7395e séance – matin
CS/11803

Pour l’OSCE, le cessez-le-feu et le retrait des armes lourdes sont la priorité en Ukraine conformément aux accords de Minsk

Réuni à la demande de l’Ukraine, le Conseil de sécurité a entendu ce matin les exposés de deux hauts responsables de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) sur l’évolution de la situation en Ukraine depuis la réunion, le 12 févier dernier, des dirigeants de la Russie, de l’Ukraine, de la France et de l’Allemagne.

Intervenant par vidéoconférence depuis Kiev, la Représentante spéciale en Ukraine du Président en exercice de l’OSCE, Mme Heidi Tagliavini, et le Chef de la Mission spéciale d’observation de l’OSCE en Ukraine, M. Ertuğrul Apakan, ont expliqué que le cessez-le-feu et le retrait des armes lourdes étaient « la priorité » en Ukraine.

Le 12 février 2015, les quatre chefs d’État et de gouvernement des pays précités ont présidé à l’adoption et à la signature d’un ensemble de mesures en vue de l’application du Protocole de Minsk du 5 septembre 2014 et du Mémorandum de Minsk du 19 septembre 2014.

Ces mesures prévoient notamment un « cessez-le-feu immédiat et général dans certaines zones des régions ukrainiennes de Donetsk et de Louhansk », qui a pris effet le 15 février à minuit.  Elles prévoient aussi le retrait par les deux parties de toutes les armes lourdes à des distances égales afin d’établir une zone de sécurité.

« Il semblerait que nous soyons à la croisée des chemins », a déclaré la Représentante spéciale en Ukraine du Président en exercice de l’OSCE, Mme Heidi Tagliavini.  « Soit le conflit connaît une nouvelle escalade, soit le bon sens, la responsabilité et l’humanité l’emportent et nous pouvons nous orienter vers la paix », dans le cadre fixé par les quatre chefs d’État et de gouvernement qui se sont récemment réunis à Minsk.

« Aujourd’hui nous sommes activement engagés dans la désescalade », s’est félicitée la diplomate suisse.  Un cessez-le-feu durable et le retrait des armes lourdes sont, à son avis, indispensables pour progresser vers un règlement pacifique.  « Tant que les armes ne se taisent pas, il n’y a pas d’espoir de stabiliser la situation, et encore moins de parvenir à la paix. »

Mme Tagliavini a rappelé que la guerre en Ukraine avait déjà coûté la vie à 6 000 personnes.  De plus, il y a des milliers de personnes gravement blessées et plus d’un million de personnes déplacées et réfugiées.  Ces chiffres ont augmenté après la prise de la ville de Debaltseve par les forces rebelles, d’autant plus que la Mission spéciale d’observation de l’OSCE a été empêchée de travailler pendant plusieurs jours.

Elle s’est toutefois dite encouragée par la réduction récente des hostilités, la libération de prisonniers et le retrait d’armes lourdes de la ligne de séparation.  Elle a souligné que le Groupe trilatéral de contact avait pour objectif de « jeter des ponts » et de créer des opportunités pour mettre en œuvre les accords de Minsk conclus au plus haut niveau politique et trouver des solutions pacifiques sur le terrain. 

Conformément à l’ensemble de mesures adoptées ce mois-ci, a poursuivi la Représentante spéciale, les groupes de travail créés par le Groupe trilatéral de contact devront se concentrer sur les questions les plus importantes et les plus urgentes, c’est-à-dire sur les aspects humanitaire et sécuritaire, de même que sur un dialogue politique inclusif et sur la réhabilitation économique et sociale.

Mme Tagliavini a ainsi souhaité pouvoir parvenir à un accord entre toutes les parties pour organiser une mission d’évaluation des besoins humanitaires dans la région, représentant des organisations internationalement reconnues comme le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et d’autres agences pertinentes des Nations Unies.  À cette fin, elle a remis à ses collègues du Groupe de contact trilatéral un projet de document.

Il faudrait également se préparer à enlever le plus rapidement possible les munitions non explosées, et créer des conditions favorables pour le retour des personnes déplacées, a-t-elle ajouté.  

Le diplomate turc Ertuğrul Apakan, Chef de la Mission spéciale d’observation de l’OSCE en Ukraine, a précisé à son tour que les accords de Minsk formaient un tout, avec tout d’abord le cessez-le-feu immédiat et le retrait des armes lourdes, qui doivent être suivis du processus politique dont des élections et une réforme constitutionnelle.

Le cessez-le-feu et le retrait des armes lourdes sont maintenant la priorité et forment la base des autres dispositions des documents de Minsk, a-t-il dit.  Notant que les rebelles avaient violé le cessez-le-feu en attaquant la ville de Debaltseve, il a averti que cela allait à l’encontre de l’esprit et des buts des accords de Minsk.

Toutefois, M. Apakan a indiqué au Conseil de sécurité que les combats avaient beaucoup diminué dans la zone de conflit, même si des violences ont encore eu lieu près de l’aéroport de Donetsk ainsi qu’aux alentours de la ville de Marioupol.  En outre, a-t-il ajouté, nous avons eu connaissance de signes indiquant que les deux parties prenaient des mesures pour s’acquitter de leurs responsabilités en vertu de la série de mesures de Minsk.  Il a affirmé que les observateurs de la Mission spéciale d’observation avaient commencé à voir le retrait des armes lourdes de la ligne de contact.  Il s’est félicité de ces mesures, même si la Mission n’a pas pu vérifier le lieu de stockage de ces armes.

L’OSCE a reçu pour tâche de faciliter, surveiller et vérifier le retrait des armes lourdes de la zone de sécurité, a rappelé M. Apakan, en prévenant qu’il lui fallait pour cela obtenir plus d’informations de base.  C’est pourquoi l’OSCE a demandé aux parties d’indiquer quelles armes lourdes elles détiennent, où elles sont entreposées, où elles seront stockées, ainsi que quelles routes seront empruntées pour les retirer.  La Mission a également besoin d’informations de ce type pour surveiller le retrait des groupes et mercenaires armés étrangers.

La Mission spéciale d’observation est actuellement composée de 451 observateurs, dont 300 sont déployés dans les régions de Donetsk et de Lugansk, a ensuite indiqué M. Apakan.  Il a souligné que, bien que demeurant une mission civile, la Chef de la Mission spéciale d’observation se voit assigner un mandat proche de celui du maintien de la paix. 

En outre, a-t-il fait remarquer, ses opérations doivent s’étendre au-delà de la ligne de contact, conformément à la série de mesures de Minsk, pour inclure l’intérieur et les alentours de la zone de sécurité qui couvre environ 50 000 kilomètres carrés.  Cela nécessite de nouveaux concepts et processus opérationnels, a-t-il dit.

Il faut ainsi élargir la capacité technologique de la Mission en la dotant de moyens supplémentaires pour rassembler les informations, comme des images satellites.  Cela exige un soutien solide, a prévenu le Chef de la Mission.  « Nous envisageons aussi d’étendre sur le plan géographique le mandat de quatre de nos équipes, pour surveiller le cessez-le-feu et le retrait des armes lourdes des zones de retrait. »

« La conclusion des accords de Minsk nous donne quelque espoir d’amélioration de la situation humanitaire », a poursuivi M. Apakan.  Il a toutefois rappelé que plus d’un million de personnes avaient été déplacées par le conflit.  La Mission spéciale d’observation continuera donc à apporter son aide aux efforts humanitaires, quand cela est possible, et s’efforcera d’être utile à la population de par sa présence sur le terrain.

En conclusion, il a réitéré que seul un cessez-le-feu inconditionnel et complet permettrait la mise en œuvre des accords de Minsk.  La Chef de la Mission spéciale d’observation accomplira son mandat en lien étroit avec toutes les parties et de manière impartiale, a-t-il assuré.

Cependant, à son avis, rien ne remplacera une volonté politique ferme de parvenir à la paix et à la normalisation.  Les documents de Minsk et le plan de paix du Président ukrainien Petro Porochenko restent la voie à suivre pour restaurer la paix et la stabilité en Ukraine.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.