ont semé le chaos en Libye ».  De fait, a-t-elle fait valoir, « si l’on n’arrive pas à stabiliser la situation dans ce pays, il ne sera pas simple de parvenir à la paix et à la stabilité au Sahel ».

Face à ce fléau mêlant terrorisme, criminalité transnationale organisée et violences intercommunautaires, M. Chambas s’est félicité que, lors de la Conférence régionale africaine de haut niveau sur la lutte contre le terrorisme et la prévention de l’extrémisme violent tenue à Nairobi en juillet dernier, le Secrétaire général ait souligné l’importance du soutien des populations locales aux ripostes antiterroristes.  Il a également salué la mobilisation des gouvernements, des acteurs locaux et des organisations régionales, notamment sur le plan stratégique.  Il s’est ainsi félicité du plan d’action 2020-2024 adopté en décembre par la Communauté des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) en vue de l’éradication du terrorisme dans la sous-région.

Nouveau membre élu du Conseil, le Niger a lui aussi applaudi l’adoption de ce plan d’action doté d’une enveloppe financière de 2,3 milliards de dollars, dont un milliard sera prélevé sur les ressources internes.  Il a par ailleurs rappelé que cinq pays de la région ont mis en place le G5 Sahel dont les forces, a-t-il prévenu, peinent encore à atteindre leur plein niveau d’opérationnalisation par manque de ressources financières et matérielles.  Autre membre entrant, l’Estonie a, quant à elle, noté avec satisfaction que la Force conjointe du G5 Sahel, de conserve avec l’opération Barkhane, avait mené avec succès des opérations antiterroristes dans la sous-région.    

Dans le même ordre d’idées, a poursuivi le Représentant spécial, la Stratégie régionale en faveur de la stabilisation menée par l’Union africaine et la Commission du bassin du lac Tchad constitue, à l’échelle de la région, une approche permettant d’établir les paramètres d’alerte et d’engagement précoces pour toutes les formes de conflits locaux.  Il s’agit à présent de s’appuyer sur les mécanismes existants et d’utiliser la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel comme « modèle », a préconisé M. Chambas. 

Un appel entendu par la France, pour laquelle il importe que l’UNOWAS favorise la mise en œuvre de cette stratégie intégrée en étant doté d’un rôle accru de coordination de l’action de l’ONU dans la zone, selon une approche combinant sécurité et développement.  Alors que le Conseil de sécurité doit renouveler le mandat du Bureau ce mois-ci, la délégation française a appelé à son renforcement afin de permettre au Représentant spécial de déployer au maximum ses actions de bons offices, avec l’appui des agences, fonds et programmes onusiens présents sur place.  Il faut un mandat clair pour ce Bureau ainsi que des ressources suffisantes, a ajouté la République dominicaine.

M. Chambas a par ailleurs souligné les développements positifs enregistrés sur le plan politique en Afrique de l’Ouest et au Sahel. Saluant les consultations portant sur la réforme constitutionnelle en Gambie, il s’est aussi félicité du dialogue encourageant en cours en Sierra Leone, en Mauritanie et au Sénégal.  Après l’élection présidentielle prévue au Togo le 22 février prochain, des scrutins se tiendront au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire, au Ghana, en Guinée et au Niger, a-t-il rappelé, assurant que l’UNOWAS continuera à travailler étroitement avec les parties nationales et les partenaires régionaux pour promouvoir le consensus et l’inclusivité dans ces processus électoraux.

Dans cette perspective, les États-Unis se sont déclarés encouragés par les élections qui ont eu lieu en Guinée-Bissau et au Sénégal en 2019, exhortant les pays concernés par des scrutins en 2020 à créer des environnements pacifiques et ouverts et à faciliter la participation des médias et des groupes d’opposition.  Porte-plume avec le Niger sur l’UNOWAS, la Belgique a, pour sa part, averti que les diverses élections qui se profilent cette année pourraient éprouver des institutions démocratiques qui restent parfois fragiles dans la région. 

CONSOLIDATION DE LA PAIX EN AFRIQUE DE L’OUEST (S/2019/1005)

Déclarations

M. MOHAMED IBN CHAMBAS, Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel et Chef du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS), a constaté que, depuis la dernière séance d’information en juillet 2019, la région en question avait été frappée par des violences terroristes sans précédent, qui ont visé des cibles civiles et militaires avec des conséquences humanitaires alarmantes.  Au Burkina Faso, au Mali et au Niger, le nombre des victimes a été multiplié par 5 depuis 2016.  Quelque 4 000 morts ont ainsi été signalés en 2019, contre 770 en 2016, a-t-il précisé.  Ces attaques se sont déportées vers l’est, depuis le Mali vers le Burkina Faso, et menacent les États côtiers.  Dans le même temps, le nombre des personnes déplacées a été multiplié par 10, atteignant un demi-million, sans compter les 25 000 personnes qui ont cherché refuge dans d’autres pays.  Ces attaques terroristes, a poursuivi le Représentant spécial, sont souvent perpétrées par des extrémistes violents qui entendent s’emparer d’armes et mener d’autres activités illicites, y compris des activités minières artisanales dans des zones soutenant leurs réseaux.

Notant que le terrorisme, la criminalité organisée et la violence intercommunautaire sont souvent liées, notamment dans les zones périphériques où la présence de l’État est faible, M. Chambas s’est félicité que, lors de la Conférence régionale africaine de haut niveau sur la lutte contre le terrorisme et la prévention de l’extrémisme violent tenue à Nairobi en juillet dernier, le Secrétaire général ait souligné l’importance du soutien de la confiance des populations locales dans les ripostes aux menaces terroristes.  Dans ce contexte, a-t-il dit, les gouvernements, les acteurs locaux, les organisations régionales et la communauté internationale se mobilisent dans toute la sous-région.  De plus, de solides cadres d’action existent au niveau stratégique.  Le 21 décembre dernier, a relevé le Représentant spécial, lors de son sommet de Chefs d’État et de Gouvernement, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a adopté un plan d’action 2020-2024 visant à l’éradication du terrorisme dans la sous-région, suite au Sommet extraordinaire de Ouagadougou en septembre, au cours duquel la Communauté s’est engagée à mobiliser un milliard de dollars.  De même, a-t-il noté, la Stratégie régionale en faveur de la stabilisation menée par l’Union africaine et la Commission du bassin du lac Tchad constitue une approche permettant d’établir les paramètres d’alerte et d’engagement précoces pour toutes les formes de conflits locaux.

Pour M. Chambas, il est aujourd’hui temps d’agir.  Les dirigeants régionaux et sous-régionaux doivent respecter leurs engagements et les partenaires internationaux doivent apporter leur plein soutien à la mise en œuvre des mécanismes existants.  Plaidant pour une approche transversale pour garantir un soutien effectif aux gouvernements de la région, il a estimé que la réponse de l’ONU dans le Sahel devait servir de modèle à cet égard.  Il a aussi observé que l’UNOWAS avait œuvré étroitement avec l’Union du fleuve Mano pour « ressusciter » la sécurité transfrontalière et les mesures de renforcement de la confiance dans le bassin du lac Tchad.  Compte tenu de la persistance d’affrontements violents entre agriculteurs et éleveurs dans la région, il a toutefois jugé essentiel de garantir la coexistence pacifique entre ces groupes.  Il a également averti que les changements climatiques, entre autres facteurs, exacerbent ces violences.

Cette détérioration de la situation sécuritaire ne doit cependant pas faire oublier les développements positifs enregistrés en Afrique de l’Ouest et au Sahel, a fait valoir le Chef de l’UNOWAS, saluant notamment les consultations portant sur la réforme constitutionnelle et d’autres réformes menées en Gambie.  Il s’est aussi félicité du dialogue encourageant en cours en Sierra Leone, en Mauritanie et au Sénégal afin de promouvoir l’unité nationale.  Dans les mois à venir, a-t-il rappelé, les électeurs de six pays d’Afrique de l’Ouest se rendront aux urnes pour choisir leurs dirigeants.  À cet égard, il a tenu à adresser ses félicitations au peuple et à la Commission électorale de la Guinée-Bissau pour la tenue exemplaire de l’élection présidentielle de l’an dernier dans ce pays.  Le 22 février, le Togo tiendra un scrutin présidentiel à la suite de réformes électorales et constitutionnelles, a-t-il souligné, ajoutant que des élections auront ensuite lieu au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire, au Ghana, en Guinée et au Niger, avec des risques de tensions et de violences politiques.  Se réjouissant de la reprise du dialogue en Guinée, grâce à l’impulsion des Nations Unies et de leurs partenaires, il a appelé les parties à surmonter leurs différences afin d’assurer la tenue d’élections législatives en février.  Dans les mois à venir, a-t-il dit, l’UNOWAS continuera à travailler étroitement avec les parties nationales et les partenaires régionaux pour promouvoir le consensus et l’inclusivité dans les processus électoraux.  Avant de conclure, le Représentant spécial a exhorté les États membres dans la région à promouvoir la participation des femmes et des jeunes dans les scrutins à venir.

M. ABDOU ABARRY (Niger) a, à son tour, avoué que malgré les efforts multidimensionnels déployés dans la bande sahélo-saharienne, la situation sécuritaire demeure extrêmement préoccupante.  L’année 2019, a-t-il par exemple affirmé, a été le théâtre de plus de 700 attentats terroristes dans la zone.  Des acteurs non étatiques violents, notamment les groupes terroristes, les réseaux criminels et les milices communautaires et tribales ont commis des attaques répétées contre des civils et des forces de défense et de sécurité, en particulier au Burkina Faso, au Mali et au Niger.  Le représentant a réaffirmé le soutien de son pays à la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel et au plan de soutien.  Il a estimé que l’UNOWAS doit avoir un mandat qui lui permette de relever les défis du terrorisme et des conflits intercommunautaires.

Après avoir passé en revue les progrès politiques enregistrés dans la sous-région, le représentant a rappelé l’adoption par la CEDEAO du Plan d’action 2020-2024, destiné à éradiquer le terrorisme, avec une enveloppe financière de deux milliards trois cents millions de dollars, dont un milliard sera prélevé sur les ressources internes.  Il a aussi rappelé que cinq pays de la région ont mis en place le G5 Sahel dont le forces, a-t-il prévenu, peinent encore à atteindre leur plein niveau d’opérationnalisation par manque de ressources financières et matérielles.  La communauté internationale, a-t-il plaidé, devrait aider ces pays à faire face de la manière la plus efficiente aux attaques terroristes, en les aidant à sécuriser des financements prévisibles.  Plus que jamais, a-t-il conclu, l’Afrique de l’Ouest et le Sahel ont besoin de la solidarité et de l’action concrète de la communauté internationale afin d’éviter que les avancées démocratiques ne soient contrariées par les activités criminelles des groupes armés terroristes qui sapent le fondement même de l’État.

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) s’est inquiété des violences répétées et « parfois de grande ampleur » auxquelles font face le Nigéria, le Burkina Faso, le Mali et le Niger.  Il a notamment alerté sur le fait que les attaques terroristes subies par le Burkina Faso sur un large partie de son territoire menacent la stabilité régionale avec un risque de propagation vers les pays côtiers.  Il a insisté sur le respect des droits de l’homme par les forces déployées dans la lutte contre les terroristes.

La réponse aux défis de l’Afrique de l’Ouest ne peut pas être que sécuritaire, a plaidé le représentant, pour qui une approche holistique est nécessaire pour faire face à l’extrémisme violent.  Il a également mis l’accent sur la bonne gouvernance, le lutte contre l’impunité ainsi que le développement durable et inclusif.  Il est dès lors urgent, selon lui, de prendre des mesures tangibles pour mettre fin à la dégradation du tissu social et aux menaces pesant sur le vivre-ensemble.  M. Pecsteen de Buytswerve a en outre relevé que les institutions démocratiques restent parfois fragiles dans la région et a prévenu que les diverses élections qui se profilent cette année pourraient les éprouver davantage.  Il a notamment cité la Guinée, le Burkina Faso, le Niger et le Mali, ainsi que la Côte d’Ivoire.

L’Afrique de l’Ouest est une zone d’importance stratégique pour la France et l’Union européenne, a expliqué Mme ANNE GUEGUEN (France) après avoir félicité l’UNOWAS pour son action.  Tout en saluant les avancées récentes dans la région en termes de développement humain ou de démocratie, Mme Gueguen a constaté que pour autant, la région demeure confrontée à des défis importants.  Au Sahel, la situation ne cesse de se dégrader, avec des conséquences humanitaires graves et des répercussions sur l’ensemble de la sous-région, notamment en termes de déplacements forcés.  Elle a plaidé pour une mobilisation urgente de tous pour aider les pays du G5 Sahel à combattre le terrorisme, endiguer la criminalité organisée et traiter les causes profondes de l’instabilité.  À cet égard, la représentante a rappelé que le Président français se réunira avec les présidents des pays du G5 Sahel et les partenaires multilatéraux, à Pau, le 13 janvier, pour réaffirmer l’engagement collectif et définir une feuille de route commune.

Notant qu’en 2020 et 2021 des élections auront lieu dans pas moins de huit pays d’Afrique de l’Ouest, Mme Gueguen a averti que ces processus pouvaient être source de tensions.  La France encourage dès lors le Représentant spécial à user de ses bons offices de façon active et à passer des messages politiques forts.  Il est important, selon elle, que les Nations Unies déploient une assistance électorale lorsque les pays le sollicitent.  Pour la France il est notamment essentiel d’établir un dialogue approfondi en Guinée entre responsables politiques pour apaiser les tensions et permettre que les élections législatives du mois prochain se déroulent de manière transparente, crédible et consensuelle.

Rappelant que le Conseil de sécurité doit renouveler le mandat de l’UNOWAS ce mois-ci, la représentante a appelé à renforcer le Bureau afin de permettre au Représentant spécial de déployer au maximum ses actions de bons offices.  En outre, l’ONU dispose de nombreux outils sur place, notamment les agences, les fonds et les programmes qui doivent travailler dans une même direction et en synergie, a-t-elle remarqué.  C’est la raison pour laquelle la France est d’avis qu’il est légitime de doter l’UNOWAS d’un rôle accru de coordination de l’action des Nations Unies dans la zone, selon une approche intégrée combinant sécurité et développement.  En lien avec cette approche, elle appelle l’UNOWAS à favoriser la mise en œuvre de la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel, « qui doit produire concrètement ses effets en termes de développement ».  Il est essentiel en outre, selon Mme Gueguen, que l’UNOWAS présente, dans ses rapports, des analyses des risques pour la sécurité des impacts des changements climatiques, ainsi que des recommandations d’actions pour prévenir la réalisation de ces risques.  En conclusion, la représentante a souligné que les activités de l’UNOWAS sont diverses et étendues, à la mesure des défis en Afrique de l’Ouest et au Sahel.  Dans ce contexte, il parait légitime que les Nations Unies disposent de moyens accrus pour agir plus efficacement dans la zone.

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) a salué les différents processus électoraux qui se sont déroulés dans la région, avant de noter avec préoccupation la détérioration de la situation sécuritaire. Il a plaidé pour que les auteurs d’actes terroristes soient traduits en justice et pour que des ressources suffisantes soient allouées à la Force conjointe du G5 Sahel.  M. Singer Weisinger a par ailleurs noté les conséquences négatives des changements climatiques sur les populations de la région et souligné la nécessité de renforcer la résilience de celles-ci face à ce défi.  Les femmes doivent jouer un rôle accru dans le processus de prise de décisions, a-t-il aussi tenu à souligner.  Selon le représentant, l’absence de perspectives de développement économique est un terreau qui favorise les stratégies de recrutement des groupes armés.  En ce qui concerne le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l'Ouest et le Sahel, il a estimé qu’il devait être doté de ressources suffisantes et d’un mandat clair.  Enfin, il a insisté sur la nécessité de remédier aux causes profondes de la situation dans la région.

M. Gert AUVÄÄRT (Estonie) s’est dit préoccupé par les développements négatifs dans la région, en particulier la propagation de l’extrémisme violent et de la criminalité organisée.  La dernière attaque terroriste qui s’est déroulée samedi dernier au Burkina Faso, faisant 14 morts, doit être condamnée dans les termes les plus forts, a-t-il recommandé.  Eu égard à la nature transnationale des menaces, il a plaidé pour une collaboration régionale forte, encourageant notamment un échange de bonnes pratiques entre le Bureau des Nations Unies pour l'Afrique de l'Ouest et le Sahel et le Bureau régional des Nations Unies pour l'Afrique centrale (BRENUAC).  Il a noté avec satisfaction que la Force conjointe du G5 Sahel, de conserve avec l’opération Barkhane, à laquelle l'Estonie participe, avait mené avec succès des opérations antiterroristes.  Nous devons néanmoins mettre l’accent sur le rôle des États de la région, a-t-il dit.  Enfin, le délégué a souhaité une prise en compte accrue des conséquences négatives des changements climatiques sur les populations de la région.

Malgré les progrès, Mme HALIMAH DESHONG (Saint-Vincent-et-les Grenadines) s’est dite troublée par la menace terroriste, l’insécurité et les problèmes humanitaires et de développement qui persistent dans la sous-région.  Le Bureau, a-t-elle estimé, est stratégiquement bien placée pour garantir synergie et complémentarité entre les plans sécuritaires des différents pays et promouvoir ainsi une vision globale contre les cellules de l’extrémisme violent et la criminalité transnationale organisée.  Toute solution à l’instabilité de la sous-région doit d’abord s’attaquer à ses causes-jacentes.  Les stratégies, s’est expliquée la représentante, doivent donc être globales et comprendre des éléments de développement durable, d’adaptation aux changements climatiques, de résilience et droits de l’homme.  La représentante s’est félicitée du lien entre changements climatiques et sécurité.  Les États, a-t-elle insisté, doivent diminuer ce multiplicateur de risques, en assumant la responsabilité collective de réduire les émissions de gaz à effet des serres dans l’intérêt des générations futures.  Les jeunes, a-t-elle fait observer, représentent 65% de la population de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel. 

M. WU HAITAO (Chine) a observé que l’Afrique de l’Ouest et le Sahel jouissent d’une relative stabilité politique et d’une croissance économique encourageante.  Dans le même temps, certains pays de la région font face à des situations sécuritaires préoccupantes, ce qui entraîne des crises humanitaires.  De l’avis de la Chine, il faut accroître la coopération pour trouver des réponses collectives à ces problèmes.  La Chine est prête à apporter son appui et soutient les organisations régionales et sous-régionales dans leurs actions et leurs bons offices, a assuré le représentant.  Selon lui, la communauté internationale doit appuyer les Nations Unies pour qu’un soutien financier soit apporté aux pays de la région.

Deuxièmement, a-t-il dit, il importe d’intensifier les efforts pour faire face aux urgences terroristes.  Jugeant essentiel d’aider les pays à lutter contre la radicalisation et la collusion entre terrorisme et criminalité organisée, il a rappelé que son pays appuie financièrement la Force multinationale de la CEMAC (FOMUC), la réponse immédiate aux crises et la Force conjointe du G5 Sahel.  Pour le délégué, il convient aussi de s’attaquer aux causes profondes des conflits, à commencer par la pauvreté.  Il faut pour cela aider les pays à renforcer leurs capacités et investir en Afrique, a-t-il plaidé.  La Chine, a-t-il fait remarquer, participe activement à l’assistance aux pays de la région afin d’accroître leur interconnectivité.  En outre, elle est favorable à une meilleure coopération entre toutes les agences de l’ONU, lesquelles devraient accroître leur coordination avec l’UNOWAS pour contribuer à la paix et à la stabilité de la région.

M. JAMES PAUL ROSCOE (Royaume-Uni) a souligné le travail important accompli par le Bureau des Nations Unies pour l'Afrique de l'Ouest et le Sahel, avant de déplorer la détérioration de la situation sécuritaire dans la région.  Celle-ci est préoccupante, avec des cycles de violence récurrents, a-t-il dit, en pointant la situation difficile au Burkina Faso et au Mali.  Il a appelé les pays de la région à garantir un accès humanitaire et souligné l’importance de garantir la sécurité des agents humanitaires.  Il a suggéré que ce Conseil assure une plus grande cohérence des efforts sécuritaires dans la région.

Évoquant ensuite les différents processus électoraux dans les pays de la région, le délégué a souligné le caractère crucial des libertés d’expression et de manifestation.  Les populations doivent pouvoir voter sans peur, a-t-il dit.  Enfin, le délégué a plaidé pour le règlement des causes profondes des conflits dans la région, en souhaitant notamment une meilleure gouvernance.  La situation en Afrique de l'Ouest et au Sahel est de la plus haute importance, a-t-il conclu.

M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) a salué les progrès que la région a connus, mentionnant notamment les dialogues politiques organisés dans plusieurs pays, les progrès relatifs au mécanisme de justice transitionnelle et la réforme du secteur de la sécurité.  Notant néanmoins, avec inquiétude, des tensions électorales dans quelques pays, qui entraînent de violentes confrontations, le représentant à réitéré l’importance de mener des processus politiques pacifiques.  Il a salué le travail mené par l’UNOWAS, avant de souligner l’importance, dans la perspective du renouvellement du mandat de ce Bureau, qu’il poursuive son travail de médiation et de bons offices afin de soutenir les pays de la région dans le contexte de leur processus électoral ou des processus de paix. 

M. Syihab a ensuite souhaité que le Bureau apporte son appui aux pays de la région qui luttent contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée.  Dans ce contexte, les initiatives collectives comme la Force conjointe du G5 Sahel et la Force multinationale mixte doivent être soutenues en permanence, selon le représentant.  De même, renforcer les capacités de l’État et des institutions est importante pour assurer la sécurité des populations, leur offrir des services de base et renforcer la confiance des communautés.  Enfin, le délégué a plaidé pour une approche tenant compte des causes profondes de l’instabilité, citant entre autres la pauvreté, les inégalités, la marginalisation et le déficit de services sociaux de base.  Il a également souligné qu’il fallait, pour arriver à une paix durable et à la stabilité dans la région, une volonté politique et des efforts nationaux et régionaux, ainsi que le soutien de la communauté internationale.

Mme CHERITH NORMAN-CHALET (États-Unis) a constaté que la situation sécuritaire se dégrade et que les difficultés politiques augmentent en Afrique de l’Ouest et au Sahel.  Dans ce contexte, la représentante s’est félicitée des nombreux voyages du Représentant spécial dans la région et de ses bons offices pour apaiser les tensions et appuyer la paix.  Les États-Unis soutiennent son équipe et ses travaux, a-t-elle affirmé.  S’agissant du dernier rapport du Secrétaire général, la représentante s’est déclarée préoccupée par la flambée d’activités terroristes dans le bassin du lac Tchad, ainsi qu’au Burkina Faso et au Niger.  Elle a également relevé que 25 millions de personnes ont besoin d’aide humanitaire dans la région, une crise aggravée par l’instabilité régionale.  Toutefois, a-t-elle concédé, l’UNOWAS ne peut pas garantir la stabilité à lui seul.

De fait, les États-Unis appellent les gouvernements de la région à améliorer la situation des populations de manière à pouvoir répondre à leurs besoins essentiels, a indiqué la déléguée, exprimant l’espoir que tous les membres du Conseil de sécurité exhorteront les signataires de l’Accord d’Alger à respecter leurs engagements.  Elle a également invité le Conseil à encourager les donations et contributions au plan de riposte humanitaire.  Notant enfin que 2020 est une année importante sur le plan électoral dans la région, elle s’est dite encouragée par les élections qui ont eu lieu en Guinée-Bissau et au Sénégal en 2019.  Dans la perspective des scrutins prévus dans six pays, elle a exhorté les gouvernements à créer des environnements pacifiques et ouverts et à faciliter la participation des médias et des groupes d’opposition.

M. XOLISA MFUNDISO MABHONGO (Afrique du Sud) a exprimé son inquiétude face aux attaques terroristes contre les civils, les forces de défense et de sécurité et les Casques bleus au Burkina Faso, au Mali, au Niger et dans les pays du bassin du lac Tchad, notant une propagation à d’autres pays de la région qui n’étaient pas touchés.  Il s’est dit préoccupé par l’augmentation de la violence intercommunautaire qui aggrave la situation humanitaire et sécuritaire en Afrique de l’Ouest et au Sahel.  Des mesures efficaces devraient être envisagées pour résoudre les différends entre les fermiers et les pasteurs ainsi que la violence intercommunautaire, a suggéré le délégué. 

Le représentant s’est dit encouragé par les initiatives des pays de la région afin d’améliorer la situation sécuritaire.  Elles devraient, selon lui, être soutenues par les partenaires internationaux pour les aider à mettre en œuvre avec succès la Stratégie régionale en faveur de la stabilisation pour les pays touchés par Boko Haram, et les différents plans d’appui à la région.  M. Mabhongo a par ailleurs loué la poursuite des processus de consultation et de dialogue nationaux pour résoudre les questions électorales par les pays de la région.  Il a encouragé l’UNOWAS à continuer sa collaboration avec la CEDEAO et avec sa mission de médiation et de bons offices, en vue des élections prévues dans de nombreux pays de la région courant 2020.

M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a salué l’UNOWAS et le Représentant spécial Chambas pour leur action qu’il a qualifiée « d’exemple d’approche holistique et intégrative à travers la région », ce qui est essentiel en termes de prévention à ses yeux.  Dès lors, l’Allemagne soutient pleinement le Bureau, a-t-il assuré.

Saluant les développements positifs dans la région, notamment les processus de dialogue au Libéria, au Sénégal et en Sierra Léone, ainsi que les progrès constants en Gambie, le représentant s’est également félicité de la forte collaboration au niveau régional, y compris l’engagement du G5 Sahel et de la CEDEAO ou encore la collaboration entre entités onusiennes et partenaires régionaux.  L’Allemagne reste cependant préoccupée par la détérioration de la situation sécuritaire en Afrique de l’Ouest et au Sahel, en particulier au Burkina Faso, au Mali et au Nigéria ainsi que dans le bassin du lac Tchad.  Comme l’a souligné le représentant, les activités terroristes accrues, les violations des droits de l’homme et le haut niveau de corruption sont des phénomènes qui se renforcent les uns les autres.  Dès lors, il a demandé que le prochain mandat de l’UNOWAS reflète les causes profondes et les facteurs transversaux des défis que connaît la région. 

L’un de ces facteurs est les changements climatiques, a estimé M. Heusgen en soulignant ses implications pour la sécurité et en rappelant que la région du Sahel à elle seule avait connu des déplacements de 4,4 millions de personnes en raison non seulement de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition, mais aussi des épidémies et de la violence.  Un autre défi relevé par la délégation allemande sont les inégalités entre les sexes et la faible participation des femmes aux processus politique et sécuritaire.  Il ne s’agit pas d’une fin en soi, s’est expliqué le représentant, pour lequel la participation des femmes aux processus de prise de décisions augmenterait significativement les chances de paix durable et de stabilité dans la région.  Alarmé par les violations des droits de l'homme commises par les terroristes et aussi dans le contexte de la lutte antiterroriste, le représentant a appelé à faire en sorte que les droits de l'homme et l’état de droit ne soient pas perdus de vue dans la lutte contre le terrorisme, au risque de pousser des personnes marginalisées vers l’extrémisme violent.  Il s’est également indigné face à la fermeture de milliers d’écoles pour des raisons de sécurité.  En effet, l’éducation est essentielle pour combattre les causes profondes de la radicalisation, de la violence et de la pauvreté, a martelé le représentant, pour lequel priver des enfants de ce droit sera source de problèmes à l’avenir.

En conclusion il s’est félicité des échanges entre le Conseil de sécurité et la Commission de consolidation de la paix au sujet du renouvellement du mandat de l’UNOWAS.

M. MONCEF BAATI (Tunisie) a salué l’appui de l’UNOWAS aux efforts visant à instaurer une paix durable dans la région.  La sécurité de cette région et celle du Maghreb arabe sont étroitement liées, a-t-il dit.  Le délégué s’est félicité de l’accent mis par l’UNOWAS sur la prévention des crises et a plaidé pour un renforcement de son mandat.  Il a noté avec préoccupation la détérioration de la situation sécuritaire dans la région et l’emprise accrue des groupes terroristes.  Les attaques terroristes ont provoqué notamment des déplacements de population, a-t-il rappelé.

M. Baati a appuyé la Force conjointe du G5 Sahel et souligné l’importance de renforcer les capacités des pays de la région.  Il est crucial de faire taire les armes sur le continent africain, a-t-il déclaré.  Le délégué de la Tunisie a souligné en outre la nécessité de remédier aux causes profondes de la situation dans la région, notamment la pauvreté et la marginalisation économique.  Enfin, eu égard à la nature transnationale des menaces, il a plaidé pour un partenariat international fort afin d’y remédier. 

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a dit partager les préoccupations de M. Chambas liées à la dégradation de la situation sécuritaire en Afrique de l’Ouest et au Sahel.  Il s’est déclaré particulièrement préoccupé par l’extension des activités terroristes au Sahel.  Malheureusement, a-t-il commenté, les idéologies extrémistes font de nouveaux adeptes.  Ces derniers temps, a observé le représentant, le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont été particulièrement frappés.  Confirmant le plein appui de son pays à ces États dans leur lutte contre le terrorisme, il a souhaité que l’on n’oublie pas la menace de déstabilisation qui plane aussi sur les États du golfe de Guinée.  À ce sujet, a-t-il dit, les opinions divergent.  Il y a certes des problèmes fondamentaux dans la région, tels que les affrontements intercommunautaires et la relative faiblesse des États, mais cela n’est pas nouveau et les autorités locales ont, dans l’ensemble, réussi à y faire face, a noté M. Polyanskiy.  À ses yeux, le « véritable élément déclencheur », ce sont « les activités aventuristes de ceux qui ont semé le chaos en Libye ».  De fait, a-t-il poursuivi, si l’on n’arrive pas à stabiliser la situation dans ce pays, il ne sera pas simple de parvenir à la paix et à la stabilité au Sahel.

Estimant que les efforts des gouvernements de la région arrivent à point nommé alors que les groupes terroristes coordonnent leurs actions, il a également salué les efforts déployés par la CEDEAO pour mobiliser les moyens de lutter contre les groupes terroristes et a réaffirmé l’appui de la Russie au G5 Sahel.  Pour le représentant, il est évident que l’on ne peut éliminer le terrorisme par des moyens uniquement militaires.  Il faut donc améliorer la situation socioéconomique dans les pays concernés et renforcer les institutions de ces États, tout en appuyant la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel.  Il a enfin espéré que les élections attendues dans six pays de la région se tiendront dans la légalité et le calme.

M. DANG DINH QUY (Viet Nam) a salué l’appui de l’UNOWAS aux efforts faits dans la région entre 2016 et 2019 pour prévenir les conflits et instaurer une paix durable.  Nonobstant les progrès importants accomplis, il a estimé que des efforts nationaux, régionaux et internationaux accrus sont nécessaires pour consolider une paix fragile et remédier aux défis majeurs de développement.  Le représentant s’est dit préoccupé par la détérioration de la situation sécuritaire dans certains pays et a fermement condamné les récentes attaques terroristes meurtrières au Niger, au Burkina Faso et au Mali.

Sur le plan électoral, le représentant s’est félicité des résultats de l’élection présidentielle du 29 décembre 2019 en Guinée-Bissau.  Il a ensuite appelé le Togo, la Guinée, la Côte d’Ivoire et le Ghana à assurer un bon déroulement des élections prévues en 2020.  Enfin, le délégué a souligné le rôle joué par la Force conjointe du G5 Sahel en espérant que la communauté internationale continuerait de l’appuyer, conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.

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