8354e séance – après-midi
CS/13507

Afghanistan: à un mois des élections législatives, « l’heure des décisions importantes est venue », dit le Chef de la MANUA au Conseil de sécurité

À l’approche des élections législatives, prévues le 20 octobre, « l’heure des décisions importantes est venue pour l’Afghanistan », a déclaré, cet après-midi, le Représentant spécial du Secrétaire général pour ce pays, M. Tadamichi Yamamoto, qui s’est dit préoccupé par plusieurs obstacles susceptibles de faire dérailler un processus électoral sous haute tension.

Devant le Conseil de sécurité, réuni pour son débat trimestriel sur la situation en Afghanistan, le haut fonctionnaire a rappelé que c’est la première fois depuis 2010 que les Afghans se rendent aux urnes pour élire des parlementaires.  Dans le rapport que M. Yamamoto est venu présenter, le Secrétaire général de l’ONU indique que « l’opposition politique n’a cessé de s’intensifier à l’approche du scrutin ».

Le « scepticisme » est en effet de mise, a relevé le Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA).

« Depuis quelques jours, les partisans d’une coalition de partis politiques ont commencé par bloquer plusieurs commissions électorales provinciales qui demandaient la mise en place de dispositifs de sécurité additionnels », a-t-il expliqué.  Dans ce contexte, pas moins d’un tiers des plus de 7 000 bureaux de vote à travers le pays pourraient ne pas ouvrir en raison de l’insécurité qui y règne, en particulier dans le nord, marqué par les agissements des Taliban et de l’État islamique, a-t-il mis en garde.

Au total, les atteintes à la sécurité survenues dans le nord du pays au cours du premier semestre de 2018 ont augmenté de 17% par rapport à la même période en 2017, précise le Secrétaire général dans son rapport.  Avec 5 122 victimes civiles –1 692 tués et 3 430 blessés– au cours de la même période, l’Afghanistan affiche son bilan le plus noir depuis 2009, date à laquelle la MANUA a commencé à recenser systématiquement les victimes civiles, a constaté à regret le Représentant spécial.

Au cours de ses entrevues avec les acteurs politiques afghans, celui-ci a souligné avec constance trois points essentiels: à savoir que le soutien de la communauté internationale ne saurait être tenu pour acquis; que la conduite et les résultats des élections parlementaires auront des conséquences bien au-delà du choix des candidats, notamment sur la crédibilité de la présidentielle d’avril 2019; et que tous les acteurs et institutions politiques doivent assumer leurs responsabilités dans l’intérêt du peuple afghan.

Le représentant de l’Afghanistan a reconnu que la séance d’aujourd’hui intervenait à un moment « charnière » pour son pays, non seulement en raison des élections imminentes, mais aussi de la conférence ministérielle de Genève, qui doit se tenir le 28 novembre prochain, afin de réaffirmer les engagements internationaux envers la paix, la stabilité, le développement et des progrès en Afghanistan.

Alors que plusieurs membres du Conseil ont exhorté aujourd’hui Kaboul à privilégier la réforme du secteur de la sécurité, le délégué afghan s’est voulu rassurant, arguant que les forces afghanes ne cessaient d’augmenter, le pays envisageant même de tripler la taille de son armée de l’air d’ici à 2020, ce qui permettra de combattre encore plus efficacement les foyers du terrorisme, a-t-il dit.

Une démarche qui s’accompagne d’une volonté d’ouverture, comme en témoigne l’offre de son Président de reprendre sans conditions des pourparlers, accompagnée d’une série de mesures pour faciliter le retour et la réintégration des Taliban dans la société afghane.  Malheureusement, suite à une brève accalmie, les Taliban ont rejeté le second cessez-le-feu proposé par les autorités afghanes, les combats reprenant de plus belle.  À ses yeux, les négociations ne pourront progresser sans un engagement sans faille au niveau régional, notamment de la part du Pakistan, à travers la mise en œuvre complète du Plan d’action Afghanistan-Pakistan pour la paix et la solidarité (APAPPS), signé récemment entre les deux voisins.

« Aucun pays n’a plus à gagner de la paix en Afghanistan que le mien », a rétorqué son homologue du Pakistan, qui a tenu à rappeler qu’il s’agissait du tout premier pays où s’était rendu, le weekend dernier, le nouveau Ministre des affaires étrangères désigné par le Premier Ministre, M. Imran Khan, arrivé au pouvoir en août dernier.

Alors que l’Afghanistan accusait des éléments « extérieurs » de fomenter un « génocide géographique », la Fédération de Russie s’est quant à elle inquiétée du recrutement auquel se livre l’État islamique d’Iraq et du Levant – province du Khorassan dans le nord et l’est du pays.  « Nous sommes victimes du terrorisme international et nous le combattons au nom de vous tous », a assuré aux membres du Conseil Ramiz Bakhtiar, un représentant de la jeunesse d’Afghanistan, laquelle forme les deux tiers de la population afghane.  « Ce sont les jeunes, vos véritables partenaires qui ne souhaitent pas dépendre éternellement du reste du monde et ont l’ambition de faire de leur pays une plateforme de la connectivité internationale », a plaidé le jeune homme.  La Turquie, le Kazakhstan, l’Ouzbékistan, l’Inde et la Chine ont clairement exposé leur volonté de réussir l’intégration régionale de l’Afghanistan.

À cet égard, la République islamique d’Iran s’est enorgueillie du plan de développement du port iranien de Chabahar, qui aura selon elle un impact significatif sur la promotion du commerce et de la coopération économique avec l’Afghanistan.  Avant de préciser que « toute tentative de saper ce projet vital ne servirait que les intérêts de ceux qui ne veulent pas la paix et le progrès du peuple afghan ».  L’Inde a pour sa part regretté que la résolution 2405 (2018) du Conseil de sécurité, tout comme le rapport du Secrétaire général à l’ordre du jour de cette séance, ne se penchent pas, selon elle, sur les liens intrinsèques entre terrorisme, extrémisme et production de stupéfiants et exploitation illégale des ressources naturelles afghanes, alors que « 60% des ressources des Taliban sont issues du commerce de l’opium », s’est alarmée la délégation.

SITUATION EN AFGHANISTAN S/2018/824

Déclarations

M. TADAMICHI YAMAMOTO, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), a estimé que l’heure des décisions importantes est venue pour ce pays.  « Le peuple afghan doit se rendre aux urnes le 20 octobre pour choisir ses parlementaires pour la première fois depuis 2010.  Des décisions stratégiques, qui s’appuient sur un consensus national, devront être prises pour orienter les prochaines étapes vers la paix », a-t-il anticipé.  Et le 28 novembre, à Genève, le Gouvernement afghan et l’ONU coprésideront une conférence ministérielle sur l’Afghanistan où tous les aspects des efforts déployés dans le pays seront passés en revue et feront l’objet d’engagements mutuels, de la part des autorités afghanes, comme des bailleurs de fonds internationaux. 

S’agissant des élections, bien qu’opérationnellement et techniquement les préparatifs soient en bonne voie, le haut fonctionnaire s’est déclaré profondément préoccupé par des défis politiques susceptibles de remettre en cause les délais serrés et de faire dérailler les scrutins, à moins que tous les dirigeants politiques ne s’engagent en faveur de leur tenue en temps opportun.

Le scepticisme est en effet de mise.  « En dépit d’avancées dans l’organisation, depuis quelques jours, les partisans d’une coalition de partis politiques ont commencé par bloquer plusieurs commissions provinciales d’élections qui demandaient que des dispositifs de sécurité additionnels soient mis en place », a expliqué le Représentant spécial.  En outre, près d’un tiers des plus de 7 000 bureaux de vote pourraient ne pas ouvrir en raison de l’insécurité qui règne dans le pays, a-t-il mis en garde.  « La question principale, ce n’est pas de savoir si les élections seront imparfaites ou non, mais comment les institutions électorales gèreront ces limitations. » 

Au cours de ses entrevues avec les acteurs politiques afghans, j’ai souligné avec constance trois points essentiels, a indiqué le Chef de la MANUA.  Tout d’abord, le soutien de la communauté internationale ne doit pas être tenu pour acquis.  Ensuite, il leur faut prendre conscience que les élections parlementaires ont des conséquences bien au-delà du choix des candidats, y compris sur l’élection présidentielle d’avril 2019, a relevé M. Yamamoto, en faisant allusion aux accusations de fraude électorale.  Enfin, tous les acteurs et institutions politiques doivent assumer leurs responsabilités dans l’intérêt du peuple afghan, a-t-il ajouté, avant d’exhorter la Commission électorale indépendante à redoubler d’efforts pour sensibiliser l’opinion publique à l’importance du processus électoral.

Après avoir évoqué les progrès constatés à l’issue de l’offre du Président Ghani, faite en février dernier, de s’engager à des pourparlers avec les Taliban sans conditions préalables, le Représentant spécial a assuré qu’en dépit de quelques revers depuis, l’Afghanistan est « en meilleure position aujourd’hui qu’à n’importe quel autre moment des 17 dernières années » de trouver une solution négociée au conflit.  Aussi a-t-il exhorté les parties à s’accorder sur des mesures de confiance mutuelles, qu’il s’agisse de remettre en liberté des prisonniers; de mesures dans le domaine agricole; de l’accès à l’éducation et à la santé dans les zones que se disputent les parties au conflit; et de la réduction, voire la cessation, de la violence. 

Rien qu’au cours des six premiers mois de cette année, en effet, la MANUA a enregistré le nombre le plus élevé de pertes civiles depuis qu’elle a commencé à tenir cette comptabilité.  Nous avons récemment perdu une icône de la communauté internationale en la personne de Kofi Annan, qui, en 2001, a débuté son discours d’acceptation du Prix Nobel de la paix par les mots suivants, a conclu le Représentant spécial: « Aujourd’hui, une Afghane naîtra ».  Cette fille est sur le point de devenir une femme, de voter, d’aller à l’université, de poursuivre la vocation de ses rêves.  Sera-t-elle en mesure de le faire?  « Je suis sûr que cette fille suivra de près les développements au cours des mois à venir. »

M. RAMIZ BAKHTIAR, Représentant des jeunes d’Afghanistan, a salué cette opportunité de parler à l’ONU à un moment « où beaucoup d’Afghans se sentent oubliés de la communauté internationale et dépassés par une guerre sans pitié ».  C’est l’occasion pour moi d’attirer l’attention sur la complexité et la réalité nuancée de mon pays, a poursuivi M. Bakhtiar.  « Nous ne sommes pas une nation défaillante, nous sommes une nation résiliente qui est mise à l’épreuve bien plus que la plupart des autres pays », a-t-il fait valoir.  « Nous sommes victimes du terrorisme international et nous le combattons au nom de vous tous », a affirmé le jeune homme, ajoutant que les Afghans sont aux premières lignes d’un combat contre cet ennemi commun. 

Rappelant que les deux tiers de la population afghane a moins de 25 ans, M. Bakhtiar a expliqué que ces jeunes se souviennent « à peine » du temps des Taliban, et encore moins des régimes qui les ont précédés.  Ils font partie d’un nouvel Afghanistan et ont des ambitions similaires à celles des autres jeunes dans le monde, même s’ils diffèrent dans leur manière de penser la relation entre leur pays et le reste du monde dans les 10 à 20 ans à venir, a-t-il expliqué.  « Ce sont vos véritables partenaires qui ne souhaitent pas dépendre éternellement du reste du monde et ont l’ambition de faire de leur pays une plateforme de la connectivité internationale. »  Cette nouvelle génération perçoit la diversité comme un atout, a poursuivi le représentant des jeunes.

Rappelant qu’en 2001 les médias indépendants n’existaient quasiment pas dans son pays, il a affirmé que, de nos jours, ils jouent un rôle de taille en donnant la voix aux Afghans, même si 53 journalistes ont perdu leur vie au cours des quatre dernières années.  Il s’est dit certain que l’Afghanistan ne reculera pas parce que ses milliers de jeunes veulent relever leur pays et restent convaincus que la communauté internationale ne les abandonnera pas.  Ces jeunes appellent le Conseil à se concentrer sur les véritables causes du terrorisme.  Le cas de Rahila, une jeune fille victime d’un attentat sur le chemin de l’école, a illustré la résilience des jeunes afghans par la réaction de son frère qui a créé une bibliothèque à Kaboul en son nom pour poursuivre le rêve de sa sœur d’éduquer les filles afghanes.

« Notre génération croit également en la démocratie et espère que les élections des prochains mois pourront avoir lieu », a assuré M. Bakhtiar même s’il redoute des troubles dans son pays.  En conclusion, il s’est adressé aux membres du Conseil pour leur dire: « Vous avez une responsabilité de premier plan pour que notre gouvernement reste concentré sur ces élections, pour lutter contre la corruption et pour soutenir nos forces de sécurité. »

M. MAHMOUD SAIKAL (Afghanistan) a rappelé que la réunion d’aujourd’hui intervenait à un moment charnière pour son pays, à un mois des élections parlementaires, qui seront suivies, en novembre, par la conférence ministérielle de Genève et, en avril 2019, par l’élection présidentielle afghane.

Dans le même temps, a-t-il déclaré, les forces de sécurité afghanes, dont le nombre, le professionnalisme et les capacités ne cessent selon lui d’augmenter, poursuivent le combat national contre les groupes terroristes et extrémistes.  Le pays, a-t-il ajouté, envisage également de tripler la taille de son armée de l’air d’ici à 2020, ce qui permettra de combattre encore plus efficacement le terrorisme.

Abordant la question de la paix avec les Taliban, le représentant a rappelé la nouvelle approche d’ouverture préconisée par son gouvernement, à savoir l’offre d’une reprise sans condition des pourparlers, accompagnée d’une série de mesures pour faciliter le retour et la réintégration des Taliban dans la société afghane.  Cependant, a déploré le représentant, suite à une brève accalmie, les Taliban ont rejeté le second cessez-le-feu proposé par les autorités afghanes et appuyé par le Conseil de sécurité, et les combats ont repris de plus belle.  « Nous ne pourrons réaliser des progrès tangibles, a-t-il ajouté, que si les manipulations, la tromperie et les opportunités gâchées prennent fin ».  À ses yeux, les négociations ne pourront progresser sans un engagement sans faille au niveau régional, notamment du Pakistan, à travers la mise en œuvre complète du Plan d’action Afghanistan-Pakistan pour la paix et la solidarité (APAPPS), signé récemment entre les deux pays.

Or, depuis maintenant un quart de siècle, a déploré le représentant, l’Afghanistan est victime d’un « génocide géographique » de la part de certains éléments de la région, qui souhaitent convertir le pays en « agent de confiance », sous peine de l’affaiblir et de le jeter en pâture au terrorisme.  Ce « génocide », a-t-il poursuivi, se traduit par plus de 10 000 pertes en vies humaines chaque année, des millions de personnes traumatisées et une déstabilisation de l’économie, de la gouvernance et de la vie politique du pays.

En dépit de ces perturbations extérieures, le représentant a déclaré que l’un des éléments clefs de la consolidation des gains dans son pays serait le bon déroulement des futures élections.  Il a ainsi renouvelé la détermination des autorités afghanes à faire en sorte que le scrutin se déroule de manière « libre, équitable, ouverte et transparente ».  Il en va, a-t-il affirmé, de la « future stabilité » du pays.

Mme LISE GREGOIRE VAN HAAREN (Pays-Bas) a, elle aussi, souligné l’importance des élections parlementaires afghanes du 20 octobre et présidentielle du 20 avril 2019, qui doivent être « libres, transparentes et inclusives », y compris pour les femmes et les filles.  Elle a ensuite estimé que l’Afghanistan doit se doter d’institutions publiques fiables et résilientes.  Alors que ce pays est maintenant à mi-chemin de la Décennie de la transformation (2015-2024), la conférence ministérielle de Genève sur l’Afghanistan devrait fournir une opportunité d’évaluer les progrès et d’aligner les priorités de la période restante, a affirmé la représentante.

Dans ce contexte, le Gouvernement afghan devra redoubler d’efforts pour mettre fin à la corruption, renforcer la gouvernance et l’état de droit, et garantir le respect des droits de l’homme, avec le soutien de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA).  Enfin, pour Mme Gregoire Van Haaren, dans un pays qui compte 63% d’habitants âgés de moins de 25 ans, l’ambition et les engagements des jeunes représentent une opportunité de premier plan pour l’Afghanistan. 

Saluant la volonté de tous les Afghans d’exercer leur droit de vote lors des prochaines élections parlementaires et locales, Mme VERÓNICA CORDOVA SORIA (Bolivie) a souligné le rôle de la MANUA en ce sens.  Néanmoins, elle s’est dite préoccupée par la recrudescence des affrontements armés initiés par les Taliban.   Elle a déploré le meurtre de 1 692 civils au cours du premier semestre 2018, ainsi que les attaques perpétrées contre des infrastructures civiles, notamment des écoles et des hôpitaux.  La Bolivie appelle toutes les parties à respecter leurs obligations en vertu du droit international humanitaire et des droits de l’homme.

Préoccupée en outre par la violence sexuelle et sexiste, Mme Cordova Soria a considéré que les autorités afghanes doivent adopter toutes les mesures nécessaires pour coopérer avec la Commission indépendante des droits de l’homme du pays.  Elle a réitéré que tout acte terroriste est criminel et injustifiable et que la communauté internationale doit redoubler d’efforts pour aider l’Afghanistan à combattre ce fléau.  

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni), a condamné les derniers attentats terroristes en Afghanistan et a présenté ses condoléances aux familles des victimes.  D’après elle, il faut redoubler d’efforts pour soutenir les forces de sécurité afghanes qui assurent la protection des civils.  Rappelant qu’il s’agit du dernier débat trimestriel du Conseil sur l’Afghanistan avant les élections du 20 octobre, elle a exprimé sa reconnaissance à la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) qui appuie le processus électoral et appelé toutes les parties à coopérer. 

Évoquant les points toujours en suspens, Mme Pierec a souhaité que la liste des électeurs soit publiée au plus tôt au niveau provincial avec un mécanisme de plainte approprié.  Elle a également plaidé pour une bonne stratégie de communication à l’appui de ces élections, ainsi que pour le respect de la sécurité du matériel et des locaux électoraux.  À ceux qui bloquent des centres provinciaux de la Commission électorale, le Royaume-Uni demande de cesser et de se joindre au processus électoral en cours. 

Pour avoir été Ambassadrice du Royaume-Uni en Afghanistan, la représentante s’est dite confiante dans l’avenir de ce « beau pays », même si le relèvement risque de prendre un moment.  La conférence ministérielle de Genève est un rendez-vous important, à ses yeux, pour définir les réformes à engager dans le contexte de cette décennie de transition.  S’agissant du processus de paix avec le Pakistan, elle a soutenu le Gouvernement d’unité nationale dans ses efforts en ce sens.  Elle a toutefois regretté que les Taliban n’aient pas accepté la poursuite du cessez-le-feu que le Président Ghani avait proposé.

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) s’est déclaré préoccupé par la détérioration de la situation sécuritaire en Afghanistan, rappelant les nombreuses pertes endurées par les forces de sécurité afghanes face aux attaques de l’État islamique d’Iraq et du Levant – province du Khorāsān.  Il a attiré l’attention sur l’emprise de cette organisation terroriste sur les esprits, en particulier dans le nord et l’est du pays, où elle recrute activement.  Après avoir condamné les violences perpétrées par les Taliban, le représentant a jugé indispensable de recourir davantage aux mécanismes de sanctions en vigueur contre Daech et les groupes et individus qui s’associent à ses agissements. 

La Fédération de Russie a appuyé le Pacte de Paris, qui vise à lutter contre le trafic d’opiacés afghans, et la consommation et les problèmes connexes dans les pays prioritaires touchés le long des routes du trafic.  Plaidant pour l’accélération de la réforme du secteur de la sécurité afghane, le délégué a constaté à regret que la présence de contingents militaires de l’OTAN et des États-Unis depuis 17 ans en Afghanistan n’avait pas donné les résultats escomptés et ne ferait selon lui que conduire à une escalade du conflit.  Or, il n’y a pas de solution militaire à ce conflit, a-t-il tranché, estimant que seules des négociations entre les parties seraient en mesure de parvenir à rétablir la paix, une perspective d’autant plus importante que le pays entre dans une phase électorale.

M. ANATOLIO NDONG MBA (Guinée équatoriale) s’est dit préoccupé par la situation sécuritaire en Afghanistan, rappelant que les attentats-suicides avaient fait plus de 1 600 victimes en moins de six mois.  « On ne peut rester indifférent à l’atrocité de ces actes qui frappent le plus souvent les plus vulnérables », a estimé le représentant pour lequel toute solution passe par des négociations politiques et des élections transparentes et inclusives qui donneront la possibilité aux Afghans de choisir la voie à suivre.

S’agissant des facteurs qui exacerbent l’instabilité en Afghanistan, il a estimé que, jusque-là, le statu quo ne s’est pas amélioré « parce que certaines parties privilégient leurs propres intérêts » et non pas ceux du peuple afghan.  Sachant qu’il y a toujours des acteurs qui ne seront pas satisfaits, il n’est « pas surpris » de la recrudescence de la violence et des attaques à la veille des élections en vue de paralyser le processus politique en cours.  Il a exhorté toutes les parties à participer à ce processus pour faciliter la paix et la stabilité en Afghanistan, qui passent par la tenue réussie de ces élections.

Parmi les autres facteurs de déstabilisation de la situation, M. Ndong Mba a dénoncé l’augmentation de la production d’opium, et a félicité le Gouvernement afghan pour ses récents résultats dans la lutte contre les stupéfiants.  La sècheresse grave qui frappe l’Afghanistan et qui a poussé plus de 100 000 personnes à quitter leurs foyers pour chercher de l’eau, est un autre facteur a souligné le représentant qui appelé la communauté internationale à intensifier son aide humanitaire.

M. GUSTAVO MEZA-CUADRA (Pérou) a appelé à lutter contre le terrorisme et ses causes profondes, en s’attaquant notamment au crime organisé et en particulier au trafic de drogues.  La classe politique doit rester unie, a-t-il recommandé dans le souci de la stabilité du pays.  Inquiet des menaces de boycott électoral de la part de certains secteurs politiques, il a espéré que les forces politiques et les citoyens pourraient participer en masse aux élections.  Il a souligné l’engagement du Gouvernement en faveur de l’autonomisation des femmes et encouragé à la participation de celles-ci et des jeunes à la vie politique du pays.

Le délégué a aussi souligné l’initiative du Président Ghani de promouvoir des négociations directes avec les Taliban, tout en regrettant que ces derniers n’aient pas respecté le cessez-le-feu proposé pour l’Eïd al-Adha.  Plaidant pour un dialogue intra-afghan, il a misé sur la conférence ministérielle prévue en novembre à Genève pour revitaliser l’engagement en faveur de la paix et du développement de l’Afghanistan.  Renforcer les capacités du pays en matière de défense et de sécurité est un autre élément essentiel selon la délégation, qui a aussi souligné la nécessité d’accompagner les efforts de modernisation de l’économie et de création d’emplois pour les jeunes, ceux-ci constituant 60% de la population.

M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a estimé que le processus de paix en Afghanistan devrait être mené par les Afghans eux-mêmes, tout en soulignant qu’il ne doit pas retarder le processus électoral.  Sur le plan sécuritaire, Kaboul doit mettre en œuvre le plus rapidement possible le plan de réforme du secteur de la sécurité pour renforcer ses institutions nationales, a poursuivi le représentant.  En ce qui concerne la coopération internationale, elle doit se poursuivre, a-t-il exhorté, en plaçant des espoirs dans la conférence ministérielle qui se tiendra le 28 novembre à Genève.  

La délégation kazakhe s’est dite ensuite encouragée par l’accent mis par le Gouvernement afghan sur le développement socioéconomique du pays, à laquelle tous les pays partenaires de la région d’Asie centrale doivent contribuer.  Elle a, en conclusion, rappelé que les femmes et les jeunes occupent une place centrale dans le cycle de prévention du conflit en Afghanistan.  En témoigne l’engagement de son propre pays, a indiqué M. Umarov qui a rappelé que le Kazakhstan, l’Ouzbékistan et l’Union européenne lanceraient prochainement un projet pilote pour former professionnellement des Afghanes. 

Mme ANNE GUEGUEN (France) s’est déclarée préoccupée par l’accroissement de la présence de combattants terroristes étrangers en Afghanistan, ainsi que par la « surenchère » à laquelle se livrent les Taliban et l’État islamique d’Iraq et du Levant au Khorassan.  Elle a déploré la détermination des groupes terroristes à poursuivre, par une stratégie de harcèlement, la déstabilisation du pays « à un moment charnière » en créant un climat d’insécurité permanent et en cherchant à affaiblir les forces afghanes et l’autorité du Gouvernement juste avant les élections.  Également préoccupée par le trafic de drogues qui alimente l’insurrection talibane et menace la vie de milliers d’Afghans, la déléguée a appelé les pays de la région à s’engager résolument contre ce trafic à tous les niveaux.

Passant aux élections parlementaires et locales du 20 octobre prochain, Mme Gueguen a jugé essentiel que la population afghane puisse s’exprimer et être représentée au Parlement.  Elle s’est notamment inquiétée des interrogations subsistantes autour de la préparation des élections et du faible nombre de candidats dans certaines provinces pour les élections des conseils de district.  Elle a soutenu en ce sens le travail de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA).

Selon la déléguée, la gravité de la situation sécuritaire et le coût humain du conflit doivent inciter à redoubler d’efforts.  La France, a-t-elle dit, exhorte les Taliban à répondre aux derniers gestes d’ouverture et ainsi permettre le retour de la paix et de la sécurité dans la région.  « Il ne pourra y avoir de solution durable en Afghanistan que politique, négociée dans le cadre d’un processus inclusif mené par les Afghans et pour les Afghans. »

M. MA ZHAOXU (Chine) a salué le travail “gigantesque” abattu par la  Mission d'assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA).  Le processus politique est à un tournant en Afghanistan, a constaté le représentant pour lequel la paix et le développement auront des incidences importantes à la fois sur les Afghans mais aussi sur toute la région.  La Chine souhaite contribuer à rétablir la paix et à promouvoir le développement économique en Afghanistan et, pour cela, souhaite que les élections puissent se tenir sans heurts.  Alors que les préparatifs électoraux sont à un moment charnière, les parties politiques doivent régler leurs différends par la négociation et la concertation, a-t-il estimé, appelant la communauté internationale à respecter le droit du peuple afghan à choisir son propre système politique.

M. Ma a également appelé à améliorer la sécurité en Afghanistan en appuyant les capacités des forces afghanes notamment dans leur lutte contre le terrorisme et les stupéfiants.  Les Taliban devraient être exhortés à répondre positivement à l’appel en faveur de la réconciliation nationale et de la paix, a encore estimé le représentant.  S’agissant de la crise humanitaire grave qui prévaut en Afghanistan, il a demandé que l’aide humanitaire soit augmentée et que les pays voisins puissent avoir un soutien international lorsqu’ils accueillent les réfugiés afghans.  La Chine encourage le développement régional, notamment par le biais du projet « La ceinture et la route », et a l’intention de resserrer sa coopération avec l’Afghanistan.  

Mme JOANNA WRONECKA (Pologne) a jugé important que les Taliban acceptent l’offre du Président afghan de négocier la paix dans le cadre de pourparlers directs.  S’agissant des élections, la priorité de sa délégation demeure la large participation des femmes en tant que candidates et électrices, une condition sine qua non pour une paix future.  À cet égard, a-t-elle ajouté, des efforts urgents doivent être consentis afin d’apporter un soutien aux organisations d’Afghanes tout au long du processus électoral.  La Pologne a en conclusion apporté son soutien au Gouvernement afghan dans la mise en œuvre de ses programmes de réformes.

Pour M. NAWAF A. S. A. ALAHMAD (Koweït), la phase actuelle, à la veille des élections parlementaires en Afghanistan, est essentielle et délicate.  Elle est marquée par des consultations accrues entre partis politiques et les préparatifs de ces élections qui doivent se tenir le 20 octobre 2018.  À cet égard, il a salué le rôle « vital » de la MANUA ainsi que celui des institutions électorales qui doivent finaliser les listes électorales des candidats et des électeurs et mettre en place les centres de vote.  Il a également salué la signature récente par les Nations Unies et ces institutions électorales d’un document révisé du projet d’assistance électorale des Nations Unies, auquel les donateurs ont garanti un soutien financier supplémentaire de 57 millions de dollars.

Pour le Koweït, les neuf millions d’Afghans qui se sont inscrits pour voter sont la preuve du désir du peuple afghan de s’engager sur la voie de la démocratie, en dépit des menaces sécuritaires.  Le représentant a salué leur courage, et a saisi cette occasion pour demander à nouveau que la solution politique en Afghanistan soit pilotée par les Afghans eux-mêmes.  Le Koweït suit de près l’action politique dans les différentes provinces afghanes, et les alliances politiques à la veille des élections.  Il espère que ces alliances contribueront à réduire les tensions et à placer l’intérêt national au-dessus des intérêts partisans. 

M. Alahmad a appelé le Gouvernement et les autres parties à accorder la priorité aux intérêts à long terme du pays en vue de parvenir à une paix et stabilité durables.  Parallèlement, la communauté internationale doit continuer à soutenir la finalisation d’un règlement politique global en Afghanistan.  Face à la recrudescence récente de la violence et des attentats terroristes, il a affirmé qu’il s’agit de « tentatives désespérées de certains éléments qui ne croient pas en l’option de la démocratie et des droits de l’homme et qui ne souhaitent ni la paix ni la stabilité du pays ».  Il a encouragé les forces de sécurité afghanes à redoubler d’efforts pour protéger les lieux publics et combattre ces groupes, avant de saluer l’engagement de l’OTAN à apporter son soutien financier aux forces de sécurité afghanes jusqu’en 2024.

M. GBOLIÉ DESIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a salué les progrès accomplis par la Commission électorale indépendante dans l’organisation des futures élections, prévues le 20 octobre prochain.  Il s’est également félicité des contributions financières apportées par un certain nombre de pays pour aider la Commission électorale et la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) dans cette entreprise.

Toutefois, le représentant a déclaré qu’il demeurait préoccupé par la situation sociopolitique et sécuritaire en Afghanistan, de nature, selon lui, à entraver la bonne tenue du processus électoral.  Il a ainsi déploré la fermeture du siège de la Commission électorale à Kaboul et des commissions locales dans huit autres provinces, en raison de manifestations organisées par des personnes dont les candidatures aux élections ont été rejetées.  Il s’est également inquiété des faibles progrès dans la mise en œuvre de l’Accord de paix entre le Gouvernement et le parti politique Hezb-i Islami Gulbuddin, qui pourrait selon lui retarder le début des négociations de paix avec les groupes armés à travers le pays.

Sur le plan sécuritaire, le représentant a déploré les attaques récentes de Taliban contre des forces de sécurité afghanes et de la branche locale de Daech contre les populations civiles.  À ses yeux, « ces évènements risquent de compromettre la participation des Afghans au futur scrutin ».  Il a par conséquent appelé la communauté internationale à renforcer son appui aux forces de sécurité afghanes et aux pays contributeurs à la mission Soutien résolu.  Il a salué l’engagement de ces derniers de maintenir leur présence dans le pays, si besoin est, jusqu’en 2024.

M. DAWIT YIRGA WOLDEGERIMA (Éthiopie) a salué la proposition du Président Ghani de négociations directes avec les Taliban, qui a reçu un large soutien de la part des Afghans et de la communauté internationale.  Il a estimé que la sécurité de l’Afghanistan sur le long terme ne pouvait être assurée que dans le cadre d’un processus de réconciliation dirigé par les Afghans eux-mêmes.  À cet égard, la tenue réussie d’élections parlementaires inclusives en octobre revêt une importance capitale, a noté le représentant.  Celui-ci a toutefois rappelé qu’un succès électoral demeurerait inefficace tant qu’un pourcentage significatif de la population vivra dans l’insécurité. 

En l’absence d’une croissance économique durable et inclusive, les défis sécuritaires auxquels fait face l’Afghanistan ne pourront être surmontés, a mis en garde le délégué.  C’est la raison pour laquelle Kaboul a besoin d’un soutien de la part de la communauté internationale pour mettre en œuvre son agenda de réformes tel qu’envisagé dans le Cadre national pour la paix et le développement en Afghanistan.  M. WOLDEGERIMA a émis l’espoir en conclusion que la conférence ministérielle de Genève offre une occasion valable aux partenaires de renouveler leur engagement vis-à-vis de l’Afghanistan.

M. CARL ORRENIUS SKAU (Suède) a salué les mesures sans précédent prises par le Gouvernement afghan pour parvenir à la paix et déploré le refus par les Taliban d’un cessez-le-feu bilatéral.  Il a exhorté les Taliban à s’engager dans des pourparlers avec le Gouvernement, avant d’insister sur l’importance des élections à venir.  Il est de la responsabilité du Gouvernement, de l’opposition et des organes électoraux de veiller au déroulement d’élections libres, inclusives et légitimes, a-t-il dit, en souhaitant une large participation des femmes, notamment en zone rurale.

Le délégué a déploré la détérioration de la situation humanitaire, ainsi que les attaques ciblées contre les écoles de filles, les minorités religieuses et les journalistes.  Si la situation paraît très sombre, des efforts renouvelés en faveur du processus de paix pourraient apporter un changement de trajectoire, a conclu le délégué.

La semaine dernière, a rappelé M. JONATHAN COHEN (États-Unis), un homme armé d’explosifs s’est fait exploser au milieu d’une foule qui manifestait contre un commandant de police corrompu, dans l’est de l’Afghanistan.  Selon M. Cohen, l’attentat a fait 70 morts et des centaines de blessés.  Plus tôt, le même jour, a-t-il poursuivi, un garçon de 14 ans a été tué et quatre autres blessés dans deux explosions devant une école à Jalalabad. 

Pour le représentant, à l’approche des élections parlementaires d’octobre, il ne fait aucun doute que les attaques des groupes extrémistes violents vont s’intensifier, afin de semer la peur parmi la population.  Dans ce contexte, M. Cohen a déclaré que les États-Unis appuyaient pleinement la tenue d’élections législatives en Afghanistan le 20 octobre prochain, puis le scrutin présidentiel d’avril 2019.

Cependant, a-t-il ajouté, cela ne se fera pas sans efforts.  « Construire une démocratie implique nécessairement de créer un climat de confiance parmi les individus dans l’intégrité du système », a-t-il déclaré, ajoutant que les électeurs ont aussi besoin de croire en la capacité et la volonté des élus d’améliorer leur vie quotidienne.  À ses yeux, cela suppose, dans un premier temps, un enregistrement des électeurs aussi précis et transparent que possible, en veillant notamment à ce que les femmes puissent participer et faire entendre leur voix.  Plus fondamentalement, a-t-il ajouté, cela dépend de la capacité des autorités à garantir la sécurité de ceux qui font campagne et des électeurs.

Dans ce cadre, le représentant s’est félicité des efforts déployés par le Gouvernement afghan pour faire avancer le processus de paix avec les Taliban.  « Le peuple afghan souhaite la paix, le Président Ghani a répondu à leur appel », a-t-il estimé, ajoutant que la balle était désormais dans le camp des Taliban.  « Ils doivent venir à la table et entamer des pourparlers de paix sans conditions préalables », a-t-il insisté, sous peine de sombrer dans l’obsolescence.

M. FERIDUN HADI SINIRLIOĞLU (Turquie) a estimé qu’à un mois de la tenue des élections parlementaires afghanes, les critiques « sérieuses et récurrentes » portées contre le processus électoral sont préoccupantes, de même que l’insécurité persistante et le paysage politique éclaté continuent d’être une source d’inquiétudes.  Le représentant a rappelé que son pays est prêt à soutenir le processus de réconciliation, dirigé par les Afghans eux-mêmes. 

La stabilité, sécurité et la prospérité de l’Afghanistan sont d’une importance capitale pour les pays de la région, a-t-il souligné, en expliquant que c’était là la raison du soutien d’Ankara à Kaboul. « Nous sommes heureux de coprésider le Processus d’Istanbul « Au cœur de l’Asie » sur la sécurité et la coopération régionales pour la paix et la stabilité en Afghanistan cette année, aux côtés de l’Afghanistan », s’est enorgueilli le délégué, avant de préciser que la seconde réunion des responsables du Processus se tiendrait à New York le 28 septembre, en marge de la semaine de haut niveau de l’Assemblée générale de l’ONU.

Mme MALEEHA LODHI (Pakistan) a regretté la longue guerre qui se poursuit en Afghanistan, exacerbée par les tensions ethniques et régionales, par le terrorisme et des conditions économiques précaires.  Reprenant les propos de Human Rights Watch, elle a affirmé que ce sont « les civils qui perdent la guerre en Afghanistan », et souligné qu’aucun pays n’a plus à gagner de la paix en Afghanistan que le sien.  Lors de sa première allocution, a relevé la représentante, le Premier Ministre pakistanais, M. Imran Khan, a réaffirmé l’appui du Pakistan à la paix et la sécurité en Afghanistan, qui est d’ailleurs le premier pays où s’est rendu le nouveau Ministre des affaires étrangères le weekend dernier.  Son message à Kaboul consistait à dire que le Pakistan était prêt à jouer un rôle constructif en ce sens.

Le Pakistan salue le fait que l’Administration américaine a reconnu qu’un règlement politique négocié est la meilleure option pour mettre fin à « sa plus longue guerre ».  C’était la position défendue par le Pakistan depuis des décennies, et les Nations Unies et la communauté internationale ont également toujours soutenu qu’il n’existait pas de solution militaire à ce conflit dont la fin passe par un règlement négocié.  La représentante a reconnu qu’il est difficile d’engager un processus de négociation, rappelant certaines tentatives qui ont échoué à cause d’actions unilatérales et le manque de confiance mutuelle entre les principaux antagonistes.  Il est essentiel, à ses yeux, que les parties afghanes fassent preuve de la flexibilité nécessaire pour entamer des négociations sérieuses sans quoi le règlement politique risque d’accuser des retards. 

Pour sa part, le Pakistan ne ménagera aucun effort pour encourager et soutenir tout effort pour lancer un processus de paix crédible, a assuré la représentante.  Elle a souligné l’importance de la coopération entre le Pakistan et l’Afghanistan pour réaliser la paix et la sécurité en Afghanistan mais aussi dans toute la région.  Ainsi le renforcement de leurs relations bilatérales est une priorité pour le nouveau Gouvernement pakistanais et le Plan d’action Afghanistan-Pakistan pour la paix et la solidarité (APAPPS), lancé en juillet à Kaboul, offre le cadre idoine pour un engagement constructif en ce sens, a-t-elle précisé; l’opérationnalisation de ses cinq groupes de travail permettra de se pencher sur toutes les questions bilatérales, y compris l’élargissement de l’interaction économique entre les deux pays, la gestion des frontières et le rapatriement des réfugiés, a ajouté Mme Lodhi. 

M. RICHARD ARBEITER (Canada) a estimé que l’accès équitable aux services sociaux en Afghanistan reste un élément essentiel de soutien aux jeunes.  Ceci est particulièrement important pour les filles et les jeunes issus des minorités ethniques et religieuses.  Concernant la conférence ministérielle de Genève qui aura lieu en novembre, le représentant a déclaré que sa délégation avait hâte d’y participer pour écouter l’évaluation du Gouvernement afghan de ses progrès, l’identification des progrès à réaliser et son approche envisagée pour surmonter les obstacles. 

Sur les élections, M. Arbeiter a ajouté que le Canada reste déterminé à soutenir l’Afghanistan qui cherche à tirer parti de sa diversité, notamment en favorisant la pleine participation des femmes et des communautés marginalisées à ces élections.  « Nous encourageons les autorités nationales afghanes à continuer de lutter activement contre les irrégularités et à promouvoir et protéger le droit des membres des communautés rurales, en particulier les femmes candidates et électrices, de participer aux affaires publiques et à la vie politique. »  Leur inclusion est essentielle à l’intégrité des élections, a estimé le représentant. 

Face à la dégradation de la situation sécuritaire en Afghanistan ces derniers mois, M. SYED AKBARUDDIN (Inde) a appelé à renforcer le soutien collectif pour « contrer l’inhumanité de ceux qui se sont alliés pour brutalement s’attaquer au peuple afghan ».  Il a encouragé le Conseil de sécurité à « revoir » son approche de la situation en Afghanistan, estimant que les développements actuels méritent une attention à la hauteur des dangers qu’ils représentent pour la paix et la sécurité régionale.  Il a regretté que les Taliban aient rejeté tous les efforts de paix du Gouvernement afghan au cours des derniers mois, y compris le maintien du cessez-le-feu, les accusant de traiter ces gestes d’ouverture avec dédain et dénonçant l’intensification de leur offensive alors que le pays prépare ses élections. 

Rappelant que les Taliban, le réseau Haqqani, mais aussi l’EILL, Al-Qaida et Jaish e Mohammed se financent par l’extorsion mais également grâce au soutien de cartels de stupéfiants et autres, M. Akbarrudin a affirmé que 60% des ressources des Taliban sont issues du commerce de l’opium.  Soulignant les liens intrinsèques entre terrorisme, extrémisme et production de stupéfiants et exploitation illégale des ressources naturelles afghanes, il a regretté que la résolution 2405 (2018) du Conseil de sécurité, tout comme le dernier rapport du Secrétaire général sur la situation en Afghanistan, n’adressent pas ce problème de manière adéquate.  L’Inde appelle les membres du Conseil à « répliquer le succès de la communauté internationale dans la lutte contre le trafic illicite de pétrole de l’EILL en Syrie et en Iraq en paralysant le trafic illicite de stupéfiants des Taliban ». 

M. JOÃO PEDRO VALE DE ALMEIDA, Chef de la délégation de l’Union européenne, a déploré l’augmentation de la violence ces dernières semaines, y compris l’attaque des Taliban contre Ghazni.  Il a apporté l’appui de l’Union européenne au processus de paix, en particulier dans sa dimension régionale, « un Afghanistan stable et prospère étant dans l’intérêt de tous ses voisins ».  Il a espéré que la prochaine conférence ministérielle de Genève verra un agrément sur des mesures durables contre la corruption et de promotion des droits de l’homme.

M. de Almeida a indiqué que l’Union européenne a engagé 15,5 millions d’euros à l’appui des prochaines élections parlementaires, avant d’inviter le Gouvernement à renforcer son action s’agissant de l’élimination de la violence faite aux femmes, de la protection des enfants et de la prévention de la torture.  L’Afghanistan est à un tournant, a conclu le délégué, en soulignant la nécessité de ne pas gaspiller l’élan positif pour la paix généré en juin dernier.

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a déclaré que le Processus de Kaboul, soutenu par la Conférence de Tachkent, devait constituer la base d’un processus de paix global et inclusif, et dirigé par les Afghans.  Il est primordial que la communauté internationale et les pays de la région donnent un soutien concerté aux efforts de paix du Gouvernement.  Notant que depuis 2009, il n’y a jamais eu autant de victimes civiles, le délégué a déploré que les Taliban n’aient pas répondu positivement aux signaux du Gouvernement.  Il a appelé les Talibans à participer aux négociations de paix. 

En outre, l’importance du processus électoral ne peut être sous-estimée, a poursuivi le représentant.  Il a appelé les dirigeants politiques à chercher des solutions afin de renforcer la confiance et les Taliban à ne pas saboter le processus électoral par la violence ou d’autres formes d’intimidation.  Il a ajouté que l’insécurité, la pauvreté et le chômage continuent d’avoir de lourdes conséquences sur la jeunesse afghane.  Les conditions de sécheresse ont affecté les moyens de subsistance et ont entraîné des déplacements de populations supplémentaires; l’impatience du peuple afghan et en particulier de sa jeunesse, pour une paix durable est de plus en plus claire. 

M. Pecsteen de Buytswerve a aussi déploré les attaques récentes contre les écoles qui empiètent sur le droit fondamental des jeunes à l’éducation et démontrent l’importance de la mise en œuvre rapide et complète de la Déclaration dite « safe school ».  Saluant la criminalisation des infractions liées aux enfants dans le nouveau Code pénal, il a appelé le Gouvernement à l’appliquer.  « Nous sommes aussi très préoccupés par l’emploi d’enfants soldats et par des rapports faisant état d’abus sexuels sur des garçons ainsi que de violences contre les femmes », a également dit le délégué.

Mme ZAPPIA (Italie) a déclaré que son pays soutient l’Afghanistan dans ses efforts pour rétablir la paix et la stabilité sur son territoire, estimant que la seule voie pour y parvenir est une solution politique.  À cet égard, elle s’est félicitée des efforts déployés par le Gouvernement, qui a proposé des pourparlers directs avec les Taliban, même si elle a regretté que le deuxième cessez-le-feu pour l’Eïd al-Fitr ait été refusé par eux.

Après avoir apporté son soutien aux Afghanes, qu’elle a encouragé à participer aux élections législatives, la représentante a salué le travail exceptionnel accompli par la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) dans un environnement sécuritaire particulièrement dangereux.

M. BAKHTIYOR IBRAGIMOV (Ouzbékistan) a assuré que la perspective de la stabilité et du développement durable en Asie centrale est directement tributaire de la paix durable en Afghanistan.  Il a rappelé que son pays a accueilli une conférence ministérielle sur l’Afghanistan en mars dernier, à l’initiative des Présidents des deux pays.  À la fin de cette rencontre, les dirigeants de 21 États et d’organisations internationales telles que l’ONU, l’Union européenne, l’OTAN et l’Organisation de Shanghai pour la coopération ont adopté la Déclaration de Tashkent dans laquelle ils ont appelé la communauté internationale à soutenir la proposition du Gouvernement de négocier avec les Taliban sans conditions préalables.  

Le représentant a dit que l’Ouzbékistan facilite les liens entre les deux parties, en insistant sur le fait que la paix dans le pays passe par la réconciliation nationale avec l’implication des Taliban dans le processus de négociations.   

M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) a souligné que, pour la première fois, les institutions afghanes vont entièrement prendre en main l’organisation des élections.  Grâce à leurs efforts, a-t-il dit, les préparatifs vont bon train en dépit de tous les obstacles.  Pour l’Allemagne, il est important que ces élections législatives qui ont été plusieurs fois reportées aient lieu en temps voulu et de manière libre, juste et transparente.  Le processus électoral doit respecter la Constitution du pays, a noté le délégué en ajoutant que les dirigeants politiques ont une grande responsabilité à cet égard et il faut le leur rappeler, car le peuple afghan ne mérite pas moins que cela.

Après l’offre d’un cessez-le-feu en juin et la promesse de pourparlers sans conditions faite par le Gouvernement, l’Allemagne juge qu’il faut désormais focaliser les efforts sur l’initiation de pourparlers directs entre le Gouvernement afghan et les Taliban.  « Il y a une opportunité de mettre fin au conflit afghan », a argué M. Schulz, précisant que cela est possible si les Afghans et la communauté internationale apportent leur soutien commun.  Il a aussi salué la présence d’un représentant de la jeunesse afghane au Conseil de sécurité aujourd’hui, prédisant qu’un jour, cette jeunesse va définir le destin du pays et doit donc être préparée à assumer cette responsabilité. 

Mme GILLIAN BIRD (Australie) a déclaré que son pays contribuerait à hauteur de 5 millions de dollars au programme d’appui électoral des Nations Unies, afin d’accompagner le bon déroulement des élections parlementaires afghanes, le mois prochain, et l’élection présidentielle, en 2019.  Estimant que 2018 est une année particulièrement « sanglante » pour la population civile du pays comme pour les forces de sécurité afghanes, la représentante a condamné les attaques « brutales et illégitimes » perpétrées par des factions insurgées, des groupes inspirés par Daech, Al-Qaida et d’autres organisations terroristes qui sévissent en Afghanistan.  « Ensemble, avec nos partenaires et alliés de la mission Soutien résolu menée par l’OTAN, l’Australie s’engage à appuyer l’Afghanistan pour relever les défis posés par ces groupes », a-t-elle déclaré.

La représentante a ensuite loué les autorités afghanes pour leur recherche du dialogue avec les Taliban, jugeant « audacieuse et sans précédent » l’approche développée par le Président Ashraf Ghani, y compris son offre, en février dernier, de retourner à la table des négociations sans préconditions; son annonce, en juin, d’un cessez-le-feu unilatéral; et son appel aux Taliban, en août, à prendre part à une prolongation du cessez-le-feu.  Le représentant a appelé les Taliban à faire « honorablement » suite à cette dernière offre et à jeter les bases d’un processus politique ouvert.  Il a également appelé les pays voisins de l’Afghanistan, dont le Pakistan, à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour ramener les Taliban à la table des négociations.

M. ESHAGH AL HABIB (République islamique d’Iran) a appelé à un soutien international plus robuste et durable en faveur de l’Afghanistan, notamment pour faire face aux défis du pays.  En tant que voisin de l’Afghanistan, l’Iran continue de participer aux efforts régionaux en soutien à la paix, à la stabilité et au développement du pays.  C’est dans cette perspective que s’inscrit le plan de développement du port iranien de Chabahar qui aura un impact significatif sur la promotion du commerce et de la coopération économique avec l’Afghanistan.  « Toute tentative de saper ce projet vital ne servirait que les intérêts de ceux qui ne veulent pas la paix et le progrès du peuple afghan », a-t-il affirmé.

M. Al Habib a souligné que la sécurité reste le défi le plus important de l’Afghanistan, et les efforts de lutte contre le terrorisme doivent être la priorité majeure.  L’Iran s’inquiète également des victimes parmi les civils, y compris au sein de la communauté chiite du pays, tout en appelant à changer cette donne.  Le représentant a plaidé pour des efforts en vue de la tenue des prochaines élections en Afghanistan.  Il a enfin rappelé que de nombreux défis demeurent, tout en saluant la programmation, à Genève, d’une conférence ministérielle sur l’Afghanistan en novembre prochain.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.