8598e séance – matin
CS/13920

Yémen: l’Envoyé spécial du Secrétaire général avertit sur le risque de « fragmentation du pays »

L’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen a averti, ce matin, au Conseil de sécurité, que la fragmentation du Yémen devient une menace de plus en plus importante et a appelé à redoubler d’efforts pour trouver une issue au conflit, notamment en incluant les parties prenantes des provinces du sud au processus de paix. 

« Il n’y a pas de temps à perdre, car les enjeux deviennent trop importants pour l’avenir du Yémen, du peuple yéménite et de la région toute entière », a insisté M. Martin Griffiths, qui intervenait par visioconférence depuis Amman en Jordanie.

L’Envoyé spécial a notamment indiqué que lors de ses rencontres avec les parties, celles-ci lui ont assuré leur ferme désir à parvenir à une solution politique, de faire avancer les discussions à cette fin et de reprendre la transition politique.  « Mais ce sentiment d’urgence contraste douloureusement avec les efforts engagés jusqu’ici pour résoudre le conflit », a-t-il déploré. 

M. Griffiths a aussi insisté sur la nécessité d’inclure toutes les parties prenantes, y compris celles des provinces du Sud, au processus de paix, notant qu’il existe tout un éventail de points de vue qui doivent être pris en compte pour déterminer l’avenir du sud du pays ainsi que du Yémen dans son ensemble. 

Il a également espéré que l’ensemble des parties yéménites considéreront les événements à Aden, théâtre d’affrontements, le 7 août, entre les brigades de protection présidentielle et les forces du Conseil de transition du Sud, comme le signal que le conflit doit cesser promptement et pacifiquement.  Il a mis en garde que la situation qui y prévaut risque d’endommager encore davantage le tissu social du Yémen et de voir la violence se propager à d’autres provinces du Sud, et de permettre, par ailleurs, l’expansion des activités de groupes extrémistes comme Al-Qaida dans la péninsule arabique, « avec un impact potentiellement terrible pour les civils et pour les perspectives de paix ». 

M. Griffith a d’ailleurs salué les efforts de la coalition pour rétablir le calme, notamment les efforts déployés par l’Arabie saoudite pour organiser un dialogue à Djeddah pour discuter de la situation.  « Même si la mise en œuvre de l’Accord de Stockholm a eu un impact politique significatif et un bénéfice tangible sur le terrain, il ne peut pas être considéré comme une condition préalable à la paix dans l’ensemble du Yémen », a-t-il souligné. 

Lui emboitant le pas, le représentant du Yémen s’est lui aussi félicité de l’appel lancé par l’Arabie saoudite à toutes les parties en vue d’une réunion à Djeddah pour préserver les acquis nationaux.  La délégation a, elle aussi, averti que le « plan de désintégration » du pays s’aggrave et a vivement dénoncé l’appui des Émirats arabes unis à l’intervention « illégitime » du Conseil de transition du Sud, de même que le « projet » de l’Iran dans la région.

De son côté, la Sous-Secrétaire générale aux affaires humanitaires a indiqué qu’en dépit de l’urgence de la situation, les agences continuent d’être confrontées à des restrictions significatives, alors que le Yémen reste la plus grande opération humanitaire au monde, 12 millions de personnes, en moyenne, y recevant une aide chaque mois.  Mais, a-t-elle alerté, tout cela est sur le point de s’arrêter, puisque seuls 34% des besoins humanitaires de l’année ont été couverts à ce jour.  De ce fait, il est prévu de fermer le mois prochain des programmes destinés à 2,5 millions d’enfants souffrant de malnutrition, et dans l’immédiat, plus de 23 000 bébés qui souffrent de malnutrition aiguë risquent de mourir.

« Cette situation est tragique car nous savons qu’avec des ressources adéquates, nous pouvons sauver des millions de vies et faire reculer le choléra car nous y sommes parvenus l’an dernier », a affirmé Mme Ursula Mueller.  La Coordonnatrice adjointe des secours d’urgence a notamment rappelé qu’une réponse robuste avait permis de faire chuter le nombre de nouveau cas d’un million en 2017 à 380 000 en 2018, pour ensuite avertir que cette année, le nombre de nouveaux cas dépasse déjà les 500 000, avec plus de 800 décès, soit cinq fois plus qu’à la même période l’an dernier.

Pour l’Envoyé spécial, le fait que l’Accord sur Hodeïda ait permis, huit mois après sa signature, que l’aide continue de parvenir par le biais des ports peut être considéré comme une grande victoire qui bénéficie aux civils à Hodeïda et ailleurs au Yémen.  De ce fait, mettre en œuvre les autres aspects de l’Accord sur Hodeïda serait une étape importante vers la reprise du processus de paix.  Il a indiqué avoir, en collaboration avec la Mission des Nations Unies en appui à l’Accord sur Hodeïda (MINUAAH), présenté une proposition aux parties en conflit pour faire avancer la mise en œuvre de la première phase de l’Accord, et a précisé que leur réponse est attendue d’ici le 25 août. 

La plupart des huit membres du Conseil de sécurité qui se sont exprimés au cours de cette réunion ont eux aussi insisté, à l’instar du Koweït, sur l’impératif de trouver une solution politique au conflit et ont lancé de nombreux appels à la reprise du dialogue.  Les États-Unis ont, en outre, appelé les parties à participer de bonne foi aux pourparlers de « réconciliation » proposés par l’Arabie saoudite. 

Des préoccupations ont aussi été exprimées au sujet du risque de catastrophe écologique et humanitaire que fait peser le pétrolier délabré « Safer » amarré près du port de Ras Issa et qui, faute de maintenance, présente des risques de rupture avec 1,1 million de barils dans ses soutes.  L’Envoyé spécial a indiqué qu’un accord avait été conclu pour permettre à une mission d’évaluation de l’ONU d’être déployée le 27 août afin d’examiner le navire.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

M. MARTIN GRIFFITHS, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, intervenant par visioconférence depuis Amman, en Jordanie, a averti que la fragmentation du Yémen devient une menace de plus en plus importante.  Il n’y a donc pas de temps à perdre, car les enjeux deviennent trop importants pour l’avenir du Yémen, du peuple yéménite et de la région toute entière.  M. Griffiths a indiqué que lors de ses rencontres avec les parties, celles-ci lui ont assuré leur ferme désir à parvenir à une solution politique, de faire avancer les discussions à cette fin et de reprendre la transition politique.  Mais ce sentiment d’urgence contraste douloureusement avec les efforts engagés jusqu’ici pour résoudre le conflit, a-t-il déploré. 

L’Envoyé spécial a reconnu que « rien n’est simple au Yémen », rappelant qu’au début de son mandat, par exemple, on lui avait assuré de l’imminence de la réouverture de l’aéroport de Sanaa.  Or, ce n’est toujours pas le cas.  Les vols à caractère humanitaire âprement négociés par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) durant des mois restent encore attendus, tandis que la mise en œuvre de l’Accord de Stockholm, une mesure de renforcement de la confiance avec un but humanitaire, a démontré à quel point de tels accords sont vulnérables lorsque l’engagement en faveur d’une solution pacifique vacille.  Pour l’Envoyé spécial, la liste des frustrations est longue et ne saurait s’étendre. 

S’agissant de Hodeïda, M. Griffith a rappelé que le cœur de l’Accord de Stockholm repose sur l’établissement d’un cessez-le-feu dans toute la province et le besoin d’assurer l’acheminement de l’aide humanitaire par les ports.  Huit mois après sa signature, il n’y a pas eu d’opération militaire majeure dans la ville d’Hodeïda, et on a noté une baisse significative de la violence, s’est-il félicité.  L’aide continue de parvenir par le biais des ports, ce qui est en soi une grande victoire qui bénéficie aux civils à Hodeïda et ailleurs au Yémen. 

De ce fait, mettre en œuvre les autres aspects de l’Accord sur Hodeïda serait une étape importante vers la reprise du processus de paix, a-t-il souligné.  Il a ensuite indiqué avoir, en collaboration avec la Mission des Nations Unies en appui à l’Accord sur Hodeïda (MINUAAH), présenté une proposition aux parties en conflit pour faire avancer la mise en œuvre de la première phase de l’Accord.  Leur réponse est attendue d’ici le 25 août, a-t-il précisé, pour ensuite souligner qu’« Hodeïda » est une mesure temporaire conçue pour prévenir toute détérioration supplémentaire.  L’Accord n’a jamais été conçu pour établir un précédent sur la manière de répondre aux causes sous-jacentes du conflit. 

Il s’est ensuite félicité du fait qu’il y ait un accord destiné à faciliter l’accès d’une mission d’évaluation de l’ONU qui devrait être déployée, le 27 août, afin d’évaluer le pétrolier délabré Safer, amaré près du port de Ras Issa.  Cette mission est essentielle pour atténuer les graves conséquences environnementales provoquée par toute fuite de pétrole provenant des cales du navire.

Dans le même temps, a-t-il poursuivi, les négociations sur la mise en œuvre des échanges de prisonniers sont en cours.  Les parties ont passé plusieurs jours à Stockholm et ont tenu des séances techniques détaillées au cours des mois suivants sur la question.  Pour l’Envoyé spécial, la lenteur de ces négociations prolonge les souffrances des prisonniers et de leurs familles.  M. Griffith s’est aussi dit frustré que les progrès sur Hodeïda n’aient pas été plus rapides et qu’il n’y a eu aucune mise en œuvre concrète des accords sur Taëz et les échanges de prisonniers et de détenus.  Il a rappelé que l’Accord de Stockholm constitue une étape clef dans le processus de paix au Yémen et serait d’un grand bénéfice pour les parties et le peuple yéménite s’il était mis en œuvre.  Il a ajouté que cette mise œuvre ne doit pas outrepasser l’impératif global de mettre fin au conflit.

Poursuivant, l’Envoyé spécial a indiqué que les opérations militaires se sont poursuivies dans plusieurs provinces, notamment Sanaa, Saada, Taëz, Jaouf, Beïda, Hajjah et Dalea, ainsi que à la frontière du Yémen avec l’Arabie saoudite.  L’impact des opérations militaires sur les civils est terrible, comme le démontre l’attaque de fin juillet d’un marché à Saada.  Il a condamné les efforts continus du groupe Ansar Allah qui cible délibérément les infrastructures civiles en Arabie saoudite, avertissant que tout menace contre la vie des civils et provocation militaire ne fera qu’aggraver le clivage entre les parties et d’augmenter l’impact du conflit au-delà des frontières du pays. 

Au sujet de la situation à Aden et Abyan, il a indiqué que le 7 août dernier, des affrontements ont eu lieu entre les brigades de protection présidentielle et les forces du Conseil de transition du Sud.  Ces dernières ont pris le contrôle des camps militaires et des institutions d’Aden et la nuit dernière, elles ont pris des mesures provocatrices pour étendre leur contrôle militaire dans la province d’Abyan.  Il a condamné ces violences ayant fait de nombreuses victimes civiles, ainsi que les efforts déployés par le Conseil de transition du Sud pour prendre le contrôle des institutions de l’État par la force.  Il a aussi déploré le harcèlement dont sont victimes, à Aden, les Yéménites originaires du Nord.  Il a averti du risque d’endommager davantage le tissu social du Yémen et de voir la violence se propager à d’autres provinces du Sud.  À ce moment, a-t-il confessé, il est difficile de savoir où ces événements nous mèneront.  M. Griffith a salué les efforts de la coalition pour rétablir le calme, notamment les efforts déployés par l’Arabie saoudite pour organiser un dialogue à Djeddah pour discuter de la situation. 

L’Envoyé spécial a également mis en garde contre les dangers d’une résurgence des activités de groupes extrémistes comme Al-Qaida dans la péninsule arabique, avertissant qu’une nouvelle fragmentation du secteur de sécurité à Aden et ailleurs pourrait permettre l’expansion des activités de ces extrémistes, avec un impact potentiellement terrible pour les civils et pour les perspectives de paix.  La situation sur le terrain évolue rapidement et il faut saisir chaque opportunité pour progresser, a-t-il insisté. 

M. Griffiths a rappelé que des questions à long terme sur l’avenir du Yémen restent non résolues et a insisté sur la nécessité d’inclure toutes les parties prenantes, y compris celles des provinces du Sud, au processus de paix.  Il existe tout un éventail de points de vue qui doivent être pris en compte pour déterminer l’avenir du sud du pays ainsi que du Yémen dans son ensemble.  Il a espéré que l’ensemble des parties prenantes yéménites considéreront les événements à Aden comme le signal que le conflit doit cesser promptement et pacifiquement.  Même si la mise en œuvre de l’Accord de Stockholm a eu un impact politique significatif et un bénéfice tangible sur le terrain, cela ne peut pas être considéré comme une condition préalable à la paix dans tout le Yémen, a-t-il estimé. 

Mme URSULA MUELLER, Sous-Secrétaire générale aux affaires humanitaires et Coordonnatrice adjointe des secours d’urgence, a noté que les événements des dernières semaines ont montré, une nouvelle fois, la volatilité du conflit au Yémen.  Ses effets se font notamment sentir dans les souffrances et les injustices infligées à des millions de civils, a-t-elle déploré.  Depuis des mois, a-t-elle indiqué,  le Bureau de la coordination des affaires humanitaires préconise cinq priorités visant à réduire les souffrances au Yémen, lesquelles ont été entérinées par le Conseil de sécurité dans sa résolution 2451.  La première de ces priorités, a-t-elle rappelé, concerne le droit international humanitaire, alors que le conflit continue d’avoir des conséquences dévastatrices pour les civils et les infrastructures civiles.  Ce mois-ci, des combats à Aden entre les forces du Gouvernement et celles affiliées au Conseil de transition du Sud ont fait quelque 300 tués et blessés, parmi lesquels des civils, a-t-elle noté.  Depuis lors, les violences ont diminué à Aden mais des combats font rage ailleurs, a poursuivi la Secrétaire générale adjointe, appelant à une désescalade urgente dans tout le pays, si possible par le biais d’un cessez-le-feu à l’échelle nationale.  Dans tous les cas, a-t-elle martelé, toutes les parties doivent respecter le droit international humanitaire, et tout doit être fait pour épargner les civils et les infrastructures civiles.  Cela passe, a-t-elle dit par la vérification des cibles ou l’annulation d’une attaque si elle doit causer des dommages trop graves à la population civile. 

La deuxième priorité se rapporte à l’accès humanitaire, a-t-elle poursuivi, évoquant un point positif à ce sujet.  Après des mois de discussions, le Programme alimentaire mondial (PAM) et les autorités houthistes ont, en effet, signé un accord qui contient des dispositions techniques destinées à empêcher tout détournement de l’aide alimentaire.  Il renforce aussi les méthodes d’identification des personnes ayant besoin d’une assistance alimentaire, s’est-elle félicitée.  Cependant, en raison des retards pour la finalisation de cet accord, le PAM a dû suspendre son assistance à 850 000 personnes à Sanaa il y a deux mois, mais les distributions ont à présent pu reprendre, a ajouté Mme Mueller.  Elle a également indiqué que les autorités houthistes ont aussi accepté le principe d’une évaluation par les services de l’ONU du pétrolier SAFER, qui, faute de maintenance, présente des risques de rupture avec 1,1 million de barils dans ses soutes.  Une fuite créerait une catastrophe environnementale et humanitaire, a-t-elle averti.

Pour le reste, a enchaîné Mme Mueller les agences continuent d’être confrontées à des restrictions significatives.  Plus de 100 projets humanitaires sont ainsi dans l’attente d’autorisation des autorités Ansar Allah dans le nord, lesquelles ont imposé, ces derniers mois, plus de 50 directives officielles et des dizaines d’autres de nature informelle, lesquelles fond double emploi ou se contredisent.  Le Fonds humanitaire pour le Yémen attend le feu vert pour 39 projets, dont 32 sont bloqués par les autorités Ansar Allah au nord, les autres attendant l’autorisation du Gouvernement du Yémen.  En moyenne, les projets sont bloqués pendant plus de 90 jours.  Et on peine à comprendre pourquoi des délais aussi longs sont imposés dans un contexte d’urgence grave, a-t-elle dit.  De plus, au-delà des délais bureaucratiques, les agences doivent aussi faire face à des restrictions de mouvement, a-t-elle dénoncé.  Néanmoins, alors que la tension montait à Aden en août dernier, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et l’UNICEF ont pu vacciner plus de 400 000 personnes contre le choléra.  Le Yémen reste la plus grande opération humanitaire au monde, a résumé la Coordonnatrice, précisant que chaque mois, 12 millions de personnes, en moyenne, y reçoivent une aide. 

Mais, a-t-elle alerté, tout cela est sur le point de s’arrêter.  Mme Mueller a, en effet, indiqué que s’agissant du financement des opérations d’aide, seuls 34% des besoins ont été couverts, jusqu’à présent en 2019.  À la même période, l’an dernier, le plan était financé à hauteur de 45%, grâce notamment aux contributions de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis, et ces financements ont permis de sauver des millions de vie.  Notant que les principaux donateurs, à savoir les voisins du Yémen au sein de la coalition, n’ont pour l’heure versé qu’une part inférieure à ce qu’ils avaient promis, elle a averti que des programmes essentiels cessent de fonctionner.  Certains sont déjà annulés, comme des campagnes de vaccination et des programmes de prévention du choléra, s’est-elle inquiétée.  Et au cours des prochains jours, les programmes d’assainissement vont aussi s’arrêter dans quatre gouvernorats, ce qui va exposer 300 000 personnes déplacées à des risques de choléra.  En septembre, a-t-elle poursuivi, nous serons forcés de fermer des programmes destinés à 2,5 millions d’enfants souffrant de malnutrition, et dans l’immédiat, plus de 23 000 bébés qui souffrent de malnutrition aiguë risquent de mourir. 

Cette situation est tragique car nous savons qu’avec des ressources adéquates, nous pouvons sauver des millions de vies et faire reculer le choléra car nous y sommes parvenus l’an dernier, a-t-elle affirmé.  Elle a rappelé qu’une réponse robuste avait permis de faire chuter le nombre de nouveau cas d’un million en 2017 à 380 000 en 2018, pour ensuite avertir que cette année, le nombre de nouveaux cas dépasse déjà les 500 000, avec plus de 800 décès, soit cinq fois plus qu’à la même période l’an dernier.  Par ailleurs, une nouvelle évaluation a également montré que le risque de famine perd du terrain.  C’est la conséquence du doublement de l’aide alimentaire dans certaines zones.  Mais sans financement, ce risque s’intensifiera à nouveau, a-t-elle mis en garde. 

Passant au quatrième point de son bilan, à savoir l’économie yéménite, Mme Mueller a brossé un tableau sombre, notant que la monnaie nationale, le rial, perd encore de sa valeur.  Un rapport récent du Fonds monétaire international (FMI) prévoit une dévaluation plus importante, avec une inflation atteignant jusqu’à 45%, ce qui signifie que les prix des produits de première nécessité vont encore augmenter.  Par le passé, a-t-elle rappelé, des injections de devises via la banque centrale avaient permis de stabiliser le taux de change.  Nous espérons que les partenaires du Yémen vont à nouveau fournir un soutien, a-t-elle déclaré.  À ses yeux, seule une solution politique permettra de résoudre de façon durable la situation humanitaire dramatique dans le pays.  Elle a, par conséquent, exhorté toutes les parties prenantes à appuyer les efforts de l’Envoyé spécial, M. Martin Griffiths, pour mettre fin au conflit le plus rapidement possible. 

M. MANSOUR AYYAD SH.  A.  ALOTAIBI (Koweït) a rappelé que cela fait huit mois que l’Accord de Stockholm est entré en vigueur, mais que celui-ci a été marqué par de nombreux blocages.  Il a noté que le blocus de Taëz se poursuit et les parties ont du mal à mettre en œuvre de l’Accord sur Hodeïda.  Le représentant a souligné qu’il n’y a pas de solution militaire à la crise et a appelé à procéder à une désescalade de la situation en mettant en œuvre notamment les trois points de l’Accord de Stockholm.  Le représentant a aussi condamné les attaques contre les civils et a salué les mesures prises par l’Arabie saoudite pour protéger son territoire, estimant que les attaques des houthistes contre ce pays représentent une violation du droit international. 

Le délégué a en outre relevé que la crise humanitaire au Yémen demeure préoccupante, rappelant que le Programme alimentaire mondial (PAM) avait dû suspendre ses opérations à Sanaa pendant deux mois, avant de les reprendre après avoir obtenu des garanties.  Il a invité toutes les parties à se garder d’entraver le travail des humanitaires et à assurer la sécurité de ces derniers.  Il a terminé en appelant les parties yéménites à mettre en œuvre l’Accord sur Hodeïda. 

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) a exprimé sa préoccupation face à l’intensification des combats durant le mois de juillet au Yémen, d’abord à Aden, puis à Sanaa, au détriment de la population civile.  La détérioration des infrastructures civiles, telles que les hôpitaux, les écoles et les marchés, ne fait qu’empirer les conditions de vie des citoyens yéménites, a déploré le représentant, appelant toutes les parties à ne pas ouvrir de nouvelles lignes de front et à mettre un terme aux attaques, conformément à la résolution 2216 (2015) du Conseil de sécurité et aux dispositions de l’Accord sur Hodeïda. 

Le Gouvernement yéménite et les houthistes doivent en outre continuer à travailler de concert pour mettre en œuvre l’Accord de Stockholm, a déclaré le représentant, saluant la réunion qui a eu lieu le mois dernier sur cette question entre les parties, à bord d’un navire des Nations Unies sur la mer Rouge.  Par ailleurs, le représentant a exhorté les parties à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour faciliter la mise en œuvre du plan de réponse humanitaire de l’ONU au Yémen, dans le respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme.  La seule issue possible au conflit est de nature politique, a-t-il souligné en conclusion.

M. KACOU HOUADJA LÉON ADOM (Côte d’Ivoire) a déclaré être préoccupé par le risque d’enlisement du conflit au Yémen.  Il a constaté que l’impasse du processus politique, de même que les violents combats de ces derniers jours à Aden, notamment à proximité de l’aéroport international et marqués, entre autres, par la prise du palais présidentiel par des séparatistes, font craindre une escalade de la situation.  Il a souligné que la fragmentation continue du conflit yéménite révèle sa complexité et met en relief l’impérieuse nécessité d’associer toutes les parties au processus de paix. 

Le représentant a salué les efforts déployés par les forces régionales qui ont permis d’obtenir un cessez-le-feu immédiat et le retrait du Conseil de transition du Sud des points clefs d’Aden.  M. Adom a appelé toutes les parties à s’inscrire dans la recherche d’une solution globale, à travers notamment la mise en œuvre intégrale des Accords de Stockholm et sur Hodeïda.  Enfin, la Côte d’Ivoire a exhorté les partenaires bilatéraux et multilatéraux à poursuivre leurs appuis en faveur du financement de l’aide humanitaire pour sauver des vies, alléger les souffrances du peuple yéménite et répondre aux besoins particuliers des femmes et des filles qui sont les plus vulnérables en période de conflit. 

M. JONATHAN R.  COHEN (États-Unis) s’est dit préoccupé par la flambée de violences et les affrontements à Aden.  Cette poursuite des combats ne fait qu’exacerber la situation humanitaire que l’ONU s’emploie à atténuer sur le terrain, a-t-il constaté.  Dans ce contexte, le représentant a appelé les parties au conflit à se conformer à l’accord de cessez-le-feu et à participer de bonne foi aux pourparlers de « réconciliation » proposés par l’Arabie saoudite.  Achever le travail initié par la conférence du dialogue national est la meilleure façon, pour les Yéménites, de forger leur avenir politique.  Il est également essentiel que les parties respectent les institutions, notamment la branche de la banque centrale située à Aden, et permettent un accès humanitaire sans entrave aux personnes touchées par ce conflit, a-t-il dit.

Le délégué s’est ensuite félicité de l’accord passé entre le Gouvernement et les houthistes pour que l’aide humanitaire accède à Sanaa.  Le PAM et l’ensemble des organisations humanitaires doivent pouvoir opérer sans menace de diversion ou de corruption, a-t-il souligné.  Il a espéré que la signature de cet accord par les houthistes permettra la poursuite de l’assistance humanitaire dans le pays, laquelle est essentielle pour les millions de Yéménites qui en dépendent.  M. Cohen a, par ailleurs, relevé que l’arrêt et la réduction des programmes humanitaires de l’an dernier démontre l’importance du financement de cette assistance.  À cette aune, il a appelé les donateurs à redoubler d’efforts et à tenir les promesses faites en février dernier, à Genève. 

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a exhorté toutes les parties impliquées dans les combats au Yémen à cesser les hostilités et à mettre en œuvre les accords de Stockholm.  « Mettre en œuvre ces Accords est d’une importance critique pour renforcer la confiance et parvenir à un accord politique plus large », a insisté le représentant.  Il s’est dit particulièrement inquiet des récents développements dans le sud du Yémen et a encouragé les acteurs régionaux de continuer à trouver une solution en phase avec le processus de médiation de l’ONU et les Accords de Stockholm.  Il s’est félicité des développements positifs dans la région, destinés à promouvoir la coopération, avant d’exhorter les pays de la région à donner la priorité au dialogue afin de régler les différends politiques qui persisteraient.

Par ailleurs, le représentant de l’Afrique du Sud s’est dit extrêmement inquiet en raison de la crise humanitaire au Yémen en notant que 15 millions de personnes, soit la moitié de la population du pays, est victime de privation.  De plus, 1,1 million de personnes sont touchées par le choléra et 3,3 millions ont dû fuir selon le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.  Cette crise humanitaire sans précédent dans cette région rend urgent la cessation des hostilités pour laisser place à une solution pacifique et inclusive, a-t-il souligné.  Dans ce contexte, le représentant de l’Afrique du Sud a exhorté toutes les parties à respecter leurs obligations au regard du droit international, pour ensuite saluer la réouverture de la distribution de nourriture par le Programme alimentaire mondial (PAM) après une fermeture partielle en juin 2019. 

M. HAITAO WU (Chine) a déploré les récents affrontements qui ont eu lieu à Aden.  Il a dit espérer que toutes les parties prenantes agiront en tenant compte de l’intérêt suprême du peuple yéménite.  Il a invité les parties à régler leurs différends par la voie du dialogue et en accord avec les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  Il a aussi appelé les pays de la région à s’investir en faveur de la paix au Yémen.  M. Wu a demandé que l’Accord de Stockholm soit pleinement mis en œuvre, avant de souligner que la Chine est en faveur de la protection de la souveraineté du Yémen.  Pour le représentant, c’est le peuple yéménite qui souffre le plus, et il a donc invité les bailleurs de fonds à tenir leur promesse afin que l’aide soit fournie à tous ceux dans le besoin.  Pour sa part, la Chine s’engage à poursuivre son appui humanitaire au Yémen. 

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a déploré la persistance des violences sur le territoire yéménite ces dernières semaines, « entre les forces séparatistes et le Gouvernement légitime du Yémen », notamment à Aden.  Saluant les derniers rapports faisant état du retrait des forces séparatistes de certaines positions à Aden, le représentant a espéré que cette évolution laisse présager d’un retour au dialogue et de mesures de compromis et de réconciliation. 

Le représentant a, par ailleurs, déploré l’absence de progrès tangibles dans la mise en œuvre de l’Accord de Stockholm, en raison, selon lui, de la « rigidité » des parties.  Il a appelé le Conseil de sécurité et les pays bénéficiant d’une influence sur ces dernières à exercer « la pression politique nécessaire » pour relancer leur engagement en faveur de l’Accord de Stockholm.  Cela suppose, a-t-il ajouté, que les parties fassent preuve de davantage de souplesse sur certaines questions, comme la composition des forces locales et la distribution des revenus des ports à travers la banque centrale yéménite.

M. ABDULLAH ALI FADHEL AL-SAADI (Yémen) a estimé que les derniers développements au Yémen compliquent les efforts du Conseil de sécurité pour parvenir à une solution politique.  Selon le représentant, les violations du dialogue et des résolutions pertinentes du Conseil, notamment la résolution 2216, entravent ces efforts visant à construire un Yémen pacifié.  Il y a quelques jours, a-t-il dénoncé, l’autorité de l’État a été usurpée par une intervention illégitime du Conseil de transition du Sud, appuyé par les Émirats arabes unis.  Dans ces conditions, le Gouvernement yéménite réitère sa position condamnant la rébellion armée qui mine la stabilité et l’unité du Yémen et va à l’encontre de l’objectif de l’Alliance arabe, à savoir mettre un terme à ce « putsch » et au projet de l’Iran dans la région.  Or, a déploré le délégué, ce « plan de désintégration » se poursuit et s’aggrave malgré les appels lancés par le Gouvernement de l’Arabie saoudite.  Il a imputé la responsabilité de cette rébellion au Conseil de transition du Sud et a appelé les Émirats arabes unis à cesser leur soutien à ces milices. 

Le représentant s’est félicité de la « position sincère » de l’Arabie saoudite exprimée dans les communiqués de l’Alliance arabe, lesquels appellent les milices rebelles à se retirer de l’ensemble des institutions civiles et militaires et de permettre le retour des forces légitimes et à épargner la ville d’Aden et ses habitants.  Le Gouvernement s’est félicité aussi de l’appel lancé par l’Arabie saoudite à toutes les parties en vue d’une réunion à Djeddah pour préserver les acquis nationaux.  Les forces du Conseil de transition du Sud ont néanmoins poursuivi leur escalade militaire sur le terrain, a-t-il regretté, condamnant à nouveau l’appui des Émirats à ces milices. 

Le Gouvernement yéménite souligne, par ailleurs, la nécessité de mettre en œuvre l’Accord de Stockholm, notamment son volet relatif à Hodeïda, a poursuivi le délégué.  Il a aussi appelé à mettre en œuvre les opérations de redéploiement et à revitaliser le mécanisme de surveillance tripartite.  S’agissant de la situation alarmante du pétrolier Safer, dont la cargaison de brut menace de se déverser dans la mer, le représentant a demandé une intervention de toute urgence pour contraindre les milices houthistes à permettre à des équipes techniques de l’ONU d’accéder à ce navire et à le décharger, « ce qui est encore loin d’être le cas ».  En effet, a-t-il dit, les houthistes semblent ignorer la catastrophe que pourrait causer cette situation, sans oublier les conséquences sur les moyens de subsistance des habitants de cette zone côtière. 

Accusant ensuite les houthistes de se livrer à des enlèvements et autres exactions, de mener des activités de piraterie, de se servir de mines terrestres et de placer des engins explosifs improvisés en mer, ce qui menace les couloirs de circulation internationaux, le représentant a également affirmé que ces milices entravent l’acheminement de l’aide humanitaire et s’emparent des biens des organisations qui s’en chargent.  Il a, d’autre part, condamné de façon catégorique les attaques menées contre l’Arabie saoudite, la dernière ayant visé le champ pétrolifère de Cheïba.  Pour le représentant, les milices houthistes ont « normalisé » leurs relations avec le régime iranien « au vu et au su de tous ».  « Nous rejetons cela et appelons le Conseil de sécurité à faire de même », a-t-il dit, estimant que ces faits sont en contravention avec la Charte de l’ONU et les résolutions du Conseil.  Selon lui, il est temps que ce Conseil assume ses responsabilités et mette en œuvre ses propres résolutions sur le Yémen. 

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