7855e séance – après-midi     
CS/12663

Le Conseil de sécurité entérine les efforts de la Fédération de Russie et de la Turquie pour mettre fin à la violence en Syrie et lancer un processus politique

Porte-plume du texte, la Fédération de Russie veut faire de 2017 « l’année du règlement de la crise syrienne »

Le Conseil de sécurité a, cet après-midi, salué et appuyé les efforts de la Fédération de Russie et de la Turquie pour mettre fin à la violence en Syrie et lancer un processus politique dans ce pays déchiré par un conflit depuis 2011.

En adoptant à l’unanimité de ses 15 membres la résolution 2336 (2016), le Conseil prend également note d’un ensemble de documents* négociés et publiés par la Fédération de Russie et la Turquie le 29 décembre, dont une « déclaration sur l’instauration de la cessation des hostilités sur le territoire de la République arabe syrienne ».

Le représentant de la Fédération de Russie, qui avait présenté le texte, a remercié les membres du Conseil de leur soutien, voyant dans cette unanimité, après celle qui avait accueilli la résolution 2328 (2016), la preuve que cet organe est capable de dépasser les querelles de « propagande » pour faire preuve d’unité.  Insistant sur la nécessité de se montrer « constructif » à l’avenir, la délégation russe a déclaré que 2017 devait être « l’année du règlement de la crise syrienne ».

Son homologue des États-Unis a fait montre d’un « optimisme plus prudent », « tempéré par le besoin réaliste » d’insister sur la « nécessité technique de la mise en œuvre » de ce texte.  Elle a espéré que ce cessez-le-feu tiendrait bon, se disant préoccupée à cet égard par les informations faisant état d’une offensive du régime soutenue par la milice Hezbollah à Wadi Barada.  

Le Royaume-Uni et l’Ukraine se sont faits également l’écho de ces incidents sécuritaires.  Parmi les documents agréés par la doublette russo-turque, figure un accord concernant la création d’un « mécanisme d’enregistrement des violations de la cessation des hostilités » et d’un « régime de sanctions ».

La France a, de son côté, appelé les « garants » de l’« accord de trêve », la Fédération de Russie et la Turquie, à assumer pleinement leurs responsabilités.  Mais la principale préoccupation de Paris tient à l’adhésion réelle des parties syriennes à cet accord et au processus politique, tant leur niveau d’engagement paraît « incertain ».  « Nous considérons que la cessation des hostilités doit s’appliquer à l’ensemble des groupes armés, à la seule exclusion de ceux désignés comme terroristes par le Conseil de sécurité », a précisé le représentant.

Selon lui, « les groupes armés qui ne sont pas parties à la cessation des hostilités ne sauraient, de ce fait, être considérés comme terroristes », le représentant rappelant que le Haut Comité des négociations (HCN) est le représentant « légitime » de l’opposition syrienne.

Aux termes de la résolution adoptée aujourd’hui, le Conseil de sécurité attend avec intérêt la réunion qui se tiendra, à la fin du mois janvier à Astana, au Kazakhstan, entre le Gouvernement syrien et les représentants de l’opposition, réunion « qu’il considère comme une composante importante du processus politique sans exclusive dirigé par les Syriens et facilité par l’Organisation ».

Les membres ont souligné l’importance que revêtira cette échéance, que la Chine et la France ont identifiée comme une première étape vers la reprise des négociations entre les parties au conflit, le 8 février prochain, sous l’égide de l’Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Staffan de Mistura. 

Au nombre des autres documents négociés et agréés par Moscou et Ankara et dont le Conseil a pris note aujourd’hui, on compte également un accord concernant la « formation de délégations » chargées d’entamer des négociations relatives à un règlement politique de la crise syrienne.

« Nous quittons le Conseil de sécurité confiants que cette résolution permettra des avancées durables », s’est enfin félicité le représentant de l’Espagne, dont la présidence du Conseil s’achève ce soir à minuit, et, simultanément, son mandat de membre non permanent.

 

* S/2016/1133

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Lettre datée du 29 décembre 2016, adressée au Secrétaire général et au Président du Conseil de sécurité par le Représentant permanent de la Fédération de Russie auprès de l’Organisation des Nations Unies et le Chargé d’affaires par intérim de la Mission permanente de la Turquie auprès de l’Organisation des Nations Unies (S/2016/1133)

Texte du projet de résolution (S/2016/1138)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant toutes ses résolutions antérieures et les déclarations de son président sur la situation en République arabe syrienne, en particulier les résolutions 2254 (2015) et 2268 (2016), ainsi que le Communiqué de Genève du 30 juin 2012,

Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de la République arabe syrienne, et aux buts et principes de la Charte des Nations Unies,

Prenant note de la déclaration commune des Ministres des affaires étrangères de la République islamique d’Iran, de la Fédération de Russie et de la République turque du 20 décembre 2016,

Notant avec satisfaction les efforts de médiation entrepris par la Fédération de Russie et la République turque pour faciliter l’instauration d’un cessez-le-feu en République arabe syrienne,

Demandant à nouveau à toutes les parties de donner immédiatement aux organismes humanitaires un accès rapide, sûr et sans entrave à l’ensemble du territoire syrien, comme indiqué dans ses résolutions sur la question,

Réaffirmant que la seule solution propre à régler durablement la crise en République arabe syrienne passe par un processus politique sans exclusive, dirigé par les Syriens, fondé sur le Communiqué de Genève du 30 juin 2012, comme préconisé dans ses résolutions 2118 (2013), 2254 (2015) et 2268 (2016), ainsi que dans les déclarations du Groupe international de soutien pour la Syrie sur la question,

1.    Salue et appuie les efforts déployés par la Fédération de Russie et la République turque pour mettre fin à la violence en République arabe syrienne et lancer un processus politique, et prend note des documents qu’elles ont publiés à cet égard (S/2016/1133);

2.    Souligne qu’il importe d’appliquer pleinement toutes ses résolutions sur la question, en particulier les résolutions 2254 (2015) et 2268 (2016);

3.    Attend avec intérêt la réunion qui se tiendra à Astana, au Kazakhstan, entre le Gouvernement de la République arabe syrienne et les représentants de l’opposition, qu’il considère comme une composante importante du processus politique sans exclusive dirigé par les Syriens et une étape majeure en vue de la reprise, à Genève le 8 février 2017, des négociations organisées sous l’égide de l’Organisation des Nations Unies;

4.    Décide de rester saisi de la question.

Déclarations

Mme MICHELE J. SISON (États-Unis) a salué les efforts déployés par la Fédération de Russie, se disant favorable à un accord de cessation des hostilités si un accès humanitaire est ménagé aux populations civiles.

Elle a toutefois indiqué que davantage d’informations étaient nécessaires, regrettant que les annexes à l’accord ne soient pas encore disponibles.  « Mais nous avons voté pour cette résolution, car elle établit un juste équilibre », ont expliqué les États-Unis, exprimant un « optimisme prudent et un soutien fondé sur l’espoir », mais « tempéré par le besoin réaliste » d’insister sur la « nécessité technique de sa mise en œuvre ». 

La délégation a espéré que ce cessez-le-feu serait maintenu et ne servira pas de justification à d’autres infractions inacceptables.  À cet égard, les États-Unis sont préoccupés par les informations faisant état d’une offensive du régime soutenue par la milice Hezbollah à Wadi Barada.

Le deuxième paragraphe souligne la pleine mise en œuvre des résolutions 2254 (2015) et 2268 (2016), de même, la réunion d’Astana doit porter directement sur ce processus « onusien », a affirmé la représentante américaine. 

M. ALEXIS LAMEK (France) a affirmé que son pays, favorable à toute initiative permettant de sauver des vies civiles en Syrie, et qui avait proposé, dans cet esprit, le 16 décembre, un projet de résolution visant à déployer un dispositif de surveillance des évacuations à Alep, avait voté en faveur de cette résolution.

La France, a-t-il dit, espère que cet accord de cessez-le-feu sera mis en œuvre de façon effective immédiatement et appelle les « garants » à assumer pleinement leurs responsabilités à cet égard.

Toutefois, a-t-il estimé, le texte de l’accord russo-turc, tel que partiellement présenté hier au Conseil de sécurité, comporte toujours des zones d’ombre.  La principale préoccupation de la France tient à l’adhésion réelle des parties syriennes à cet accord de trêve. 

Le niveau d’engagement des parties dans cette trêve, a-t-il expliqué, paraît particulièrement incertain, et sa mise en œuvre, fragile.  En particulier, la France considère que la cessation des hostilités doit s’appliquer à l’ensemble des groupes armés, à la seule exclusion des groupes désignés comme terroristes par le Conseil.  Les groupes armés qui ne sont pas parties à la cessation des hostilités ne sauraient, de ce fait, être considérés comme terroristes.

De même, selon la délégation française, il est indispensable que la surveillance du respect du cessez-le-feu intervienne en coordination avec les Nations Unies.  La France reste ainsi à la disposition des « garants » pour examiner les moyens d’un mécanisme de surveillance rigoureux et impartial.

Tous les efforts de la communauté internationale doivent maintenant viser à faciliter la reprise des négociations, le 8 février, sous l’égide de l’Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Staffan de Mistura.  La réunion d’Astana pourra constituer une première étape utile à cet égard, a considéré le représentant français, rappelant que le Haut Comité des négociations (HCN) était le représentant légitime de l’opposition syrienne et ne saurait en être exclu.

M. GERARD VAN BOHEMEN (Nouvelle-Zélande) s’est félicité de l’appui unanime apporté par le Conseil à une résolution visant à atténuer les souffrances du peuple syrien et à relancer le processus de paix.  Mais il reste des incertitudes quant aux groupes qui seront invités à y prendre part et davantage de clarté sera nécessaire à l’avenir, a ajouté le représentant.

M. PETER WILSON (Royaume Uni) a indiqué que son pays soutiendrait toute démarche visant à une cessation des hostilités sur l’ensemble du territoire syrien.  Il s’est inquiété des informations faisant état d’accrochages sur le terrain.  Il a estimé que certains aspects de la résolution adoptée méritaient d’être tirés au clair. 

Il a mis l’accent sur le rôle des Nations Unies en matière de surveillance an appelant la Fédération de Russie et la Turquie à veiller à des mesures de surveillance indépendante.  Il a jugé indispensable que toutes les parties respectent la résolution 2268 (2016) adoptée ce mois-ci. 

Le représentant britannique a dit que son pays appuierait tout accord politique inclusif permettant de mettre un terme au bain de sang en Syrie.  Il a espéré que la préservation de ce cessez-le-feu servirait de base à un processus politique plus large.

M. ISMAEL ABRAÃO GASPAR MARTINS (Angola) a dit que la résolution adoptée était une contribution réelle à la paix et à la sécurité.  Il a félicité la Fédération de Russie pour son rôle central et la Turquie pour s’être jointe à cet effort.  Même s’il n’y a pas d’accord parfait, le représentant de l’Angola a espéré que les efforts observés serviront le bien commun du peuple syrien.  Il a ajouté que cette résolution constituait un pas important vers une paix durable en rappelant que la solution à la crise syrienne ne pouvait être que politique.  

M. ALFREDO TORO (Venezuela) s’est félicité de la tenue, fin janvier 2017, de la réunion d’Astana entre le Gouvernement syrien et l’opposition, et a formé tous ses vœux de succès à cet égard.  Il est particulièrement important que l’accord de cessation des hostilités soit intégré aux efforts déployés par l’Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Staffan de Mistura, a ajouté le délégué, avant de se féliciter de quitter le Conseil de sécurité après avoir apporté son soutien à cette résolution.

M. VOLODYMYR YELCHENKO (Ukraine) a apporté son soutien aux efforts déployés pour mettre fin au « bain de sang » en Syrie.  Mais pour mettre en œuvre la cessation des hostilités, il faudra atteindre un niveau de confiance qui fait actuellement défaut actuellement entre les parties, comme en témoignent des accrochages signalés à Wadi Barada.

M. LUIS BERMÚDEZ (Uruguay) a salué l’adoption de cette résolution, tout en estimant que ce texte aurait pu être amélioré.  Il a dit l’importance de garantir aussi la mise en œuvre des résolutions 2254 (2015) et 2268 (2016) du Conseil de sécurité en appelant à la plus grande transparence du processus de négociations qui débutera à Astana. 

Il a jugé indispensable que ce processus de négociations se tienne sous les auspices des Nations Unies.  Il a espéré que 2017 permettrait de parvenir à une cessation durable des hostilités en Syrie.  

M. AMR ABDELLATIF ABOULATTA (Égypte) a indiqué que son pays avait appuyé toutes les résolutions soumises au Conseil de sécurité pour mettre fin aux hostilités en Syrie.  Il a estimé que ce texte constituait un pas dans la bonne direction même s’il ne mènera certainement pas à une cessation complète des violences. 

« Il nous faut des intentions réelles pour aboutir à un règlement total », a-t-il insisté.  Il a estimé que la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité et le Communiqué de Genève de 2012 restaient les bases de tout règlement du conflit en Syrie.  Il a estimé qu’il n’y avait pas de solution militaire à la crise syrienne et a appelé à des pourparlers libres de toute intervention étrangère et respectueuse de l’intégrité  territoriale de la Syrie.

M. FODÉ SECK (Sénégal) a rappelé qu’il n’existait aucune solution militaire au conflit.  Aussi, sa délégation s’est-elle réjouie de la résolution présentée aujourd’hui par la Fédération de Russie.  Il a souligné l’attachement de son pays à la nécessité de ménager un accès sûr et sans entrave à l’assistance humanitaire, estimant que ce texte constituait un « cadeau » pour le peuple syrien.

M. WU HAITAO (Chine) s’est félicité de l’adoption par le Conseil de la résolution 2336 (2016), espérant que l’accord de cessez-le-feu serait mis en œuvre.  La délégation a demandé l’application intégrale des résolutions 2254 (2015) et 2268 (2016) et a souhaité un franc succès à la réunion d’Astana, considérée comme une étape nécessaire à la reprise, le 8 février 2017 à Genève, des négociations organisées sous l’égide de l’ONU. 

Mme SITI HAJJAR ADNIN (Malaisie) s’est félicitée des efforts consentis par la Fédération de Russie et la Turquie pour servir de médiatrices de la cessation des hostilités.  Elle a estimé que seule une solution politique permettrait de mettre un terme à ce conflit.  Elle a espéré que le processus d’Astana permettrait de parvenir à une résolution durable de ce conflit.  Elle a espéré que l’élan positif du Conseil de sécurité observé depuis quelques semaines contribuerait à diminuer les souffrances du peuple syrien. 

M. KORO BESSHO (Japon) s’est félicité des efforts consentis par la Fédération de Russie et la Turquie pour parvenir à une cessation complète des hostilités.  Il a jugé indispensable que soit mise en œuvre la résolution 2268 (2016), adoptée il y a quelques semaines dans le but de faciliter la distribution de l’aide humanitaire. 

Dans ce contexte, le représentant du Japon a exhorté le Gouvernement syrien à prendre des mesures pour garantir un accès sans entrave de l’aide humanitaire.  Citant l’importance du paragraphe 3 de la résolution adoptée aujourd’hui, il a espéré que les négociations qui doivent débuter en janvier à Astana permettront la participation de toutes les parties prenantes. 

M. VITALY CHURKIN (Fédération de Russie) a remercié tous les membres du Conseil de leur soutien à la résolution 2236 (2016), ainsi que la Turquie.  « Terminer l’année en adoptant l’une après l’autre deux résolutions importantes à l’unanimité montre que nous sommes capables de nous élever au-dessus des querelles de ‘propagande’ et de faire preuve d’unité. »

Le représentant s’est félicité de la tenue, fin janvier, de la réunion d’Astana, au Kazakhstan, soulignant qu’il était très important que le Conseil de sécurité appuie les efforts de la Fédération de Russie et de la Turquie.  Le délégué a, en conclusion, rappelé à quel point le processus enclenché par les deux pays avait été « difficile », « mais nous sommes arrivés à un résultat constructif ». 

« Si vous ne pouvez pas aider », a-t-il déclaré aux membres du Conseil, alors je vous en prie, « abstenez-vous » d’empêcher les choses de se faire à l’avenir.  « Vous savez que cela n’est pas constructif », a-t-il insisté. 

Le représentant russe a affirmé que nous devons maintenant œuvrer à faire de 2017 l’année du règlement de la crise syrienne.  Si la communauté internationale agit avec l’intérêt du peuple syrien à l’esprit, « alors nous parviendrons à un résultat ».

M. ROMÁN OYARZUN MARCHESI (Espagne) a remercié la Turquie et la Fédération de Russie pour les efforts consentis en vue de faire progresser la solution politique en Syrie.  Il a jugé indispensable que le suivi du cessez-le-feu se fasse de manière transparente et impartiale en rendant compte au Conseil de sécurité.  Il a dit que l’Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Staffan de Mistura, ne devait pas seulement être associé aux négociations futures à Astana mais devrait être un acteur central de ces négociations en veillant, notamment, au respect de la résolution 2254 (2015).  

Le représentant de l’Espagne a, par ailleurs, souligné l’importance de l’Union européenne qui « a beaucoup apporté » aux négociations et sera un acteur essentiel de la reconstruction de la Syrie lorsque les conditions politiques seront réunies.  « Nous quittons le Conseil de sécurité  aujourd’hui confiants que cette résolution permettra des avancées durables », a insisté le représentant de l’Espagne, dont le pays assurait, au mois de décembre, la présidence du Conseil de sécurité.

 

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