Soixante-dixième session,
17e séance – matin
AG/AB/4179

Cinquième Commission: frustration de l’Union européenne et des États-Unis devant la « sélectivité » des propositions formulées pour améliorer le fonctionnement du CCQAB

La Cinquième Commission a examiné aujourd’hui les recommandations visant à améliorer le fonctionnement et les conditions d’emploi des 16 membres du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB), organe indépendant de l’ONU.  Avant que la Commission ne passe à l’examen de la demande de subvention pour les Chambres extraordinaires des tribunaux cambodgiens, les représentants de l’Union européenne et des États-Unis ont pris le temps d’exprimer leur frustration devant la « sélectivité » des propositions de réforme du CCQAB.

Les 16 membres du CCAQB sont nommés par l’Assemblée générale pour un mandat de trois ans renouvelable, consistant à examiner le projet de budget soumis par le Secrétaire général et de donner des avis sur toutes questions administratives et budgétaires.  Seul le Président siège à temps plein, les 15 autres membres se répartissant entre ceux qui sont en poste à la mission permanente de leur pays et ceux qui ne sont pas établis à New York et qui, à ce titre reçoivent de l’Organisation une indemnité journalière de subsistance, pendant les 78 semaines de réunions étalées sur deux ans.

Comme le Comité fait face à une charge de travail accrue et qu’il est saisi de questions de plus en plus complexes, le Président du CCQAB, M. Carlors Ruiz Massieu, a plaidé pour un temps plein pour tous les membres du Comité dont la rémunération doit se fonder sur le barème applicable aux classes inférieures au sein, lequel se situe entre celle d’un sous-secrétaire général et celle d’un secrétaire général adjoint en poste au Siège.  Le Président a insisté sur le fait que tous les membres du CCQAB doivent être traités sur un pied d’égalité pour ce qui est de leur rémunération et de leur statut juridique, ce qui n’est pas le cas actuellement, puisque la rémunération et les conditions d’emploi varient selon que les membres du Comité relèvent ou non d’une mission permanente.

En conséquence, le Secrétaire général indique que pour 2016 et 2017, le montant net des crédits supplémentaires pour l’exercice biennal s’élèverait à 4 567 000 dollars, soit le montant de la rémunération à verser aux membres du Comité -8 482 500 dollars-, lequel serait en partie compensé par une réduction de 3 915 500 dollars au titre des frais de voyage de ceux qui ne résident pas à New York.

Il n’est pas souhaitable de verser aux membres du Comité un salaire des Nations Unies, au risque de compromettre leur indépendance, a tranché le représentant de l’Union européenne qui, avec son homologue des États-Unis, n’a pas caché sa frustration face à des recommandations qui ne parlent que de la rémunération et du statut des membres du Comité sans rien dire de l’amélioration de leurs méthodes de travail.  Le représentant a estimé que l’alourdissement de la charge de travail du Comité ne justifie pas en soi la création de postes à temps plein, compte tenu des innovations comme les Normes comptables internationales pour le secteur public (IPSAS) ou Umoja, le Progiciel de gestion intégrée. 

L’Union européenne, a-t-il avoué, s’attendait en effet à une analyse des options pour intégrer des pratiques innovantes dans les méthodes de travail, comme l’organisation de réunions parallèles, les mécanismes de contrôle de la qualité des rapports ou encore les mesures permettant de mieux exploiter les technologies modernes.  Le représentant a aussi avoué son mécontentement devant la faiblesse des éléments proposés pour le Code de conduite, dont la limitation du nombre des mandats, le professionnalisme ou « le délai de réflexion » consistant à imposer un délai minimum entre la date à laquelle les membres du Comité quittent leurs fonctions et celle à laquelle ils peuvent se porter candidats à un poste ou être recrutés comme consultants par le Secrétariat de l’Organisation.

Qu’en est-il de la parité entre les sexes quand on sait qu’à partir du 1er janvier 2016, un seul membre, sur les 16 que compte le Comité, sera une femme?  Les États-Unis ne peuvent en aucun cas appuyer une « réforme sélective », a prévenu leur représentante. 

La Cinquième Commission a ensuite examiné la demande de subvention d’un montant de 25,15 millions de dollars pour les Chambres extraordinaires des tribunaux cambodgiens.  Ces Chambres extraordinaires ont atteint un record de travail du fait des appels et des instructions en cours, a précisé le Contrôleur des Nations Unies, Mme Bettina Tucci Bartsiotas.  Les Chambres extraordinaires ont des composantes nationale et internationale financées séparément; le Gouvernement cambodgien assumant le financement du personnel national et l’ONU, celui du personnel international.  Aujourd’hui, le représentant du Cambodge a indiqué que son Gouvernement prendrait en charge six mois de salaire du personnel national ainsi que les dépenses additionnelles pour un montant total de 4,15 millions de dollars. 

Quant à la composante internationale, le CCQAB recommande à l’Assemblée générale de ne pas approuver l’ouverture d’un crédit de 25 millions de dollars demandée par le Secrétaire général.  Le CCQAB pense que l’ouverture d’un tel crédit qui correspond à la quasi-totalité du budget contredirait le principe du financement volontaire des Chambres extraordinaires.  Mais, compte tenu des difficultés financières et de la nécessité de clore rapidement les affaires, il estime que l’Organisation devrait accorder les mêmes montants qu’en 2015, soit 12,1 millions de dollars.  Le représentant du Japon s’est dit préoccupé par le fait que les Chambres extraordinaires dépendent autant des ponctions sur le budget ordinaire de l’ONU.

La prochaine réunion de la Cinquième Commission est prévue mardi 1er décembre à partir de 10 heures.

BUDGET-PROGRAMME DE L’EXERCICE BIENNAL 2016-2017

Modalités de fonctionnement et les conditions d’emploi en vigueur au Comité consultatif et Observations du Secrétaire général

Rapport du Président du CCQAB et observations du Secrétaire général (A/70/544)

Le rapport rappelle que les membres du CCAQB sont nommés par l’Assemblée générale à titre personnel sur la base de leurs qualifications et de leur expérience, compte tenu de la nécessité d’assurer une large représentation géographique.  Ils sont au nombre de 16, dont au moins 3 experts financiers d’une compétence reconnue, et siègent pour un mandat de 3 ans renouvelable.  Leurs principales fonctions sont d’examiner le projet de budget soumis par le Secrétaire général à l’Assemblée générale; de donner à l’Assemblée des avis sur toutes questions administratives et budgétaires; d’examiner, pour le compte de l’Assemblée, les budgets administratifs des institutions spécialisées et les propositions concernant la conclusion d’arrangements financiers avec celles-ci; et d’examiner les rapports des auditeurs sur les comptes de l’Organisation et des institutions spécialisées.  Le Président du Comité consultatif siège à temps complet et est élu par les 15 autres membres du Comité.

Ceux-ci se répartissent en deux catégories: certains sont en poste à la mission permanente de leur pays, tandis que d’autres ne sont pas établis à New York.  Ceux qui ne relèvent pas d’une mission permanente se rendent à New York pour participer aux sessions du Comité et reçoivent de l’Organisation une indemnité journalière de subsistance; les autres ne sont pas payés par l’Organisation.  Bien que le Comité se réunisse actuellement jusqu’à 78 semaines par exercice biennal, les conditions d’emploi de ses membres « en déplacement » sont comparables à celles des membres des organes se réunissant entre deux et quatre semaines par an seulement.

Sachant que le Comité fait face à une charge de travail accrue, qu’il est saisi de questions de plus en plus complexes et que ses modalités de fonctionnement, notamment les conditions d’emploi de ses membres, demandent à être améliorées, l’Assemblée a prié le CCQAB d’élaborer des recommandations et invité le Secrétaire général à lui faire part de ses propres observations.

Le Président du CCQAB estime donc que les dispositions relatives au défraiement des frais de voyage et au paiement d’une indemnité de subsistance ne sont pas adaptées aux modalités de fonctionnement du Comité, qui requiert une présence à temps complet à New York.  À son avis, le barème des traitements applicable aux membres du CCQAB doit être différent et distinct du barème qui s’applique aux fonctionnaires des Nations Unies.  Sa rémunération se situe actuellement entre celle d’un sous-secrétaire général et celle d’un secrétaire général adjoint en poste au Siège.  Il demande donc à l’Assemblée de fixer la rémunération nette annuelle des membres du Comité en se fondant sur le barème applicable aux classes inférieures à celle retenue pour lui.  

Le Président estime que tous les autres membres du CCQAB doivent être traités sur un pied d’égalité pour ce qui est de leur rémunération et de leur statut juridique, ce qui n’est pas le cas actuellement, puisque la rémunération et les conditions d’emploi varient selon que les membres du Comité relèvent ou non d’une mission permanente.

Dans ses observations, le Secrétaire général présente les incidences financières des changements qu’il est proposé d’apporter.  Pour 2016 et 2017, on suppose que tous les membres du Comité consultatif qui ne résident pas actuellement à New York choisiraient de bénéficier des conditions d’emploi proposées. De ce fait, il n’y aurait plus de membres non résidents.

En conséquence, le montant net des crédits supplémentaires pour l’exercice biennal s’élèverait à 4 567 000 dollars, soit le montant de la rémunération à verser aux membres du Comité -8 482 500 dollars-, lequel serait en partie compensé par une réduction de 3 915 500 dollars au titre des frais de voyage pour les membres du Comité ne résidant pas à New York.

Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, M. LYLE DAVIDSON (Afrique du Sud) a appuyé les recommandations contenues dans le rapport et rappelé que cette question est à l’examen depuis la soixante-septième session.  Le moment est venu de parvenir à un accord et de prendre une décision.

M. FRANCESCO PRESUTTI, Union européenne, a dit souhaiter que le CCQAB dispose des instruments nécessaires pour exercer son travail « en toute indépendance » et estimé, à cet égard, que le rapport ne répond pas aux questions de l’Assemblée.  Le représentant a en effet reproché au document une « approche étroite » concentrée essentiellement sur les conditions d’emploi et le statut des membres du Comité, alors que l’objectif principal était de revoir les méthodes de travail du Comité.  L’Union européenne, a-t-il avoué, s’attendait plutôt à une analyse des options pour intégrer des pratiques innovantes dans les méthodes de travail, comme l’organisation de réunions parallèles, les mécanismes de contrôle de la qualité des rapports ou encore les mesures permettant de mieux exploiter les technologies modernes.

M. Presutti a aussi avoué de ne pas être pleinement satisfait des éléments du Code de conduite qui devrait être « fort et complet » pour assurer la pleine indépendance et l’impartialité du Comité et de ses membres.  Le rapport, a-t-il regretté, ne dit rien « des délais de réflexion », de la limitation du nombre des mandats ou des exigences de professionnalisme.  La question de la parité entre les sexes n’est pas abordée, alors qu’à partir du 1er janvier 2016, un seul membre, sur les 16 que compte le Comité, sera une femme.  Le représentant a en outre estimé que l’alourdissement de la charge de travail du Comité ne justifie pas en soi la création de postes à temps plein.  Au contraire, a-t-il argué, la mise en œuvre des Normes comptables internationales pour le secteur public (IPSAS), entre autres, permet d’accélérer l’examen des états financiers et d’améliorer la gestion des rapports émis par le Comité même si leur nombre augmente.  Les autres initiatives, comme Umoja, le Progiciel de gestion intégrée, auront un impact important sur la capacité du Comité à gérer sa charge de travail, a ajouté le représentant, avant d’encourager le Comité à utiliser au mieux ces innovations pour être plus productif.  Il n’a pas non plus jugé souhaitable d’accorder le statut de « personnalités qui n’ont pas la qualité de fonctionnaire du Secrétariat » aux membres du Comité, car cela aboutirait à verser à ces membres des salaires des Nations Unies au détriment de leur indépendance, a-t-il expliqué en appelant à la « prudence » sur cette question.

Également au nom du Liechtenstein, M. MATTHIAS DETTLING (Suisse) s’est félicité des efforts entrepris pour accroître l’efficacité du CCAQB et renforcer son indépendance.  Il a appuyé l’idée de soumettre les membres du Comité aux mêmes conditions d’emploi et de statut.  Le Code de conduite proposé constitue une bonne base de discussion, a-t-il poursuivi, avant de recommander à la Cinquième Commission de se pencher sur d’autres réformes à même de renforcer le CCQAB dans son rôle d’organe spécialisé et indépendant.  L’Assemblée générale pourrait par exemple définir les critères de sélection des experts financiers.  Pour renforcer l’indépendance du CCQAB et éviter les conflits d’intérêt, le représentant a aussi appuyé l’idée d’imposer un délai minimum entre la date à laquelle les membres du Comité quittent leurs fonctions et celle à laquelle ils peuvent se porter candidat a un poste ou être recrutés comme consultant par le Secrétariat de l’ONU.

Nous voulons, a déclaré Mme CHERITH NORMAL CHALET (États-Unis) que le CCQAB puisse remplir sa tâche en tant qu’organe indépendant d’experts de l’Assemblée générale.  Cette question est à l’ordre du jour de la Cinquième Commission depuis plusieurs années mais, a rappelé la représentante, aucune décision n’a jamais été prise car on se concentre trop sur les conditions d’emploi et pas suffisamment sur les méthodes de travail.  Pour avoir un tableau complet des réformes nécessaires, nous avions demandé un rapport qui présente plusieurs propositions sur la manière dont le Comité devrait fonctionner.  Ce que l’on a aujourd’hui, a dénoncé la représentante, c’est un petit morceau du tableau ne suggérant rien de l’ensemble qui devrait par exemple laisser voir un Code de conduite ou des recommandations sur « les délais de réflexion ».  Ces éléments et d’autres doivent être inclus dans les changements à envisager pour améliorer le CCQAB.  Les États-Unis ne peuvent en aucun cas appuyer une réforme sélective, a prévenu la représentante. 

M. DMITRY V. PODLESNYKH (Fédération de Russie) a appuyé l’idée de transformer le CCQAB en un organe permanent et de modifier le statut de ses membres.  Il a espéré une décision sur les changements proposés et l’inclusion des incidences budgétaires dans le biennal 2016-2017, souhaitant dès lors que la Cinquième Commission se prononce au cours de la présente session.  Ce rapport est une bonne base de discussions, a-t-il estimé.

Demande de subvention pour les Chambres extraordinaires des tribunaux cambodgiens

Rapport du Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires (CCQAB) (A/70/7/Add.20)

Pour l’établissement de ce rapport, le CCQAB a examiné le rapport du Secrétaire général A/70/403.  Les Chambres extraordinaires ont des composantes nationale et internationale financées séparément.  Le Gouvernement cambodgien assume le financement du personnel national et l’ONU, du personnel international.  En 2015, la situation financière de la composante nationale s’est beaucoup améliorée mais aucun financement n’étant disponible en août, le paiement des salaires a été reporté jusqu’à ce que les contributions volontaires attendues aient été reçues.

Le CCQAB prend donc note de l’engagement du Gouvernement cambodgien de couvrir les dépenses qui lui reviennent.  Quant au financement de la composante internationale, il a été assuré, chaque année, par un petit nombre de gouvernements.  Le CCQAB souligne, en conséquence, qu’il reste nécessaire d’intensifier les activités de levée de fonds, notamment en élargissant la base des donateurs.

Pour 2016, le Secrétaire général demande que l’Assemblée approuve l’ouverture d’un crédit de 25 151 300 dollars, soit la totalité du budget pour l’année moins une contribution volontaire déjà annoncée de 546 400 dollars.  Le CCQAB pense que l’ouverture d’un tel crédit qui correspond à la quasi-totalité du budget contredirait le principe du financement volontaire des Chambres extraordinaires. Mais, compte tenu des difficultés financières et de la nécessité de clore rapidement les affaires dont les Chambres extraordinaires sont saisies, le Comité estime que l’Organisation devrait accorder les mêmes montants qu’en 2015.  En conséquence, le CCQAB recommande à l’Assemblée générale d’autoriser le Secrétaire général à engager un montant ne dépassant pas 12,1 millions de dollars pour compléter, à titre transitoire, les contributions volontaires.  Il insiste sur le fait que  dans le cas où les contributions volontaires excéderaient les besoins des Chambres, les fonds du budget ordinaire alloués aux Chambres seront remboursés à l’Organisation.

Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, M. LYLE DAVIDSON (Afrique du Sud) a noté les progrès louables réalisés par les Chambres et salué l’engagement du Gouvernement cambodgien.  Il a aussi apprécié les efforts du Secrétaire général et ceux de son Expert spécial pour l’assistance des Nations Unies aux procès des Khmers rouges.  Le représentant s’est félicité de la Déclaration conjointe, faite à Phnom Penn le 17 novembre 2015, par le Gouvernement cambodgien et le Sous-Secrétaire général aux affaires juridiques de l’ONU.  Il a salué d’avance les contributions volontaires des donateurs potentiels à la composante nationale des Chambres extraordinaires et dit approuver la proposition du Secrétaire général concernant l’allocation de fonds.  Le représentant a affirmé la volonté de son Groupe de participer de « manière constructive » aux délibérations sur ce point afin d’adopter rapidement une décision.

M. HAJIME KISHIMORI (Japon) s’est dit préoccupé que les Chambres extraordinaires dépendent des ponctions sur le budget ordinaire de l’ONU, ce qui remet en cause le principe des contributions volontaires.  Il a remercié le Gouvernement du Cambodge pour son engagement à couvrir les coûts de la composante nationale et a encouragé tous les Etats Membres à fournir davantage de contributions volontaires.

M. RY TUY (Cambodge) a exprimé la gratitude du Gouvernement cambodgien au Secrétaire général et à l’ONU pour les efforts visant à trouver les fonds nécessaires à la composante internationale des Chambres extraordinaires.  Il a soutenu la demande de subvention supplémentaire et a confirmé que le Gouvernement du Cambodge prendrait en charge les six mois de salaire du personnel national ainsi que les dépenses additionnelles pour un montant total de 4,15 millions de dollars.  Il a espéré que les donateurs continueraient à apporter leurs contributions pour assurer que les Chambres extraordinaires rendent la justice sur les crimes des Khmers rouges.

 

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