soixante et onzième session,
5e séance – après-midi
CPSD/610

Quatrième Commission: débat animé entre partisans de l’autonomie avancée du Sahara occidental et défenseurs du droit à l’autodétermination des Sahraouis

La Quatrième Commission a achevé, cet après-midi, les auditions de pétitionnaires sur la question du Sahara occidental dans un débat animé, et a repris son débat général sur la décolonisation.

Un certain nombre de pétitionnaires se sont prononcés pour la proposition d’autonomie pour la région du Sahara occidental, présentée par le Maroc au Conseil de sécurité en 2011, alors que d’autres ont revendiqué que le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui soit enfin garanti après 41 ans d’occupation illégale du Sahara occidental par le Maroc.

À titre de rappel, l’autonomie avancée de cette région garantirait à ses populations l’autogestion démocratique de leurs affaires à travers des organes législatifs, exécutifs et judiciaires dotés de compétences exclusives.  L’État marocain ne conserverait des compétences que dans les domaines régaliens, en particulier la défense, les relations extérieures et les attributions constitutionnelles et religieuses du Roi du Maroc.

Face à l’échec des tentatives de l’ONU de parvenir à un règlement pacifique de ce différend, certains intervenants ont estimé que la solution politique demandée par le Conseil de sécurité est précisément la proposition marocaine.  Cette position n’était pas partagée par ceux qui ont reproché au Maroc d’être responsable de l’échec de l’organisation du référendum d’autodétermination du peuple sahraoui, notamment le représentant du Front Polisario, qui a accusé le Royaume du Maroc d’avoir boycotté ce processus « parce qu’il ne pensait pas pouvoir le remporter ».  D’autres ont accusé le Royaume d’abus des droits de l’homme des Sahraouis dans ces provinces et d’en exploiter les ressources naturelles « illégalement ».

Les juristes ayant participé au débat ont, quant à eux, réaffirmé que la question du Sahara occidental était bien une question de décolonisation, et que la responsabilité de jure de ce territoire revenait à l’Espagne.  De leur avis, malgré le non-respect du processus de décolonisation à ce jour, il n’est pas question de renoncer au référendum d’autodétermination du peuple sahraoui, dont l’organisation par les Nations Unies a été envisagée pour la première fois il y a 24 ans.

Dans plusieurs motions d’ordre, le représentant de l’Algérie a rappelé des questions de procédure, estimant que les pétitionnaires, qui s’expriment à titre personnel, doivent respecter ceux qui les ont autorisés à s’exprimer et se limiter au sujet sur lequel ils ont été autorisés à parler.  Parler de la situation dans les camps de Tindouf c’est le droit des pétitionnaires, parler de l’Algérie ne l’est pas parce que son pays n’est pas le sujet du débat, a-t-il précisé.

En réponse, le représentant du Maroc a rappelé que tous les États Membres de la Commission avaient autorisé les pétitionnaires à prendre la parole, pas seulement l’Algérie.  À son avis, on risquait d’établir un dangereux précèdent en interdisant ainsi aux pétitionnaires de s’exprimer librement.

En fin de séance, le Maroc, le Royaume-Uni et l’Argentine ont exercé leur droit de réponse.

La Quatrième Commission se réunira demain, vendredi 7 octobre à 15 heures, pour poursuivre son débat général sur les questions de décolonisation.

Pétitionnaire sur la question du Sahara occidental

M. AHMED JOUMANI, Conseiller du Président du Conseil national des droits de l’homme du Maroc (CNDH), a présenté la situation de la pratique quotidienne des droits de l’homme dans les provinces sahariennes du Maroc où le CNDH dispose de deux sections à Laayoune et Dakhla.  Ces sections régionales sont fortement impliquées dans les orientations stratégiques mises en place par les autorités publiques, qui ont misé sur une politique de proximité et de territorialisation des mécanismes de protection des droits de l’homme au Maroc, a-t-il expliqué.

Dans le cadre de son action quotidienne, le CNDH dépêche systématiquement des commissions d’enquête sur les évènements que connaissent périodiquement ces provinces et observe les procès de personnes poursuivies, notamment en cas d’allégations de mauvais traitements ou de torture.  Il traite en outre les plaintes déposées par les citoyens et agit immédiatement pour le règlement de nombreux litiges.  Cette action est menée dans le cadre du mécanisme national de recours et de protection établi par le Maroc et chargé d’examiner des allégations de violations des droits de l’homme.  Le CNDH assure en outre des cycles de formation des agents de la police nationale et envisage la mise en place d’un centre pour handicapés à Laayoune pour renforcer leur prise en charge médicale et la rééducation, a encore précisé M. Joumani.  Il a également déclaré que º5 800º personnes avaient bénéficié de compensations financières par l’Instance Équité et Réconciliation dans les provinces sahariennes, y compris les victimes civiles des enlèvements et des exactions commises par le Polisario.

Pour M. SIDI AHMED HORMAT ALLAH, de l’Association marocaine pour le développement de l’Oued Eddadhab, le 7 novembre 2015 est une date clef pour les habitants des provinces du sud du Maroc.  Elle correspond au lancement, à partir de la ville de Laayoune, du nouveau modèle de développement de ces provinces.  « Un programme important qui répond aux aspirations des habitants de la région et qui a un budget de 8 milliards de dollars pour financer des projets phares dans différents secteurs économiques », a-t-il expliqué.  Ce programme devrait en outre créer près de 120 000 emplois.  Pour le pétitionnaire, ce modèle de développement contribuera considérablement au développement intégré et à la promotion de l’identité historique de la région.  Dans un souci écologique, ce modèle met l’accent sur le développement durable, notamment les énergies renouvelables, la protection des écosystèmes et des ressources en poissons, a-t-il précisé. 

Le pétitionnaire a insisté sur les détails techniques de ce plan pour souligner à quel point le Maroc est déterminé à aller de l’avant dans la régionalisation avancée qui permettra au peuple sahraoui de gérer ses propres affaires.  Il refuse les accusations portées contre le Maroc selon lesquelles le Royaume « pillerait » les ressources du Sahara, et leur oppose les investissements énormes qu’il y fait au contraire.

M. ZINE EL AABIDINE EL OUALI, Acteur associatif de Laayoune, a dénoncé le fait que l’an dernier, une de ses collègues a été privé de parole devant cette Commission « tout simplement parce qu’elle a cité le nom de l’endroit où des membres de sa famille sont séquestrés depuis º40 ansº».  Il a poursuivi en disant que « le représentant du pays qui les séquestre sur son territoire ne veut pas qu’on cite son nom devant la Commission, sous prétexte que cet endroit ne figure pas sur la liste des º17 territoiresº dont on peut débattre devant cette honorable Assemblée ».  Il a posé la question de savoir comment procéder pour obtenir de l’aide sans risquer de se faire couper la parole.

Motions d’ordre

Le représentant de l’Algérie a pris la parole pour préciser que le point à l’ordre du jour est celui du Sahara occidental et non celui d’un autre pays.

Le représentant du Maroc a répondu que « c’est exactement cette attitude dont se plaint le pétitionnaire « qui vient de parler à l’instant ».

Le représentant de l’Algérie a fait observer que la Commission devait se limiter à respecter la procédure et le point à l’ordre du jour.

Le représentant du Maroc a rappelé que le point à l’ordre du jour est la décolonisation des peuples et des territoires, et que le pétitionnaire a parlé des conditions de vie de sa famille à Tindouf et, « à sa connaissance », Tindouf se trouve en Algérie.

Le représentant algérien a fait part de son intention d’interrompre toute intervention se référant à l’Algérie.

Le représentant du Maroc a pris à témoin les délégations présentes pour dire que « le collègue algérien est en train de terroriser la salle avec ses menaces ».

Le Président de la Commission a affirmé qu’hier, certains intervenants ont pu parler de Tindouf sans être interrompus.  Il a rappelé aux délégations d’utiliser le temps pour écouter les pétitionnaires et de se limiter à la question à l’ordre du jour.

M. HAMMADA EL BAIHI, pétitionnaire, a déclaré que toutes les solutions ont failli en raison de l’attitude d’un pays qui accueille le Front Polisario sur son territoire.

Invoquant une motion d’ordre, le représentant de l’Algérie a dit que son pays n’était pas une puissance occupante dans la sous-région.  Il a demandé au Président du Comité de faire respecter les règles du Comité et d’empêcher les intervenants à faire des déclarations hors sujet.

Le représentant du Maroc a déclaré que le pétitionnaire n’a pas mentionné l’Algérie avant de regretter que l’Algérie interrompe les interventions. 

« Ce n’est pas en accusant l’Algérie de tous les maux que l’on va résoudre la question du Sahara occidental » a affirmé le représentant de l’Algérie.    

« Tout le monde sait que la solution du Sahara se trouve entre les mains de l’Algérie », a déclaré le représentant du Maroc, avant que le Président du Comité procède à la suspension de la séance.   

Reprenant la parole M. HAMMADA EL BAIHI, pétitionnaire, a dit qu’il n’a pas fait des milliers de kilomètres pour ne pas dénoncer des violations.  Il a insisté qu’il était difficile de ne pas citer l’Algérie sans mentionner les violations perpétrées à Tindouf.

M. KINO DAILAL, auteur, a soulevé le problème qui entrave toute solution politique à la question du Sahara occidental.  Il s’agit, à son avis, « d’un pays voisin du Maroc dont, paraît-il, je ne peux pas citer le nom au risque d’être interrompu ».  Il a estimé qu’il était de son devoir d’en parler parce qu’il constitue « la pièce maîtresse » dans la prolongation du conflit du Sahara.  Il a accusé « ce pays » d’avoir créé « de toutes pièces le conflit du Sahara pour tenter de s’approprier ce territoire dans le but de s’offrir une fenêtre sur l’océan Atlantique » et de maintenir « nos familles, par la force, dans les camps de l’enfer qu’il a installés sur son territoire pour entretenir vivantes les braises de ce conflit ».  Pour le pétitionnaire, c’est également « ce pays » qui « sape les bases élémentaires de la paix et de la stabilité dans la région du Maghreb en manipulant un groupe armé installé sur son territoire, et en voulant imposer à ses voisins une entité incongrue ».

Motions d’ordre

Le représentant de l’Algérie a estimé que les pétitionnaires, qui s’expriment à titre personnel, doivent respecter ceux qui les autorisent à prendre la parole et se limiter à aborder le point sur lequel ils ont été autorisés à s’exprimer.  Il a souligné à nouveau que l’Algérie n’est pas le sujet du débat et qu’il appartient au Président de faire respecter les règles de procédure.

Le représentant du Maroc a rappelé que tous les États Membres de la Commission avaient autorisé les pétitionnaires à prendre la parole, pas seulement l’Algérie.  À son avis, on risquait d’établir un dangereux précédent en interdisant aux pétitionnaires de s’exprimer librement.

Le représentant algérien a rappelé qu’il ne veut pas s’exprimer sur le fond et que ses interventions se limitent à une question procédurale.  Parler de la situation dans les camps de Tindouf c’est le droit des pétitionnaires, parler de l’Algérie ne l’est pas, a-t-il précisé.

Le Président a rappelé que tous les pétitionnaires qui figurent sur la liste sont autorisés à s’exprimer devant la Commission, et que le Président ne peut pas savoir à l’avance ce que dira un pétitionnaire.  Il doit par contre accorder les demandes de motion d’ordre.

Le représentant du Maroc s’est excusé « pour nos envolées méditerranéennes » et a demandé au Président de constater qu’il y a des abus des règles de procédure dans cette salle.  Les pétitionnaires sont là pour parler, et les camps de Tindouf se trouvent en Algérie.  Pour lui, l’Algérie est partie au conflit qu’elle le veuille ou non, a-t-il conclu.

Le président a expliqué que ce n’est pas au Président de dire aux pétitionnaires ce sur quoi ils ont le droit de s’exprimer.  Il a invité les États Membres « à essayer encore une fois de poursuivre les auditions », faute de quoi il serait obligé de suspendre la réunion une nouvelle fois.

M. GISLI Kr. BJÖRNSSON, Président du Conseil d’administration de l’Association islando-marocaine de business et de communication, a salué des accords de pêches conclus entre le Maroc et l’Union européenne qui n’excluent pas le Sahara occidental.  Il a affirmé que le Maroc menait au Sahara occidental une politique qui vise le développement.  Il a ajouté que le niveau de vie au Sahara occidental comptait parmi les plus élevés au Maroc et que le Royaume avait prévu des ressources importantes en matière d’investissements dans les infrastructures du Sahara occidental pour la période 2016-2021.

Mme SUZANNE SCHOLTE a affirmé qu’il était temps que cette commission et les Nations Unies demandent au Roi du Maroc de mettre un terme à l’occupation illégale du Sahara occidental et de se retirer de ce territoire.  Elle a ajouté que la situation était d’autant plus inacceptable qu’elle conduisait à de nombreux résultats tragiques: d’abord, les Marocains continuent de perpétrer leurs atrocités contre les Sahraouis dans la partie du Sahara occidental occupée par le Maroc; ensuite, une génération entière de Sahraouis n’a jamais vu son territoire et la majorité de la population vit dans des camps; enfin, les Sahraouis voient leur ressources naturelles pillées par les envahisseurs.  Mme Scholte a affirmé que l’échec des Nations Unies sur cette question envoyait un message terrible, à savoir que le respect de l’état de droit et la confiance portée aux Nations Unies ne conduisaient qu’à voir ses enfants grandir dans des camps de réfugiés, son pays pillé par des envahisseurs, ses proches se faire battre, torturer et être portés disparus dans les prisons marocaines. Mme Scholte a jugé plus grave encore le message envoyé face à l’attitude du Maroc, qui laisse à penser que l’invasion, l’agression et l’usage de la violence pourraient constituer des moyens pour atteindre les objectifs fixés.

Mme VERONIQUE VAN DER PLANCKE, au nom de l’EUCOCO, association de coordination européenne de soutien au peuple sahraoui, a rappelé que l’exploitation des ressources sahraouies, « sans l’avis du peuple du Sahara occidental et sans qu’il en bénéficie », constituait une violation du droit international.  Elle a également rappelé que l’Avocat général auprès de la Cour de justice de l’Union européenne avait déclaré le 13 septembre dernier que le Sahara occidental n’est pas une partie du Maroc.  Elle a demandé le renforcement de la MINURSO, dont le Maroc a expulsé 84 membres, pour organiser le référendum et l’extension de son mandat à une composante « droits de l’homme ».

Mme SOUMAIA FERGANI, du Comité national algérien de solidarité avec le peuple sahraoui et de l’Union nationale des femmes algériennes, a affirmé que le peuple sahraoui a toujours la même revendication depuis que leur territoire a été occupé d’abord par l’Espagne, puis, en 1975, par le Maroc.  Selon elle, la visite du Secrétaire général de l’ONU, en mars 2016, dans les camps de Tindouf et dans le territoire libéré du Sahara occidental a été une lueur d’espoir de voir les Nations Unies relancer le processus.  Pour Mme Fergani, la solution politique reste celle préconisée dans le plan de règlement de 1991, qui a été approuvé par le Conseil de sécurité, et qui dit qu’un référendum d’autodétermination doit être organisé pour permettre au peuple sahraoui de décider librement de son avenir.  Depuis, les Sahraouis attendent toujours ce référendum, et il est grand temps que l’ONU s’acquitte de sa responsabilité à leur égard, a estimé Mme Fergani.

M. MULA AHMED, Association des étudiants sahraouis, a indiqué qu’il est né dans un camp de réfugiés au sud-ouest de l’Algérie. Il a rappelé que son peuple a fui le Sahara occidental après la marche verte et en raison des bombardements des avions marocains.  Il a indiqué qu’une fillette sahraouie est encore morte hier, tuée par une mine antipersonnel.  

M. TOM O’BRYAN a affirmé que l’absence de guerre ne garantissait pas pour autant la paix.  Il a rappelé que plus d’un million d’habitants du Sahara occidental enduraient la répression brutale de l’occupation marocaine, et affirmé que 100 000 personnes avaient fui la domination marocaine et vivaient désormais en exil, dans la pauvreté la plus totale au sein d’un camp de réfugiés dans le désert algérien.`  « Expert de la question des droits de l’homme à l’Université d’Harvard ayant travaillé sur la crise du Sahara occidental pendant des années, j’ai aujourd’hui ce message urgent à vous transmettre: les Nations Unies doivent surveiller les violations des droits de l’homme au Sahara occidental », a-t-il dit.  Le pétitionnaire a par ailleurs affirmé que le Gouvernement marocain n’était pas le seul responsable, rappelant que dans des camps de réfugiés, le Front Polisario avait écrasé ses opposants et empêché les réfugiés du Sahara occidental de se déplacer.  Il a indiqué que le statu quo au Sahara Occidental –absence de guerre, absence de paix– n’était plus supportable et qu’il fallait à mettre un terme à l’impunité et à l’injustice au Sahara Occidental.  

M. MAHFOUD BOUAD, Syndicats des étudiants sahraouis, a dénoncé la mort hier d’une fillette de 4 ans tuée par une mine antipersonnel marocaine.  Il a exhorté la Commission à tout mettre en œuvre afin de mettre fin à la colonisation du Sahara occidental et à faire respecter le cessez-le-feu de 1991.  « Face à l’inaction de l’ONU, et en particulier du Conseil de sécurité », M. Bouad a estimé que le seul moyen pour le Sahara occidental d’atteindre l’autodétermination était de recourir à la lutte armée.  

Mme FATMATA BACHIR JATRI EMHAMED, qui a grandi dans les camps sahraouis avec “l’espoir de pouvoir revenir un jour dans ma patrie”, a reproché au Royaume du Maroc de repousser les négociations parce que « seuls ses propres intérêts l’intéressent ».  Dans la mesure où il n’a pas été possible de trouver une solution pacifique à ce conflit depuis 41 ans, ce n’est pas surprise si les jeunes sahraouis se tournent vers la lutte armée comme seule solution, ºa-t-elleº fait remarquer.  La pétitionnaire a également dénoncé l’exploitation « illégale » par le Maroc des ressources naturelles du Sahara occidental, avant de mettre l’accent sur les abus des droits de l’homme commis par le Royaume dans les territoires « occupés du Sahara occidental ».  C’est le soutien de pays puissants comme la France, qui a permis au Maroc de s’en tirer à bon compte, a-t-elle déclaré.

M. JUAN JOSE MANZO RAMIREZ, Étudiant indépendant guatémaltèque soutenant le peuple sahraoui, a demandé comment les droits de l'homme peuvent être universels alors que des groupes subissent encore la tyrannie.  Il a estimé que le temps était venu d’une action plus déterminée des Nations Unies pour permettre au Sahara occidental de faire respecter sa souveraineté

Mme SALKA DAHI BACHIR, étudiante, née en 1991, deux mois après l’accord de cessez-le-feu de la MINURSO, a déclaré que « son peuple » avait passé 25 ans dans des camps sous occupation marocaine.  Elle a exprimé sa déception par le rôle joué par les Nations Unies dans ce conflit.  Les jeunes sahraouis, dont 500 à º1 000º sortent des universités chaque année mais ne trouvent pas d’emploi, ont souffert et continuent de souffrir, ce qui alimente leur frustration, a-t-elle déploré.  6De ce fait, les jeunes n’ont plus confiance en les efforts des Nations Unies et refusent de vivre sous l’occupation.  Elle a réclamé le droit du peuple sahraoui à exercer son droit à l’autodétermination.

Mme LATIFA AÏT-BAAL, Présidente de EuroMed-CDC, a souligné le danger de la politisation de la question des ressources naturelles. Elle a fait référence à une décision de la Cour européenne de justice datée du 10 décembre 2015 qui stipule que le Front Polisario n’a aucune légitimité à représenter une quelconque population.  Elle a affirmé que le Maroc est en conformité avec les principes de l’Article 73 de la Charte de l’ONU, précisant que la Maroc maintenait les activités de sa seule mine de phosphate au Sahara Occidental pour de seules raisons sociales puisque cette mine est déficitaire. 

Mme NAGLA MOHAMED LAMIN, de la Sahrawi National Youth Organization (USJSARIO/NOVA), s’est présentée comme « une femme sahraouie, née et élevée dans une tente verte d’un camp de réfugiés ».  En 1995, à l’âge de 6x ans, a-t-elle raconté, elle a vu sa mère recevoir de l’ONU un certificat l’autorisant à voter dans le cadre d’un éventuel référendum d’autodétermination.  Elle a dit avoir compris ce jour-là que le désert algérien n’était pas sa terre et qu’elle était une réfugiée.  Militante de la cause sahraouie, elle agit également au sein du groupe NOVA constitué de jeunes sahraouis ayant étudié dans le monde entier et préoccupés par l’avenir de leur pays. « Nous parlons des droits humains, des droits des femmes et de la façon de maintenir la paix parmi des jeunes confrontés à la frustration et à la colère. »  Elle a invité les délégués à venir dans les camps pour voir « le prix que nous payons à la paix en attendant depuis º40 ans » une solution au conflit avec le Maroc.

Pour M. LOSSEYNI BAKAYOKO, Enseignant-chercheur, INP-HB Yamoussoukro (Côte d’Ivoire), la question du Sahara occidental n’est plus une question de décolonisation, mais plutôt une question de nature géopolitique, dans la mesure où aucun État n’a revendiqué une quelconque souveraineté sur le Sahara occidental à l’exception du Maroc.  Il a souligné que la quasi-totalité de la population marocaine vit sur les terres de leurs ancêtres et que les enfants sahraouis sont éduqués au même titre que les enfants marocains.  Il a également salué les efforts déployés par le Maroc pour le développement de ces provinces.  Par conséquent, il a dit soutenir la proposition marocaine d’autonomie élargie de ces provinces.

M. LEONARD ANDJEMBE a parlé de l’africanité du Maroc, qui découle de l’histoire et de la culture et s’affirme de nos jours par la contribution de plus en plus remarquée de ce pays au développement du continent.  Il a constaté l’échec de toutes les tentatives des Nations Unies pour régler le différend du Sahara occidental et soutenu une solution politique de compromis.  L’initiative marocaine de large autonomie est, selon lui, cette alternative.

Mme MARIA DOLORES TRAVIESO DARIAS, Présidente de l’Association Canaria de Juristas por la paz y el derechos humanos, a été observateur juridique pour le Sahara occidental et témoin direct de torture et de détentions arbitraires, ainsi que de condamnations à vie de certains Sahraouis de la part de tribunaux militaires marocains.  Elle a également dénoncé l’expulsion de membres de la MINURSO et l’attitude de défiance du Maroc.  Pour elle, le seul arbitre de ce conflit est l’Espagne.  La pétitionnaire a également demandé l’élargissement du mandat de la MINURSO.

Mme MARIA NIEVES CUBAS ARMAS a insisté sur le cadre juridique du différend du Sahara occidental et rappelé que l’Espagne est de jure la Puissance administrante de ce territoire, ce qui a été confirmé par l’Avocat général de la Cour européenne.  Elle a reproché au Maroc de ne pas respecter le droit international et d’occuper illégalement, depuis 41 ans, le Sahara occidental.  Elle a demandé que la légalité soit respectée et le processus de décolonisation achevé.

Mme RUTH SEBASTIAN GARCIA, pétitionnaire, a indiqué que la Cour suprême de l’Espagne a stipulé que si le Sahara occidental ne voulait pas être considéré comme un territoire marocain, aucune juridiction marocaine ne peut être reconnue compétente pour juger des militants sahraouis. 
M. DIEGO MOREIRA, Association pour la paix au Sahara occidental, a dénoncé les violations commises par la Maroc contre les Sahraouis qui souhaitent la mise en œuvre de la Déclaration universelle des droits de l'homme.  Il a estimé que les exactions commises par le Maroc au Sahara Occidental sont une insulte aux Nations Unies. 

M. YARA MAALAININE, Directeur de IT, a déclaré que les droits de l'homme sont violés partout au Maroc.  Il a affirmé que le Maroc consacre des moyens importants pour diffuser des images trompeuses sur ses prétendus investissements au Sahara occidental.  

Mme MINA LAGHZAL, pétitionnaire, a dit que l’on ne pouvait pas prétendre développer un territoire en épuisant ses ressources. 

M. YANJA EL KHATTAT, Président de la région Dakhla-Ouesd Eddadhab, a estimé qu’assurer le respect de la souveraineté du Maroc au Sahara occidental est le seul moyen de résoudre ce conflit.  Il a estimé que le Sahara occidental était attaché à son maintien au sein du Maroc.  

M. AHMED BOUKHARI, représentant du Front Polisario, n’a pas voulu répondre « aux accusations gratuites » portées contre le Front.  Regrettant que le débat sur le Sahara occidental dure depuis 30 ans, il a tenu à préciser de nouveau qu’il s’agit bien d’un problème de décolonisation et que la présence du Maroc au Sahara occidental est illégale.  Il a également tenu à souligner que le Front doit participer à toute dynamique de paix en tant que représentant du peuple du Sahara occidental.  Après 16 années de guerre terrible, le Maroc n’a pas fait ce qu’il devait faire par rapport à la feuille de route des Nations Unies et a annexé les provinces du Sahara « parce qu’il n’était pas sûr de gagner le référendum, selon M. Baker », a affirmé M. Boukhari, avant de rappeler que le Maroc avait renvoyé la composante civile de la MINURSO.

La représentante de l’Équateur a demandé « au seul représentant du peuple sahraoui » plus d’information sur l’état du processus de référendum au Sahara occidental, des données sur les œuvres publiques réalisées par le Maroc dans la zone d’El Gharrat.

Le représentant du Venezuela a demandé quelle était la situation politique actuelle dans le Sahara occidental pour ce qui est de l’application du mandat de la résolution 69 du Conseil de sécurité pour l’organisation d’un référendum, compte tenu de l’expulsion de la composante civile de la MINURSO.  Il a proposé qu’une mission de visite du C24 se rende sur place pour se faire une idée plus claire de la situation au Sahara occidental.

Le représentant de l’Afrique du Sud a rappelé que le Maroc souhaitait revenir dans l’Union africaine et a demandé à M. Boukhari s’il pensait que le Maroc respecterait toutes les dispositions de l’Acte constitutif de l’Union africaine.

Le représentant de l’Algérie a souhaité des informations sur certaines allégations.  Rappelant que le HCR, le PAM, certaines ONG sont présents dans les camps et qu’il y eu des visites sur place du Haut-Commissaire aux droits de l’homme et du Secrétaire général des Nations Unies, il s’est demandé pourquoi certaines personnes accusaient toujours les camps d’être des prisons.  Rappelant que le Sahara occidental est un territoire inscrit sur la liste des territoires non autonomes, il a demandé à M. Boukhari ce qu’il en était de ce territoire et des allégations indiquant qu’il fait partie du territoire de la Puissance occupante.

La représentante de la Namibie a dit vouloir connaître, suite aux allégations faites ici les deux derniers jours, la situation des droits de l’homme au Sahara occidental et dans les camps.  Compte tenu du fait que de nombreux pétitionnaires ont appuyé le plan d’autonomie élargie proposé par le Maroc, elle a souhaité savoir si cette solution serait acceptable pour le peuple du Sahara occidental.

Le représentant du Maroc a souligné « que l’on a assisté à ce cinéma l’année dernière » et que la règle est d’accorder trois minutes pour les réponses, pas cinq ».

Le Président a déclaré que M. Boukhari avait cinq minutes pour répondre à 10 questions.

Répondant aux questions de plusieurs délégations, le représentant du Front Polisario a estimé que le Maroc ne souhaitait pas l’organisation d’un référendum parce qu’il sait qu’il ne peut pas le gagner. Il a exhorté l’ONU à venir constater la situation sur place.  Il a affirmé que le Front Polisario était le représentant légitime du peuple du Sahara occidental.  Répondant à une demande de précisions de la représentante de l’Équateur, le représentant du Front Polisario a indiqué que ºM. Christopher Rossº attendait toujours l’accord du Gouvernement marocain pour pouvoir lancer le processus de la cinquième série de négociations.

Débat général

Mme ANA RODRIGUEZ ABASCAL (Cuba) a appuyé le droit légitime de l’Argentine sur les îles Malvinas. Cent seize ans après l’intervention américaine à Porto Rico, elle a exhorté les États-Unis à mettre en place un processus qui permettra au peuple portoricain d’exercer son droit à l’autodétermination.  Elle a jugé urgent que le colonialisme disparaisse de la région de l’Amérique latine et des Caraïbes.

M. ALI RASSOL (Iraq) a réaffirmé l’importance de mettre fin à l’occupation partout dans le monde en mettant tout particulièrement l’accent sur la situation du territoire palestinien occupé depuis 50 ans.   

M. PHILLIP TAULA (Nouvelle-Zélande) a déclaré que son pays s’adaptera au rythme de décolonisation souhaité par les Tokélaou. Il a évoqué la fragilité de cette île en raison de son isolement géographique et sa faible démographie de º1 400º habitants.  Il a affirmé la volonté du Gouvernement de la Nouvelle-Zélande d’assurer que tous les habitants des Tokélaou ont accès à des services de base de qualité.  Il a précisé que son gouvernement a offert un ferry aux Tokelaou en février 2016 pour permettre à leurs habitants de se déplacer dans les meilleures conditions.

M. DOAN MINH NGUYEN (Viet Nam) a souligné l’importance de la résolution 1514 de l'assemblée générale.  Il a regretté que la liste des territoires à décoloniser compte encore 17 territoires concernant deux millions de personnes.   Il a exhorté tous les États Membres de renforcer leur coopération afin d’accélérer le processus de décolonisation et garantir ainsi le respect universel des droits de l'homme et des libertés fondamentales.         

Mme MAURA MWINGIRA (République-Unie de Tanzanie) a reconnu la particularité de chacun des 17 territoires non autonomes toujours inscrits sur la liste de la Quatrième Commission et a lancé un appel aux puissances administrantes pour qu’elles prennent les mesures qui s’imposent pour donner pleinement suite aux résolutions pertinentes (notamment les résolutions 1514 et 65/119), permettant l’autodétermination des peuples de ces territoires.

Pour ce qui est de la question du Sahara occidental, elle a fait part de sa préoccupation face à l’absence de progrès sur ce dossier et exhorté les parties à s’engager sans plus tarder dans des négociations sérieuses sous les auspices des Nations Unies et de l’Union africaine, sans conditions préalables et de bonne foi pour parvenir à une solution mutuellement acceptable.

M. FEH MOUSSA GONE (Côte d’Ivoire) a invité les parties au conflit du Sahara occidental à poursuivre leurs efforts pour parvenir à une solution juste et durable.  L’option du processus politique qui apparait, selon lui, comme la seule voie dans ce sens, doit tenir compte des intérêts des peuples de la région.  Il a souligné que le statu quo n’est ni acceptable ni profitable pour aucune des parties.  Par conséquent, sa délégation les appelle à faire preuve de compromis, et réitère son soutien ferme au plan marocain visant à accorder une large autonomie aux provinces sahariennes.  Le représentant se félicite de la demande d’adhésion du Maroc à l’Union africaine.  Il est convaincu qu’une solution politique au différend du Sahara occidental  contribuerait à la stabilité de la région du Maghreb.

M. MICHAEL R. TEN-POW (République du Guyana) a rappelé que 80 anciennes colonies, y compris le Guyana, avaient obtenu l’indépendance en vertu du droit à l’autodétermination.  Toutefois, il a indiqué que deux millions de personnes, réparties dans divers territoires, n’étaient toujours pas en mesure d’exercer ce droit.  Il a par conséquent appelé toutes les parties prenantes à redoubler d’efforts pour faire avancer le processus de décolonisation des 17 territoires non autonomes restants, y compris le Sahara occidental.  M. Ten-Pow a en effet indiqué que son pays soutenait le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination et à l’indépendance et insisté sur l’importance du respect mutuel entre les parties pour trouver une solution définitive à cette question.  Le délégué du Guyana a par ailleurs appelé les États Membres ayant toujours une présence coloniale en Amérique latine et dans les Caraïbes à prendre des mesures décisives pour y mettre fin. 

Droit de réponse

Le représentant du Maroc a réagi aux propos du Venezuela sur le Sahara occidental et lui a reproché d’avoir fait une confusion entre les notions d’autodétermination et d’indépendance, en rappelant les quatre solutions retenues par l’Assemblée générale pour l’autodétermination, dont l’indépendance.  Il lui a également reproché de vouloir se faire l’écho de l’Union africaine, et a regretté qu’il n’ait pas repris l’appel de 28 chefs d’État qui ont retiré leur confiance à la République sahraouie (RASD) cette année.  Il a également souligné que les seuls représentants du peuple sahraoui sont ceux qui ont été démocratiquement élus lors des élections législatives au Maroc et pas ceux qui se sont autoproclamés.  S’agissant de l’opération d’assainissement de la zone de Ghir Girat, il a expliqué qu’elle avait permis de nettoyer la zone de trafiquants de drogues et autres et à la MINURSO de reprendre ses patrouilles.  Le Maroc a récupéré le Sahara qui était sous occupation espagnole, alors que le Venezuela veut occuper la moitié de son voisin en invoquant l’intégrité territoriale, a-t-il fait remarquer, ajoutant que le Venezuela, qui est une dictature, n’a aucune légitimité pour venir accuser le Maroc où les Sahraouis vivent dans la démocratie.

Motions d’ordre

Le Venezuela a fait une motion d’ordre pour dire qu’il ne s’agit pas ici de régler des différends bilatéraux.  Il a estimé que ce que le Maroc a affirmé est faux et a demandé au Président de ne pas permettre que l’on offense son pays et que les débats se limitent aux questions relatives à la décolonisation.

Reprenant la parole, le représentant du Maroc a dit avoir fait l’objet d’accusation au cours des derniers jours sans jamais interrompre quiconque.  Il a demandé à son homologue d’être patient avec lui comme il l’a été avec le représentant vénézuélien au cours des derniers mois.  Il a souligné que la qualité de vie des sahraouis au Sahara occidental est mille fois meilleure que celle des habitants du Venezuela et il en veut pour preuve les articles dans la presse internationale.

Droits de réponse

Réagissant à la déclaration de Cuba, le représentant du Royaume-Uni a dit que son pays ne doutait pas de sa souveraineté sur les Îles Falkland, la Géorgie du Sud et les Îles Sandwich du Sud et les espaces maritimes adjacents. 

Le représentant de l’Argentine a réaffirmé la souveraineté de son pays sur les Îles Malvinas, la Géorgie du Sud-et-les Îles Sandwich du Sud et les espaces maritimes adjacents.

Réagissant à la déclaration du Maroc, le représentant du Venezuela a dénoncé « la stratégie de provocation de l’Ambassadeur du Maroc pour détourner l’attention sur le point à l’ordre du jour ».  Il a DIT espérer que le peuple sahraoui ne devra pas recourir à la lutte armée pour retrouver sa liberté.  Il a estimé que le Maroc n’est pas membre de l’Union africaine parce qu’il ne respecte pas des principes fondamentaux en matière d’autodétermination. 

Le représentant du Maroc a dit que la dictature était aussi une forme de colonialisme, avant de citer des noms d’opposants vénézuéliens emprisonnés par le Gouvernement.

Invoquant une motion d’ordre, le représentant du Venezuela a regretté « la désinformation du Maroc ».  Il a appelé le Maroc à cesser de s’attaquer au Venezuela avec des informations erronées.  Il a estimé que son pays avait été provoqué et que la question des prisonniers au Venezuela n’avait rien à voir avec le thème de la décolonisation.

Le président a demandé au représentant du Maroc d’en rester au point à l’ordre du jour, concernant la décolonisation et de ne pas se référer aux affaires du Venezuela.     

Reprenant la parole, le représentant du Maroc a rappelé au Venezuela que la dictature était aussi une forme de colonisation.

Le représentant du Venezuela a dit qu’il fallait respecter les résolutions des Nations Unies en rappelant que ces dernières appelaient à décoloniser 17 territoires dont le Sahara occidental.   

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