Soixante-douzième session,
17e séance – matin
CPSD/646

Maintien de la paix: à la Quatrième Commission, les États Membres appuient la volonté de réforme du Secrétaire général

La Quatrième Commission (décolonisation et questions politiques spéciales) a entamé, aujourd’hui, son débat sur les opérations de maintien de la paix, l’occasion pour les délégations d’apporter leur soutien aux initiatives lancées par le Secrétaire général, M. António Guterres, pour améliorer l’efficacité de ces opérations, en réformant l’architecture en place depuis la création de l’ONU, afin de mieux y intégrer la prévention des conflits et la pérennisation de la paix.

Comme l’ont souligné les États Membres dans leurs interventions, les opérations de maintien de la paix sont l’essence même de l’action des Nations Unies, avec quelque 110 000 Casques bleus déployés dans 15 missions autour de la planète.  Ils ont d’ailleurs tous rendu hommage à leur courage et leur dévotion, rappelant le sacrifice de ceux qui sont tombés sous la bannière de l’ONU, dont 67 en 2017. 

S’ils ont rappelé la nécessité de préserver les principes de la Charte (souveraineté, intégrité territoriale, non-ingérence) et ceux des opérations de maintien de la paix (consentement des parties, impartialité, non-recours à la force sauf en cas de légitime défense), les États ont aussi reconnu la singularité des nouveaux conflits et théâtres d’opération, caractérisés par l’émergence de menaces asymétriques qui impliquent des acteurs non étatiques ou des organisations terroristes qui menacent directement les Casques bleus et compliquent l’exécution de leur mandat, dont la priorité reste la protection des civils.  À l’instar de l’Inde ou de l’Indonésie, plusieurs pays contributeurs de troupes ont rappelé l’importance de la définition de mandats clairs et réalisables par le Conseil de sécurité, avec les ressources financières et matérielles adaptées.

Reconnaissant toutefois que ce nouveau contexte a transformé profondément la notion de « maintien de la paix », conduisant parfois à l’échec ou la prolongation excessive de certaines opérations de maintien de la paix, les délégations ont apporté leur soutien à la réforme souhaitée par le Secrétaire général.

S’exprimant au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), la représentante d’El Salvador a rappelé que les opérations de maintien de la paix « ne sont pas une fin en soi » mais « un instrument pour mener à des solutions pacifiques » devant intégrer « un processus de paix parallèle, inclusif et bien planifié ».  Au nom du Mouvement des pays non alignés, le Royaume du Maroc a estimé que ces opérations devaient « s’accompagner d’efforts en matière de redressement économique et de renforcement des capacités des États ».  Pour l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), l’Indonésie a insisté pour que des solutions politiques figurent « au cœur de la conception des mandats et de la décision de déploiement » des opérations de maintien de la paix.

De son côté, la Jamaïque, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a mis en avant la nécessité de « comprendre les causes profondes des conflits pour créer une paix durable », en aidant tout particulièrement les États à bâtir des institutions solides qui permettent de prévenir le retour de conflit et de renforcer leur résilience.  À cet égard, son représentant a salué la création de la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH).

La représentante de l’Union européenne a aussi appelé à s’attaquer aux racines des conflits, saluant d’une part les recommandations du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de maintien de la paix, ainsi que le concept de « pérennisation de la paix » défendu par le Secrétaire général. « Aucune opération de maintien de la paix ne peut se substituer à un règlement politique, via la médiation, le dialogue et la prévention », a-t-elle expliqué, défendant une ONU plus tournée « vers le terrain et les peuples ».

Faisant le même constat que les opérations de maintien de la paix doivent devenir plus efficaces et plus adaptées aux conflits actuels, le Secrétaire général adjoint à l’appui aux missions, M. Atul Khare, a rappelé dans son propos liminaire la volonté de son département d’améliorer le soutien aux missions en réformant la planification, la budgétisation, la délégation de l’autorité et la chaîne d’approvisionnement, afin de rapprocher la prise de décisions du terrain et de renforcer la confiance et la transparence.  Il a insisté sur les efforts déployés pour être plus rapide et performant en éliminant les obstacles bureaucratiques ou les doublons de structures.

De son côté, le Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité au Département des opérations de maintien de la paix, M. Alexandre Zuev, a rappelé le succès de l’ONU au Libéria ou en Côte d’Ivoire, reconnaissant les difficultés d’autres missions comme celles au Darfour (MINUAD), en République centrafricaine (MINUSCA) ou en République démocratique du Congo (MONUSCO).  Il a d’ailleurs mis en avant les efforts déployés pour améliorer l’efficacité de ces missions, avec un plan d’évaluation des performances, expérimenté avec la MONUSCO.  Au-delà de la gestion des missions, il a également insisté sur la dimension politique des opérations de maintien de la paix, sur l’importance de la prévention et de la médiation, en impliquant les acteurs régionaux, citant en exemple l’Union africaine.

Soutenant aussi la réforme de l’architecture du maintien de la paix défendue par le Secrétaire général, le CANZ (Australie, Canada et Nouvelle-Zélande) a défendu la création d’une structure politico-opérationnelle unique, placée sous la direction de sous-secrétaires généraux régionaux, qui permettrait plus de cohérence et d’adaptation au contexte régional.

Le représentant de la République islamique d’Iran a toutefois appelé à faire preuve de prudence en la matière, notant que le nom même d’un nouveau « département des opérations de paix » est évocateur d’un « changement considérable ».  Renchérissant, le Royaume du Maroc pour le Mouvement des pays non alignés et El Salvador pour la CELAC ont demandé que la création de ce nouveau département soit examinée dans un esprit de consensus et sans outrepasser le Comité spécial des opérations de maintien de la paix, « seul organisme intergouvernemental habilité à examiner tous les aspects de ces opérations ».

La Quatrième Commission poursuivra son débat jeudi 26 octobre 2017, à partir de 10 heures.

ÉTUDE D’ENSEMBLE DE TOUTE LA QUESTION DES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX SOUS TOUS LEURS ASPECTS

Déclarations liminaires

M. ATUL KHARE, Secrétaire général adjoint à l’appui aux missions, a rappelé le rôle important des pays contributeurs de troupes et le sacrifice, le dévouement et le courage des 110 000 Casques bleus déployés dans 15 missions.  Il a rappelé la nécessité de rendre les opérations de maintien de la paix plus efficaces, pour leur permettre d’atteindre les objectifs qui leurs ont été fixés.  Les Nations Unies, a-t-il souligné, doivent devenir une organisation qui privilégie le terrain, a-t-il affirmé.  Il a ensuite indiqué que la réforme initiée par le Secrétaire général des Nations Unies était en cours pour améliorer les performances, rendre les missions plus rapides, plus efficaces et plus responsables. 

Il a déploré que le soutien aux opérations de maintien de la paix soit ralenti par des services qui ne sont pas livrés, la fragmentation des structures, la microgestion de certaines structures, et des ressources inadéquates.  Face à ces défis, a indiqué M. Khare, le Secrétaire général a proposé un changement majeur qui met l’accent sur l’amélioration de la budgétisation et de la planification, pour soutenir les prises de décisions.  La réforme vise aussi à assurer une meilleure délégation de l’autorité aux gestionnaires de programmes et à modifier la gestion et le soutien aux structures du Département des opérations de maintien de la paix (DOMP).  Il a précisé que l’objectif était de rapprocher la prise de décisions du terrain, de renforcer la confiance dans les gestionnaires, d’améliorer la transparence et la redevabilité, de réduire les doublons de structures et d’améliorer le soutien aux missions. 

Le Secrétaire général adjoint à l’appui aux missions a ensuite rappelé que l’une de ses préoccupations restait la sécurité des Casques bleus.  Il a également rappelé l’impact préjudiciable de la mauvaise conduite de certains membres du personnel sur la réputation des opérations de maintien de la paix.  Il a ensuite souligné que le Secrétaire général a fait de l’élimination des abus sexuels sa priorité en instaurant un Programme d’action pour lutter contre l’exploitation et les atteintes sexuelles, précisant que le Département de l’appui aux missions travaillait à la mise en œuvre de ce programme, ainsi que de la résolution 2272 du Conseil de sécurité sur la pénalisation des abus sexuels.  Il a ensuite indiqué que le nombre de cas de mauvaises conduites du personnel des opérations de maintien de la paix avait diminué en 2017, 50 allégations d’abus sexuels ayant été recensés, comparés aux 89 cas enregistrés en 2015 et aux 55 enregistrés en 2016. 

Il a expliqué que le contrôle de la conduite et de la discipline dans les opérations de maintien de la paix avait été renforcé, et que des rapports trimestriels et annuels sur la conduite et la discipline sont également rédigés.  

M. Khare a ensuite souligné l’importance de renforcer la gestion des ressources et l’impact environnemental des opérations de maintien de la paix.  Il a parlé des progrès réalisés grâce à la mise en place d’un système de gestion de l’environnement, précisant que les budgets des opérations de maintien de la paix intégraient aussi des indicateurs de normes de performance dans ce domaine.  Il a également souligné les efforts déployés pour améliorer le déséquilibre géographique et de genre existant dans certaines missions.

Abordant la question de la gestion de la chaîne d’approvisionnement, il a fait part de la volonté de disposer d’un processus plus clair, avec une meilleure synchronisation entre les planificateurs, les fournisseurs et les distributeurs de biens et services.  Il a ainsi expliqué que la Division du soutien logistique avait été réformée.  Il a ensuite insisté sur une meilleure intégration des nouvelles technologies et de l’innovation, avec le développement de la première phase du portail « UMOJA Extension 2 » dédié à la chaîne d’approvisionnement intégrant le système Galileo.  Il a également mis en avant le développement d’outils pour la protection des camps de Casques bleus, à Kidal, au Mali, indiquant que ces outils seraient disponibles dans toutes les zones où cela serait nécessaire.  Il a ajouté qu’un programme de sensibilisation aux situations avait aussi été lancé au Mali afin de standardiser la gestion de l’information et du renseignement, dans le cadre de la politique de collecte de renseignements des opérations de maintien de la paix. 

Abordant la question du renforcement du maintien de la paix, le Secrétaire général adjoint a une nouvelle fois insisté sur la coopération étroite avec le Département des opérations de maintien de la paix (DOMP) pour améliorer les performances en dépit de ressources limitées.  Il a toutefois fait part des défis à relever, pointant notamment l’insuffisance des équipements à disposition des contingents.  « Les missions ne peuvent pas protéger les civils et remplir leurs mandats si elles ont un équipement inapproprié », a-t-il souligné, avant d’encourager les États Membres à fournir des équipements. 

M. Khare a ensuite cité des exemples de réussite, tels que les partenariats triangulaires lancé depuis deux ans avec le soutien du Japon pour former des militaires de Tanzanie ou de la Mission d’observation militaire de l’Union africaine en Somalie (AMISOM), ainsi que les partenariats renforcés avec l’Académie militaire d’Entebbe, en Ouganda.  « Les organisations régionales comme l’Union européenne, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) restent des partenaires clefs pour nous, tout comme l’Union africaine », a-t-il noté, insistant sur la coopération avec l’Union africaine pour renforcer les capacités des missions en Somalie et au Darfour.

En conclusion, le Secrétaire général adjoint à l’appui aux missions a souligné que la réforme lancée par le Secrétaire général allait permettre d’opérer de manière plus efficace.  « Avec les changements proposés, nous serons mieux à même de remplir nos mandats, de stopper les cas de mauvaise conduite du personnel des opérations de maintien de la paix et de mieux équiper nos Casques bleus », a-t-il expliqué. 

M. ALEXANDRE ZUEV, Sous-Secrétaire général à l’état de droit et aux institutions chargées de la sécurité au Département des opérations de maintien de la paix, a déclaré que le maintien de la paix est un moyen efficace pour édifier les États, ainsi que pour éviter la reprise de conflits.

Bien qu’elle soit surtout la victoire du peuple du Libéria, le fait que ce pays ait pu organiser des élections justes et libres en s’appuyant sur les institutions nationales, est aussi une preuve que le travail de la Mission des Nations Unies au Libéria a porté ses fruits, a-t-il poursuivi, précisant qu’en Côte d’Ivoire et à Haïti, et dans de nombreux autres pays du monde, « nous avons vu que le maintien de la paix pouvait faire la différence ».  Il a cependant reconnu l’existence de difficultés, rappelant les « échecs tragiques en matière de protection des civils » et affirmant son engagement dans la lutte contre l’exploitation sexuelle.

Tout en signalant que les opérations de maintien de la paix « ont su s’adapter, évoluer et ont toujours prouvé leur utilité », il a pointé une série de nouveaux défis, citant notamment les environnements asymétriques, les groupes armés qui ciblent les soldats de la paix, le fléau du crime organisé, la prolifération d’une nouvelle génération d’armes difficiles à contrôler, ainsi que les acticités de groupes armés guidés par une idéologie extrémiste.  « Nous devons apprendre à répondre à ces phénomènes », a-t-il indiqué notant que les accords politiques conclus par les élites ou les élections peuvent ne pas régler seuls de tels problèmes de violence.

Il a aussi noté l’existence de conflits de plus en plus prolongés, qui se traduisent par une longue présence des missions sur le terrain, comme au Darfour, en République démocratique du Congo ou en République centrafricaine.  Tout en reconnaissant que la stratégie politique doit primer dans les opérations de maintien de la paix, il a estimé que renforcer des institutions alors que le consentement du gouvernement d’accueil diminue, ou protéger les civils malgré l’absence d’un processus politique pose question.  « Nous nous demandons parfois si nous ne sommes pas trop ambitieux », a-t-il indiqué.  Il s’est aussi préoccupé du manque d’unité de la communauté internationale pour régler nombre de différends. « Gérer les intérêts régionaux et équilibrer le rôle de l’ONU avec ceux qui sont sur le terrain présente un vrai défi pour l’Organisation », a-t-il commenté.

Comment fonctionner dans le contexte actuel? a poursuivi M. Zuev, soulignant que l’ONU doit mieux comprendre et définir son rôle politique.  Poursuivant en français, il a indiqué que les réformes annoncées par le Secrétaire général au mois de septembre renforceront la cohérence et le caractère conjoint des efforts, permettront un soutien plus flexible et adapté aux besoins du terrain, ainsi qu’un meilleur usage d’outils d’intervention à la disposition du Secrétariat.  Il a aussi indiqué que l’élimination et la lutte contre les abus sexuels figurent au cœur de ces initiatives de réforme.

Pour sa part, M. Zuev a aussi initié un plan pour améliorer la performance générale des missions, en s’appuyant sur des « évaluations stratégiques et franches », qui encouragent une meilleure exécution des mandats et une obligation de résultat au Siège et sur le terrain.

Il a précisé que l’examen de la revue stratégique de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) est la première étape de ce processus.  « La capacité de notre mission la plus importante et la plus couteuse à se transformer en outil plus dynamique et plus flexible sera une mesure du succès des réformes du Secrétaire général.  Concrètement, il s’agit d’évoluer vers une présence plus flexible, ciblée et mobile avec une structure de commandement intégrée » a-t-il précisé.

Il a aussi appelé à adapter le maintien de la paix au contexte du conflit concerné et à l’espace politique pour mettre en œuvre les mandats en toute sécurité.  Il a parlé de mécanismes de mise en œuvre de mandat à distance, grâce aux technologies et au partenariat, qui peuvent offrir des voies novatrices pour les principales tâches, y compris la protection des civils et le renforcement des institutions.

Poursuivant en russe, M. Zuev s’est attardé sur le rôle politique des opérations de maintien de la paix, indiquant qu’il présente un problème complexe. Il a indiqué que lorsqu’une crise est de nature politique, l’ONU ne peut pas imposer la paix de force et a appelé le Conseil de sécurité à établir des mandats clairs, à avoir une position unifiée et à rappeler que le travail diplomatique sur le terrain est essentiel pour obtenir un accord politique du gouvernement d’accueil.  « Il faut aussi penser aux conditions politiques de la fin de l’opération », a-t-il ajouté.  M. Zuev a aussi invité les pays fournisseurs de contingents à apporter leur contribution aux discussions sur la création des mandats et l’examen des indicateurs d’exécution des missions.

Reprenant la parole en anglais, il a rappelé que l’espace politique de la médiation et de la gestion des conflits se partageait aujourd’hui avec les acteurs régionaux.  « Il faut nouer des partenariats plus forts et définir la valeur ajoutée de ces partenariats.  C’est aussi une question de cohérence politique et stratégique », a-t-il insisté.  Il a cité le G5 Sahel comme exemple de cette volonté de coopérer, ainsi que l’accord-cadre entre l’Union africaine et l’ONU et le travail avec l’Union européenne sur différentes questions.  Il a aussi appelé à mieux définir les stratégies de sortie des missions et de les lier aux processus de transition politique.

Sur le plan des capacités et de la performance opérationnelle M. Zuev a noté que des progrès significatifs réalisés depuis 2015, précisant que 83 États Membres se sont inscrits au Système de préparation des moyens de maintien de la paix, « un succès impressionnant deux ans après sa création ».  Il a fait part de son espoir que la rencontre des ministres de la défense qui se tiendra à Vancouver les 14 et 15 novembre, permettra de fournir des capacités facilitatrices aux missions et d’augmenter le nombre de femmes en uniforme pour atteindre 15% pour les officiers et 20% pour la police.

M. Zuev a par ailleurs indiqué que l’année dernière, l’ONU a fourni un encadrement aux missions et aux fournisseurs de contingents sur le danger des engins explosifs improvisés et qu’elle s’apprête à achever une politique d’évacuation des blessés.  Il a aussi cité l’adoption d’une politique de renseignement, pour faciliter la collecte et l’analyse d’informations.  Sur le plan de la performance opérationnelle, il a expliqué que près de 35% des unités déployées avaient été certifiés par les États Membres, appelant ces derniers à renforcer la conformité avec les exigences de certification.  « Nous avons également commencé à mettre en œuvre un plan de réforme visant à augmenter la performance à travers des procédures de recrutement plus rigoureuses, un cadre politique plus robuste et une adaptation des compétences et capacités politiques aux mandats d’aujourd’hui », a-t-il fait savoir.

Débat général

M. ABDERRAZZAK LAASSEL (Maroc), au nom du Mouvement des pays non alignés, a demandé une approche plus prudente suite aux évolutions récentes dans le domaine des opérations de maintien de la paix.  Il a notamment souligné que la création d’un nouveau « département de paix », avec un basculement de la notion d’opération de maintien de la paix à celle d’opération de paix, doit être examinée de manière attentive et prudente.  Il a également estimé que la création de toute nouvelle politique doit bénéficier du consensus des États Membres, appelant le Secrétariat à éviter de mettre en œuvre des politiques qui n’ont pas encore été approuvées.  Le représentant a aussi fait part de son espoir que les prochaines sessions du Comité spécial des opérations de maintien de la paix seront différentes des précédentes, et permettront de renforcer la pertinence du rapport annuel et de le rendre plus facile à utiliser.

M. Laassel a ensuite rappelé que la création d’opérations de maintien de la paix et la prorogation de leurs mandats devaient se faire dans le strict respect des principes énoncés dans la Charte.  Il a demandé au Conseil de sécurité de créer des mandats clairs et réalistes, en collaboration avec les pays fournisseurs de contingents et à s’abstenir d’adopter à la hâte des mandats sans fondement politique, ni ressources suffisantes ou qui ne peuvent pas être mis en œuvre.  Il a souligné qu’une planification intégrée est primordiale pour obtenir des succès, appelant par ailleurs à éviter de changer les mandats des missions sans consultation avec les pays fournisseurs de contingents.  Le représentant a aussi insisté sur l’importance d’une coopération triangulaire entre pays fournisseurs, le Secrétariat et le Conseil de sécurité, précisant que le Mouvement des non-alignés appuyait le remaniement complet des modalités de cette coopération afin de la rendre plus efficace.

M. Laassel a ensuite fermement condamné toute forme d’exploitation sexuelle commise par le personnel de Nations Unies et a réitéré son appui à la politique de tolérance zéro.  Il a insisté sur le fait que les enquêtes et les poursuites devaient se faire au sein des juridictions nationales des pays concernés.  Il a salué les efforts du Secrétaire général et des pays fournisseurs de contingents, ajoutant que cette lutte est une responsabilité de tous les États Membres, et qu’elle doit être prise au sérieux.

En matière d’appui financier et humain, il a salué la dernière augmentation du taux de remboursement, et a appelé à un échange d’information en vue de la prochaine augmentation en 2017.  Il s’est ensuite penché sur la question de la sécurité du personnel du maintien de la paix, soulignant que la collecte d’information peut y contribuer mais que des inquiétudes persistent à cet égard.  Il a rappelé l’importance de trouver un consensus à ce sujet, notamment au sein du Comité spécial des opérations de maintien de la paix (C34), afin de développer plus avant le cadre politique.

M. Laassel a aussi estimé que le maintien de la paix doit être accompagné d’efforts en matière de redressement économique et de renforcement des capacités. Les opérations ne doivent pas non plus être utilisées comme alternatives à la lutte contre les causes profondes des conflits ou pour gérer les conflits eux-mêmes, a-t-il ajouté, précisant que la gestion des conflits doit se faire par le biais d’outils politiques, sociaux et de développement afin d’arriver à une transition douce qui permet une paix, une sécurité et un développement durables.

Le Mouvement a aussi demandé la tenue de consultations avec les États Membres sur les moyens d’assurer la protection du personnel des missions, leur sécurité restant une préoccupation majeure pour les pays fournisseurs de contingents.  Il a en outre souligné que la protection des civils est la responsabilité première des États, et que cet argument ne doit pas être utilisé comme justificatif unique pour le déploiement de troupes.  Il a aussi appelé à répondre aux problèmes liés au manque de ressources et à la difficulté à fournir des troupes et des équipements pour les opérations militaires.

Enfin, M. Laassel a appelé les Nations Unies à intensifier leur appui aux opérations de maintien de la paix de l’Union africaine autorisées par le Conseil de sécurité en leur octroyant un financement prévisible et durable.

En tant que groupe qui comporte le plus grand nombre de pays fournisseurs de contingents, le Mouvement a par ailleurs rendu hommage à tous ceux qui ont perdu leur vie en défendant la cause de la paix.  Il a demandé que le monument aux soldats de la paix, qui se trouve au Siège de l’ONU, soit plus visible et accessible aux visiteurs.

Intervenant au nom de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), Mme CARLA ESPERANZA RIVERA SÁNCHEZ (El Salvador) a souligné que les opérations de maintien de la paix « ne sont pas une fin en soi » mais un instrument politique pouvant mener à des solutions pacifiques négociées et à des processus de paix viables et durables.  Le maintien de la paix s’est révélé être un des outils les plus efficaces à la disposition des Nations Unies pour aider les pays à traverser le chemin difficile du conflit à la paix, d’où la nécessité, a-t-elle affirmé, de renforcer ses capacités opérationnelles et sa structure organisationnelle. 

Prenant note du processus de réforme enclenché par le Secrétaire général, elle a encouragé ce dernier à poursuivre les consultations avec les États Membres, ajoutant que le Comité des 34 est le seul organisme intergouvernemental habilité à examiner tous les aspects de ces opérations.  Dans ce contexte, elle a souligné que toutes ces opérations devaient strictement honorer les buts et principes de la Charte, de même que les principes qui sont venus s’ajouter avec le temps: consentement des parties, impartialité, et non recours à la force sauf en cas de légitime défense ou de défense du mandat.  El Salvador a aussi estimé que, pour être réellement efficaces, les opérations de maintien de la paix doivent jouir, dès le début, d’un appui politique, de ressources humaines, financières et logistiques suffisantes, ainsi que de mandats clairement définis et viables.  Elle a mis l’accent, à ce propos, sur la transition du maintien de la paix à la consolidation. 

Préoccupée par l’augmentation de pertes en vies humaines là où se trouvent ces opérations, elle a jugé que celles-ci devraient toujours être accompagnées d’un processus de paix parallèle et inclusif, bien planifié et soigneusement conçu, épaulé par le consentement et l’adhésion des parties concernées.  Elle a aussi qualifié d’essentielles les stratégies de sortie, recommandant notamment la mise en place, sous la houlette de l’État concerné, d’un cadre de sécurité établissant une stratégie à long terme, axée sur la stabilité politique et le développement socioéconomique.  El Salvador a aussi dit sa gratitude à tout le personnel de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH), en particulier les contingents et les forces de police, et salué la création de la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH). 

La représentante a par ailleurs insisté sur la nécessité de resserrer la coordination entre les opérations de maintien de la paix et la Commission de consolidation de la paix, ainsi qu’avec tous les programmes, fonds et organismes spécialisés de sorte à mettre davantage l’accent sur la corrélation étroite entre paix et développement.  Elle a en outre reconnu le rôle indispensable des femmes et des jeunes dans la résolution des conflits.  

Mme GILIAN BIRD (Australie), au nom du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande (CANZ), a constaté que la nature des opérations de maintien de la paix a beaucoup changé en 70 ans.  À ce titre, elle a soutenu l’ambitieux agenda de réforme des opérations de maintien de la paix initié par le Secrétaire général. Selon elle, une seule et unique structure politico-opérationnelle placée sous la direction de sous-secrétaires généraux régionaux, permettra d’assurer une plus grande cohérence du système et de s’assurer que ces missions de maintien de la paix sont bien alignées avec le contexte régional dans lequel elles opèrent.  Elle a aussi appuyé la réforme de la gestion, soulignant que l’autorité doit être déléguée au terrain pour rendre les opérations de maintien de la paix plus souples et plus efficaces.  Elle a appelé les États Membres à être à la hauteur du niveau d’ambition que s’est fixé le Secrétaire général.  Ce n’est pas le moment de travailler comme d’habitude, a-t-elle affirmé.

La représentante a par ailleurs estimé que la Commission spéciale pour les opérations de maintien de la paix peut faire mieux, l’engageant à revoir ses méthodes de travail pour produire des orientations politiques claires.  Rappelant que 67 Casques bleus ont trouvé la mort cette année, la déléguée a ensuite appelé à renforcer les capacités opérationnelles des missions afin de mieux protéger ces soldats qui sont « attaqués au seul motif qu’ils font du maintien de la paix ». Elle a aussi exhorté les Nations Unies à accroître le contingent des femmes au sein de ces opérations et à New York.  Cette recommandation n’a rien de « politiquement correcte » mais est au contraire un facteur fondamental de succès et de paix durable, a-t-elle commenté.

Mme Bird a par ailleurs appelé à combler les écarts linguistiques, notamment au sein des missions déployées dans des environnements francophones.  Elle a aussi insisté sur la protection des civils, véritable baromètre du succès de ces missions, dénonçant les cas d’abus sexuels et la persistance de graves violations à l’encontre d’enfants.  Elle s’est aussi félicitée de la tenue, au mois de novembre, à Vancouver, de la Réunion des Ministres de la défense sur le maintien de la paix des Nations Unies, y voyant l’occasion de véritablement faire réformer et améliorer le maintien de la paix.

Après avoir salué, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), l’engagement des 100 000 Casques bleus au service de la paix dans le monde et honoré la mémoire de ceux qui y ont laissé leur vie, M. E. COURTENAY RATTRAY (Jamaïque) a salué la création de la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH) pour une période de six mois courant du 16 octobre 2017 au 15 avril 2018.  « Afin de consolider les progrès réalisés en Haïti et maintenir un environnement propice au développement durable, la communauté internationale doit rester activement engagée dans un partenariat effectif avec le Gouvernement et la population d’Haïti », a-t-il indiqué.

M. Rattray a ensuite déclaré que le débat sur le maintien de la paix était complémentaire à l’examen décennal de l’architecture de consolidation de la paix, et a appelé à une coordination étroite entre les deux secteurs.  Il a par ailleurs affirmé que la « synergie naturelle entre paix, sécurité et développement » figure au centre de la proposition de réforme du Secrétaire général concernant le pilier paix et sécurité, et qui vise l’établissement d’un département unique qui intègrerait le Département des affaires politiques au Bureau d’appui à la consolidation de la paix.  « Nous anticipons que cela permettra une approche plus holistique dans la prévention des conflits, la construction de la paix, et sa durabilité », a-t-il indiqué.

Le représentant de la CARICOM s’est ensuite longuement attardé sur la participation active des femmes dans la prévention et la résolution des conflits, le maintien et la consolidation de la paix, et dans les efforts de promotion de la paix et la sécurité internationales.  Il s’est notamment réjoui que le Bureau des affaires militaires ait accepté d’engager des femmes officiers et lieutenants et a salué l’objectif d’atteindre 15% de femmes officiers et observateurs militaires.  Il a toutefois jugé nécessaire d’assurer une plus grande institutionnalisation de la sexospécificité dans toutes les missions militaires et de maintien de la paix.

M. Rattray est ensuite revenu sur les actes d’abus sexuels commis par le personnel du maintien de la paix, se disant pleinement en faveur de l’approche « Tolérance zéro ».  Il a appelé à placer les droits et la dignité des victimes au centre des efforts pour mettre fin à l’impunité.  Il a aussi appelé à renforcer l’engagement avec la société civile et des acteurs nationaux et internationaux clefs.

Poursuivant, il a mis en évidence le besoin de missions de maintien de la paix bien équipées, disposant de ressources appropriées face aux risques accrus sur le terrain.  Il s’est dit encouragé par l’usage des avancées technologiques, notant les cours en ligne multilingues et gratuits offerts par l’Institut de formation aux opérations de paix.

Enfin, M. Rattray a rappelé que la CARICOM attachait une grande importance à la participation des pays fournisseurs de troupes et de policiers dès la création initiale des mandats, et a souligné le besoin d’une « coopération triangulaire efficace et transparente » entre le Conseil de sécurité, le Secrétariat et les pays fournisseurs de contingents ou de personnels de police pour faire face aux défis du maintien de la paix.

M. DANNY RAHDIANSYAH (Indonésie), au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a pris note du processus de réforme de l’architecture du maintien de la paix et de la sécurité, tout en soulignant qu’il importe aussi de disposer des moyens et capacités de s’acquitter des mandats et d’assurer la sécurité des Casques bleus.  L’ASEAN a ensuite rappelé que les principes d’impartialité et d’usage de la force seulement à des fins de légitime défense doivent être réaffirmés, en dépit des défis de plus en plus relevés auxquels font face les missions.  Il a aussi estimé que des solutions politiques devaient figurer au cœur de la conception des mandats et de la décision de déployer des missions de maintien de la paix.  Tout en condamnant fermement les actes de violence perpétrés à l’encontre des Casques bleus, le représentant a estimé que ceux-ci ne devaient pas constituer une excuse pour lancer ces unités dans des opérations de contre-terrorisme.  « La neutralité et la crédibilité des Casques bleus est essentielle », a-t-il souligné.

 Le représentant a également partagé les préoccupations de la communauté internationale sur la question des abus sexuels.  Il a aussi appelé à adopter des mesures novatrices pour augmenter le nombre de femmes Casques bleus.  Il a aussi insisté sur l’importance d’un engagement précoce et de tenir des consultations rapprochées entre le Conseil de sécurité, le Secrétariat et les pays fournisseurs de contingents ainsi que les acteurs régionaux et les pays hôtes non seulement lors de l’élaboration et de l’ajustement des mandats des missions, mais aussi lors de l’examen de toute question stratégique ou politique affectant les opérations.  Leur connaissance du terrain peut apporter des informations pertinentes, a soutenu le délégué.

Intervenant ensuite en sa capacité nationale, le représentant de l’Indonésie a souhaité une plus grande coopération entre le Secrétariat et les pays contributeurs de contingents.  Il a aussi estimé que la refonte de l’architecture de paix et de sécurité doit se faire en tandem avec une réforme sur le plan de la gestion.  Il a exprimé sa vive inquiétude quant au manque de financement et de capacités que rencontrent ces missions, pour ensuite appeler le système des Nations Unies à veiller davantage à la sécurité et au bien-être des Casques bleus et du personnel civil sur le terrain.  Il a aussi appelé la communauté internationale à accroître le nombre de femmes dans les opérations de maintien de la paix, précisant que l’Indonésie a déployé 258 femmes militaires dans quatre missions.

Rappelant finalement son implication dans la prévention des abus sexuels, il a indiqué que son pays avait été un des premiers à signer, le 18 septembre 2017, l’engagement volontaire.

Mme NARCISSA VLADULESCU, de l’Union européenne, a salué les efforts lancés par le Secrétaire général pour mettre en œuvre les recommandations du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de maintien de la paix, ainsi que le lancement de la réforme de l’architecture des opérations de maintien de la paix qui cible notamment la prévention des crises, leur meilleure gestion, l’amélioration des méthodes de travail, le renforcement du leadership, de la transparence et de la redevabilité.

Elle a estimé que les recommandations du Groupe indépendant de haut niveau chargée d’étudier les opérations de maintien de la paix avaient permis d’améliorer l’avenir de l’architecture de la paix et de la sécurité internationales, se félicitant que le Secrétaire général des Nations Unies ait mis en avant le rôle clef du partenariat entre l’Union européenne et les Nations Unies pour la stabilité internationale.  L’Union européenne entend d’ailleurs renforcer ce partenariat, notamment sur le modèle trilatéral avec l’Union africaine.

La représentante a ensuite souhaité que les meilleures pratiques en termes de conduite et de discipline soient observées et que les leçons du passé soient tirées.  Elle a aussi souligné l’importance essentielle d’apporter des solutions politiques aux conflits, de traiter de leurs causes profondes et donner la priorité à la prévention.  Saluant la formule de « pérennisation de la paix », elle a ajouté qu’aucune opération de maintien de la paix ne pouvait se substituer à un règlement politique, via la médiation, le dialogue et la prévention.

Abordant la question de la protection des civils et de la prévention des crimes de masse, la représentante a insisté pour qu’elles soient le dénominateur commun des opérations de maintien de la paix, rappelant l’importance de s’assurer que les missions disposaient d’un mandat adéquat.  Elle a également insisté sur l’importance de la protection des enfants et des femmes, notamment contre les violences et abus sexuels.  Elle a indiqué que l’Union européenne soutenait une meilleure prise en compte des problématiques de genre dans la résolution des conflits, mettant aussi en avant le rôle de l’implication des acteurs locaux pour la protection des civils.  « Renforcer la police, la justice et les institutions de redressement est une mesure de sauvegarde cruciale de l’état de droit », a-t-elle souligné.

La représentante a également rappelé le besoin pour les Casques bleus de disposer de mandats clairs, cohérents et réalistes, avec une composante droit de l’homme forte, ainsi qu’une stratégie de sortie de crise.  Elle a insisté aussi sur l’entrainement, la formation et l’équipement des missions. 

Elle a aussi souligné l’importance de diminuer l’impact environnemental des opérations, indiquant que si les missions devaient disposer de ressources adéquates, elles devaient aussi s’assurer que ces ressources étaient utilisées de la bonne manière, avec transparence et redevabilité.

La représentante a aussi parlé de l’importance de l’information et du renseignement dans des environnements critiques et dangereux, non seulement pour assurer la réussite des missions mais aussi pour veiller à la sécurité du personnel onusien.  Elle a encouragé le recours à des nouvelles technologies et a estimé que les missions doivent aussi disposer d’un soutien médical adapté.

M. JULIO CÉSAR ARRIOLA (Paraguay) a souligné que le Paraguay, en tant que pays contributeur de troupes, était très attaché à la mise en œuvre efficace des mandats des opérations de maintien de la paix auxquels il participe.  Fort de ce principe, il a rappelé que son pays avait créé le centre d’entrainement conjoint des opérations de paix (CECOPAZ), dont la fonction première est de former le personnel militaire des Nations Unies, en vue de son déploiement. 

Dressant, par ailleurs, l’historique de la participation croissante du Paraguay aux opérations de maintien de la paix, le représentant a rappelé que son pays avait participé à sa première opération en 1998, sous la bannière du contingent argentin, dans le cadre de la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre (UNFICYP).  Par la suite, a-t-il poursuivi, le Paraguay a déployé du personnel au sein de contingents menés par d’autre pays, y compris, à partir de 2001, auprès de la Mission des Nations Unies en Éthiopie et en Érythrée (MINUEE) et de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO).  En 2006, le Paraguay a pour la première fois déployé un peloton entier au sein du bataillon brésilien de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH).  Puis, en décembre 2010, le pays s’est vu confier les rênes de son premier bataillon, toujours dans le cadre de la MINUSTAH. 

Aujourd’hui, a précisé le représentant, le Paraguay participe à cinq des 14 missions en exercice.  Dans le cadre de la réforme des opérations de maintien de la paix, le représentant a principalement appelé à renforcer le mandat de protection des civils des missions, notamment en clarifiant les règles régissant ce volet.

M. HOSSEIN MALEKI (République islamique d’Iran) a appuyé la proposition de réforme du Secrétaire général, tout en appelant à faire preuve de prudence, notamment en ce qui concerne la création d’un nouveau « Département des opérations de paix », dont le titre, a-t-il relevé, est évocateur d’un changement considérable.  Après avoir apporté son appui aux principes directeurs du maintien de la paix, le représentant a rappelé que les normes de conduite les plus élevées étaient attendues du personnel des Nations Unies, notamment des Casques bleus de l’ONU.  Il a déclaré attendre du Secrétaire général des actions « décisives et nécessaires » pour mettre fin à l’« acte odieux et inhumain » que constituent l’exploitation et les abus sexuels.  Pour sa délégation, toute intervention militaire par les Nations Unies ou d’autres forces étrangères au prétexte de protéger les civils devraient être évitée, cette protection relevant de la responsabilité première des États.  M. Maleki a également été d’avis que les organisations régionales ne devraient « en aucune façon » se substituer à l’ONU lorsqu’il s’agit d’assumer la responsabilité première du maintien de la paix et de la sécurité internationales. 

M. BHARTRUHUARI MAHTAB (Inde) a souligné que le contexte des opérations de maintien de la paix avait changé en sept décennies, les conflits entre États ayant laissé la place à une profusion de conflits intra-étatiques, impliquant des acteurs non étatiques et des organisations internationales terroristes.  « Cela a de sérieuses implications sur l’efficacité des opérations de maintien de la paix », a-t-il ajouté.  Il a également déploré que de nombreuses situations de conflit se poursuivent en raison de l’incapacité des membres du Conseil de sécurité à s’entendre, à cause d’intérêts géopolitiques majeurs divergents.

Le représentant a constaté qu’en raison de l’implication croissante d’acteurs non étatiques dans les conflits, la pression s’accroissait pour confier des mandats plus « robustes » aux opérations de maintien de la paix, « au risque d’être en conflit avec ces principes ».  Il a également rappelé que les défis auxquels étaient confrontés les Casques bleus devenaient « de plus en plus complexes et dangereux ».

Dans ce contexte et pour permettre aux Casques bleus d’être plus efficaces, le représentant a estimé important qu’ils disposent d’un « mandat clairement défini, avec des objectifs clairs, une structure de commandement claire et des ressources adaptées.  Il a aussi jugé indispensable d’institutionnaliser des consultations des pays contributeurs de troupes.

Rappelant les incidents survenus dans le domaine de la protection des civils, le représentant a insisté pour que tous les efforts visant à établir une politique de performance et de redevabilité prennent en compte la clarté du mandat et la spécificité de la situation, et qu’elle s’applique aussi aux responsables onusiens à tous les niveaux.

Il a estimé qu’alors que l’attention se focalise sur le renforcement de la logistique, les engagements accrus des États Membres, le déploiement de nouvelles technologies ou encore le renforcement de forces de réaction rapides, « il y a clairement besoin d’une implication plus forte dans les processus de règlement des conflits ».  Il a également souligné que la pérennisation de la paix impliquait une approche plus globale, axée sur l’égalité de genre, l’autonomisation, l’accès à la santé, à l’éducation, à l’emploi et le renforcement des institutions démocratiques et de l’état de droit.

Rappelant que l’Inde était le principal pays contributeur de troupes, le représentant a rappelé que ses Casques bleus avaient toujours défendu leurs mandats de manière proactive.  L’Inde participe également à la formation des Casques bleus, par l’intermédiaire de partenariats avec des pays d’Afrique.

Abordant la question des abus sexuels et des mauvaises conduites de personnels de missions, le représentant a réitéré son soutien à la politique de tolérance zéro dans ce domaine, soutenant la création d’un fonds pour les victimes de ces abus.

Il a enfin espéré que les réformes proposées par le Secrétaire général permettront de mettre fin aux retards bureaucratiques, d’améliorer la logistique sur le terrain et de renforcer plus largement la dimension politique des missions.
 

M. JORGE SKINNER-KLÉE (Guatemala) a appelé au renforcement des capacités stratégiques et opérationnelles des opérations de maintien de la paix aux fins de mieux les adapter aux circonstances sur le terrain et à garantir davantage d’efficacité dans la recherche d’une paix durable.

S’agissant des défis à relever, le Guatemala a appelé à remédier à la « polarisation actuelle » entre les pays contributeurs de contingents et les bailleurs de fonds, moyennant une coopération plus étroite entre les États, aussi bien dans le cadre du Comité des 34 que de la Cinquième Commission.  Dans cet objectif, il serait fondamental de renforcer le consentement et la coopération entre les États hôtes et les fonctionnaires des missions, ainsi qu’au sein même du Conseil de sécurité puisque ce sont les membres de cet organe qui doivent œuvrer à la défense des mandats des missions, a-t-il argué.  De ce fait, il a qualifié d’indispensable la coopération triangulaire entre les contributeurs de contingents, le Conseil de sécurité et le Secrétariat.

Le représentant du Guatemala a par ailleurs souligné que les définitions et/ou principes émanant du Comité des 34 doivent être mis en œuvre et « non interprétés » par le Secrétariat.  Il a aussi regretté que l’équipe chargée de rédiger et de soumettre la politique de collecte et d’analyse des informations et de renseignement « n’ait pas été fidèle au consensus reflété au sein du Comité des 34 ».  

M. SUKHBOLD SUKHEE (Mongolie) a indiqué que son pays vise à améliorer les capacités de maintien de la paix des forces armées mongoliennes, augmenter le niveau d’entrainement des troupes avant leur déploiement et accroître sa participation aux opérations de maintien de la paix.  « Depuis 2002, lorsque nous avons envoyé nos deux premiers observateurs militaires dans le cadre de la MONUSCO, la Mongolie a déployé plus de 15 000 soldats au cours des 15 dernières années », a rappelé le délégué.  « Aujourd’hui, a-t-il poursuivi, plus de 900 soldats mongoliens sont présents dans six opérations de maintien de la paix, parmi lesquelles celles de la République démocratique du Congo, du Darfour et du Soudan du Sud ».  Après avoir encouragé à augmenter la participation des femmes dans ces missions, le représentant a exhorté la communauté internationale à redoubler d’efforts pour assurer la protection des civils.  Il a aussi appelé à veiller à ce que l’ensemble du personnel des opérations de maintien de la paix sache que les Nations Unies prohibent l’exploitation sexuelle, et qu’il connaisse aussi les normes à observer en matière de comportement.

Mme MARÍA EMMA MEJÍA VELÉZ (Colombie) a indiqué qu’elle partageait la vision sur une réforme qui tient compte de l’ajustement des opérations de maintien de la paix aux nouvelles dynamiques et aux nouveaux types de conflit.  Cette réforme est nécessaire et urgente pour assurer un exercice plus efficace du maintien de la paix, a souligné la représentante qui a estimé que la Réunion des Ministres de la défense sur le maintien de la paix des Nations Unies qui se tiendra à Vancouver au mois de novembre, soit l’occasion de progresser dans ce domaine.  Pour Mme Mejía Veléz, les efforts doivent passer par une reconnaissance des victimes des conflits, la réduction de la disparité entre les sexes et la durabilité de l’environnement.  La fermeture récente de certaines missions, comme au Libéria et en Côte d’Ivoire, montre que les progrès réalisés sont mesurables, et que les opérations de maintien de la paix peuvent permettre une transition qui privilégie les capacités d’appropriation nationale.

Poursuivant, la représentante a particulièrement insisté sur la nécessité de faire face au déficit chronique des femmes dans les opérations de maintien de la paix.  Elle a noté qu’en décembre 2004, ces dernières ne représentaient que 3,2% des effectifs militaires, qualifiant d’encourageant l’objectif qu’elles représentent 15% des officiers et 20% des forces de police.  Elle a aussi mis l’accent sur le rôle primordial que jouent les femmes dans les accords de paix et la gestion après-conflit.

M. CHUMPHOT NURAKKATE (Thaïlande) a estimé qu’en matière de réforme du pilier de la paix et de la sécurité, il est essentiel d’établir des principes clairs de responsabilité et d’autorité, des plans cohérents et une synergie.  Il a aussi indiqué que les réformes ne peuvent pas aboutir sur la seule base d’initiatives individuelles venant d’en haut.  « Leur succès dépend de l’engagement collectif, des efforts partagés et des actions concertées de tous les acteurs impliqués », a-t-il indiqué.  Selon lui, toutes les propositions de réformes doivent tenir compte de la nature transversale du travail des Nations Unies.

En tant que pays contributeur de troupes, la Thaïlande attache aussi une grande importance à l’impact pratique au niveau opérationnel et souhaite que l’emphase soit mise sur l’amélioration de l’efficacité des opérations de maintien de la paix.  Le représentant a notamment appelé à améliorer la coopération triangulaire entre le Conseil de Sécurité, les pays contributeurs de troupes et le Secrétariat.  La coopération régionale et sous-régionale est, selon le délégué, un autre élément crucial.  Il a ensuite indiqué que la notion de « paix durable » est intrinsèquement liée à celle du développement durable.  Il a aussi souligné que les femmes sont des agents de changement efficaces, tout spécialement lorsqu’il s’agit de consolidation de la paix, exhortant les Nations Unies à augmenter le quota féminin dans toutes les sphères du personnel du maintien de la paix.  Enfin, il a demandé à tous les Casques bleus d’adopter « les plus hauts standards de conduite », rappelant que la Thaïlande s’est toujours prononcée en faveur d’un principe de tolérance zéro en matière d’exploitation et d’abus sexuels.

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