7452e séance – après-midi
CS/11911

La Chef des opérations humanitaires de l’ONU exhorte les membres du Conseil de sécurité à mettre de côté leurs différends afin de remédier à la situation « extrêmement grave » en Syrie

Mme Valerie Amos, qui s’exprimait pour la dernière fois devant le Conseil en tant que Secrétaire générale adjointe aux affaires humanitaires et Coordonnatrice des secours d’urgence du système de l’ONU, a dressé cet après-midi un tableau sombre de la situation en Syrie, qui continue de se détériorer jour après jour.

« 12,2 millions de personnes sont dans le besoin urgent d’une assistance humanitaire, et le nombre de personnes déplacées dépasse les 8 millions », a-t-elle dit.  À cette aune, Mme Amos a exhorté les membres du Conseil à mettre de côté leurs différends politiques et à rechercher une solution à ce qui semble être une série de défis insurmontables.

Au cours de la séance, consacrée à l’examen du rapport* du Secrétaire général relatif à l’application des résolutions 2139, 2165 et 2191 adoptées par le Conseil en 2014, Mme Amos a indiqué que la descente aux enfers de la Syrie pendant quatre ans avait dépassé en gravité les pronostics les plus sombres des observateurs.  « La situation à travers le pays est extrêmement grave et se détériore jour après jour », a-t-elle dit, ajoutant que les actes haineux se multipliaient en Syrie.  « Des hommes, des femmes, des enfants innocents sont tués, mutilés, déplacés et soumis à une sauvagerie qu’aucun être humain ne devrait endurer », a déploré la Secrétaire générale adjointe.

Elle a rappelé que la résolution 2139 (2014) avait formulé des demandes claires aux parties: elle leur enjoignait de mettre fin aux violences, de se conformer au droit international et de faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire.  « Malheureusement, au cours des 15 derniers mois, le Secrétaire général a systématiquement fait état de l’irrespect continu des parties envers les demandes que leur avait faites le Conseil », a regretté Mme Valerie Amos.  Elle a ensuite déclaré que l’utilisation du chlore comme arme de guerre se poursuivait, tuant, blessant et terrorisant les civils, et que les écoles et hôpitaux continuaient d’être attaqués.  Elle a précisé que 422 000 personnes, soit près de deux fois plus qu’au moment de l’adoption de la résolution 2139 (2014), se trouvaient dans des zones assiégées.

« Si j’avais mentionné un tel chiffre lors du début du conflit, je suis sûre que les membres du Conseil ne l’auraient pas cru possible », a-t-elle dit.  Elle a ajouté qu’en avril, l’ONU et ses partenaires n’avaient pu atteindre aucune des zones en état de siège.  L’introduction par le Gouvernement syrien de nouvelles règles empêche l’acheminement de l’aide humanitaire auprès des personnes qui sont dans un besoin désespéré, a-t-elle déploré.  

« L’avancée de Daech en Syrie se traduit par un degré inédit de sauvagerie, avec la perpétration de manière indiscriminée de meurtres, de mutilations, de viols et de destructions », a-t-elle dit.  La Coordonnatrice des secours d’urgence du système de l’ONU a indiqué que Daech enrôlait de force des enfants dans ses rangs et rendait par ses agissements l’acheminement de l’aide humanitaire dans les zones qui sont sous son contrôle de plus en plus difficile.

« Aujourd’hui, plus de 12,2 millions de personnes sont dans le besoin urgent d’une assistance humanitaire en Syrie, soit une augmentation de près d’un tiers par rapport au jour de l’adoption de la résolution 2139 », a-t-elle dit.  Elle a précisé que 540 000 personnes avaient été contraintes de se déplacer cette année, venant s’ajouter aux 7,6 millions de personnes déplacées que compte d’ores et déjà le pays.  Près de 4 autres millions de personnes ont trouvé refuge dans les pays voisins de la Syrie, a-t-elle précisé.

Au vu de cette situation, la Secrétaire générale adjointe a exhorté le Conseil à prendre les mesures nécessaires afin de protéger les civils et faire en sorte que les parties respectent leurs obligations en vertu du droit international humanitaire, en facilitant l’acheminement de l’aide humanitaire.

Elle a aussi demandé aux membres du Conseil qu’ils considèrent toutes les options possibles afin que les auteurs de violations du droit international répondent de leurs actes.  Le Conseil de sécurité devrait également veiller à intensifier l’effort financier en appui de la réponse humanitaire, et il devrait s’assurer à ce que soit respectée la nature non politique de l’aide humanitaire, a-t-elle ajouté.

Consciente des difficultés à surmonter, Mme Valerie Amos a néanmoins indiqué que la communauté internationale ne pouvait se permettre d’abandonner les Syriens à leur désespoir.  « Pour le bien de la Syrie et des générations futures, le Conseil doit mettre de côté les différends politiques existant en son sein et rechercher une solution à ce qui semble être devenu un problème insurmontable », a souligné Mme Amos en rappelant que l’adoption des résolutions 2139 et 2165 attestait de ce qui pouvait être fait lorsque les États membres du Conseil agissent de concert et parlent d’une seule voix.

S’exprimant à la suite de la Coordonnatrice des secours d’urgence, le représentant de la République arabe syrienne, M. Bashar Ja’afari, a rappelé que la crise humanitaire ne saurait s’achever sans que soit réglé le problème qui est à sa racine, à savoir l’éradication du terrorisme appuyé par l’étranger et l’instauration d’un dialogue entre Syriens sans ingérence extérieure.

« Il s’agit là de la seule manière sérieuse de régler le conflit et d’améliorer la situation humanitaire », a souligné le représentant.  Les résolutions du Conseil sur la lutte contre le terrorisme doivent être mises en œuvre, en coordination avec le Gouvernement de la Syrie, afin de mettre un terme aux soutiens apportés par la Turquie, l’Arabie saoudite et le Qatar aux groupes terroristes en Syrie, a-t-il indiqué.

M. Ja’afari a dénoncé l’attitude de la Turquie, dont le Ministre des affaires étrangères a affirmé, il y a quelques jours, que son pays était d’accord avec les États-Unis pour qu’un appui aérien soit assuré aux groupes terroristes en Syrie.  « Il n’existe pas de terrorisme modéré en Syrie », a souligné le représentant en indiquant que les groupes terroristes actifs dans son pays y menaient des actions atroces, soutenues par des pays étrangers.

Les sanctions économiques unilatérales injustement imposées au peuple syrien restent une source de souffrance supplémentaire, a-t-il ajouté, précisant que celles-ci devaient être levées.  Enfin, il a souligné que le Gouvernement de Damas avait coopéré avec l’ONU et facilité un accès à l’assistance humanitaire dans tous les points chauds du pays jusqu’au 9 avril dernier.

 

 

*     S/2015/368

 

 

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