Conférence internationale sur le financement du développement
1ère et 2ème séances - matin & après-midi
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Les dirigeants du monde se retrouvent à Addis-Abeba, “dans un pays dynamique et un continent émergent” pour mobiliser les fonds nécessaires au programme de développement pour l’après-2015

Après Monterrey en 2002 et Doha en 2008, les chefs d’État et de gouvernement se retrouvent à Addis-Abeba pour, une troisième fois, affiner les moyens de mobiliser les ressources pour financer prioritairement la lutte contre l’extrême pauvreté.  La troisième Conférence internationale sur le financement du développement, qui se tient jusqu’au 16 juillet, a ouvert ses portes aujourd’hui dans la capitale économique de l’Ethiopie, “un pays dynamique niché dans un continent émergent”, selon les mots du Directeur-général adjoint du Fonds monétaire international (FMI).  Les enjeux sont de taille.  “Le cadre global de financement”, qui sortira d’Addis-Abeba, a pour vocation de financer les 17 objectifs du programme de développement durable pour 2015-2030 et ses 164 cibles, qui seront adoptés à New York en septembre prochain, pour prendre le relais des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).

2015 est l’année de l’action, a commenté le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, en prévenant que sans les ressources, les engagements ne seraient rien de plus que des promesses sur papier.  La Conférence d’Addis-Abeba est le point de départ d’une nouvelle ère de coopération et de partenariat mondial.  C’est une “occasion historique” de faire des investissements écologiquement, socialement et économiquement viables dans l’avenir, a souligné le Secrétaire général. 

Qu’attend-on d’Addis-Abeba?  Globalement, a répondu le Président de la 69ème session de l’Assemblée générale, M. Sam Kutesa, nous devrions partir  d’ici avec un cadre “holistique, ambitieux et concret” en faveur du développement durable.  « Nous devons être la génération qui vaincra la pauvreté », a renchéri le Président de la Banque mondiale, M. Jim Yong Kim, en parlant des milliards de  dollars que le monde devra engager, dans un contexte tout à fait différent, un contexte où, a précisé le Directeur général de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) M. Roberto Azevedo, les pays en développement connaissent une croissance qui a permis des résultats remarquables dans la réalisation des OMD. 

Un contexte où, a ajouté le Directeur général adjoint du Fonds monétaire international (FMI), M. Zhu Min, l’Ethiopie est devenue “ un pays dynamique » et l’Afrique, « un continent émergent.”  Le continent africain revient de loin et des changements majeurs sont en cours, s’est enorgueillie la Présidente de la Commission de l’Union africaine, Mme Nkosazana Dlamini Zuma, en mentionnant l’Agenda 2063.  « Nous voulons mener l’Afrique à la prospérité », a-t-elle déclaré, promettant que l’Afrique utiliserait à bon escient les ressources qui lui seront allouées ici à Addis-Abeba.  « En définitive, notre vocation, c’est de prendre en charge le destin de nos pays », a affirmé le Président du Sénégal, M. Macky Sall.  L’Afrique s’est levée et son heure a sonné, a dit en écho son homologue de la Namibie, M. Hage Geingob.  Si l’Afrique ne recouvrait que 17% de ses ressources placées frauduleusement à l’étranger, elle pourrait rembourser sa dette et financer, sur fonds propres, ses besoins de développement.

Le financement du développement ne doit pas être perçu par le prisme réducteur de l’aide ou comme un cadeau des riches aux pauvres.  Non, a dit la Présidente du Libéria, Mme Ellen Johnson Sirleaf, c’est un mécanisme qui rassemble des ressources qui profiteront à tous.  C’est un accord universel qui vient du nord vers le sud, du monde développé vers le monde en développement car nous parlons de notre humanité à tous. 

“Le cadre global de financement du développement pour l’après-2015” est toujours en négociations.  Le Président de la “Grande Commission”, M. Tedros Adhanom Ghebreyesu, s’est dit confiant et certain de pouvoir compter sur la coopération de toutes les délégations”.  Surmontons nos intérêts égoïstes et travaillons ensemble au bien-être commun de l’humanité, a encouragé le Secrétaire général de l’ONU. “Parvenons à un résultat transformateur” ici à Addis-Abeba car le succès est crucial pour garantir un agenda du développement pour l’après-2015 “ambitieux” et un accord sur le changement climatique “global”.  « Nous ne pouvons travailler comme d’habitude si nous voulons atteindre nos objectifs », a dit, à son tour, le Premier Ministre de l’Éthiopie et Président élu de la Conférence, M. Hailemaryam Desalegn.

« Le cadre » vise à assurer la protection sociale et la prestation des services publics essentiels pour tous, à intensifier la lutte contre la faim, à mettre en place une nouvelle instance pour combler les lacunes en matière d’infrastructures, à promouvoir une industrialisation inclusive et durable, à assurer le plein emploi et à promouvoir les microentreprises et les PME, à protéger les écosystèmes et à promouvoir des sociétés pacifiques et ouvertes à tous. 

Pour ce faire, le cadre énumère les moyens de mobiliser et d’augmenter les ressources publiques intérieures, celles du secteur privé et le financement international.  « Le cadre » n’oublie pas la nécessité de faire du commerce international un vrai moteur du développement, de résoudre la question de la dette et de traiter des problèmes systémiques de la gouvernance économique mondiale.  « Le cadre » parle aussi de l’accès à la science, à la technologie et à l’innovation, du renforcement des capacités et de l’amélioration des données, du contrôle et du suivi.

La troisième Conférence internationale sur le financement du développement tient, outre ses réunions plénières, des tables rondes et des dizaines de manifestations parallèles sur les différents thèmes du « cadre global de financement ».  Elle a composé son Bureau aujourd’hui et nommé les membres de la Commission de vérification des pouvoirs.  Les précisions peuvent être obtenues auprès du Secrétariat de la Conférence. 

La Plénière poursuivra ses travaux demain, mardi 14 juillet, à partir de 10 heures. 

Déclarations liminaires

M. HAILEMARYAM DESALEGN, Premier Ministre de l’Éthiopie et Président élu de la Conférence, a déclaré que « nous ne pouvons travailler comme à l’accoutumée si nous voulons atteindre les Objectifs du développement durable ».  Le Président de la Conférence a ensuite mentionné les défis à relever lors de cette Conférence, notamment le financement des infrastructures, l’amélioration de la coopération fiscale ou bien encore le renforcement de la coopération Sud-Sud.  Il a également espéré que les pays développés réaffirmeront leurs engagements en matière d’aide publique au développement (APD). « Aujourd’hui, les pays les moins avancés (PMA) ont la ferme intention de financer leurs propres efforts de développement et d’avancer », a-t-il dit.

L’Afrique a déployé des efforts considérables pour relever les défis auxquels elle est confrontée, a-t-il poursuivi, avant de souhaiter que cette Conférence prenne dûment en compte les spécificités de l’Afrique.  Le Président a enfin indiqué que le futur programme de développement pour l’après-2015 devait avoir le pouvoir d’éradiquer la pauvreté, ajoutant qu’une action appropriée à Addis-Abeba était la condition clef du succès dudit programme.  Nous allons relever ces défis, a-t-il affirmé en concluant son intervention.

2015 est l’année de l’action mondiale, a déclaré le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies (ONU), M. BAN KI-MOON.  Le Secrétaire général a évoqué la tenue de la Conférence de Sendai sur la réduction des risques de catastrophes au mois de mars dernier, le Sommet de New York, destiné à adopter le programme de développement pour l’après-2015, en septembre prochain et la Conférence de Paris sur le climat, au mois de décembre.  Mais, a-t-il prévenu, sans les ressources, les engagements pris à l’issue de toutes ces rencontres ne seraient rien de plus que des promesses sur papier.  Cette Conférence sur le financement du développement, a estimé le Secrétaire général, est le point de départ d’une nouvelle ère de coopération et de partenariat mondial.  Cette Conférence, a-t-il ajouté, va adopter un cadre de financement du développement qui inclut des engagements concrets dans des domaines cruciaux.  Ce cadre doit comprend un pacte social pour que personne ne soit abandonné sur le bord de la route.  Il appelle à la protection sociale et aux services essentiels pour tous.  Il appelle aussi à des investissements publics accrus dans l’agriculture durable et à des investissements dans les infrastructures.  C’est une occasion historique de faire des investissements écologiquement, socialement et économiquement viables, a souligné le Secrétaire général. 

Le cadre du financement du développement, a poursuivi le Secrétaire général, comprend aussi un train de mesures pour soutenir les pays les moins avancés.  Il innove dans la facilitation du développement, le transfert et la diffusion des technologies nécessaires au développement durable.  Il appelle à une plus grande coopération en matière fiscale.  Il intègre l’égalité entre les sexes dans l’agenda du financement du développement et il dit très clairement que toutes les actions doivent s’appuyer sur un engagement fort à protéger et à préserver notre planète, nos ressources naturelles, notre biodiversité et notre climat. 

Le vrai test sera la mise en oeuvre, a prévenu le Secrétaire général.  Un processus de suivi plus fort devrait contribuer à traduire les engagements en actes, a-t-il dit.  M. Ban a donc regretté que les États ne soient pas encore parvenus à un accord sur le cadre global du financement du développement.  Il les a donc exhortés à conclure leurs négociations et à parvenir à un accord qui soit à la hauteur de l’ambition des objectifs du développement durable.  Il faut faire preuve de souplesse et de sens du compromis.  Mettons de côté nos divergences et surmontons nos intérêts égoïstes pour travailler ensemble au bien-être commun de l’humanité, a encouragé le Secrétaire général. 

Partons de la vision commune que nous avons d’un monde viable débarrassé de la pauvreté, a déclaré M, Ban Ki-moon.  “Parvenons à un résultat transformateur” ici à Addis-Abeba.  Le succès est crucial pour garantir un agenda du développement pour l’après-2015 “ambitieux” et un accord sur le changement climatique “global”.  Envoyons un signal clair sur notre sérieux face aux enjeux du développement durable et d’une vie digne pour tous, a conclu le Secrétaire général. 

M. SAM KUTESA, Président de la 69ème session de l’Assemblée générale, a estimé que le 70ème anniversaire de l’ONU, cette année, est une occasion historique de changer notre monde.  Addis-Abeba est une étape fondamentale de notre quête commune pour éradiquer la pauvreté et sauver notre planète.  Nous avons, a rappelé le Président, progressé avec les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), en extrayant près d’un milliard d’individus de l’extrême pauvreté.  Mais, a-t-il reconnu, la dure réalité est toujours celle d’un monde où près d’un milliard d’autres individus continueront de vivre “dans une misère noire” au-delà de 2015.  Le Président s’est attardé sur les défis liés au chômage des jeunes, à l’impact du changement climatique, au terrorisme et à l’extrémisme violent.  En septembre prochain, a-t-il poursuivi, les États Membres devraient adopter des objectifs de développement durable qui ont été élaborés dans un processus participatif “inégalé” jusqu’ici.  Ces objectifs peuvent constituer un changement s’ils sont mis en oeuvre avec efficacité.  C’est la raison pour laquelle, il ne faut épargner aucun effort pour assurer le succès de la Conférence d’Addis-Abeba, a souligné M. Kutesa. 

L’objectif est de mobiliser davantage de ressources à partir de toutes les sources possibles.  Il est aussi important de renouveler et d’améliorer les partenariats pour appuyer les efforts des pays en développement.  Le coût des investissements nécessaires dans le domaine des infrastructures est estimé à 25 milliards de dollars par an pour les seuls pays africains, a prévenu le Président.  Que serait donc un succès à Addis-Abeba?  Globalement, a répondu le Président, nous devrions partir d’ici avec un cadre “holistique, ambitieux et concret” en faveur du développement durable.  Il faut adopter des mesures qui se traduiront par une grande mobilisation des ressources et qui permettraient d’assurer l’efficacité de la mise en oeuvre du programme de développement pour l’après-2015.  Addis doit générer plus de mobilisation de ressources nationales, réaffirmer les engagements pris dans le domaine de l’aide publique au développement (APD), faciliter l’accès aux prêts concessionnels, mobiliser le secteur privé, trouver des solutions aux problèmes de la dette extérieure et du commerce international, et définir un cadre participatif pour l’évaluation de ce qui se fait aux niveaux national, régional et international, a conclu le Président de l’Assemblée.

M. JIM YONG KIM, Président de la Banque mondiale, s’est dit persuadé qu’il était possible de vaincre la pauvreté.  Plus d’un milliard de personnes sont d’ores et déjà sorties de la pauvreté extrême, a-t-il dit.  Il a ensuite insisté sur l’ambition du programme de développement pour l’après-2015 et sur l’appui que fournira la Banque mondiale.  Il a affirmé que la Banque mondiale avait fourni un appui de 400 milliards de dollars pour la concrétisation des OMD.  Il a souligné la nécessité de diminuer les taux de mortalité infantile, avant d’insister sur les défis posés par le changement climatique et les pandémies.  « L’épidémie d’Ébola nous a montré que nous n’étions pas prêts », a-t-il dit.  Il a souhaité qu’un appui robuste soit apporté à l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), afin qu’elle devienne une organisation forte et prête à faire face aux défis sanitaires. « Les milliards de dollars nécessaires doivent être disponibles en quelques semaines, et non pas en quelques mois, comme cela a été le cas pour l’épidémie d’Ébola », a-t-il affirmé.  Le Président a insisté sur les milliards de dollars que le monde devra engager pour financer le développement. « Nous devons être la génération qui vaincra la pauvreté », a-t-il conclu.

M. ROBERTO AZEVEDO, Directeur général de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), a rappelé que le commerce était un moteur important du développement, en particulier lorsqu’il est associé aux efforts de financement appropriés et au renforcement des capacités.  Saluant l’accomplissement historique que constitue la diminution de moitié de la pauvreté – qui était l’un des OMD -, et ce dès 2010, il a indiqué que deux tiers environ de la réduction de cette pauvreté provenaient de la croissance économique qui a eu lieu dans les pays en développement, dont l’un des moteurs est le commerce.  La part des pays en développement dans le commerce mondial a bondi de 28 à 42% au cours des deux dernières décennies, a-t-il poursuivi.

Il a ensuite mentionné les efforts déployés par l’OMC visant à appuyer le financement du développement, citant à cet égard l’initiative « Aide pour le commerce », déployée au bénéfice des pays en développement, et l’adoption en 2013 du « Train de mesures de Bali ».  Ces mesures devraient, en rationalisant les procédures douanières, diminuer drastiquement le coût des échanges commerciaux et créer des emplois, a-t-il dit, estimant à 18 millions le nombre d’emplois qui pourraient être créés.

« Nous devons naturellement faire plus, beaucoup plus », a convenu M. Azevedo, ajoutant qu’une approche plus large et plus systémique était nécessaire.  Soulignant que le financement du commerce était un élément clef, il a rappelé que les pays en développement continuaient de pâtir des conséquences de la crise de 2008 et que les capacités de prêts n’avaient pas retrouvé leur niveau d’avant la crise.  Il a estimé à entre 110 et 120 milliards de dollars la demande non satisfaite du financement du commerce en Afrique, ajoutant qu’en y remédiant le potentiel de dizaines de milliers d’individus et de petites entreprises serait libéré.  Le Directeur général a indiqué que l’OMC, qui travaille avec les banques de développement régionales pour appuyer les programmes de facilitation du financement du commerce, allait bientôt lancer une nouvelle initiative.

« Mais nous devons changer et améliorer le système dans son ensemble », a-t-il poursuivi, avant de rappeler que la Conférence ministérielle de l’OMC se tiendra en décembre à Nairobi.  C’est la première fois qu’une telle conférence se tiendra en Afrique, a-t-il dit. Affirmant que cette Conférence sera axée sur l’amélioration du sort de l’Afrique et des pays en développement, il a indiqué que les États Membres étaient en train de négocier de nouvelles règles sur l’agriculture, les biens industriels et les services. « Un nouvel accord international sur ces questions, aux côtés des mesures de soutien aux pays les moins avancés, serait une percée majeure pour que le commerce appuie le développement », a-t-il conclu.

M. ZHU MIN, Directeur général adjoint du Fonds monétaire international (FMI), a salué une Conférence qui se tient “dans un pays dynamique et un continent émergent.”  Le FMI est prêt à financer le développement, a-t-il assuré, en saluant les changements survenus dans les pays en développement qui vivent aujourd’hui “intégration et croissance”.  Le produit intérieur brut (PIB) des pays les plus fragiles a augmenté de 70% mais ces pays sont tout de même restés à la traîne s’agissant de la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), a regretté le Directeur général adjoint du FMI.  “L’unité fait la force, la dispersion, la faiblesse”, a souligné le Directeur-adjoint en citant un proverbe africain.  Il a donc voulu que l’on reste guidé par trois principes clefs: “le partenariat, l’engagement et la souplesse”.  Le FMI, a-t-il annoncé, s’engage à augmenter les crédits aux pays en développement de trois manières: engager 15% de ses excédents, financer les pays les plus vulnérables et maintenir un taux d’intérêt zéro pour les crédits aux pays qui ont subi une catastrophe naturelle. 

Nous avons, a dit le Directeur général adjoint, des défis énormes à relever, comme l’explosion démographique et la détérioration de l’environnement.  Nous devons être prêts à nous adapter aux autres défis qui ne manqueront pas de naître.  Le FMI, a-t-il affirmé, pense déjà à l’avenir et à son rôle face aux défis de l’autonomisation de la femme, du changement climatique ou encore de la pauvreté extrême.  Le FMI veut avancer en faisant preuve de plus de souplesse.  Ce n’est qu’en travaillant en partenariat que nous pourrons saisir “la chance unique” d’Addis-Abeba et aller de l’avant, a estimé le Directeur général adjoint.

Mme NKOSAZANA DLAMINI ZUMA, Présidente de la Commission de l’Union africaine, a cité M. Nelson Mandela, qui avait affirmé que « la pauvreté comme l’apartheid n’était pas naturelle et que la pauvreté pouvait donc être éradiquée comme l’apartheid ».  Le continent africain revient de loin, et des changements majeurs sont en cours, a-t-elle poursuivi, avant de mentionner l’Agenda 2063 adopté par l’Union africaine.  Elle a précisé que cet Agenda avait fait de sa priorité les investissements dans la jeunesse africaine.

« Si les capitaux ne sont pas toujours disponibles, l’ingéniosité humaine est, elle, une ressource infinie », a-t-elle affirmé, estimant que l’Afrique avait besoin « d’une révolution des connaissances ».  La Présidente de la Commission a affirmé que la mobilisation de ressources adéquates était une condition essentielle du succès du futur programme de développement, avant de déclarer que les pays africains avaient amélioré leurs capacités de collecte fiscale et leur environnement économique pour attirer les investissements directs étrangers.

« Il faut éliminer la pauvreté, et pas seulement la pauvreté extrême », a-t-elle dit, ajoutant que l’histoire jugera durement les participants à cette Conférence s’ils ne se montraient pas à la hauteur des défis.  Elle a également affirmé que les pays les moins avancés, dont une majorité sont en Afrique, avait besoin d’un appui international.  « Nous voulons mener l’Afrique à la prospérité », a-t-elle déclaré, promettant que l’Afrique utiliserait à bon escient les ressources qui lui seront allouées.

Déclarations

M. TEDROS ADHANOM GHEBREYESUS, Président de la Grande Commission, s’est dit confiant quant au succès de la Conférence sur le financement du développement, “certain de pouvoir compter sur la coopération de toutes les délégations”.  Nous devons nous entendre pour éradiquer ensemble la pauvreté et changer la vie de centaines de millions d’êtres humains.  Envoyons le juste message de façon à faire la différence, a-t-il dit aux délégations.

M. BONI YAYI, Président du Bénin, a, en sa qualité de Président de la coordination des PMA, dit toute l’importance qu’il attache à cette Conférence.  Il a fait part des réformes internes en cours dans les PMA pour la transformation structurelle de leurs économies et la diversification de leurs sources de financement interne.  Dans ce contexte, l’APD doit jouer un rôle catalytique aux côtés du secteur privé, qui est le premier vecteur des ressources internes, a préconisé M. Yayi.  Le Président a insisté sur l’importance des questions qui seront abordées à la Conférence de Paris sur le changement climatique.  Les PMA, a-t-il dit, insistent sur la question de l’adaptation et donc du transfert des technologies.  Les PMA entendent prendre une part active à la Conférence de Paris, a-t-il prévenu.

« Malgré quelques progrès accomplis, le constat est déjà fait que nos résultats sont bien en deçà des engagements convenus », a affirmé M. MACKY SALL, Président du Sénégal.  Il a déploré que le volume de la dette reste élevé et que les subventions continuent d’entraver le commerce.  L’APD a montré ses limites, a-t-il ajouté, estimant que son efficacité même était altérée par la disparité des modalités et mécanismes d’intervention.  Il a indiqué que cette aide comptait pour 10% du PIB du Sénégal et faisait intervenir plus de 460 partenaires bilatéraux, multilatéraux et non gouvernementaux, chacun avec ses propres règles et procédures, « ce qui conduit à la dispersion des moyens, aux chevauchements et à des retards considérables dans la conception et la réalisation des projets ».  Il a rappelé les principes de la Déclaration de Paris sur l’efficacité de l’aide et a jugé nécessaire de mettre fin « au paradoxe des ressources disponibles mais non accessibles ».

Le Président du Sénégal a ensuite affirmé que les progrès les plus significatifs dans la mobilisation des ressources pour le développement résultaient plutôt des efforts locaux, y compris les transferts de la diaspora.  M. Sall a indiqué que l’Afrique était à la croisée des chemins.  « Notre continent a trop longtemps subi le poids de l’histoire pour se satisfaire d’un rôle de continent du futur », a-t-il ensuite relevé, ajoutant que le futur se conjuguait au présent.

Rappelant que les investissements massifs dans les infrastructures étaient la condition essentielle du développement, il a indiqué qu’au titre du Nouveau partenariat pour l’Afrique (NEPAD), les pays africains devaient mobiliser 360 milliards de dollars d’ici 2040.  Il a également souhaité qu’une lutte plus ferme soit menée contre les flux financiers illicites, rappelant que la corruption, la fraude et l’évasion fiscale et autres pratiques illégales faisaient perdre à l’Afrique des ressources estimées à entre 30 et 60 milliards de dollars par an.  « C’est plus que le montant de l’APD », a noté M. Sall.

Il a mentionné l’initiative CONNEX qui vise à renforcer l’aide aux pays en développement pour les négociations de contrats complexes, en particulier dans l’industrie extractive.  M. Sall a appelé de ses vœux une réforme de la gouvernance économique et financière mondiale en vue d’une représentation plus équitable de la diversité internationale et de l’assouplissement des règles d’accès au crédit.  « En définitive, notre vocation, c’est de prendre en charge le destin de nos pays », a-t-il affirmé, rappelant que si l’Afrique recevait la juste rémunération de ses ressources et recouvrait seulement 17% de ses ressources placées frauduleusement à l’étranger, elle pourrait rembourser sa dette et financer, sur ses propres ressources, ses besoins de développement.  En conclusion, le Président du Sénégal a souhaité que la Conférence mette en place un mécanisme de suivi des engagements.

M. DAVID ARTHUR GRANGER, Président du Guyana, a estimé que la communauté internationale se réunit à un moment crucial, marqué par des perspectives de croissance à la baisse et des crises humanitaires difficiles et autres dans plusieurs pays.  Mais, s’est-il réjoui, nous sommes en train de décider d’un programme ambitieux pour le développement durable.  Ici à Addis-Abeba, a-t-il poursuivi, il s’agit de renforcer notre confiance dans le multilatéralisme et de décider de l’avenir que nous voulons pour nos populations et les générations futures.  Nous devons renouveler la solidarité mondiale et notre volonté de résoudre les problèmes mondiaux de manière efficace, a dit M. Granger.  Les gouvernements doivent faire preuve de leadership et les autres parties prenantes doivent aussi comprendre que leurs efforts sont essentiels.  Le développement doit pouvoir compter sur la contribution de tous les segments de la société.  Il faut autonomiser les gens, en particulier les femmes et les jeunes.  Le progrès est toujours possible quand la communauté internationale travaille ensemble, a souligné le Président, en pointant le doigt sur les pays développés.  Il faut des investissements pour changer irréversiblement le paradigme et le mettre au service du développement durable.  Il faut terminer le travail des OMD dans les domaines de l’éducation, de la santé, de l’eau, de l’assainissement et de la sécurité alimentaire. 

Le Président guyanais a salué le projet de document final d’Addis-Abeba.  Il s’est dit heureux que ce dernier traite des problèmes qui concernent toutes les catégories de pays.  Les défis des pays à revenu intermédiaire méritent en effet l’attention de la communauté internationale.  Pour ces pays, la question de la dette est préoccupante, tout comme celle liée aux termes de l’échange.  La Conférence d’Addis-Abeba est une phase importante de notre entreprise commune d’assurer un avenir plus brillant et plus viable à l’humanité, a conclu le Président.

M. UHURU KENYATTA, Président du Kenya, a affirmé que la mise en œuvre du programme de développement durable demandera des ressources financières et non financières considérables.  Il a demandé que les pays développés honorent leurs engagements en matière d’APD et fournissent à cet égard un échéancier clair. Rappelant l’importance de la mobilisation des ressources domestiques, il a appelé de ses vœux le renforcement des systèmes de collecte fiscale et salué le lancement, en marge de cette Conférence, de l’Initiative fiscale d’Addis-Abeba.  Il a aussi salué les propositions visant à remédier à la composition et à l’efficacité du Comité d’experts de l’ONU sur la coopération fiscale internationale. Soulignant le rôle crucial du secteur privé dans la mobilisation des ressources pour le développement, M. Kenyatta  a plaidé pour l’élaboration d’un cadre juridique sur les partenariats public-privé.

Le Président du Kenya a ensuite affirmé qu’un partenariat international pour le développement devait être le moteur de la mise en œuvre du programme de développement, ajoutant que son pays accueillera en 2016 la seconde réunion de haut niveau sur un tel partenariat.  En conclusion, M. Kenyatta a souhaité qu’un mécanisme de suivi des engagements pris lors de cette Conférence soit mis en place.

Mme ELLEN JOHNSON SIRLEAF, Présidente du Libéria, a estimé que les décisions que nous allons prendre à cette Conférence permettront de préserver les acquis de ces 15 dernières années, engrangés grâce à une coopération sans précédent entre nations.  Les pays en développement ont pu réaliser des progrès énormes dans la réalisation des OMD, a-t-elle insisté, en citant les avancées dans la lutte contre le paludisme, la mortalité maternelle et infantile, et l’analphabétisme.  Le revenu moyen par habitant a augmenté dans ces pays.  Très peu de gens, a dit la Présidente, auraient pu croire en 2000 que ce type de progrès aurait pu être possible.  “Cela semble impossible jusqu’à ce que ce soit fait”, a-t-elle commenté, en citant Nelson Mandela.  Après de nombreuse années de consultations dans le monde, nous devons maintenant assumer la tâche importante de mettre en oeuvre les idéaux qui sont à l’origine de cet exercice.  Notre destinée n’est qu’une, a souligné la Présidente. 

Nous voulons mettre un terme à la pauvreté, préserver la planète et créer un ordre économique mondial favorable à tous.  La Présidente s’est réjouie qu’à la différence du passé, les États cherchent aujourd’hui à déterminer les ressources qu’il faut pour bâtir un monde de coopération où tout le monde est gagnant.  Nous avons les moyens de le faire.  Nous devons être résolus à prendre de nouvelles mesures pour faire en sorte que quelle que soit la richesse extraite du continent, elle permette d’améliorer la vie des gens.  C’est pourquoi l’Afrique insiste sur la gouvernance, la responsabilisation et la bonne répartition des richesses.  La vision africaine se fonde sur un monde économique transformateur, un programme de développement axé sur les gens, le transfert des technologies, l’égalité entre les sexes et un nouveau partenariat mondial qui tienne compte des intérêts des pays les moins avancés (PMA).

Le financement du développement ne doit pas être perçu par le prisme réducteur de l’aide ou comme un cadeau des riches aux pauvres.  Non, a dit la Présidente, c’est un mécanisme qui rassemble des ressources qui profiteront à tous.  C’est un accord universel qui vient du nord vers le sud, du monde développé vers le monde en développement car nous parlons de notre l’humanité à tous.  Beaucoup de choses ont changé.  Nous avons aujourd’hui plus de richesses et de connaissances.  Nous devons travailler ensemble car c’est la mise en oeuvre qui est essentielle.  Il est impératif que le monde ait les ressources et les capacités nécessaires pour réaliser chaque objectif de développement durable, avec les instruments de mesure adéquats.  Nous avons ici une chance, a conclu la Présidente, de faire d’Addis-Abeba un moment historique.  Dans un monde imparfait, n’insistons pas sur la perfection.  Ne cherchons pas à transformer un bon document en document excellent.  Concentrons-nous sur les ressources qui permettront des actions concrètes pour générer des changements au-delà des attentes.  

M. HASSAN SHEIKH MOHAMUD, Président de la Somalie, a souligné la nécessité de se fixer des objectifs précis s’agissant de l’élimination de la pauvreté. Nous devons renforcer les institutions, mettre fin aux conflits, promouvoir l’égalité entre les genres et fournir une éducation primaire et secondaire pour tous les enfants, a-t-il poursuivi.  « Nous devons adopter des mesures concrètes afin que nous puissions dire d’ici 2030 que nous avons atteint nos objectifs », a-t-il dit.  

Il a mentionné la mise en place d’une nouvelle donne pour le développement dans son pays en 2013 qui visait à harmoniser l’aide avec les priorités de la Somalie et à bâtir des institutions transparentes.  « Deux ans plus tard, nous discutons toujours de ce processus sans qu’un financement adéquat n’ait été apporté », a-t-il affirmé, avant de déplorer que le principe d’appropriation nationale dans le cadre de cette nouvelle donne ait été limité.

Soulignant la nécessité de ne pas répéter de telles erreurs, il a indiqué qu’un financement adéquat était un élément clef des efforts de développement. Il a mentionné l’importance cruciale des investissements dans les infrastructures afin d’atteindre les objectifs de développement.  Certains pays en situation de conflit ne possèdent pas les infrastructures de base, a-t-il dit, ajoutant qu’ils devaient donc recevoir des ressources accrues.

Il a souligné l’importance des transferts de fonds de la diaspora somalienne pour son pays.  Contraindre l’acheminement de ces fonds ne fera que porter préjudice aux plus pauvres dans mon pays, a-t-il dit, ajoutant que 40% de la population en dépendait.  Le Président a affirmé que la fermeture des banques internationales gérant les transferts de fonds somaliens n’était pas la bonne approche pour combattre le financement de la terreur et le blanchiment d’argent. Pour atteindre cet objectif, nous devons adopter des mesures de sécurité et promouvoir la transparence, tout en améliorant la gouvernance financière en Somalie, a-t-il dit.  Il s’est également dit en faveur de la réduction des coûts de transaction de tels transferts à moins de 3%.  « Si nous voulons atteindre nos objectifs, nous devons mettre en place les mesures de suivi appropriées s’agissant du financement du développement », a-t-il conclu.

Nous observons aujourd’hui l’émergence d’une nouvelle Afrique, a déclaré M. HAGE G. GEINGOB, Président de la Namibie; une Afrique qui enregistre une des deux croissances les plus rapides au monde, une Afrique qui s’est levée et dont l’heure a sonné.  Parlant en particulier de son pays, le Président a dénoncé le “fardeau” qu’est le classement de la Namibie dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire élevé.  Cette définition “fallacieuse” ne tient compte que du PNB divisé par la population.  Or, la Namibie ayant une petite population, cette approche conduit à un revenu élevé par habitant sans tenir compte de la manière dont ledit revenu est réparti et des déséquilibres structurels de l’économie.  C’est une définition “injuste” qui prive la Namibie de l’accès aux prêts concessionnels dont elle a besoin pour son développement. 

Le Président a appelé la Conférence à décider que les prêts concessionnels doivent être ouverts aux pays à revenu intermédiaire élevé.  Comme beaucoup de pays du continent, la Namibie a des ressources naturelles.  Mais son peuple ne mange pas ces ressources.  Comme tout le monde, il mange de la nourriture et comme tout le monde, il aime se faire soigner dans les hôpitaux et s’instruire dans les écoles.  Le Président a aussi plaidé pour un meilleur accès au commerce international, arguant comme Joseph Stiglitz que “la seule prospérité véritable et durable est la prospérité partagée”. 

Mme MARIA EMMA MEJIA VELEZ, Vice-Présidente du Conseil économique et social (ECOSOC), a indiqué que le futur programme de développement devra faire face à un monde plus complexe que lors de la Conférence de Monterrey.  Les pays ont la responsabilité au premier chef de leur développement, a-t-elle dit, avant d’ajouter que la mobilisation des ressources domestiques ne pouvait se faire sans un environnement économique favorable.  Elle a estimé que le financement public international devait être concentré sur les pays qui en ont le plus besoin.  Les financements privés doivent être dirigés vers des investissements de long terme, cruciaux pour la croissance économique.  Elle a indiqué que cette Conférence devrait répondre aux défis de la mobilisation des ressources, mais aussi de la viabilité de la dette ou d’une meilleure coopération fiscale.  Un mécanisme de suivi robuste sera la clef de la réussite de nos efforts, a-t-elle dit.

Mme MEJIA VELEZ a détaillé le rôle de l’ECOSOC dans le suivi des engagements pris à cette Conférence, indiquant que le nouveau Forum pour le financement du développement, créé sous les auspices de l’ECOSOC, visait à renforcer le suivi des efforts de financement du développement.  Le Conseil est prêt à remplir ce nouveau rôle, a-t-elle conclu.

Il faut reconnaître, a déclaré M. MUKHISA KITUYI, Secrétaire général de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), les changements intervenus dans le paysage économique depuis les OMD, dont le doublement de l’APD et la division par deux du nombre des gens qui vivent dans l’extrême pauvreté.  Les pays en développement sont devenus des vecteurs de la croissance mondiale, dont de nombreux PMA.  La récente croissance dans les PMA a conduit à une transformation structurelle et à la création d’emplois.  Mais pour mettre définitivement fin à la pauvreté dans ces pays, il faudra un miracle économique comme le miracle chinois, à la différence que cette fois-ci, il faudra tenir compte de l’empreinte carbone.  Il faut en effet changer d’état d’esprit et embrasser les trois piliers du développement durable.  Il y a 15 ans, personne n’imaginait que les changements écologiques pouvaient mettre en difficulté les moyens de subsistance.  Aujourd’hui, on sait qu’on ne peut plus continuer sur cette voie.  Nous avançons dans la bonne direction avec des partenariats de qualité. 

L’ambition doit certes se réaliser dans un contexte international difficile marqué par le tassement de la croissance, le fardeau de la dette publique ou encore la chute des prix des matières premières.  Ne baissons pas les bras, a encouragé le Secrétaire général, car on peut se mettre à la hauteur des défis.  Il faudra des actions concertées aux niveaux national, régional et international.  Les pays doivent pouvoir compter sur un appui au renforcement des capacités, à la promotion de l’entreprenariat, à l’attraction des investissements et à l’accès au commerce international.  Les régions peuvent améliorer la connectivité et mettre à bas les barrières commerciales, tout en prenant en compte les innovations et les technologies.  Au niveau mondial, les États doivent créer un environnement propice à la réalisation des objectifs de développement durable, a conclu le Secrétaire général, en promettant une action ferme de la CNUCED.

Mme HELEN CLARK, Administratrice du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a souhaité que le financement du développement devienne réalité.  Il faut aller au-delà des engagements de Monterrey, a-t-elle affirmé, précisant que les défis auxquels le monde fait face aujourd’hui étaient beaucoup plus aigus qu’en 2002.  Elle a déclaré que l’APD restait essentielle pour les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral ou bien encore les petits États insulaires en développement.  « Une source de financement n’en remplace pas une autre », a-t-elle dit, ajoutant que l’APD devait jouer un rôle catalyseur.  Elle a expliqué que l’émergence économique des pays était corrélée à la manière dont ils faisaient fructifier le capital humain.  Les transferts de technologies sont également cruciaux, a-t-elle ajouté.  En conclusion, elle a affirmé que les Nations Unies devaient continuer d’appuyer les pays en développement afin qu’ils avancent résolument sur la voie du développement.

Mme RAMA SALLA DIENG, Société civile, a prévenu que les défis sont nombreux et les ambitions grandes.  Elle a donc regretté que des matières aient été négligées.  La Conférence, a-t-elle voulu, doit affirmer que le processus de développement doit être mené par les pays grâce à un processus participatif.  Il est difficile d’être optimiste, a-t-elle dit, car on ne voit pas très bien les résultats auxquels la Conférence peut aboutir.  Il faut de nouveaux engagements pour l’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes.  La responsabilisation politique, économique, sociale et financière doit prendre en considération le rôle des femmes et les inclure dans tous les domaines.

Poursuivant, M. STEFANO PRATO a demandé un organisme fiscal universel.  Nous avons besoin d’un forum auquel tout le monde participe et pas uniquement les pays riches.  Les politiques fiscales progressives sont nocives, a-t-il dénoncé, en demandant des engagements concrets en faveur de la protection sociale.  Dans ce cadre, il a appuyé l’idée d’une taxe sur les transactions.  Il a demandé un examen critique de tout le Cycle de Doha et du système commercial multilatéral.  Il a aussi demandé une restructuration des institutions de Bretton Woods et voulu que l’ordre du jour d’Addis-Abeba renforce le rôle de l’ONU dans la réforme du système économique et financier international. En matière de suivi, il a exhorté les États à prendre l’engagement de publier à temps l’information sur toutes les activités de développement et pour ce faire, il faut un mécanisme de suivi fort.

Mme CAROLINE ANSTEY, Secteur privé, a indiqué que le secteur privé détenait la clef de l’intégration économique des pays en développement.  Le secteur privé a besoin d’un environnement concurrentiel, a-t-elle dit, avant d’appeler acteurs privés et gouvernements à s’associer en des coalitions progressistes afin de promouvoir le développement.  Elle a rappelé que le secteur privé représentait 90% des emplois dans les pays en développement, avant de se féliciter que la coopération entre acteurs privés et publics se soit accrue au cours des deux dernières décennies.  Celle-ci doit encore être améliorée, a-t-elle dit.

Elle a affirmé que le monde des affaires annoncerait à cette Conférence, de nouvelles initiatives en faveur de nouveaux partenariats pour le développement.  Nous discuterons également de différentes actions afin d’accroitre la productivité, créer des emplois durables et promouvoir des financements mixtes, a-t-elle déclaré.  En conclusion, elle a affirmé qu’il fallait se méfier des considérations politiques à court terme en ce qui concerne les efforts de développement.  Ne gaspillons pas la chance qui nous est offerte d’aboutir à un programme de développement ambitieux.

M. IKILILOU DHOININE, Président des Comores, a rappelé que très peu de pays ont pu mobiliser les ressources nécessaires à la réalisation des OMD, les donateurs jugeant souvent “irréalistes” les projections budgétaires.  La Conférence vient donc à point nommé pour définir les modalités de financement du développement durable car la crédibilité des objectifs de développement durable dépend de la capacité de rénover le partenariat mondial et de proposer des mécanismes de financement innovants.  Le Président a dit attendre des instruments spécifiques pour les petits États insulaires en développement qui sont confrontés à des défis dont certains menacent leur existence physique.  A ce jour, ces États ne bénéficient pas de tout l’appui financier qu’exige l’ampleur des menaces auxquelles ils sont confrontés.  Le Président s’est en effet dit déçu devant les occasions manquées et les promesses non tenues durant la décennie 2000.  Il a dit avoir encore à l’esprit l’enthousiasme de Gleneagles.  Il a donc exhorté les États à adopter ici à Addis-Abeba des règles, des mécanismes et des codes de conduite permettant d’assurer un financement idoine et de rompre avec la tradition des promesses non tenues.

LETSIE III, Roi du Lesotho, a indiqué que l’esprit de Monterrey devait trouver son écho à cette Conférence. Le renforcement du cadre de financement du développement durable est crucial, a-t-il dit. « Le monde est sous pression », a-t-il poursuivi, en soulignant la gravité des crises contemporaines. Il a indiqué que le cadre de financement devait permettre la mobilisation de l’ensemble des ressources financières. Il faut utiliser un plus grand éventail de sources de financement, y compris l’APD qui reste essentielle, a-t-il affirmé. Il a jugé crucial que cette APD bénéficie aux pays qui en ont le plus besoin.

Il a affirmé que le défi de la dette des pays en développement était aggravé par des facteurs qui échappent à leur contrôle, dont la dégradation des termes de l’échange.  Il a en conséquence plaidé en faveur de politiques de coopération pour une gestion viable de la dette.  La coopération Sud-Sud ne peut se substituer à la coopération Nord-Sud, a-t-il insisté.  « Nonobstant l’importance des partenariats, chaque pays a la responsabilité première de son développement », a-t-il poursuivi.  Il a souhaité que le document final de la Conférence comprenne des engagements concrets qui répondent aux aspirations des peuples.  Le succès du multilatéralisme ne se mesure pas à l’aune des promesses formulées mais à l’aune de ce que nous pouvons faire pour aider les pays les moins avancés, a-t-il conclu.

M. BAKRI HASSAN SALIH, Premier Vice-Président du Soudan, a parlé d’une conjoncture internationale “délicate et compliquée”.  La Conférence est donc essentielle car elle se fonde sur l’importance qu’il y à mettre en oeuvre les objectifs de développement durable.  Il a espéré qu’Addis-Abeba permettra de renforcer les partenariats internationaux.  Il s’est attardé sur la conjoncture spéciale du Soudan avec la séparation du Soudan du Sud à l’issue d’une guerre civile qui a encore des répercussions économiques.  Le Soudan devrait de toute évidence bénéficier de l’Initiative pour les pays pauvres très endettés (PPTE), d’autant plus que les sanctions imposées en 1997 continuent de peser sur son économie.  Ces sanctions sont “injustes et iniques” car elles privent le pays d’une aide financière dont il a besoin et à laquelle il a droit.  Tous ces éléments minent le Soudan et l’empêchent de travailler dans le cadre d’une coopération internationale et d’un partenariat ouvert.

M. DANNY FAURE, Vice-Président des Seychelles, a affirmé que la restructuration et l’annulation de la dette de nombreux pays africains et de petits pays insulaires en développement, couplée aux politiques budgétaire et monétaire judicieuses, était un instrument essentiel du financement du développement.  Il a dit apprécié le futur objectif 14 de développement durable relatif à la préservation des ressources marines, rappelant que son pays était très dépendant des secteurs de la pêche et du tourisme.  « Pour mieux mobiliser les ressources en faveur de nos pêcheries, les Seychelles envisagent la possibilité de lancer la première émission obligataire bleue », a-t-il affirmé, ajoutant qu’une telle structure était un véhicule approprié pour la mobilisation des ressources privées à un taux raisonnable.

Il a affirmé que le changement climatique demeurait la question la plus pressante en ce qui concerne le financement du développement des pays en développement.  Il a exhorté tous les pays développés à honorer leurs engagements à mobiliser 100 milliards de dollars annuels pour l’opérationnalisation du Fonds vert pour le climat.  Il a indiqué que le PIB, qui sert au classement des pays suivant leur niveau de développement, n’était que l’élément d’un ensemble plus vaste qui devait être envisagé à travers le prisme de la viabilité.  « Nous réitérions notre appel en faveur d’un indice de vulnérabilité qui pourrait permettre à nos pays d’envisager de manière systématique les défis de développement auxquels ils sont confrontés », a-t-il dit. Il a souhaité que les négociations commerciales de Doha enregistrent des progrès.

M. MOHAMMAD SHARIATMADARI, Vice-Président de la République islamique d’Iran, a estimé que pour les pays en développement, la priorité est la stabilité du système économique international.  La crise financière de 2008 et son impact ont montré clairement que les institutions financières internationales ne prennent pas cette question au sérieux.  Le commerce, a poursuivi le Vice-Président, est un moteur de la croissance économique et une source vitale du financement du développement.  Il est donc nécessaire d’accélérer le processus d’accession des pays en développement à l’OMC.  Le Vice-Président a insisté sur le fait que les objectifs politiques ne devraient jamais mener à des sanctions “injustifiables” ou à des restrictions déguisées au commerce international.  Le Vice-Président a aussi souligné l’importance de l’investissement étranger direct et des flux financiers privés.  Il a aussi plaidé pour la création d’un organe fiscal intergouvernemental au sein des Nations Unies pour renforcer la coopération en matière fiscale et trouver les synergies entre les politiques fiscales et d’investissement et contribuer ainsi à optimiser leur impact sur le développement durable des pays en développement.

« 2015 est une occasion unique de mettre le monde sur la voie du développement durable », a affirmé M. STEFAN LOFVEN, Premier Ministre de la Suède.  Il a ajouté qu’un partenariat renouvelé entre gouvernements, secteur privé et la communauté scientifique permettra d’aboutir à de nouvelles solutions afin que la mondialisation profite à tous.  Il a demandé l’augmentation des flux financiers légitimes tout en insistant sur la lutte contre les flux illégitimes. La meilleure collecte des ressources fiscales est cruciale, a-t-il dit.

« L’APD n’est pas la réponse au programme de développement mais ce n’est pas une excuse pour ne pas honorer les engagements pris », a-t-il affirmé, jugeant important que le document final de la présente Conférence souligne le rôle unique que joue l’APD.  « La Suède continuera d’engager 1% de son revenu national brut en faveur de l’APD », a-t-il déclaré.  Le Premier Ministre a affirmé que l’égalité entre les sexes était bénéfique pour la croissance économique, avant de plaider pour l’intégration de la durabilité dans toutes les décisions d’investissement.  « Le temps est venu de joindre la parole aux actes. Dans 15 ans, j’espère que 2015 sera vue comme l’année pendant laquelle la communauté internationale aura décidé d’agir pour le bien de tous», a-t-il conclu.

M. SIBUSIDO DLAMINI, Premier Ministre du Swaziland, a souligné la nécessité de mobiliser des ressources afin que les pays en développement puissent relever les défis de la mise en œuvre des ODD.  « Mon pays appuie l’appel lancé à la communauté internationale afin de leur fournir des moyens renforcés, par le biais de cibles clairement définis et quantifiées ».  M. Dlamini a également jugé impératif que cette aide financière accrue s’accompagne de transferts de technologie, avant de demander que les intérêts des pays en développement soient placés au cœur du cycle de négociations de Doha.

Le Premier Ministre a ensuite exhorté les institutions financières multilatérales à appuyer les organisations régionales et sous-régionales.  « L’émergence continue de graves épidémies exige le renforcement des systèmes de santé nationaux », a-t-il dit, avant d’appeler les partenaires de développement de son pays à intensifier leurs efforts de financement en faveur du secteur de la santé, en particulier s’agissant des maladies non transmissibles.  Enfin, il a affirmé que la classification des pays selon leurs revenus devait prendre en compte les vulnérabilités particulières qui peuvent affecter les pays au revenu intermédiaire.  « Ces pays ont besoin de financements concessionnels spécifiques afin de mener à bien leur transition vers la catégorie des pays à revenu moyen élevé », a-t-il conclu.

M. BRIGI RAFINI, Premier Ministre du Niger, a souligné que toute recherche de solution au problème du développement durable doit nécessairement inclure une dimension sécurité.  Au-delà des actions classiques d’aide humanitaire et d’appuis ponctuels au développement, nous aspirons, s’est-il expliqué, à la mise en place de systèmes et de conditions permettant d’asseoir les bases d’un développement durable et inclusif.  La Conférence devrait répondre à la question de la prise en charge effective du financement de la lutte contre le terrorisme et le crime organisé, promouvoir des actions visant à atténuer les effets du changement climatique et renforcer les infrastructures écologiques et socio-éducatives.  Devant la faiblesse des ressources internes du Niger, dont une bonne partie est absorbée par les efforts consentis dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, et face à la réduction drastique de l’APD découlant d’une sorte de lassitude des partenaires, très peu d’opportunités s’offrent à des pays comme le Niger pour assurer le développement des infrastructures et du capital humain, deux facteurs indispensables à une croissance inclusive et durable.  

M. GASTON BROWNE, Premier Ministre d’Antigua-et-Barbuda, a déploré que peu de Chefs d’État et de gouvernement participent à la présente Conférence.  « J’avais espéré que les hauts représentants des gouvernements rassemblés ici étaient venus avec un mandat visant à apporter une véritable plus-value », a-t-il regretté.  Il a affirmé que les conséquences d’un échec de cette Conférence obéreraient les perspectives des pays en développement et des institutions financières internationales.  Le prix de ne rien faire, de ne pas fournir les ressources appropriées, sera payé par les pays riches qui seront obligés de faire face aux déplacements forcés et à la misère humaine, a-t-il lancé.

M. Browne a ensuite affirmé que les gains enregistrés depuis Monterrey et Doha étaient inégaux, de nombreux pays, y compris les petits États insulaires en développement (PEID), ayant régressé.  Les économies des petits pays insulaires en développement restent faibles et vulnérables, a-t-il dit.  Il a aussi déploré que les institutions financières, au lieu de reconnaître la situation financière difficile de ces pays, continuaient de les exclure des financements concessionnels.

Sans solutions financières qui règlent les questions de la dette et de son service, les petits États perdront la bataille dans laquelle ils sont engagés, « à moins qu’ils n’obtiennent de l’aide ».  Il a rappelé que le PIB de son pays avait diminué de 25% depuis la crise de 2008 et que le service de la dette représentait entre 30 et 65% de son revenu, « ce qui est insoutenable ».  M. Browne a donc espéré que le document final appelle à la restructuration et à l’effacement graduel de la dette des pays en développement, y compris des PEID.  Il a aussi souhaité que les entraves qui empêchent ces pays d’accéder au financement concessionnel soient éliminées et que les pays développés honorent leurs promesses dans le domaine de l’APD.  Enfin, il a affirmé qu’il était peu judicieux pour les pays développés d’injustement qualifier les petits États de paradis fiscaux ou de pays facilitant le financement du terrorisme, alors qu’ils ne font que se conformer aux normes internationales.

La Finlande, a promis Mme LENITA TOIVAKKA, Ministre finlandaise du commerce extérieur et au développement, honorera ses engagements en matière d’APD, y compris l’objectif visant à inverser la tendance à la baisse de l’aide aux PMA.  La Finlande entend investir dans quatre domaines-clés, l’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes et des filles; le bon fonctionnement démocratique; l’énergie, l’eau et la sécurité alimentaire; et le développement d’un secteur privé responsable.  La Finlande fera tout pour mettre l’APD au service de la mobilisation des autres ressources.  Le pays a décidé d’investir la somme de 100 millions d’euros par an aux prêts concessionnels à des entreprises du secteur privé et à la création d’emplois dans les pays pauvres. La Ministre a insisté sur le rôle du secteur privé et la capacité  humaine des filles et des femmes.  “L’aide c’est bien, mais le commerce c’est mieux” a-t-elle dit, en paraphrasant le Président de la Tanzanie.  Nous ne voulons pas développer n’importe quel secteur privé.  Nous voulons un secteur privé responsable, qui prend soin de ses employés et de l’environnement et paie ses impôts à l’État.  En coopération avec son secteur privé, la Finlande entend débloquer une enveloppe de 50 millions d’euros pour un programme sur l’entreprenariat au cours des quatre prochaines années.  En conclusion, la Ministre a souligné que le succès de la Finlande, pays à haut revenu, tient au fait que les femmes et les hommes sont éduqués et participent à la vie active sur un pied d’égalité et ce, grâce aux politiques publiques.

M. GERD MULLER, Ministre de la coopération économique et du développement de l’Allemagne, a affirmé que les pays développés avaient une responsabilité éminente dans le domaine du développement et rappelé qu’ils possédaient 90% des actifs financiers au monde.  Puis, il a souligné la nécessité de mettre fin à l’exploitation illégale des ressources naturelles et à l’évasion fiscale.  Les investissements privés doivent être plus ciblés pour favoriser le développement de long terme, a-t-il affirmé.  Il a rappelé que son pays était le troisième donateur d’APD en  valeur absolue, avant de souhaiter une intensification des efforts pour améliorer le sort des réfugiés.  Un document final ambitieux serait un bon signal envoyé à New York pour le sommet de septembre prochain, a-t-il conclu. 

M. KRISTIAN JENSEN, Ministre des affaires étrangères du Danemark, a voulu mettre résolument l’accent sur la nécessité de mobiliser le secteur privé pour financer le développement durable.  Ce développement, s’est-il expliqué, se compte en plusieurs milliards de dollars, bien loin de l’ampleur de l’aide.  Or, l’argent du secteur privé est là, sa technologie et son savoir-faire aussi.  Le Gouvernement danois, avec quelques fonds de pension et le Fonds danois d’investissement dans les pays en développement, va entrer dans le Partenariat pour les investissements dans le développement durable, créé par le Forum économique mondial et l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE).  Pourquoi? Parce ça marche, a affirmé le Ministre qui a aussi souligné que pour la plupart des pays, les ressources intérieures sont la plus grande source de financement du développement.  Le Gouvernement danois promet donc d’accroitre son appui au renforcement des systèmes fiscaux dans les pays en développement et de renforcer leur voix dans les fora fiscaux internationaux.  Avec d’autres pays européens, le Danemark a renoncé à réclamer des exemptions fiscales sur les biens et services, comme partie de l’APD.  Enfin, le Ministre a estimé que l’APD devrait cibler encore plus  les pays les plus pauvres.  Il s’est dit heureux que l’Union européenne se soit mis d’accord pour accélérer la mise en œuvre de l’objectif visant à consacrer collectivement 0,15 à 0,2% du PNB européen aux PMA. 

M. ALEXANDER B. CHIKWANDA, Ministre des finances de la Zambie, a jugé impératif l’établissement d’un partenariat fort pour le financement du développement.  Les inégalités entre les pays ne cessent de se creuser, a-t-il dit, avant de reconnaître le rôle de l’APD dans le financement du développement.  Il a jugé que cette APD était nécessaire, pour autant qu’elle soit adéquate et prévisible, avant de souligner le devoir qui incombe aux États récipiendaires de parvenir à plus de transparence dans leur gouvernance financière.  L’APD ne saurait être la panacée, a-t-il dit.

Puis, il a affirmé que les entreprises et les marchés étaient les pierres angulaires du développement.  Un secteur privé dynamique permettra de se délivrer de la dépendance de l’APD, a-t-il affirmé.  Puis, il a détaillé les réformes prises par son pays pour améliorer la collecte des ressources fiscales, notamment la mise en place d’un système de paiement en ligne des impôts.  Il a également souhaité l’appui de la communauté internationale afin de relever le défi de l’évasion fiscale et demandé qu’un traitement préférentiel soit réservé aux PMA dans les négociations de Doha.  « Le succès des trois piliers du développement est ancré dans la recherche et le progrès technologique », a-t-il conclu.

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