7342e séance – après-midi
CS/11704

Syrie: « le conflit détruit le présent et l’avenir du pays », déclare la Secrétaire générale adjointe aux affaires humanitaires, Mme Valerie Amos

La Secrétaire générale adjointe aux affaires humanitaires et Coordonnatrice des secours d’urgence, Mme Valerie Amos, a dressé, cet après-midi, un bilan dramatique de tous les aspects de la situation en Syrie.  Aux membres du Conseil de sécurité, elle a déclaré avec franchise que la résolution humanitaire 2139 (2014) était restée lettre morte depuis son adoption, en février dernier.

Pour Mme Amos, le conflit en Syrie « détruit le présent et l’avenir du pays ».

« La crise en Syrie est sans précédent et nous sommes à présent à court de mots pour décrire la brutalité, la violence et le mépris avec lesquels la vie humaine y est traitée », a-t-elle d’abord déploré.  Constatant qu’aucune demande du Conseil en matière de protection des civils n’avait été satisfaite par l’ensemble des parties, Mme Amos a accusé ces dernières d’ignorer totalement les principes les plus élémentaires de l’humanité.  Elle a ensuite énuméré les violences perpétrées contre les civils dans de nombreuses villes et régions de Syrie, en soulignant leur intensification accrue et leurs conséquences.

En février 2014, a-t-elle ainsi dit, le bilan était de 100 000 morts.  Aujourd’hui, l’ONU parle de près de 200 000 morts et d’un million de blessés, et ces chiffres augmentent chaque jour, a regretté Mme Amos.  Elle a ajouté que quelque 12,2 millions de Syriens dépendaient, aujourd’hui, de l’aide humanitaire pour vivre et que la moitié de la population syrienne a fui la guerre civile, plus de 3 millions de personnes déplacées ayant trouvé refuge dans les pays voisins.  « Les Syriens représentent un cinquième du nombre de personnes déplacées dans le monde », a-t-elle résumé.

Revenant à la lettre de la résolution 2139 (2014), la Secrétaire générale adjointe a insisté sur le fait qu’aucun de ses appels n’avait été entendu, qu’il s’agisse de la cessation de l’usage indiscriminé des armes ou de l’arrêt immédiat de tous les types de violences contre les enfants.  Le Gouvernement syrien, a-t-elle dit, continue de bombarder à l’aide de barils d’explosifs des zones densément peuplées, tandis que les organisations terroristes désignées comme telles attaquent les civils au mortier et à la voiture piégée. 

« Aujourd’hui, la Syrie est l’endroit le plus dangereux de la planète pour un enfant », a lancé Mme Amos.  Actuellement, 5,6 millions d’enfants sont dans le besoin, a-t-elle fait remarquer.  En Syrie « les enfants sont assassinés, torturés et victimes de violences sexuelles de la part de toutes les parties au conflit ».

En outre, a-t-elle dit, des millions de petits Syriens ont été traumatisés par les horreurs dont ils ont été témoins, et des rapports indiquent que 350 enfants, certains âgés d’à peine 5 ans, ont été formés au combat dans un camp militaire de Raqqa.

« J’ai eu l’occasion de le dire à plusieurs reprises: ce conflit ne fait pas que détruire la Syrie d’aujourd’hui; il détruit aussi son avenir », a déclaré Mme Amos.  Sur les violences sexuelles –jeunes filles réduites à l’esclavage ou forcées de se marier-, la Secrétaire générale adjointe a indiqué qu’elles étaient en hausse depuis cet été.  Des femmes capturées par l’État islamique d’Iraq et du Levant ont été vendues sur des marchés à Raqqa, a-t-elle confirmé. 

Se référant de nouveau aux obligations de la résolution 2139 (2014), la Secrétaire générale adjointe a indiqué qu’en dépit des appels à la fin immédiate des détentions arbitraires et du recours à la torture dans les prisons, des dizaines de milliers de civils étaient toujours incarcérés et soumis aux traitements « les plus cruels, inhumains et dégradants ».  « Selon la Commission d’enquête de l’ONU sur la Syrie, des informations attestent que des prisonniers continuent de mourir sous la torture ou de faim. »

Le respect du principe de neutralité médicale, a-t-elle regretté, est un autre appel du Conseil de sécurité ignoré par les belligérants.  Les dommages délibérés et indiscriminés causés aux hôpitaux mais aussi aux écoles sont devenus fréquents, a noté Mme Amos, en précisant qu’entre l’adoption de la résolution 2139 (2014) et la fin novembre, 70 établissements de santé avaient été attaqués, 60 d’entre eux par les forces gouvernementales.  « Au cours de la même période, 150 docteurs ont été tués, dont 97 dans l’exercice de leurs fonctions, et le Gouvernement syrien continue de confisquer équipements et médicaments aux convois de l’ONU », a-t-elle précisé.  « La plupart des hôpitaux du pays sont contrôlés par des militaires parties au conflit. »  Concernant les attaques contre des écoles, Mme Amos a assuré qu’au cours des neuf derniers mois 105 écoliers avaient été tués. 

La Secrétaire générale adjointe aux affaires humanitaires et Coordonnatrice des secours d’urgence n’a pas omis d’attirer l’attention sur l’existence, « depuis des années », de villes assiégées, ce qui constitue une autre violation de la résolution 2139.  Selon les Nations Unies, a-t-elle dit, 212 000 personnes sont piégées soit par le Gouvernement syrien, soit par les forces d’opposition.   « Personne n’est autorisé à sortir, aucune aide ne peut rentrer » à Yarmouk, la vieille ville d’Homs et Moadamiyah.  Mme Amos a fait savoir que depuis l’adoption de la résolution 2139 (2014), l’ONU et ses partenaires avaient été autorisés à fournir une aide alimentaire et médicale à 5% des personnes assiégées. 

« Même les guerres ont des règles.  Le refus d’assistance médicale et le recours à la faim comme arme de guerre sont interdits par le droit international », a enfin souligné la Secrétaire générale adjointe. 

Avant de conclure, Mme Amos a exhorté la communauté internationale à faire respecter, par l’ensemble des parties au conflit, la totalité des demandes figurant dans la résolution 2139 (2014).  « Plus important encore, le Conseil de sécurité et la communauté internationale doivent mettre fin politiquement à ce conflit.  Une fois pour toutes », a-t-elle martelé.   

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.