8675e séance – matin
CS/14035

Conseil de sécurité: l’Équipe d’enquêteurs chargée d’amener Daech à répondre de ses crimes en Iraq a commencé à réunir des « preuves incontestables »

« Le récent renouvellement de notre mandat représente une réaffirmation de la part du Conseil de sécurité qu’il ne suffit pas de condamner la barbarie et la dépravation », a déclaré, ce matin au Conseil, le Chef de l’Équipe d’enquêteurs des Nations Unies chargée de concourir à amener Daech/État islamique d’Iraq et du Levant à répondre de ses crimes (UNITAD), M. Karim Asad Ahmad Khan.

Venu présenter son rapport semestriel devant l’organe de l’ONU chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales, M. Khan a indiqué que, un an après son déploiement en Iraq, l’Équipe qu’il dirige est désormais opérationnelle, avec 107 membres dont des enquêteurs, des juristes, des experts en criminalistique et des spécialistes de la protection et de l’accompagnement des témoins.  Tous les groupes régionaux y étant représentés, a-t-il précisé, en relevant que 53% de femmes figurent parmi les équipes d’appui et 50% parmi les cadres. 

L’UNITAD a commencé à mettre en place une base de preuves incontestables, grâce à l’analyse ADN et à la balistique, au balayage laser des lieux des crimes, à la numérisation de preuves documentaires disparates et à la collecte de données médicolégales cruciales dans des fosses communes, a expliqué le haut fonctionnaire.

Ces éléments de preuve, déjà exploités par une cour d’appel finlandaise concernant deux ressortissants iraquiens accusés de crimes de guerre à Tikrit, peuvent également servir de base à des poursuites judiciaires en Iraq, a relevé le Chef de l’Équipe d’enquêteurs.  Il s’est à cet égard réjoui que Bagdad ait pris des mesures concrètes en vue d’adopter une législation permettant de poursuivre en justice les actes commis par Daech en tant que crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide.  Une décision qui a été saluée, notamment, par la Belgique et la République dominicaine.

Le témoignage de Kachi, un Iraquien de la communauté yézidie ayant survécu au massacre perpétré dans les montagnes du district de Sinjar le 3 août 2014, a donné aux membres du Conseil de sécurité la pleine mesure de la gravité des crimes sur lesquels est chargée d’enquêter l’UNITAD.  Ce jour-là, a relaté le témoin, des combattants de Daech ont pris le contrôle de la région et de ses villages alentours, provoquant la fuite de dizaines de milliers de civils yézidis et capturant et tuant environ 7 000 hommes, femmes et enfants.

Les membres de l’organisation terroriste ont assiégé la localité de Kocho 12 jours durant et exécuté près de 400 hommes aux cris de « Dieu est grand ».  Pas moins de 850 femmes et enfants ont pour leur part été conduits à l’est de Sinjar avant d’être tués et enterrés, parfois ensevelis vivants dans une fosse.  L’épouse et les filles de Kachi ont été vendues comme esclaves en Iraq et en Syrie, seuls 19 habitants de Kocho sur 1 250 ayant survécu, a-t-il raconté.

Troublés par cette évocation du « mal incarné », de nombreuses délégations, comme les États-Unis, la France ou l’Afrique du Sud ont considéré que la réponse à ces crimes doit être la justice, pour que les coupables soient tenus pour comptables de leurs actes.  Une lutte contre l’impunité d’autant plus indispensable que la justice participe du relèvement d’une nation, a renchéri l’Allemagne.  C’est pourquoi la coopération dont les autorités iraquiennes font preuve avec l’Équipe d’enquêteurs, de l’aveu même de son Chef, a satisfait nombre de délégations, dont la Pologne, le Royaume-Uni, la République dominicaine ou le Pérou.

Si la collecte de preuves sur le terrain est l’un des éléments les plus importants de la lutte antiterroriste, c’est à l’Iraq qu’il incombe cependant de poursuivre les auteurs d’atrocités commises sur son territoire, ont pour leur part insisté l’Indonésie, la Fédération de Russie et la Guinée équatoriale.  Dans ce contexte, il est crucial que l’Équipe continue de respecter la Charte des Nations Unies, les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, la souveraineté de l’Iraq, tout en coordonnant au maximum ses activités avec les autorités de ce pays.

L’Iraq a confirmé qu’il était bien dans ses intentions de renforcer sa coopération avec l’Équipe, estimant dans le même temps que les auteurs des crimes doivent être traduits devant la justice iraquienne pour montrer aux familles de victimes que justice sera faite.  De fait, le Gouvernement iraquien a demandé à l’UNITAD de traiter de la question sous l’angle strictement juridique et de soumettre les preuves collectées aux autorités iraquiennes compétentes pour ouvrir les procédures judiciaires, a résumé son représentant.

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES – (S/2019/878)

Déclarations

M. KARIM ASAD AHMAD KHAN, Conseiller spécial et Chef de l’Équipe d’enquêteurs des Nations Unies chargée de concourir à amener Daech/État islamique d’Iraq et du Levant à répondre de ses crimes, a déclaré que depuis son dernier exposé au Conseil de sécurité, son équipe avait continué de mener des enquêtes, tout en veillant à ce que les victimes et leurs familles soient placées au centre de ses travaux.  Car il est essentiel que toutes les voix des victimes issues de toutes les communautés, qu’elles soient chrétienne, Kaka’i, shabak, sunnite et turkmène ou yézidie soient entendues, a-t-il expliqué, ajoutant qu’il était de la responsabilité de tous, y compris du Conseil de sécurité, pour établir les responsabilités.

M. Kahn a ensuite indiqué qu’un an après son déploiement en Iraq, l’Équipe d’enquêteurs est désormais opérationnelle.  Elle compte 107 membres, dont 53% de femmes parmi les équipes d’appui et 50% parmi les cadres, tous les groupes régionaux y étant représentés.  L’Équipe a en outre fait des progrès significatifs dans la collecte de documents, de données numériques, de témoignages et de preuves juridiques dans les trois régions prioritaires pour la conduite de ses enquêtes, à savoir Mosul, Sinjar et le camp de Speicher à Tikrit.  Grâce aux contributions extrabudgétaires, l’Équipe a également pu étendre sa juridiction à tous les crimes commis par Daech à l’encontre de l’ensemble des communautés présentes en Iraq.

M. Khan a ensuite indiqué que sur la base de ses activités, l’Équipe avait pu identifier un certain nombre d’individus appartenant à l’État islamique d’Iraq et du Levant, notamment 160 auteurs de crimes commis contre la communauté yézidie à Sinjar.  Elle est désormais en train de monter des dossiers qui puissent être présentés à la justice.  De plus, avec la coopération exemplaire du Gouvernement iraquien, l’Équipe a pu mener, pendant 203 jours, des enquêtes de terrain, notamment à Mossoul et Tikrit.  Les éléments de preuve collectés dans ce cadre servent aujourd’hui de base au procès actuellement intenté en Finlande contre deux membres présumés de cette organisation, poursuivis pour des crimes de guerre commis par l’EIIL en juin 2014 à Tikrit.  Avec cette coopération, le Gouvernement iraquien et l’Équipe ont démontré leur capacité à fournir des éléments de preuve pour des procès dans des pays tiers, s’est-il réjoui.  Bagdad a également pris des mesures concrètes en vue de l’adoption d’une législation permettant de poursuivre en justice les actes commis par Daech en tant que crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide, s’est félicité le Conseiller spécial, qui a tenu à souligner sa volonté personnelle de travailler avec les autorités nationales afin d’établir un cadre juridique solide qui servirait de base à la poursuite des membres de Daech pour des chefs d’inculpation proportionnels à la gravité de leurs actes.

« Le récent renouvellement de notre mandat représente une réaffirmation de la part de ce Conseil qu’il ne nous suffit pas de condamner la barbarie et la dépravation de Daech », a résumé le Conseiller spécial.  Pour rendre service aux survivants, nous devons nous assurer que les auteurs de ces crimes seront personnellement tenus de rendre des comptes.  Grâce à l’analyse ADN et à la balistique, au balayage laser des lieux des crimes, à la numérisation de preuves documentaires disparates et à la collecte de données médicolégales cruciales dans des fosses communes, nous avons commencé à mettre en place une base de preuves incontestables sur laquelle reposent les poursuites judiciaires nationales qui pourront être couronnées de succès, a poursuivi le haut fonctionnaire.  Il s’est dit heureux que le Conseil, aujourd’hui, à l’initiative du Royaume-Uni, ait donné la parole directement à Kachi, un membre de la communauté yézidie qui a été un partenaire important du travail de l’Équipe.  « Je suggérerais humblement que cela puisse servir de précédent à la participation de représentants de communautés de l’ensemble de l’Iraq à nos futures séances d’information », a-t-il ajouté.

KACHI AMO SALOH, Iraquien, membre de la communauté yézidie et survivant du massacre de Kocho perpétré dans les montagnes du district de Sinjar le 3 août 2014, a relaté ce massacre par visioconférence depuis les bureaux de l’UNITAD. 

Ce jour-là, a témoigné Kachi, des terroristes de Daech ont pris le contrôle de la région et de ses villages provoquant la fuite de dizaines de milliers de civils yézidis, mais quelque 7 000 femmes, hommes et enfants ont été capturés et tués.  Le village de Kocho a été assiégé pendant 12 jours par de très nombreux combattants de Daech, jusqu’au 15 août 2014.  Ils ont emmené les villageois, soit environ 1 250 personnes, dont des femmes et des enfants, et les ont enfermés dans l’école du village, où ils les ont fouillés et ont confisqué leurs biens, puis ils ont séparé les hommes des femmes, a-t-il raconté. 

Les terroristes ont ensuite emmené les hommes, environ 400, dans différents lieux hors du village, près des fermes et dans les vergers, et ils ont commencé à tirer en criant « Dieu est grand » et en brandissant des drapeaux de Daech.  Après les tirs, ils sont partis ailleurs et le témoin s’est retrouvé sous une pile de corps, « blessé mais pas mort ».  En ouvrant les yeux, Kachi a vu près de lui trois de ses frères tués.  Ses neveux et des cousins ont subi le même sort.  Il y avait 50 à 60 hommes dans ce groupe, s’est-il souvenu.  Kachi a réussi à s’enfuir de peur d’être tué, « en abandonnant ses frères et leurs enfants dans un charnier ».  Il a dit avoir survécu « par la grâce de Dieu » pour témoigner de ce crime atroce commis par l’EIIL. 

Les gens de Daech ont ensuite emmené environ 850 femmes et enfants à l’est de Sinjar, puis ont séparé les femmes âgées du reste du groupe – il y avait environ 77 vieilles dames dont sa belle-mère âgée de 90 ans, a poursuivi Kachi.  Elles ont toutes été tuées et enterrées, parfois ensevelies vivantes dans une fosse.  Les terroristes ont alors emmené les femmes et les filles, dont l’épouse et les filles de Kachi qui ont été vendues sur un marché d’esclaves en Iraq et en Syrie.  À ce jour, a-t-il précisé, Kachi a perdu 75 membres de sa famille élargie, tous tués par Daech. 

Seuls 19 habitants de Kocho sur 1 250 ont survécu dont Kachi, qui souffre de séquelles psychologiques depuis le massacre.  Cinq ans ont passé mais « je vois toujours les corps de mes frères, j’entends toujours les cris de ma femme et de mes filles, dont ceux de Lara, qui avait trois mois, morte en captivité de faim et de soif », a-t-il confié.

Kachi a remercié le Conseil de sécurité d’avoir créé l’Équipe d’enquêteurs à la demande des communautés yézidies et autres communautés, et du Gouvernement iraquien.  Leurs travaux sont vitaux à ses yeux et pour la totalité de la communauté yézidie pour établir les responsabilités.  Mais à présent, rendre leurs auteurs comptables de leurs crimes et les poursuivre en justice n’est pas suffisant pour les Yézidis, « la communauté internationale doit reconnaître que ce qui s’est passé pour les Yézidis est un génocide », a-t-il insisté, en espérant que le Conseil allait créer un mécanisme permanent pour éviter que de tels crimes ne se reproduisent à l’avenir.  Kachi a conclu en priant les enquêteurs de continuer d’écouter les récits des survivants et des familles des victimes.    

Mme KELLY CRAFT (États-Unis) a présenté ses condoléances à la France, après la mort de 13 de ses soldats engagés dans la lutte contre le terrorisme au Mali. Revenant au thème de la réunion, Mme Craft a rappelé les crimes commis contre diverses communautés en Irak par Daech, le « mal incarné ».  Ce n’est qu’en exigeant que les criminels rendent compte de leurs actes que la justice sera rendue, a-t-elle assuré, rappelant que son pays avait débloqué trois millions de dollars pour appuyer les travaux de l’Équipe d’enquêteurs, notamment pour financer l’excavation de charniers à Sinjar.  Mme Craft a salué la bonne coopération entre le Gouvernement iraquien et l’Équipe.  Elle s’est également félicitée que les éléments de preuve collectés servent de base à des poursuites dans les pays tiers. « Il faut crier haut et fort que justice sera rendue et que les coupables de crimes seront punis », a redit la représentante, assurant que les États-Unis allaient pleinement appuyer le mandat de l’Équipe.  

Après avoir présenté ses condoléances à la France pour la mort de ses 13 soldats au Mali, M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) a salué le courage de Kachi et le travail de M. Khan: l’importance de la justice pour le relèvement d’un pays est absolument indispensable, a-t-il souligné en se félicitant que le travail de l’Équipe d’enquêteurs de M. Khan soit élargi aux crimes commis contre les chrétiens.  Le représentant a rappelé le soutien de l’Allemagne à ces travaux qui sont l’un des objectifs de l’Alliance contre l’impunité qui s’est créée en marge de l’Assemblée générale.  Enfin, il s’est aussi félicité de l’appui des autorités iraquiennes qui coopèrent avec l’Équipe d’enquêteurs.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a dit qu’il soutenait le mandat de l’Équipe d’enquêteurs et salué la bonne coopération dont elle jouit de la part du Gouvernement iraquien.  Cette coopération démontre que le Gouvernement iraquien a fait preuve de sa capacité à juger des crimes commis sur son territoire, a-t-il dit.  Le représentant a également insisté sur le fait que l’Équipe devait s’acquitter de son mandat, en évitant d’empiéter sur ceux d’autres mécanismes des Nations Unies sur les questions de terrorisme.  Par ailleurs, en tant que membre de la coalition internationale de lutte contre le terrorisme, et coauteur de la résolution relative aux combattants étrangers, le Koweït a estimé qu’une des priorités de la communauté internationale est le rapatriement dans leurs pays d’origine des combattants étrangers.  Les pays concernés doivent prendre toutes les mesures à cet effet, a insisté le représentant en conclusion.

M. GBOLIÉ DÉSIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) s’est déclaré convaincu que l’UNITAD saura trouver des réponses adaptées, en synergie avec les autorités iraquiennes, en dépit des défis complexes qui demeurent.  Parmi ces derniers, le caractère transnational des actions de Daech, entre 2014 et juin 2016, appelle l’identification d’espaces de coopération judiciaire entre les États de la région afin que les membres de cette organisation terroriste détenus au-delà des frontières du pays répondent de leurs crimes, a estimé le représentant.  À cet égard, a-t-il dit, la Côte d’Ivoire exhorte l’UNITAD et les autorités iraquiennes à renforcer leur coopération en vue de l’élaboration de mécanismes juridiques consensuels permettant la prise en compte, dans l’arsenal juridique iraquien, des crimes commis par Daech.  Saluant la mise en place du programme de protection des témoins par l’UNITAD, M. Ipo s’est félicité, à cet effet, de sa parfaite coopération avec la Mission d’assistance des Nations Unies en Iraq (MANUI) et l’Organisation internationale de police criminelle (Interpol). 

Pour la Côte d’Ivoire, a poursuivi le délégué, l’engagement de la communauté internationale à traduire en actes concrets le principe de responsabilité pour les crimes de masse commis lors des conflits, notamment par des groupes terroristes, va bien au-delà du cadre iraquien et régional.  Cet engagement, a-t-il souligné, appelle la mobilisation de l’ensemble du système des Nations Unies et de tous les acteurs engagés dans la lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée.   

M. PAUL DUCLOS (Pérou) a reconnu le travail crucial de l’Équipe d’enquête, non seulement pour tenir Daech pour comptable de ses actes, mais aussi pour sa contribution aux efforts de réconciliation nationale.  Il s’est félicité que l’Équipe soit opérationnelle, ce qui lui permet d’assurer son potentiel en matière d’enquête, d’analyse médicolégale, d’exhumation, d’identification des disparus et de protection des témoins.  Le délégué a par ailleurs décrit avec satisfaction les synergies et la coopération entre l’Équipe et les autorités iraquiennes, rappelant aussi qu’elle contribue à l’élaboration de législations permettant les poursuites judiciaires et l’usage des preuves et d’informations exploitables ensuite par d’autres États qui les sollicitent.  M. Duclos a souligné l’importance du soutien reçu par l’Équipe d’enquête de la part d’autres États de la région et d’organisations internationales, en particulier la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq (MANUL), et demandé qu’on lui garantisse les moyens nécessaires.  Il a enfin rappelé que la menace posée par Daech est toujours présente, et que la poursuite de la lutte contre l’impunité peut contribuer à dissuader de commettre de nouveaux crimes atroces.

Mme KGAUGELO THERMINA MOGASHOA (Afrique du Sud) a salué le travail d’enquête « professionnel » de l’UNITAD, notamment grâce à l’utilisation de technologies modernes, des meilleures pratiques internationales et d’une équipe d’experts internationaux dans une panoplie de domaines.  Elle a salué la coopération étroite entre l’UNITAD et les autorités iraquiennes dans ce contexte, en particulier le fait qu’ils développent des mécanismes de soutien mutuel dans le but de traduire les responsables des crimes de Daesh en justice.  Même si Daech a subi des revers significatifs à cause de la défaite militaire de son califat auto-proclamé et la récente mort de son leader Abu Bakr Al-Baghdadi, il est évident, pour la représentante, que la menace posée par les éléments restants est bien réelle, notamment celle des groupes affiliés qui ont émergé en Afrique et ailleurs, et que leur « idéologie toxique » continue de se propager sur Internet.  Toutes ces questions appellent à des réponses, a estimé Mme Mogashoa qui s’est dite préoccupée par la conclusion du rapport du Secrétaire général selon lequel Daech reste une menace omniprésente en Iraq, et cela en dépit des récents revers.  Dans ce contexte, l’Afrique du Sud est d’avis que le rôle de l’UNITAD reste vital pour venir complémenter d’autres efforts visant à mettre fin à la menace que pose Daech (EILL), en assurant que justice devra être rendue pour les crimes horribles commis par cette organisation.  À cet égard, Elle lui a paru évident que l’UNITAD joue un rôle essentiel en tant qu’organe impartial et indépendant, en appui aux autorités iraquiennes.

M. HAITAO WU (Chine) a espéré que l’Iraq allait continuer de rechercher une solution de développement inclusive et réaliser ainsi de nouveaux progrès vers une paix durable.  Les activités terroristes en Iraq ont fait de nombreuses victimes civiles et constitué une menace à la paix et à la sécurité dans la région, a-t-il rappelé.  De nombreux combattants terroristes étrangers et leurs familles sont passés à l’acte dans ce pays et le représentant a appuyé les efforts visant à les poursuivre en justice.

Prenant note du rapport de l’Équipe d’enquêteurs, M. Wu s’est félicité des efforts engagés malgré les difficultés rencontrées.  La Chine soutient la coopération entre l’Équipe et les autres entités des Nations Unies sur le terrain pour éviter les doublons et fournir un appui aux victimes du terrorisme.  Il a aussi souhaité que l’UNITAD respecte strictement son mandat, en consultation étroite avec le Gouvernement iraquien.  Il faut empêcher la reprise des activités terroristes en Iraq, a insisté le représentant, soulignant que pour l’Équipe d’enquêteurs, la poursuite de ses travaux dépendra de ses relations sur le terrain.  Les activités des terroristes posent un défi majeur et les États Membres doivent poursuivre leur coopération et prendre les mesures effectives pour réprimer leurs activités.  S’agissant des combattants étrangers en Iraq et ailleurs le Secrétariat doit suivre leurs activités de très près, a-t-il conclu.

M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) a noté avec satisfaction que l’Équipe d’enquêteurs est désormais pleinement opérationnelle.  Il a aussi salué les avancées dans la collecte des éléments de preuve à Sinjar, Mossoul et Tikrit, malgré les défis de taille rencontrés sur le terrain.  Il est crucial que l’Équipe continue de respecter la Charte des Nations Unies, de s’acquitter de son mandat et de se conformer, dans l’exécution de ses activités, aux résolutions du Conseil de sécurité, a déclaré le délégué.  Soulignant l’importance des témoignages dans la collecte des éléments de preuve, M. Syihab a indiqué que la protection des survivants et des communautés affectées doit être au cœur des efforts de l’UNITAD. Enfin, le délégué a affirmé qu’il incombe aux autorités iraquiennes de poursuivre les auteurs d’atrocités commises sur son territoire.  Par conséquent, l’Indonésie appelle l’Équipe d’enquêteurs à coopérer pleinement avec les autorités compétentes et à appuyer l’Iraq en vue de renforcer son système judiciaire pour traduire les responsables en justice. 

Mme AMPARO MELE KOLIFA (Guinée équatoriale) a pris bonne note de « l’équilibre de genre et géographique » dans la composition de l’Équipe d’enquêteurs.  Elle a également salué l’organisation des travaux et les efforts déployés pour faire participer les victimes de Daech.  Pour la représentante, le succès de l’Équipe favorise la lutte contre l’impunité en Iraq et la construction d’une société résiliente.  Elle a encouragé l’Équipe à continuer de travailler de manière impartiale, indépendante et crédible, dans le strict respect des procédures et bonnes pratiques de l’ONU, du droit international et de la souveraineté de l’Iraq.  Enfin, elle a appelé les autorités iraquiennes et l’ONU à renforcer leur coopération avec l’Équipe.

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) a salué l’opérationnalisation de l’Équipe d’enquêteurs et l’esprit de collaboration qui a prévalu jusqu’ici dans la conduite de ses travaux, notamment avec le Gouvernement iraquien, le Gouvernement de la région du Kurdistan et les communautés locales, y compris les victimes et témoins des crimes perpétrés par Daech.  Le représentant a de plus noté avec satisfaction « l’équilibre de genre et géographique » reflété dans la composition de l’Équipe.   Le représentant s’est également félicité de l’adoption par le pays d’un cadre législatif permettant de traduire en justice les membres de Daech responsables de crimes de guerre, crimes contre l’humanitaire et génocide, et des avancées dans la collecte d’éléments de preuve et le recueil de témoignages à Sinjar, Mossoul et Tikrit.  Par ailleurs, le représentant a encouragé l’Équipe à continuer d’accorder une grande importance aux survivants de crimes de violence sexuelle et de genre. 

Après avoir relevé les progrès réalisés ces derniers mois par l’Équipe d’enquêteurs, M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a remercié Kachi pour son témoignage « poignant » et son courage qui rappellent l’importance de répondre aux appels de survivants pour que les crimes soient reconnus et leurs auteurs traduits en justice.  Le représentant s’est félicité de la coopération étroite entre l’Équipe et les autorités iraquiennes.  Il a salué notamment le projet de loi déposé au Parlement iraquien afin de permettre les poursuites pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide.  Il a souhaité que l’UNITAD accompagne l’Iraq pour mener à bien ce projet.

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a salué la confiance et la bonne coopération dont a fait preuve l’Iraq avec l’Équipe d’enquêteurs, de même que son approche axée sur les victimes.  La délégation tient à l’indépendance de cette Équipe, qu’elle a exhorté à s’acquitter de sa mission.

M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) a souligné que le rôle principal dans le processus de lutte contre le terrorisme revient au Gouvernement iraquien.  On ne peut lutter contre ce mal que par une « coordination maximale »: il est donc indispensable que tous les acteurs respectent la souveraineté iraquienne et coordonnent leurs activités, a insisté le représentant.  Il s’agit d’aider le Gouvernement iraquien à stabiliser la situation.  Pour sa part, la Russie, qui poursuit son appui aux autorités, considère que le travail de l’Équipe d’enquêteurs consistant à recueillir les preuves sur le terrain est l’un des éléments les plus importants de la lutte contre le terrorisme.

Mme ANNE GUEGUEN (France) a commencé par remercier les délégations pour leurs témoignages de sympathie après la mort de 13 soldats français, tués dans la collision de deux hélicoptères de la force Barkhane au Mali.

S’agissant de l’UNITAD, la représentante a salué l’accent mis sur les victimes par l’Équipe d’enquêteurs.  Pour la France, la justice doit être rendue pour les crimes commis par Daech dans le respect des normes internationales.  À ce titre, si la délégation se félicite de la tenue de procès sur la base d’éléments de preuve recueillis par l’Équipe d’enquêteurs, elle rappelle le principe de non-imposition de la peine de mort.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a présenté ses condoléances à la France.  Insistant sur le fait qu’il est essentiel que le Conseil de sécurité continue de suivre ces questions si importantes de justice, elle s’est dite frappée comme tous par le témoignage de Kachi, et l’a remercié.  « C’est le meilleur exemple que nous ayons entendu ce mois-ci », a-t-elle déclaré.  Elle a aussi remercié le Gouvernement iraquien dont l’appui est essentiel pour permettre aux enquêteurs de poursuivre leur travail et salué le projet de loi déposé au Parlement permettant de poursuivre les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et le génocide.

M. MOHAMMED HUSSEIN BAHR ALULOOM (Iraq) a salué l’adoption de la résolution 2490 (2019) approuvant la demande de son gouvernement de proroger le mandat de l’Équipe d’enquêteurs afin de poursuivre son travail d’instruction des crimes commis par Daech.  Il a ensuite espéré davantage de progrès pour exiger des coupables qu’ils rendent des compte et les faire traduire en justice.  Suite à la débâcle militaire de Daech en Iraq, a-t-il poursuivi, le pays a besoin des efforts de la communauté internationale pour reconstruire les infrastructures, faire traduire en justice les commanditaires et les soutiens financiers d’actes terroristes afin de garantir l’éradication complète de ces groupes et tuer dans l’œuf tout plan terroriste visant à troubler la paix et la sécurité internationales.   Ces efforts de coordination sont indispensables pour surveiller les frontières et contrôler et démanteler les moyens utilisés par les groupes terroristes, a insisté le représentant.

M. Bahr Aluloom a dit attendre avec impatience la désignation des membres iraquiens de l’Équipe afin de renforcer les capacités iraquiennes.  Son gouvernement s’est engagé à coopérer avec l’Équipe pour appuyer la mise en œuvre de son mandat, a-t-il rappelé, mais elle doit faire fond sur la souveraineté iraqienne et ses compétences à connaître des crimes commis contre son peuple.  L’Équipe doit traiter cette question sous l’angle strictement juridique afin de renvoyer ces affaires devant la justice iraquienne, a-t-il insisté; toute autre utilisation de ces preuves hors de ce cadre devra être soumis aux autorités iraquiennes et à sa justice.  Il s’agit de soumettre des preuves aux autorités iraquiennes compétentes pour lancer les procédures judiciaires et la justice doit être rendue rapidement aux victimes.  Les auteurs doivent être traduits devant la justice iraquienne pour montrer aux familles de victimes que justice sera faite .  Prolonger la période d’enquête aura un impact délétère sur la qualité des preuves et l’exposition des crimes, a estimé le représentant.  Le temps peut conduire à la disparition des preuves et saperait les efforts déployés pour rendre justice aux victimes.  Pour le représentant, il faut tourner la page le plus vite possible et identifier et juger les coupables de ces crimes.  Il a conclu en appelant au respect strict de la souveraineté et de l’indépendance des autorités judiciaires iraquiennes.  

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