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Conseil de sécurité: le Chef de la Mission de l’ONU en Libye s’inquiète de la violence accrue et d’un processus politique paralysé

10/3/2014
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Conseil de sécurité

7130e séance – matin


CONSEIL DE SÉCURITÉ: LE CHEF DE LA MISSION DE L’ONU EN LIBYE S’INQUIÈTE

DE LA VIOLENCE ACCRUE ET D’UN PROCESSUS POLITIQUE PARALYSÉ


Face à une augmentation « spectaculaire » de la violence en Libye, le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission d’appui de l’ONU (MANUL) a prévenu le Conseil de sécurité, ce matin, que les « efforts intenses » pour négocier un accord sur la gestion de la période de transition après le 7 février, à commencer par l’avenir du Congrès général national, n’ont pas mis fin aux divisions qui paralysent le processus politique.


M. Tarek Mitri, qui a parlé avant le représentant de la Libye et le Président du Comité des sanctions imposées à ce pays, a indiqué que depuis le début du mois de février, des manifestations ont lieu partout dans le pays contre la poursuite du mandat du Congrès général national.  « En raison de l’animosité croissante, la Libye risque de s’engouffrer dans un nouveau chemin de violence sans précédent », a-t-il averti.


M. Mitri a indiqué que le 2 mars, le Congrès général national a été pris d’assaut par des manifestants qui réclamaient sa dissolution.  Il a parlé de l’incident du 18 février au cours duquel deux brigades armées ont sommé les membres du Congrès d’abdiquer ou de subir les conséquences d’une intervention militaire. 


La décision prise le 3 février par le Congrès concernant le transfert d’autorité à un organe législatif constitutionnellement élu n’a pas permis de désamorcer la crise à l’approche du 7 février, date considérée par certains comme la fin du mandat du Congrès.  Face aux pressions publiques, le Congrès a choisi de tenir des élections anticipées.


L’élection de l’Assemblée constituante a eu lieu le 20 février et avec le boycott des Amazighs et d’une bonne partie des Tabous et des Touaregs dans le sud, un total de 13 sièges n’a pas été pourvu. 


Dans son dernier rapport*, le Secrétaire général souligne qu’aussi essentielles soient-elles, les élections ne sont pas le seul agent de démocratisation, compte tenu en particulier de la dynamique post-conflit en Libye.  « Ranimer la conscience civique est une tâche herculéenne que l’on ne peut sous-estimer », juge-t-il.


L’évolution de la situation en Libye, dit-il, met en évidence l’urgence pour les forces politiques de s’engager résolument en faveur du processus démocratique.  Les Libyens, prévient le Secrétaire général, sont nombreux à être de plus en plus sceptiques quant à la crédibilité du processus politique et déçus par la lenteur des réformes politiques, en matière de sécurité et de gouvernance.


L’augmentation « spectaculaire » de violence, ces trois derniers mois, a fait plus de 100 morts et des centaines de déplacés à Sabha, tandis qu’à Benghazi, la campagne incessante d’assassinats ciblés, de bombardement et d’enlèvements a atteint un « niveau intolérable », a alerté le chef de la MANUL.  Dans une ville qui tire sa fierté du rôle qu’elle a joué contre des décennies de règne tyrannique, le sentiment d’être en danger ne fait que croître dans l’opinion publique.


Le Représentant permanent de la Libye, M. Ibrahim O. A. Dabbashi, a reconnu que son pays est confronté à deux menaces principales: les groupes extrémistes ayant des extensions internationales et cherchant par tous les moyens à reconstituer un « État fidèle à leur propre vision »; et les vestiges du régime antérieur qui ont gardé leurs armes dans certaines parties de la Libye pour saper l’autorité du Gouvernement.


Le renforcement de la capacité de l’État d’assumer ses responsabilités en matière de sécurité se heurte, a expliqué le chef de la MANUL, à l’absence d’un accord politique sur la reconstitution d’une armée nationale, l’intégration des combattants révolutionnaires et la collecte des armes.  M. Mitri a jugé nécessaire de donner des assurances aux révolutionnaires, et d’abord de reconnaître leur contribution à la révolution et de protéger leurs droits et intérêts légitimes.


S’il a reconnu la faiblesse des institutions centrales en Libye et la nécessité pour son gouvernement de changer ses méthodes de travail, le représentant libyen a appelé la communauté internationale à renforcer les capacités de son pays et à l’aider à obtenir l’extradition des fugitifs.


Le Représentant spécial et chef de la Mission de l’ONU, n’a pas manqué de parler de Morning Glory, le navire battant pavillon « nord-coréen », qui a été approvisionné en pétrole libyen le 8 mars dernier par des groupes armés qui bloquent depuis plusieurs mois un certain nombre de terminaux et des champs pétroliers dans l’est du pays, en violation de la souveraineté libyenne.


Le représentant de la Lybie a appelé la communauté internationale et les États préoccupés par la sécurité maritime de son pays à appliquer les lois internationales en vigueur, en arraisonnant ce navire.  Il a engagé le Conseil de sécurité à se prononcer clairement sur cette question et à faire respecter la souveraineté de la Libye sur son territoire et ses ressources.  Il a, là aussi, reconnu que le sous-développement de l’administration portuaire est à l’origine d’une baisse des revenus qui entraîne un déficit énorme du budget de l’État.


Les membres du Conseil de sécurité ont également entendu M. Eugène-Richard Gasana, Représentant du Rwanda et Président du Comité des sanctions créé en vertu de la résolution 1970 (2011), présenter le dernier rapport du Groupe d’experts créé en vertu de la résolution 2095 (2013).  Il a souligné que la prolifération des armes depuis et vers la Libye demeure un défi important pour la stabilité du pays et de la région. 


La Libye, s’est-il, est devenue la source principale d’armes illicites, alimentant l’insécurité et le terrorisme sur plusieurs continents.  Il a donc salué la création d’un Département d’achats pour l’armée.


Concernant le gel des avoirs de certains individus, notamment ceux de Saadi Qadhafi, le Groupe d’experts a indiqué qu’à cause des lois défaillantes dans certains pays, une somme de près de 2 millions de dollars a pu sortir des banques. 

Une certaine confusion entoure d’ailleurs la question liée au rapatriement des avoirs gelés.  En dépit de l’interdiction de voyager, Aisha Qadhafi et Mohammed Qadhafi ont pu quitter l’Algérie pour Oman.


Le représentant de la Lybie a précisé que pour l’embargo sur les armes, toute demande d’exportation vers la Libye qui ne serait pas faite via la Mission libyenne auprès des Nations Unies sera considérée comme émanant d’une partie non reconnue par le Gouvernement.  Le chef de la Mission de l’ONU s’est félicité de cette position.


* S/2014/131


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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