Conseil de sécurité,
7622e séance – matin
CS/12243

Un an après le début du conflit, le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires dresse un tableau accablant de la situation humanitaire au Yémen

Près d’un an après le début du conflit, il est plus que jamais nécessaire de mettre fin à la « catastrophe humaine » en cours au Yémen, a déclaré, ce matin, le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires de l’ONU, M. Stephen O’Brien, devant le Conseil de sécurité.  La communauté internationale et, en particulier le Conseil de sécurité, doivent exiger des parties le respect de leurs obligations vis-à-vis de la population civile.

« Depuis mars 2015, plus de 35 000 victimes ont été faites, dont 6 000 signalées par des hôpitaux ou dispensaires.  Les Nations Unies ont confirmé qu’au moins 2 997 des personnes tuées et 5 659 des blessés sont des civils.  Plus de 700 enfants ont été tués et plus de 1 000 autres blessés, et 720 auraient été recrutés par les parties au conflit », a expliqué M. O’Brien, qui est également le Coordonnateur des secours d’urgence des Nations Unies.

Le coût humanitaire du conflit est terrible, a-t-il poursuivi, en précisant que 2,7 millions de Yéménites sont déplacés et au moins 7,6 millions de personnes exposées à l’insécurité alimentaire.  Près de 2 millions d’enfants souffrent de malnutrition aigüe, tandis que les femmes enceintes ou allaitantes nécessitent une assistance de toute urgence, a-t-il ajouté.

Les pénuries de médicaments, les salaires impayés et les dégâts considérables ont pour conséquence un accès insuffisant aux services de santé pour près de 14 millions de personnes.  En l’espace de 11 mois, près de 600 centres hospitaliers ont fermé, a précisé le Secrétaire général adjoint, qui a également fait état de la déscolarisation de plus de 1,8 million d’enfants et de la destruction ou de l’endommagement de réservoirs d’eau par les bombardements aériens, les tirs d’artillerie et les roquettes.  Au moins 900 000 personnes sont affectées par cette situation.

Dans ce contexte, les institutions des Nations Unies et leurs partenaires des ONG travaillent dans des conditions extrêmement dangereuses, a fait observer M. O’Brien.  « Depuis janvier, la communauté humanitaire a fourni des rations alimentaires à environ 2,6 millions de personnes, de l’eau potable à 234 000 autres, et du fuel à plus de 3 millions », a-t-il fait valoir.  En outre, 102 000 Yéménites ont reçu des soins de santé, 36 000 enfants sont traités pour malnutrition aigüe et 3 700 d’entre eux âgés de moins de 5 ans ont bénéficié de programmes alimentaires adaptés.

« En dépit de ces efforts louables, je suis extrêmement préoccupé par l’espace de plus en plus réduit dans lequel le personnel humanitaire intervient pour répondre aux besoins accablants des hommes, femmes et enfants yéménites », a-t-il cependant déclaré.

Les parties au conflit contribuent à cette situation, a accusé le Secrétaire général adjoint, en faisant état de l’« incohérence » avec laquelle les Houthistes et leurs alliés autorisent l’accès humanitaire, notamment dans la ville de Taïz.  Dans le gouvernorat de Hadramaout, mais aussi dans celui d’Aden, où Al-Qaida opérant dans la péninsule arabique est implanté, les opérations humanitaires dans ces régions se heurtent également à d’énormes défis sécuritaires.

En outre, l’accès aux gouvernorats du nord du pays, où les besoins humanitaires sont criants, continue d’être périlleux, en raison des frappes aériennes le long de la frontière avec l’Arabie saoudite.  Ainsi, a relevé M. O’Brien, une récente communication reçue de ce pays au sujet de la sûreté du personnel humanitaire dans les zones contrôlées par les Houthistes a eu un impact sur la planification des opérations humanitaires, causant ainsi d’importants retards au cours de ces deux dernières semaines.  Le 11 février dernier, un des cargos du Programme alimentaire mondial (PAM) en provenance de Djibouti, dont l’arrivée dans le port yéménite de Hodeïda avait été préalablement approuvée, a été contraint par les forces de la Coalition d’accoster dans celui de Jīzān, en Arabie saoudite.

« Dans le cadre de leurs opérations militaires, les parties au conflit ont le devoir de veiller à la protection de tous les civils et des personnels et locaux humanitaires », a rappelé le Secrétaire général adjoint, avant de condamner le recours à des engins explosifs dans les zones peuplées.

M. O’Brien a ensuite expliqué aux membres du Conseil que l’assistance humanitaire devrait s’accompagner d’efforts pour revitaliser l’économie et le commerce de biens, compte tenu de la dépendance du Yémen aux importations de carburant et de vivres.  Dès lors, a-t-il souligné, il est de la plus haute importance que les inspections relatives à la mise en œuvre de la résolution 2216 (2015) n’entravent en rien le commerce maritime de produits de première nécessité, dont les civils ont cruellement besoin.

Le Secrétaire général adjoint s’est, à cet égard, félicité du lancement officiel du mécanisme de vérification et d’inspection des Nations Unies, qui doit maintenant contribuer de façon cruciale à l’amélioration des importations commerciales dans les ports yéménites échappant au contrôle de Sanaa.  Le mécanisme fonctionnera pendant une période préliminaire de six mois depuis Djibouti et sera délocalisé à Aden et/ou à Sanaa lorsque les conditions de sécurité le permettront, a-t-il précisé.

Enfin, dans deux jours, a annoncé M. O’Brien, le Plan d’aide humanitaire 2016 pour le Yémen sera lancé à Genève, avec un montant fixé à 1,8 milliard de dollars.  Il a donc invité les bailleurs de fonds à faire preuve de générosité afin de répondre aux besoins humanitaires qui, a-t-il fait observer, ne cessent de s’aggraver à mesure que le conflit s’intensifie.

En début de séance, le Conseil de sécurité a observé une minute de silence à la mémoire de l’ancien Secrétaire général de l’ONU, Boutros Boutros-Ghali, décédé aujourd’hui.

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