7353e séance – après-midi
CS/11720

RPDC: pour la première fois, le Conseil de sécurité tient une réunion entièrement consacrée à la situation des droits de l’homme dans le pays

Le Conseil de sécurité a décidé, aujourd’hui, d’inscrire à son ordre du jour la question de la République populaire démocratique de Corée (RPDC).  Répondant à une demande du Conseil des droits de l’homme et de l’Assemblée générale, le Conseil, lors d’un vote de procédure, a entériné l’inscription de ce point par 11 voix pour, 2 contre (Chine, Fédération de Russie) et deux abstentions (Tchad, Nigéria), « sans préjudice de la question de la non-prolifération en RPDC ».

Ce vote reflète les positions des auteurs d’une lettre adressée au Président du Conseil de sécurité.  Les pays signataires ont souligné que la séance d’aujourd’hui, une première en son genre, ne devait pas rester sans suite. 

M. Oh Joon, qui s’exprimait pour la dernière fois devant le Conseil en tant que représentant de la République de Corée, a formulé « le vœu ardent que nos sœurs et frères innocents pourront, dans un avenir proche, nous dire que nous avons fait ce qu’il fallait pour les sauver ».

Avant l’intervention des membres du Conseil, le Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme, M. Ivan Šimonović, se référant aux conclusions du rapport de la Commission d’enquête du Conseil des droits de l’homme, avait affirmé que les crimes perpétrés en RPDC étaient commis de manière systématique.  Ce document, a-t-il dit, décrit un système totalitaire caractérisé par la privation brutale des libertés de pensée, de conscience et de culte ainsi que des droits à la liberté d’opinion, d’expression, d’information et d’association. 

Le rapport de la Commission d’enquête recense, a-t-il souligné, l’une des listes les plus accablantes de crimes internationaux à ce jour.  M. Šimonović a ainsi attiré l’attention sur les conséquences de la famine organisée par le régime de la RPDC au cours des années 1990, « qui a causé des milliers de morts et infligé des dommages physiques et psychologiques irréversibles aux survivants ».  Selon des estimations, en novembre 2013, 84% des membres des familles en RPDC, soit 8 à 9 familles sur 10, étaient mal nourris. 

Selon la Commission d’enquête, 80 000 à 120 000 détenus politiques se trouvent actuellement dans quatre grands camps où sont pratiqués « la privation de nourriture, le travail forcé, les exécutions, la torture, le viol et la privation des droits en matière de procréation, qui exposent les personnes concernées à des mesures répressives, à l’avortement forcé et à l’infanticide ».

Pour M. Šimonović, l’amélioration de la situation en matière de droits de l’homme en RPDC n’exigera pas seulement la mise en œuvre de réformes.  Elle exigera également que justice soit rendue, a-t-il soutenu.  À cet égard, il a fait remarquer qu’une large majorité d’États Membres, ainsi que des victimes, des survivants et des organisations de la société civile, demandaient que le Conseil de sécurité prenne une décision visant à saisir la Cour pénale internationale concernant la situation en RPDC. 

Le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, M. Tayé-Brook Zerihoun, invité aux côtés de Šimonović à faire un exposé, a déclaré que la Commission d’enquête établie par le Conseil des droits de l’homme avait permis de donner la parole à de nombreuses victimes de graves violations et proposé une feuille de route pour que la RPDC adhère aux normes internationales en vigueur.  « Ce n’est plus seulement le dossier nucléaire qui préoccupe la communauté internationale, mais aussi la situation des droits de l’homme », a-t-il dit, en souhaitant que la réunion d’aujourd’hui aboutisse à une évaluation plus complète de la situation dans le pays. 

Les membres du Conseil ayant appuyé l’inscription de la question de la RPDC à l’ordre du jour du Conseil ont, à l’instar des États-Unis, de la France et du Royaume-Uni, exprimé leur effroi face à la nature et la portée des violations des droits de l’homme perpétrées depuis un demi-siècle par le régime de Pyongyang.  

Pour la représentante des États-Unis, Mme Samantha Power, les violations des droits de l’homme mais également les menaces d’attaques nucléaires de la RPDC contre d’autres États Membres de l’ONU, « qui constituent une atteinte à la paix et à la sécurité internationales », « nous encouragent à renvoyer la question de la RPDC à la CPI pour que des sanctions ciblées soient adoptées ».  

Pour souligner la détermination de la communauté internationale de donner une suite à cette réunion, le représentant de la France, M. François Delattre, a martelé que « rien, pas même le chantage nucléaire auquel se livre le régime nord-coréen, ne nous fera détourner le regard ».  « Le régime de Pyongyang est placé devant ses responsabilités, face à l’Histoire et au jugement de la communauté internationale.  Les violations doivent maintenant cesser, les prisonniers doivent être libérés, le pays doit s’ouvrir aux médias, aux organisations non gouvernementales, aux Nations Unies », a-t-il souligné. 

« La paranoïa du régime nord-coréen est telle que l’endoctrinement en RPDC commence au jardin d’enfants », a déclaré, pour sa part, le représentant du Royaume-Uni, M. Mark Lyall Grant.  Constatant qu’après la publication du rapport de la Commission d’enquête, la RPDC n’avait rien fait pour suivre ses recommandations, M. Grant a appelé la communauté internationale à se préparer à lutter contre l’impunité si ce pays refuse de le faire.

Le représentant de l’Australie, M. Gary Quinlan, qui avait lu la lettre adressée au Président du Conseil, a déclaré que la RPDC, en application des recommandations de la Commission d’enquête, devrait mettre fin aux violations perpétrées contre son propre peuple et s’engager à coopérer avec la communauté internationale, « en tendant la main au Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en RPDC et en ouvrant un accès sans entraves aux agences humanitaires ».

La Chine et la Fédération de Russie se sont démarquées de ces positions.  Le représentant chinois, M. Liu Jieyi, s’est opposé à « la politisation des droits de l’homme ».  « Cette question importante n’a pas à être traitée dans cette enceinte », a-t-il répété, en assurant qu’en tant que pays voisin de la RPDC, la Chine ne permettrait jamais que la situation dans la péninsule coréenne débouche sur une guerre.  « La priorité, c’est la dénucléarisation de la péninsule », a-t-il ajouté, en invitant le Conseil de sécurité à encourager la reprise des pourparlers entre toutes les parties concernées.  « L’initiative de cette réunion est inappropriée et pourrait nuire aux travaux du Conseil de sécurité et d’autres organes de l’ONU », a prévenu, pour sa part, le représentant russe, M. Evgeny Zagaynov.  Les questions de droits de l’homme doivent être examinées au Conseil du même nom « qui, faut-il le rappeler, avait été créé à cette fin ».

LETTRE DATÉE DU 5 DÉCEMBRE 2014, ADRESSÉE AU PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LES REPRÉSENTANTS DE L’AUSTRALIE, DU CHILI, DES ÉTATS-UNIS D’AMÉRIQUE, DE LA FRANCE, DE LA JORDANIE, DE LA LITUANIE, DU LUXEMBOURG, DE LA RÉPUBLIQUE DE CORÉE, DU ROYAUME-UNI DE GRANDE-BRETAGNE ET D’IRLANDE DU NORD ET DU RWANDA AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2014/872)

Déclarations

M. GARY FRANCIS QUINLAN (Australie) a accusé la RPDC d’être un État totalitaire usant de la violence et la répression contre ses propres citoyens pour maintenir ses dirigeants et son appareil militaire au pouvoir.  L’Australie, a-t-il dit, ne peut qu’exprimer son plus vif désaccord avec les membres du Conseil de sécurité opposés à l’idée d’examiner la question des droits de l’homme dans cette enceinte, en estimant pour sa part que les violations massives de ces droits anticipaient les situations d’instabilité et de conflit, « en particulier en l’absence de reddition de comptes ».  Les conclusions accablantes du rapport de la Commission d’enquête contre le régime « dépravé » de Pyongyang soulignent la nécessité d’une réponse internationale, a poursuivi le représentant.  Le Gouvernement nord-coréen, a-t-il insisté, doit changer de cap immédiatement.

Pour M. Quinlan, la RPDC doit commencer par mettre fin aux violations massives perpétrées contre son propre peuple et s’engager à coopérer avec la communauté internationale, en tendant la main au Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans le pays et en ouvrant un accès sans entraves aux agences humanitaires.  « Il existe des options pour la RPDC –des options humaines– et nous continuerons à insister auprès de son leadership pour qu’elle les choisisse », a assuré le délégué de l’Australie.  Les États Membres disposant d’une influence auprès de ce pays ont un rôle à jouer, a-t-il dit.  En l’absence d’action du régime nord-coréen, le Conseil de sécurité doit, pour sa part, s’acquitter de ses propres responsabilités pour mettre fin à l’impunité pour des crimes contre l’humanité.  C’est pourquoi il doit continuer de se saisir de la situation des droits de l’homme en RPDC, « dans l’intérêt de son peuple et de la sécurité dans la péninsule coréenne », a rappelé, avant de conclure, le représentant de l’Australie.

Mme SAMANTHA POWER (États-Unis) a souligné que la réunion d’aujourd’hui démontrait qu’un consensus grandissant existait quant à la nature et la portée des crimes commis par la RPDC.  Le rapport de la Commission d’enquête donne une raison au Conseil de sécurité d’agir, a-t-elle dit, en ajoutant que le refus total de coopérer du régime avec la Commission d’enquête correspondait à la sorte de politique décrite dans ce rapport.  Les violations systématiques et brutales des droits de l’homme donnent de fortes raisons de croire que des crimes contre l’humanité ont été perpétrés au plus haut sommet du régime, a-t-elle relevé, à son tour.  Après avoir cité des extraits de témoignages « effroyables » recueillis par les enquêteurs de la Commission d’enquête, Mme Power a rappelé que l’Assemblée générale avait condamné les violations généralisées répertoriées dans le rapport de la Commission.  « Nous sommes encouragés à renvoyer la question de la RPDC à la CPI pour que des sanctions ciblées soient adoptées », a-t-elle poursuivi.  Pour Mme Power, l’attitude de la RPDC représente une menace à la paix et à la sécurité internationales, comme l’ont souligné les deux exposés.  « Nous devons agir ».  « La RPDC a déclaré que tout effort visant à rendre justice aurait des conséquences catastrophiques. » 

« Nous devons agir et non pas reculer face à des menaces qui sont des moyens de dissuasion », a martelé la représentante des États-Unis.  « Nous devons répondre aux menaces d’attaques nucléaires, y compris contre les États-Unis ».  « Il y a peu de temps, la RPDC avait mené une attaque informatique de taille contre notre pays », a-t-elle soutenu.  « Souvenez-vous du 11 septembre » était la substance du message lancé par les pirates informatiques, a-t-elle précisé, en ajoutant que les menaces de la RPDC visaient d’autres États Membres de l’ONU.  Il incombe donc au Conseil de sécurité de tenir compte des recommandations de la Commission d’enquête et de saisir la CPI, a-t-elle déclaré, en assurant que, dans l’intervalle, les États-Unis appuieraient la création d’un bureau sur le terrain chargé de suivre l’évolution de la situation des droits de l’homme en RPDC.  « Les pays voisins ne doivent pas renvoyer les réfugiés nord-coréens dans le pays », a-t-elle également insisté.  Avant de conclure, la représentante a affirmé « qu’aujourd’hui, nous avons brisé le silence sur la RPDC ».  « Nous devrons continuer de condamner les abus. »  « Le Conseil de sécurité doit continuer de traiter la situation des droits de l’homme en RPDC en tant que terribles crimes contre la population », a-t-elle lancé. 

M. FRANÇOIS DELATTRE (FRANCE) a déclaré que le Conseil est enfin réuni pour entendre le cri de détresse des victimes d’un régime sanguinaire.  Les responsables de cette terreur et, en premier lieu, les autorités nord-coréennes, devront répondre de leurs actes.  Les crimes commis ne resteront pas impunis.  C’est un impératif éthique pour la communauté internationale.  Il fait peu de doute que ces crimes, par leur gravité, leur échelle et leur caractère systématique, constituent des crimes contre l’humanité.  La recommandation de la Commission d’enquête que la situation soit renvoyée à la Cour pénale internationale mérite d’être examinée avec la plus grande attention. 

Le Haut-Commissariat aux droits de l’Homme a également un rôle à jouer.  Son bureau sur le terrain en cours d’établissement à Séoul devra permettre de suivre les recommandations du rapport et de l’évolution de la situation.  Il devra également continuer à collecter des informations sur les violations commises.  « Nous souhaitons, a-t-il dit, que le Conseil reste régulièrement informé. »

Le représentant a ajouté que les violations commises par le régime constituent une menace à la paix et à la sécurité internationales.  Elles participent et sont même une composante essentielle, d’un système politique totalitaire, dangereux et déstabilisateur pour l’ensemble de la région.  Elles révèlent un État unique dans le registre de la terreur, un État paria au regard du régime international de non-prolifération nucléaire et balistique, un État qui exporte, en violation des résolutions du Conseil, des biens et technologies sensibles qui financent par la suite l’indécent train de vie de ses dirigeants et la répression d’une population régulièrement frappée par la famine.  C’est pourquoi, a-t-il souligné, le Conseil de sécurité ne peut plus ignorer ces crimes qui choquent la conscience humaine. 

M. Delattre a estimé que le Conseil avait envoyé un message clair aux tortionnaires de Pyongyang: la chape de plomb trop longtemps maintenue sur un peuple et un pays coupé du monde vient d’être levée.  La réalité nord-coréenne est désormais visible de tous.  Le Conseil de sécurité en est saisi.  Rien, pas même le chantage nucléaire auquel se livre le régime nord-coréen pour nous dissuader de tenir cette réunion, ne nous fera détourner le regard, a estimé le représentant de la France.  Le régime de Pyongyang est placé devant ses responsabilités, face à l’Histoire et au jugement de la communauté internationale.  Les violations doivent maintenant cesser, les prisonniers doivent être libérés, le pays doit s’ouvrir aux médias, aux organisations non gouvernementales, aux Nations Unies, a-t-il souligné avant de conclure.      

M. USMAN SARKI (Nigéria), tout en reconnaissant que chaque État était tenu de garantir la sûreté de ses propres citoyens, a rappelé que le système des Nations Unies était déjà doté de mécanismes de protection des droits de l’homme, comme le Conseil des droits de l’homme, l’examen périodique universel ou encore les organes conventionnels.

Mme SYLVIE LUCAS (Luxembourg) a signalé qu’une série de violations constatées par la Commission d’enquête répondent aux critères permettant d’établir l’existence de crimes contre l’humanité.  Elle a également constaté que les auteurs de ces crimes bénéficient d’une impunité totale et que les violations frappent sans distinction les populations les plus vulnérables, notamment les femmes et les enfants, « premières victimes des famines et auxquels l’enfer des camps de prisonniers politiques n’est pas épargné ».  Mme Lucas a ensuite fait lecture d’un extrait du rapport dans lequel un témoin décrit comment une fillette de 7 ans a été battue à mort lorsqu’un garde a trouvé les grains de céréales qu’elle avait récoltés pour tromper sa faim.

Pour la représentante du Luxembourg, on ne saurait dissocier « la posture belliqueuse » de la RPDC sur le plan international de la situation « révoltante » des droits de l’homme qui y règne sur le plan interne.  Elle a jugé impératif que le Conseil de sécurité examine les recommandations contenues dans le rapport de la Commission d’enquête, lequel préconise notamment la saisine de la Cour pénale internationale.  Le Luxembourg souscrit pleinement à cette recommandation, a-t-elle assuré, car il importe absolument que les responsables des atrocités « sans égal dans le monde contemporain » rendent compte de leurs actes.  La représentante a également estimé que le Conseil de sécurité devrait considérer l’adoption de sanctions ciblées contre ceux qui portent la plus grande part de responsabilité dans les crimes contre l’humanité commis en RPDC.

Mme Lucas a aussi invité « les autorités nord-coréennes » à autoriser la visite du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en RPDC sans délai.  Compte tenu de l’ampleur des violations et abus dont sont victimes les femmes, elle a aussi estimé qu’ONU-Femmes doit se saisir officiellement de la question.  La présente séance du Conseil, « une première en son genre », ne doit pas rester sans suite, a souhaité Mme Lucas, avant d’encourager le Conseil de sécurité à faire régulièrement le point sur la situation en RPDC.

Mme DINA KAWAR (Jordanie) a déclaré que la situation en RPDC était sombre.  Elle a ainsi condamné les déclarations du régime de Pyongyang, qui envisage de nouveaux essais nucléaires.  À cela, a-t-elle dit, s’ajoutent les nombreuses allégations de violations massives des droits de l’homme dans le pays.  La représentante a demandé à la RPDC de prendre rapidement des mesures tangibles pour faciliter l’accès aux agences humanitaires

M. MARK LYALL GRANT (Royaume-Uni) a rappelé que la paranoïa du régime nord-coréen était telle que l’endoctrinement dans ce pays, a-t-il accusé, « commence au jardin d’enfants ».  Après la publication du rapport de la Commission d’enquête du Conseil des droits de l’homme, la RPDC n’a rien fait pour suivre ses recommandations, a déploré le représentant, qui a appelé la communauté internationale à se préparer à lutter contre l’impunité si ce pays refuse de le faire.  Le représentant du Royaume-Uni a appuyé l’appel lancé au Conseil de sécurité afin de renvoyer la situation des droits de l’homme en RPDC devant la CPI.  Notant que certains États Membres se sont opposés à la tenue du débat d’aujourd’hui, le représentant a tenu à rappeler que les droits de l’homme étaient un des fondements de la paix et de la sécurité internationales.  M. Grant s’est réjoui de ce que le Conseil de sécurité ait pu réussir à se réunir aujourd’hui.  Il a donc exhorté la RPDC à se plier aux exigences du Conseil de sécurité et à s’abstenir de réagir comme il l’a fait au lendemain de l’adoption de la résolution de l’Assemblée générale.

M. LIU JIEYI (Chine) a déclaré que son pays avait déjà exprimé sa position au début de la réunion, réaffirmant qu’il était opposé à la politisation des droits de l’homme.  Cette question importante n’a pas à être traitée dans cette enceinte, a-t-il répété.  « Nous sommes voisins, nous ne permettrons jamais que la situation dans la péninsule coréenne débouche sur une guerre ».  « La priorité, c’est la dénucléarisation de la péninsule coréenne », a-t-il ajouté, avant de souligner l’importance d’éviter toute rhétorique pouvant conduire à une escalade des tensions dans la région.  Le Conseil de sécurité doit contribuer à la reprise des pourparlers entre toutes les parties concernées, a-t-il conclu.

M. CRISTIÁN BARROS MELET (Chili) a déclaré que la discussion d’aujourd’hui était opportune et nécessaire.  « Il faut souligner la convergence entre les rapports du Rapporteur spécial et de la Commission d’enquête et les résolutions du Conseil de sécurité, qui concluent tous que la situation des droits de l’homme en RPDC est catastrophique ».  « Chaque réponse aux demandes adressées par l’ONU à ce pays prend la forme d’une menace à la paix et à la sécurité internationales », a-t-il poursuivi.  Pour le représentant chilien, le Conseil de sécurité doit exercer davantage de pression pour que cessent les graves violations des droits de l’homme dont font état les rapports du Rapporteur spécial et de la Commission d’enquête.  La RPDC doit autoriser l’accès dans le pays au Rapporteur spécial, a-t-il dit.

M. OLIVIER NDUHUNGIREHE (Rwanda) a rappelé qu’en 1994, le manque d’attention de la communauté internationale avait contribué à l’aggravation de la situation dans son propre pays, où avait été perpétré un génocide.  Il s’est dit préoccupé par le rapport de la Commission d’enquête du Conseil des droits de l’homme, qui évoque des crimes graves.  Sur la base des conclusions du rapport, le Conseil de sécurité, a-t-il estimé, doit être saisi de cette question.  Le représentant a appelé la RPDC à s’engager de bonne foi dans un dialogue avec la communauté internationale, mais aussi dans un dialogue intercoréen visant à dénucléariser de la péninsule coréenne.

Mme RAIMONDA MURMOKAITĖ a indiqué qu’il ne faisait plus aucun doute que le Gouvernement de la RPDC était responsable de la commission et de la planification de crimes contre l’humanité.  « Les prisonniers politiques et leurs familles périssent dans des camps de travail forcé, la privation de nourritures est utilisée comme instrument de contrôle de la population, les enfants souffrent de malnutrition, l’aide humanitaire est bloquée et la torture fait partie intégrante de tout interrogatoire », a-t-elle déploré.

Face à la détérioration de la situation des droits de l’homme dans le pays, la déléguée de la Lituanie a appelé la communauté internationale à prendre pleinement conscience de sa responsabilité de protéger le peuple de la RPDC.  Elle a également invité le Conseil à examiner le renvoi de la situation en RPDC devant la CPI et à considérer la portée de mesures ciblées contre les responsables de ces crimes contre l’humanité.  En conclusion, la déléguée a prévenu que des crimes contre l’humanité continueront d’être commis en RPDC tant que les politiques et les institutions qui les permettent seront en place.  « Le Conseil doit donc continuer de demander aux autorités de la RPDC d’engager des changements profonds en appliquant sans tarder les recommandations de la Commission d’enquête du Conseil des droits de l’homme. »

Mme MARÍA CRISTINA PERCEVAL (Argentine) a rappelé que sa délégation avait voté en faveur de chacune des résolutions sur la RPDC adoptées par les organes compétents, à savoir le Conseil des droits de l’homme et la Troisième Commission de l’Assemblée générale.  La représentante a aussi estimé que le Conseil de sécurité devrait s’en tenir au mandat que lui a confié la Charte des Nations Unies, qui est de « maintenir la paix et la sécurité internationales ».  Mme Perceval a donc souhaité que la réunion d’aujourd’hui ne constitue pas un précédent.  Mme Perceval a cependant tenu à réitérer que l’Argentine était préoccupée par la situation en RPDC.  C’est pourquoi, elle a demandé au Gouvernement de ce pays et au Conseil qu’ils déploient des efforts conjoints pour la reprise du dialogue en vue d’un règlement politique définitif de tous les problèmes en suspens.

M. Evgeny T. Zagaynov (Fédération de Russie) a réaffirmé que l’initiative de cette réunion était inappropriée et pourrait nuire aux travaux du Conseil de sécurité et d’autres organes de l’ONU.  Les questions de droits de l’homme doivent être examinées au Conseil du même nom qui, faut-il le rappeler, avait été créé à cette fin.  En inscrivant la RPDC à son ordre du jour, le Conseil de sécurité a dissuadé ce pays de coopérer avec l’ONU, alors qu’il s’était engagé à le faire, a-t-il estimé.

M. OH JOON (République de Corée) a déclaré que la situation des droits de l’homme en RPDC continuait de se dégrader, « à un point tel qu’il a été nécessaire d’interpeller le Conseil de sécurité ».  « L’Assemblée générale adopte depuis 2005 des résolutions sur le sujet, mais, cette année, la résolution qui a été soutenue contient des recommandations, dont l’inscription à l’ordre du jour du Conseil de la situation en RPDC ».  « Les violations des droits de l’homme y sont généralisées et systématiques et elles posent ainsi une menace à la paix et à la sécurité internationales », a-t-il noté.  Parce que certaines violations constituent des crimes contre l’humanité, le Conseil de sécurité ne peut donc pas rester passif, a souligné le représentant.  Pour lui, l’attaque informatique contre les intérêts commerciaux américains et la liberté d’expression ainsi que les menaces militaires proférées contre des États Membres entraînent une intensification des tensions internationales.  « Nous sommes aux côtés de la communauté pour venir en aide au peuple nord-coréen et c’est pourquoi, nous exhortons les autorités de la RPDC à prendre des mesures pour améliorer la situation des droits de l’homme dans le pays. » 

Le représentant a souligné qu’il était important pour les autorités nord-coréennes de s’engager dans un dialogue constructif avec le Rapporteur spécial et par la voie d’une coopération technique avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme.  Le Conseil de sécurité doit veiller à ce que le peuple de la RPDC puisse jouir des libertés fondamentales auxquelles il a droit, a encore insisté le représentant.   « Des millions de Sud-Coréens ont des membres de la famille et autres proches qui vivent en Corée du Nord ».  « Ils se trouvent à quelques kilomètres de là où nous vivons. »  « Les conclusions de la Commission d’enquête nous brisent le cœur », a confié le représentant.  Concluant sa dernière intervention en tant que représentant d’État non membre du Conseil, il a exprimé « le vœu que nos sœurs et frères innocents pourront, un jour prochain, nous dire que nous avons fait ce qu’il fallait pour les sauver ».

M. MAHAMAT ZENE CHERIF (Tchad) a pris note des conclusions accablantes de la Commission d’enquête du Conseil des droits de l’homme au sujet des violations massives et systématiques qui auraient été perpétrées par le régime nord-coréen.  L’une des recommandations de la commission est de renvoyer la situation devant la Cour pénale internationale (CPI), a-t-il relevé.  Le représentant a également noté que la RPDC avait refusé d’accueillir les membres de la Commission sur son territoire, ceux-ci ayant été contraints de mener leur enquête à l’étranger.  Dans ces conditions, le Tchad enjoint à faire montre de prudence, a indiqué son représentant, en précisant que la communauté internationale n’avait jamais jugé bon d’accorder autant d’attention à des situations tout aussi graves.  « Pourquoi cette politique de deux poids, deux mesures » a-t-il demandé?  Le représentant a toutefois encouragé la RPDC à s’engager de bonne foi dans un dialogue avec le Conseil de sécurité ainsi qu’avec les pays de la région.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.